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THE LIBRARY
UNIVERSITY OF
WESTERN ONTARIO
THE J. D. BARNETT
TEXT-BOOK COLLECTION
University of Western Ontario
LIBRARY
LONDON - CANADA
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INSTITUTIONES
PHILOSOPHICiE
AD USUM
STUDZOSiC JUVENTUTIS.
Beatus homo qui invenit saplentiam
Melior est acquisitio ejus negotiatione ar-
gent! pretiosior est cuntis opibus.
Proverb. cap. 3. ver. 13. Sfc,
qu E B E C I t
EX TYPIS THO. CARY k SOCII.
1835.
r^^
DISTRICT DE QUEBEC.
Bureau du Protonotaîre,
22e. d'Août, 1835.
QU'IL soit donc notoire que le vingt-deuxième
jour d'Août, dans l'année mil huit cent trente-cinq,
THOMAS CARY et GEORGE DESBARATS, de Québec
Imprimeurs, Papetiers et Associés, faisant commerce sous
le nom de THOMAS CARY et Compagnie, résidant en la
Cité de Québec, ont déposé dans ce Bureau un Livre le
Titre duquel est dans les mots suivans, savoir : — " Institu-
" tiones Philosophîcœ ad usum studîosœJuventutis/' au sujet
duquel ils réclament le droit de propriété comme Proprié-
taires.
Enregistré en conformité à l'Acte Provincial, intitulé,
" Acte pour protéger la Propriété Littéraire."
PERRAULT & BURROUGHS,
Protonotaires de la Cour du Banc
du Roi, du District de Québec.
INSTITUTIONES PHILOSOPHIC^.
PHILOSOPHIA, juxta vim nominis, est amor seu
siudium sapientiœ. Quoad objectum suum consi-
derata, definiri potest : " collectio cognitionum quse solâ
" ratione, discursûs ope, comparari possunt ;'* seu, ut alii
volunt, '* cognitio discursiva veritatum quse solâ ratione
" comparantur."
2. Philosophia vulgô dividitur in Logicam, Metaphysi-
cam, Ethicam seuMoralem, et Physicam. Logica tractât
de operationibus mentis nostrse relative ad veritatis inqui-
sitionem, Metaphysica de entibus supra naturam corpo-
ream positis, Ethica seu Moralis de regulis morum, et
Physica de corporibus (a).
Hsec divisio ità nofî est accurata. ut idem objectum
solummodô pertineat ad unam partem, et non simul ad
alteram. Sic, v. g. cogitationes pertinent ad Logicam
quatenùs sunt dirigibiles ad veritatem inveniendam aut
demonstrandam, et ad Metaphysicam quatenùs sunt merè
spirituales.
(a) La Physique sera l'objet d'uD traité particulier qui sera rédigé en français.
A 2
INSTITUTIONUM PHILOSOPHICARUM
PARS PRIMA.
LOGICA.
3. Quamvis mens humana sit simplex et una, varias
sunt tamen ejus operationes. Quœdam sunt regulae
certaque prœcepta, quibus, si optimè cognita et perspecta
sint, istee operationes infallibiiiter dirig'untur, sive in dete-
gendâ falsitate, sive in inveniendâ veritate aliisque démon -
strandâ. Collectio horum prseceptorum et regularum
Logiea vocatur.
Logica itaque, quee à pluribus definitur ars cogitandi, est
scîentia practica quœ mentis operationes dirigit tùm in inqtti-
sitione^ tùm in manifestatione veritatis.
4. Tôt igitur debent esse Logicse partes, quot sunt ope-
rationes mentis. Porro quatuor sunt mentis operationes^
nempè Cogitatio scu Perceptio (la pensée) cùm mens aliquid
sibi représentât, absque ullâ affirmatione aut negatione ;
Judicium, cùm mens pronunciat de cogitationum habit u-
dine (sur le rapport des pensées) ; Discursus seu Raticcî-
mum, cùm judicium ex alio seu ex aliis infert ; et
Methodus, cùm cogitationes, judicia et ratiocinia conve-
nienti modo disponit. Quatuor sunt igitur Logicee partes,
singulae de singulis illis operationibus tractantes.
CAPUT PRIMUM.
DE PRiMA MENTIS OPERATIONE, SEU DE COGITATIONE,
I. De naturâ cogitationum.
5. Cogitatio seu perceptio (la pensée) est è numéro earum
rerum qute faciliùs sentiuntur quàm explicantur. Definiri
solet, mera alicujus rei reprœsentatio in mente fada. lo.
Est reprœsentatio, quia menti exhibet quid sit res in se ;
V. g. cogitatio trianguli clarè représentât menti figuram
LOGICA. D
pïanam tribus angulis, tribusque lateribus constantem.
2o. Est mera reprœsentatio , rem enini reprœsentatam tune
mens solumraodo contemplatur, nihil de eâ affirmando aut
negando.
Res per cogitationeni repreesentata vocatur objectum
cogitationis.
6. Cogitatio confundi non débet cum quibusdam aliis
mentis impressionibus quse nullam relinquunt reprœsenta-
tionem, sed solum sensum pariunt, et quee vocantur sensus
interiores. Porro sensus isti interiores vel ità mentem
afficiunt, ut in solâ mente existant, nec referantur ad ob-
jecta externa aut ad corpus nostrum, et vocantur simpliciter
sensus intimus, seu conscientia ; vel dùm mentem afficiunt.
referuntur simul ad objecta externa, et vocantur sensationes;
vel referuntur ad partes corporis nostri, tuncque passiones
nuncupantar. Res illustretur.exemplis. Sentio me cogi-
tare; sensum hune neque ad partes mei corporis, necjue
ad objecta externa refero, en sensus intimus. Experior
sensum amaritudinis et refero ad fel quod delibavi, en
sensatio. Sensu famis conficior, et ad stomachum refero,
enpassio. Undè officium sensus intimi est ut nos admo-
neat de prœsenti animée nostrœ statu solùm ; sensationis,
de prœsenti animse nostrœ statu, et simul de utilitate vel
malignitate objectorum quibus circumdamur ; passionis,
de prœsenli animœ nostras et siinul de statu corporis nostri.
7. Duplex est cogitationis species, idea et imago. Idea
est cogitatio quœ rem repr^esentat absque ullâ sensibili
forma, talis est cogitatio Dei, mentis humanœ, justitiœ, &c.
Objectum idearam sunt res omnes intellectuales et incor-
poreae. Facultas quse in nobis ideaiur (qui idée) intelli-
gentia seu intellectus dicitur (a).
(a) Selon Mr. de Boaald, Législation primitive, totn. 2. pag. 14G, 147, riiomine parle
de ce qu'il imagine, qui fait image, qui est l'objet de ses sensations et qui tombe sous se:
sens ' il nftrlft aii«;5%î Hp re Oii'il iil^^. nui np fnir nn« iinnm» or /^llî .^q *^r«k,. ^^^
sens
ame
Le
Simagi.--. — , , ^
et aux idées pour en combiner les rapports.
Si l'homme qui pe,-«se ne peut avoir pour oli^•t de sa pensée que des images ou des idéts
Thomme qui par& ne peut ejrprim«r que das ma^e^ ou des idées ; c'est ce qui conipo3«i lé
discours, véritable expression de Têtre intelligent, c'est-à-dire, de l'homme <\\x\ imaaine ki
qui idée. "
Le met idéer eit préférable, selon le même savant, à ceux de comprendre et de concevoir
parce que, exprimant une connaissance inoins parfaite, il rend avec plus de vérité lea
opérations de l'intelligeDce humaine ou finie.
Il est aisé de voir, ajoute Mr. de Bonald, Recherches philosophiques, tom. 1 paff 347
qu'une ptinsée par idét diffère autant d'umepenaée jj«r iBio^^equ'uu objet purement spirituel
6 LOGICA.
8. Imago seu figura est cogitatio qaèe rem repraesentat
sub aliquâ sensibili forma, talis est cogitatio solis, arboris,
canîs, &c. Objectum imaginis sunt corpora seu materia,
et facultas quse in nobis imaginatur (qui imagine, qui
image) vocatur imaginaiio.
9. Ex eo quôd igitur non possimus imaginari rem ali-
quam, non sequitur nos non posse illam ideari seu conci-
pere ; et vice versa, ex eo quôd non possimus ideari rem
aliquam, non sequitur nos non posse illam imaginari. v. g.
non possumus imaginari mentem nostram, sed possumus
illam ideari ; pariter non possumus ideari structuram cor-
poris nostri, sed possumus illam imaginari. De liis inter
se conveniunt Philosophi.
10. Verùm in quo consistit hœc mentis repraesentatio,
seu qusenam est cogitationum natura ? si fides adhibeatur
Patri Mallebranche (a), perceptio ideœ distinguenda est ab
ipsâ ideâ (h).
Perception juxta hune celeberrimum philosophum, est
ille sensus intimus quo mens sibi conscia est se aliquid
cognoscere; idea verô est imago, seu forma externi objecti,
quateniis nobis exhibetur. Hœc forma verè est extensa,
si quidem corporea objecta in statu naturali reprœsentat ;
non est tamen materialis ; species igitur quse nobis offertur,
diffère d'un objet matériel, qu'un esprit diffère d'un corps, que Vitre diffère du Jiéaiu. La
différence qui existe entre ces deux sortes de pensées, est pour ainsi dire, infinie. Or
convient-il d'exprimer par un seul et môme terme des pensées si essentiellement différentes ?
Avant Descartes, on employait des termes différons pour exprimer les idées et les images;
c'est ce philosophe qui a élabli la terminologie actuellement en us;\ge duns la plupart de nos
cours de Logique. 11 appelle les images àe% idées; mais alors il y a deux expressions
pour ces représentations de l'imagination, et il n'y en a pas une qui soit propre aux
perceptions di l'entendement. Ibid. pag. 342.
La terminologie renouvelée par Mr. de Donald paraît plus naturelle que celle que
DoBcartes a introduite ; elle paraît aussi plus propre 'à exprimer et h caractériser la double
faculté qu'a l'ame humaine àHdéer et d'imaginer, et ;i bien établir et ù mieux préciser l'état
de la question sur l'origine des pensées, puisqu'il est facile de voir alors que les idées et les
images ne doivent pas avoir une origine commune.
Elle a encore le précieux avantage de donner une plus grande précision au langage
quand il s'agit de traiter certaines questions métaphysiques. En voici quelques exemples.
L'homme social, qui a l'usage de la raison, pense, juge, délibère et raisonne par idées
et par images, parce qu'il a en partage ['intelligence et l'imagination.
Le sourd-muet, avant qu'il ait reçu de la société l'instruction morale et religieuse, selon
Mr. de Donald, ou selon Uescartes, avant qu'il ait dirigé son attention vers les idées morales,
qui sont innées en nous, selon ces deux célèbres philosophes, ne peut penser, juger,
délibérer et raisonner que par images et non pas par idées, parce qu'il n'a que la propriéié
de l'intelligence sang en avoir l'exercice. 11 a, selon les termes de l'école, cette précieuse
faculté en puissance et non pas par l'acte.
La brute ne pourra jamais penser, jugfr, délibérer ou raisonner que par images, parce
que, par sa nature, elle est privée, non seulement de l'exercice, mais encore de la propriété
de Vi?iteUigence ; en un mot, elle n'a en partage, que l'imagination, \a, faculté de sentir
ou i' éprouver des sensations et l'instinct.
Au reste, il sera facile îi ceux qui no s'accommoderont pas de cette manière de s'exprimer,
de substituer les mots idea, ideœ aux mots cogitatio, cogitationes, &:c.
(a) Le père Nicolas Mallebranche, de l'Oratoire, est né îi Taris le G Août 1G38, et est
mort dans la même ville le 15 Octobre 1715.
(b) Institutiones philosophicœ l\ D. Bouvier, tom. 2 pag. 197.
LOGICA. 7
spiritualis est, licèt extensa, et nihil aliud est quàm ipsa
corporum essentia, œterna, immutabilis, in Deo existens
et à Deo non distincta, quia Deus omnium rerum arche-
typos {a) in substantiâ suâ continet. Hinc ideœ realiter
sunt existenteSjSeternae et immutabiles,ac proindè non ipsae,
sed earum sensus seu perceptio potest esse modificatio
mentis.
His prsemissis, quadruplicem distinguit auctor res cog-
noscendi modum.
10. Solum Deura in se ipso immédiate cognoscimus,
quia solus per se ipsum intelligibilis est. 2o. Res corporeas
in se ipsis nec percipere, nec videre possumus, sed tantùm
in formis archetypis apud Deum existentibus, quas extensi-
onem intelligibilem (Vêtendue intelligible) vocat. Pariter
in Deo videmus veritates morales, quia in Dei substantiâ
continentur, et quia Deus suam substantiam nobis mani-
festare voluit.
3o. Mentem nostram nec in se ipsâ, nec in forma arche-
typâ cognoscimus, quia Deus hanc ideam apud se ab
seterno existentem nobis in prœsenti vitâ manifestare noluit ;
de existentiâ et proprietatibus ejus per sensum intimum
admonemur.
4o. Animas aliorum hominum non videmus in seipsis,
nec in formis archetypis, nec per sensum intimum eas
novimus, sed per conjecturas, videlicet observando in eis
easdem operationes quas fieri in nobis sentimus. (Recher-
che de la Vérité', liv. 3 chap. 6. 7.)
11. Contra hanc doctrinam fortiter insurrexit D. Ar-
nauld (&) in libro cui titulus : Des vraies et des fauses idées.
Totis viribus contendit lo. Ideam esse ipsumraet objec-
tum menti prsesens, à perceptione reverà non esse distinc-
tum, ac proindè perceptiones ex naturâ suâ esse objecto-
rum repraesentatrices; 2o. Non tantummodô corporum ima-
gines, sed ipsamet corpora immédiate videri ; 3o. Nobis
inesse mentis nostree ideam, quâ ipsius naturam et propri-
etates cognoscimus, licèt imperfectè.
Sic ambo isti percelebres philosophi systemata systema-
tibus opposuerunt, acriter certârunt tanquàm pro aris et
focis ; sed frustra, adhuc sub judice. lis est. " Grand com-
(a) Archétype, arktl'jpe ; les philosophes appellent ainsi le modèle, l'idée d'après
laquelle Dieu a créé le monde.
(b) Mr. Antoine Arnauld, Docteur de Sorbonne, est né à Paris, en 1613, et est mort à
Bruxelles en 1694.
8 LOGICA.
** bat, iiiquiebat Fontenelle, où l'univers était spectateur,
" et où personne ne pouvait être juge !"
Quidquid sit, conscii sumus nostrarum cogitationum ,
illas à quâlibet irapressione distingainms, secernimus alias
ab aliis ; hoc solum offert experientia, id quoque satis sit.
II. De origine cogitationum.
12. Omnes cognitiones nostras ad Deura primam omni-
um rerum causam et originem esse referendas, clarius est
quàm negetur. Sed quibusnam mediis omnes cognitiones
nostras in nobis imprimit Deus ? Varise sunt Philosopho-
rum sententise, quas priusquàm exponamus, notandum est
Cartesium, Lockium et abbatem Condillac sub communi
idearum nomine intelligere et ideas et imagines.
13. CartesiusfaJ et Cartesiani ideas in triplicem classem
dividunt, scilicet in ideas innatas seu congenitas, adventitias
(adventives) etfactitias.
Idese innatœ seu congenitœ sunt illse quas Deus irapressit
in nobis à primo creationis instanti ; hujus modi idese sunt
veluti sopitse ac sepultae quando non datur attentio ; ipsâ
verô prsesente vel reduce, reviviscunt ; taies sunt idea su-
premi numinis et plures alise quas vult Cartesius mentibus
nostris esse congenitas, et quse facile percipiuntur, quando
datur attentio.
Hinc istse idese, quando déficit attentio, reverà existunt
in mente, sed tantùm potentiâ, non autem actu, ideôque
non magis percipiuntur ac si non existèrent. Sic ipse Car-
tesius mentem suam explicat, Epist. 99. Hanc doctrinam
tenuerunt D. D. Bossuet, Fénélon, Mallebranche, Pascal,
Leibnitz, d'Aguesseau, Cardinalis Gerdil, pluresque alii
percelebres Philosophi.
Idese adventitiœ sunt illae quœ decursu temporis nobis
objectorum sensibilium impressionibus adveniunt, taies
sunt idese (imagines) quas habemus aspiciendo solem, mon-
tem, &c. Idese factitiœf sunt illse quas mens ex pluribus,
jam sibi notis, format ; taies essent idese (imagines) montis
aurei, bovis alati, &c.
■14. Juxta Lockium (&) et ejus asseclas, mens humana,
cùm existere incipit, est veluti tabula rasa, omninô desti-
tuta characteribus, omnium expcrs cognitionum et idearum,
(a) René Descartea est né à la Haye en Touraine, en Mars 159G, et est mort à Stockholm
en 1650.
(b) Jean Locke est né à Wrington, près de Bristol, en 1532, et est mort en 1704.
LOGICA. 9
solâque cogitandi facultate donata. Undè contra Cartesi-
um acerrimè contendunt omnes nostras ideas oriri à sensi-
bus. Sic autem intelligendi sunl. tSi quis viv^eret omni sensu
destitutus, instar statuas, qualitates rerum penitùs ignora-
ret ; id est, neque per auditum sonos, neque per visu m
colores, neque sapores per gustura, neque per olfactuni
odores, neque per tactuni impressiones numéro ferè infini-
tas cognosceret. Ergo viveret omni cognitione carens,
Ergo sensus nostri sunt fontes ex quibus scaturiunt omnes
cognitiones nostree. Sed quomodo ? Immédiate et médiate.
lo. ImmediaSè, quia nascuntur à sensibus informes qua^dam
objectorum cognitiones in sensationibus involutae ; 2o.
Médiate, quia mens reflectendo in suas sensationes prima-
rias, acquirit objectorum ideas, et sic pro datis occasionibus,
idearum supeliectilem adauget. Hinc si ipsis fides adhibe-
atur, omnes ideee à sensibus et à reflexione in sensationes
oriuntur.
15. Abbas Condillac (a) doctrinee Lockii subscribens,
eam perficere sibi proposuit. Contendit omnes ideas mentis
nostrse esse sensationes diversis modis transformatas ; sic
sensatio caloris, v. g. fit successive attentio, reiiexio, idea,
judicium, &c. " La sensation, inquit, passe également par
*' différentes transformations pour devenir l'entendement.
" ... .Mais où découvrirons-nous toutes les facultés dont
'' l'ame est capable, si non dans la faculté de sentir? Cer-
'* tainement cette faculté enveloppe toutes celies qui peu-
•' vent venir à notre connaissance." {Logique, 2de. part,
chap. 7. 8.) ■ * Chaque sensation prise séparément peut être
*' regardée comme une idée simple : mais une idée com-
*' plexe est transformée de plusieurs sensations que nous
" réunissons hors de nous.*' — [Traité des sensations, tom.
2. page 244.)
16. Hâc de re audiatur D. de Bonald, libro cui titulus.
Recherches Philosophiques, tom. 1, page 395. " L'idée
** n'est pas une sensation transformée ; car que serait
" une sensation d'ordre ou de justice? Je ne pense pas
" avoir d'autre sensation de justice que celle d'une action
"juste ou injuste qui frappe mes sens. Mais lorsque je
" vois le meurtre d'un homme, par exemple, ne faut-il pas
'' que j'aie dans l'esprit, antérieurement à cette sensation,
(a) Etienne Bontiot de Condillac, né à Grenoble en 1715, est mort dans sa terre, près de
Beiiugency, le 3 Août 1780.
10 LOGICA.
" des notions du juste ou de l'injuste, pour savoir dans
" quel rang je dois placer cette action, et s'il faut la regar-
" der comme un crime, &u comme un acte légitime de pou-
" voir public ou de défense personnelle.''
17. D. de Bonald in hoc eximio opère docet lo. omnes
imagines nostras oriri à sensationibus nostris, et ad imagi-
nationem pervenire per sensus ; 2o. quasdam esse ideas
adventitias et factitias ; 3o. denique quasdam esse ideas
innatas seu mentibus nostris congenitas, sed earum co-
guitionem esse innatam, non in singulo homine, sed in
societate, quse sola servat hanc cognitionem tanquàm depo-
situm, ut illam, per idearum expressionem, id est, per voceniy
sive oralem, sive scriptam, communicet posteris, ut eis vitam
coramunicat. Hinc si fides huic celeberrimo philosopho
adhibeatur, idese sunt innatae simul et acquisitee. Innatse
in se, acquisitee in suâ expressione.
18. lo. Sunt innatee ; nî enim qusedam ideœ in mente
existentiâ prœceiderent expressiones quœ illas représentant
vel présentes reddunt, nunquàm sese jungere possent voci-
bus quae illas exprimunt, et consequenter nemo cognoscere
posset suas proprias ideas (a).
(«) " L'Idée est innée, son expression est acquise. Si l'idée ne précédait dans l'esprit
" l'expression, jamais on ne pourrait nous faire comprendre les sens des mots, et nous n'eni
" tendrions pas plus les mois ordre, justice, que nous n'entendons les mots forges h plaisir.
" Donc l'idée existe avant le mot qui la rend présente. D'un autre côté, l'expression est
" acquise, puisque nous apprenons à parler, et que nous ne parlons pas sans l'avoir appris ;
'* mais cette expression, toute acquise ou adventive qu'elle est, est absolument nécessaire
" à. la représentation, même mentale, de 1 idée, et jamais nous ne pourrions nous entrete-
" nir arec nous-mêmes de la beauté, de l'ordre et de la vertu, si nous n'avions pas dans
" l'esprit les expressions qui les représentent, ni entretenir les autres, sans leur faire enten-
•' dre les mêmes expressions.
•' Ainsi l'idée est nécessaire pour que le mol signifie quelque chose, et soit proprement
" une expression ; et l'expression est tout aussi nécessaire pour que l'idée soit sensible îi
" l'esprit. Mais l'idée est universelle ; donc elle est native ou innée; l'expression est locale et
" différente dans les diverses langues ; donc elle eat acquise. Ainsi, l'on peut dire que
" l'idée est îi la fois innée et acquise. Innée en elle-même, acquise dans son expression.
'• Les idées ne sont point innées comme le sont les besoins naturels ou naiifs,qui sont nés
" avec nous, en sorte qu'un homme ne pourrait pas plus ne pas avoir Tidée de Dieu que la
" sensation de la faim ou de la soif, et que ces idées devraient être dans tous les hommes
" aussi involontaires, aussi présentes, aussi sensibles, aussi actuelles en un mot que ses
" besoins.
" Ce n'est pas là ce que l'on entend par idées innées: celte expression ne peut désigner
" que des idées qui sont en puissance, c'est-à-dire, des idées que l'homme peut appercevoir
" dans son esprit au moyen de certames conditions requises pour cette perception, lesquelles
" conditions sont la connaissance des expressions qui revêtent et nomment ces idées, en
" sorte qu'on peut dire qu'il /j'y a point d'idée innée sans expressioît acquise.
" Ainsi pour donner une image bien sensible de la tonction de l'esprit et de celle des or-
" ganes, daus le rapport nécessaire de l'idée et de son expression, l'entendement est com-
" me un papier écrit avec une eau sans couleur, sur lequel l'écriture ne devient visible «jue
" lorsqu'on frotte le papier avec une autre liqueur. On peut dire (pie sur ce papier l'écri-
" ture est innée en quehjue sorte, puisqu'elle existait avant de paraître, et qu'elle a pré-
" cédé le moyen employé pour la rendre visible. On peut dire qu'elle est acquise, puis-
" qu'elle ne se montre que sous la condition et au moyen de la liqueur qu'on y ajoute.
" Ainsi quoique les idées ne soient pas innées dans le sens que l'école ancienne" l'a peut-
" être entendu, il n'est pas moins vrai que la loi de Dieu, et généralement toutes les vérités
" morales, sont, comme dit St. Paul, Kom. Chap. 2. ver. 1.'*, écrites dans le cœur da
LOGICA. 1 1
19. 2o. Sunt acquisitse, quia earum expressio, quœ nobis
transfertiir à sensibus, per vocem ab externo (du dehors),
id est, à societate venit. Auctor sic suain opinionem
stabilire conatur.
20. lo. *' Homines à nativitate surdi-muti, antequàm
" signis et gestibus scripturam doceantur, non cogitant
" nisi per imagines. Mirum igitur non est si, ante insti-
" tutionem, nullam habeant divinitatis, mentis humanœ,
" œternitatis, &c. ideam. Istas sicut et omnes alias ideas
** morales penitùs ignorant, quia earum expressiones non
" habent" (b).
Hic observandum est tamen plurimos in-hâc scientiarum
parte versatissimos, qui cum D. de Bonald docent cogni-
tionem idearum innatarura surdis-mutis à solâ societate
communicari posse, nisi quaedam sit specialis revelatio seu
inspiratio divina, contendere scripturam non esse neces-
sariam, et sola signa seu gestus sufficere ut surdi-muti
quamdam divinitatis et primorum principiorum legis natu-
ralis notionem acquirant (d).
21. 2o. *' Homines silvatici (hommes sauvages) qui
*' extra consortium hominum à primulâ infantiâ vixerunt,
*' ferè similes sunt bestiis agrorum ; non loquuntur, nihil
" propriè percipiunt, nulla rationis indicia exhibent, ut
" experentiâ constat (e).
" l'homme ; opus legis scriptitm in cordihus, où elles attendent que la parole transmise à
" chaque homme par la sociélé, suivant les lois générales du créateur, vienne les rendre
" visibles pour l'esprit ; fides ex auditu ; la foi vient de l'ouïe, dit le même Apôtre ; Rom.
" Chap. 10. ver. 17. Quojnodd audient sine prœdicante." ibid. ver. 14. (Rec/ierc/:es
Philosophiques, tom. 1. page 393).
(b ) Cette expression revêt, pour ainsi dire, nos idées, en fait un son par la parole et une
" image par l'écriture ; ainsi exprimées, elle les présente à notre esprit, et uotre esprit
" voit sa pensée dans l'expression, comme les yeux se voient eux-mêmes dans un miroir.
" Et de même que, sans la lumière, notre propre corps demeurerait éternellement caché à
" nos yeux, nos pensées, sans expression, demeureraient à jamais ignorées de notre
" esprit. .. L'ouïe est dans l'homme le sens propre des idées, comme la vue est le sens
" propre des images." (Mr. D. de Bonald, Législation primitive, tom. 2. p. 199.)
(d) Cette partie du système de Mr. de Bonald. ainsi modifiée, selon quelques-uns, et
sans aucune modification, selon quelques autres, est devenue, aux yeux des uns et des autres,
une vérité de fait, depuis que l'on a trouvé le moyen d'apprendre les langues aux sourds-
muets de naissance. Parmi ces inforluiiés, tous ceux auxquels on est parvenu à donner
une certaine éducation morale et religieuse, ont avoué qu'avant leur instruction, ils n'avaient
aucune idér de l'ordre, de la justice, de la vertu. &c. ; qu'ils ne connaissaient en aucune
manière la diflérence essentielle qui existe entre le bien et le mal moral ; qu'ils ignoraient
entièrement l'existence, la spiritualité et l'immortaliic de l'ame humaine, &c. Ils ne
voyaient et ne connaissaient, en un mot, que ce qui peut frapper les sens, et le Maître du
monde, quand par le commerce avec les hommes, ils pouvaient s'élever jusqu'à cette con-
naissance, n'était à leurs yeux qu'un homme plus grand, plus fort et plus puissant que tous
les autres hommes ensemble. Telle était, pour ne pas multiplier les exemples, la manière
devoir et de penser de Messieurs Jean Massieu et Laurent Clerc, élèves de Rlr. l'Abbé
Sicard il Paris, et de Mr. Antoine Caron, élève de Mr. R. Macdonald a Québec.
(e) "Ou croit communément que les sourds-muets parlent naturellement par gestes. Les
' ' sourds-tnuets apprennent les gestes par le commerce avec des Iiommes, comme les enfans
" apprennent la parole. Des sourds-muets ensemble, sans communication avec des enleti-
" dans-pailans, et des enfans abandontiés dans les buis sans avoir la parole, ne penseraient
12 LOGIC A.
22. En quod de his sententiis jadicandum est. Cartesius
supponit cognitionem primorum principiorum legis naturalis
ità insitam esse in mente huraanâ ab ipso Deo, ut etiam
homo, qui à primulâ infantiâ cum aliis hominibus nullam
quocumque modohabuerit commuaicationem, per se solum
hsec principia assequi possit, dummodo attentionem eis
prœbeat (13). Quœ omnia, juxta plurinios, nedùm validé
probentur, etiam experientiee adversantur ; ideoque, ideœ
innatœ, ut eas vult Cartesius, à plaribus, inter recentiores,
impugnantur.
23. Idese ortœ ex reflexione in sensationes et passiones,
ut eas excogitrvit Lockius, maximis intricantur difficul-
tatibus et vix propugnari possunt. '* Les idéologues
** modernes, inquit D. de Bonald, qui ont soutenu comme
" une maxime fondamentale que toutes les idées viennent
*' des sens, et qui ont opposé ce principe à l'opinion des
" idées innées, ont mêlé ensemble l'erreur et la vérité, et
** n'ont pas mieux développé l'une que l'autre. Ils ont
" confondu l'idée et son expression, l'opération de l'ame
" et celle des organes ; opérations distinctes, quoique insé-
*• parables, et différentes, quoique indivisibles." (Recher.
philo, tom. 1. pag. 396).
Sensationes transformatœ in ideas, ut eas intelligit abbas
Condillac (15, 16), pluribus merito videntur materialista-
rum doctrinis favere, (quamvis tamen auctor materialista
non fuerit) ideoque nullo modo propugnari possunt. ' 'Vers
** la fin du dernier siècle, l'idéologie sensualiste de Locke
" et de Condillac, porta des fruits que n'avaient pas
" prévus ses fondateurs, et qui sans doute étaient bien
*' loin de leur pensée et de leur cœur ; elle conduisit, par
" rien, n'exprimeraient rien ni par geste, ni par parole. lia auraient quelques
" mouvemens déierminéa par leurs besoins ; mais ils ne feraient point il'uciions déli-
" bérées, n'en vermient point Taire et par conséquent n'auraient point le geste
" qui est l'expression de l'action, comme la parole est l'expression de la pensée..
" . . Ils seraient bien au-dessous des brutes. Le sauvage de l'Aveyron n'a encore de
" gestes que pour ses besoins immédiats et journaliers, manger, sortir, &c. mais il nn
" raconte pas par gestes ; il exprime des appétits, et non des idées, îi-peu-près comme un
" animal dressé." Législ. prim. tom. 2. pag. 194.
Les différens hommes sauvages que l'on a trouvés dans les bois, à. diverses époques,
étaient à-peu-près dans le môme état d'abrutissement que le jeune Aveyronnais dont l'auteur
vient de parler. Incapables de faire ou d'exprimer par le geste aucune action délibérée,
ils ne faisaient entendre que des sons de gorge qui imitaient passablement les cris des
animaux parmi lesquels ces infortunés avaient été élevés. C'était là In seule ruanière de
manifester au dehors les affections qu'ils éprouvaient au dedans d'eux-mêmes. Jamais on
n'a pu découvrir en eux, avant leur instruction, la plus petite marque de raison ou d'intel-
ligence. On trouve dans le nouveau dtctiomïaire d'histoire naturelle, par une société de
Naturalistes, verbo, hommes sauvages, une assez longue liste d'enfahs découverts dans les
bois. Cet article est de Mr. Virey, et semble assez bien prouver co que Mr. de Bonald
avance en parlant des hommes sauvages.
LOGICA. . 13
une conséquence naturelle, au matérialisme. Propagée
par La Mettrie, Helvétius et d'Holbac, cette opinion
trouva facilement des défenseurs et des apôtres, à une
époque oij toutes les saines doctrines politiques et
morales avaient été bouleversées de fond en comble.
Cabanis l'appuya de toute son autorité, et annonça
dans son traité du rapport du physiqiie et du moral, qu'il
n'y avait point d'ame, que l'esprit n'est que le cerveau
agissant, et que la pensée n'est qu'une sécrétion de cet
organe." fAnnales de la Philosophie Chrétienne, tom. 1.
pag.26,27). ^
Plurimij inter recentiores, cum D. de Bonald admittunt
ideas innatas simul et acquisitas, alii ut eas vult auctor, et
alii cum modificatione de quû locuti sumus (20).
m. De cogitationum objecta.
24. Objectum cogitationis est res per cogitationem in
mente repraesentata. Duplex est, alterum intermim et
alterum externum.
25. Objectum internum seu reprœsenfatum est illud quod
menti prœsens est et mentem afficit, sive extrinsecè existât,
sive non existât. Sic présente lupo, cogito de cane ;
canis est objectum internum. Hoc objectum est proprium
cogitationis objectum ; sine eo enim nulla potest esse
cogitatio, alioquin cogitatio nihil repreesentaret, essetque
reprsesentatio sine reprœsentatione.
26. Objectum externum seu reprœsentandum, quod occa-
sionale vocatur, est illud ad quod refertur forma per cogi-
tationem repraesentata ; sic in pra^dictâ hypotbesi, lupus est
objectum ea'^ernMm,quamvis de illo mens nullatenùs cogitet.
Hoc objectum non est proprium cogitationis objectum ;
non enim semper attingitur à cogitatione et sine eo potest
esse cogitatio, ut evidens est.
Propositio prima.
27. Non datur nec dari potest cogitatio nihili.
Prob. Illius solius datur cogitatio, quod potest à mente
reprsesentari ; atqui nihilum non potest à mente reprae-
sentari ; si enim à mente reprœsenlaretur, esset nihilum
simul et non esset. lo. esset nihilum, ex hypothesi ; 2o.
non esset, cùm à mente reprcesentaretur, et cùm prius sit
esse quàm repraesentari. Ergo. . . . &c.
H LOGICA.
Solvuntur ohjectiones.
Objicies. Nihilum habet proprietates. Ergo. . . .&c.
28. Respondeo, nego antecedens (a). Tune enim non
esset nihilum.
Instabis lo. Nihilum distinguitur ab ente. Ergo...4&c.
Resp. Nego consequentiam. Non enim distinguitur ab
ente, nisi per proprietates entis. Ergo, . . .&c.
Instabis 2o. Nihilum potest esse subjectum propositio-
nis. Ergo habet proprietates.
Resp. Dist. Ant. Nihilum potest esse subjectum pro-
positionis ratione alterius et quoad nomen ; conc. ant. Ra-
tïone sut et quoad rem, nego ant. et consequentiam.
29. lUud est subjectum propositionis ratione sut et quoad
rem, cujus cogitatio potest conjungi cum altéra cogitatione,
vel ab eâ separari. Illud est subjectum propositionis
duntaxat quoad nomen et ratione alterius, cujus vocale
nomen à mente perceptum potest conjungi cum cogitatione,
vel ab eâ separari.
Reverà nihilum potest esse subjectum propositionis
ratione alterius et quoad nomen, quia vocale nomen potest
conjungi cum attributo vel ab eo separari ; sed non potest
esse subjectum propositionis ratione sut, cùm non habeat
illud sut.
(a) Voici les règles de l'argumentaiion tirées dun abrégé de Philosophie par Mr. l'Abbé
Hauchecorne.
lo. L'Agresseur attaque la thèse en prenant la contradictoire, et disant, par exemple ;
" si priùs jusserit N. .. .et bénigne annuerint auditores, argumentabor, doctissime respon-
" dens, contra tuam propositionetn quœ sic statuitur : non datur cogitalio nihili ; at ego
" contra, datur cogitatio nihili ; ergo rejicienda est tua propositio, ou, malè posita est lua
" propositio, ou, tua thesis."
2o. Le répondant reprend tout ce qui lui a été objecté, afin de procéder avec ordre, et de
bien entendre l'état de la question ; il dit, par exemple, " argumentatur vir clurissimus
" N. . . . contra meam propositionem quœsic statuitur ; non datur cogitatio nihili ; contra
" sic. argumentatur ; datur cogitatio nihili : ergo rejicienda est mea propositio."
'Après avoir ainsi bien fixé l'état de la question, on reprend l'objection en disant " datur
" cogitatio nihili ; nego antecedens." Il faut ensuite prouver que ce qui vient d'être nié,
était vraiment à nier, ce qui s'appelle, dare rationem negali.
Si une proposition paraît vrai*, il faut l'accorder et dire, concéda majorem, ou minorem,
ou antecedens. Si elle paraît fausse, on la nie en disant neg. msj. ou min, ou ant. Mais
si elle présente un double sens, on l'examine en disant, distinguo vwj. ou min. ou ant.
Les règles de ce genre de réponse sont renfermées dans les mots suivans : " divide, deCni,
concède, negato, probato."
lo. Divide, partagez bien votre proposition dans les deux sens que vous lui trouvez.
2o. Défini ; exposez en quoi consistent ces duux sens.
3o. Concède ; avouez ce qui vous paraît vrai.
4o. Negato ; niez ce qui vous paraît faux.
5o. Probato ; donnez les raisons de ce que vous avancez. On ne dislingue jamais une
conséquence, parce qu'elle ne peut Cire que bien ou mal tirée. Ainsi, l'on dit . distinguo
LOnsequens, et non pos consequentiam.
Si une proposition, une majeure, par exemple, renferme du vrai et du faux, et que l'on
ne veuille pas s'arrêter à la discuter, on dit : transeat major, puis on s'attache ii l'examen
de la mineure, et quand la réponse est donnée, on rappelle le transeat pour fair voir que
l'on aurait pu attaquer la majeure. D'autrefois, quand l'argument n'est point en forme, ou
qu'il ne va pas directement contre la ihège, on dit, concedo lulum.
LOGIC A. 15
Pono ut rectè concluderetur nihilum habere proprietates
ex eo quôd possit esse subjectum propositionis, oporteret
ut esset subjectum propositionis ratione sut et quoad rem
ipsara.
Obj. 2o. Nihilum cognoscitur. Ergo nihili dari potest
cogitatio.
Kesp. Dist. Ant. Nihilum cognoscitur impropriè; conc.
ant. cognoscitur propriè, nego ant. et consequentiam.
30. Res aliqua cognoscitur propriè, quandô cognoscitur
quid sit res ista ; cognoscitur impropriè, cùm cognoscitur
quid non sit.
Reverà nihilum cognoscitur impropriè ; cognoscitur enim
quid non sit : sed non cognoscitur propriè, cùm non
habeat naturam quam menti perspectam habeamus. Porrô
ut nihili dari posset cogitatio, oporteret ut nihilum cognos-
ceretur propriè. Ergo. . . . &c.
Inst. Nihilum definitur. Ergo cognosci potest propriè.
31. Resp. Dist. Ant. Nihilum definitur ne^ah*î;è ; conc.
ant. definitur positive, nego ant. et consequentiam.
Itaque definitio alia est positiva, quse est oratio rei natu-
ram explicans ; alia negativa, quœ explicat quid non sit res.
Reverà nihilum definitur négative, quandô dicitur illud
esse negationem entis ; sed non definitur positive, cùm
non habeat naturam quœ explicetur. Porrô ut nihilum
cognosceretur propriè, oporteret ut definiretur positive, non
autem négative tantùm.
Obj. 3o. Ex nihilo facta sunt omnia. Ergo nihilum
habet naturam.
32. Resp. Dist. Ant. Ex nihilo tanquàm termine facta
sunt omnia ; conc. ant. Ex nihilo tanquàm materiâ; neg.
ant. et consequentiam.
Res diceretur fieri ex nihilo tanquàm materiâ, si nihilum
esset materia ex quâ res ista fieret ; sic ex ligne fit tabula.
Res dicitur fieri ex nihilo tanquàm termino, eo sensu quôd
cùm anteà nihil existeretj res, Dec jubente, existere
cœperunt.
Reverà ex nihilo tanquàm termino facta sunt omnia,
quia nihilum est quasi terminus à quo res profectae sunt^ ut
ad existentiam pervenirent, cùm, Deo jubente, creata sunt
omnia ; sed non ex nihilo tanquàm materid creata sunt
omnia. Porrô ut probaretur nihilum habere naturam, ex
]G LOGICA.
eo cjuôd omnia ex nihilo facta fuerint, oporteret ut facta
laissent ex nihiio tanquàm materiâ, non autem ex nihilo
tanquàm termino.
Propositio secunda.
33. Impossibile non potest percipi ut possibile, id est, non
potest percipi convenientia inter cogitaliones répugnantes.
Prob. Nihil.um enim percipi non potest (27). Atqui
nihilum perciperetur, si impossibile perciperetur ut possi-
bile ; impossibile enim nihil est. Ergo. . . . &c.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. Percipi potest convenientia inter duas cogitationes
répugnantes. Ergo. . . . &c. Resp. Neg. ant. Nam inter
easdem cogitationes non potest esse convenientia simul
et repugnantia. Atqui si inter duas cogitationes répu-
gnantes percipi posset convenientia, inter cas esset conve-
nientia simul et repugnantia. Repugnantia quidera, cùm
ambai sint répugnantes ; convenientia vero, cùm mens
eam percipiat, et prias sit esse quàm percipi. Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Sœpè saepiùs ignoratur repugnantia quaa est
inter duas cogitationes quce sunt reipsà répugnantes : atqui
quando ignoratur repugnantia, percipi potest convenientia.
Ergo percipi potest convenientia inter duas cogitationes
quae sunt reipsà répugnantes.
Resp. neg. min. Nam ubi adest repugnantia, quantum-
vis sit ignorata, ibi nulla est convenientia. Ergo quamvis
ignoretur repugnantia quae reipsà est inter duas cogita-
tiones, non ideo inter eas percipi potest convenientia.
Inst. 2o. Ubi nulla est repugnantia, percipi potest
convenientia ; atqui repugnantia ignorata nulla est respectu
mentis. Ergo ubi repugnantia ignoratur, percipi potest
convenientia.
34. Resp. Dist. Min. Ignorata repugnantia nulla est
respectu mentis, eo sensu quod non possit à mente per-
cipi ; con. min. Nulla est respectu mentis, eo sensu quôd
tune mens percipere possit convenientiam ; neg. min. et
consequentiam,
Itaque repugnantia ignorata non magis à mente percipi-
tur quàm si nulla esset : at non ideô efficit ut percipi
possit convenientia quae nullo modo intercedere potest inter
cogitationes quse, ex hypothesi, sunt reipsà répugnantes.
LOGICA. 17
Corollarium.
35. Ex his patet Veritas istius axiomatis, *' quidquid
" percipitur, illud est verum." " L'esprit humain, inquit
*' D. de Bonald, Législ. primit, tom. 2. pag. 166, ne peut
" idéer ce qui n'est pas, comme il ne peut imaginer ce qui
*' n'existe pas." " Le faux, inquit Mallebranche, est in-
** compréhensible."
IV. De Cogitationum proprie tatibus.
Prsecipuse cogitationum proprietates sunt earum veritas,
claritas et distinctio.
L De Cogitationum veritate.
36. Cogitatio vera ea est quae représentât objectum
suum quale est. Cogitatio falsa esset illa qu8B non reprœ-
sentaret objectum suum quale est.
Propositio.
37. Omnis cogitatio est necessariô et essentiaUter vera.
Prob. Nulla enim existit in mente aHcujus objccti cogi-
tatio, nisi sit in mente hujus objecti repreesentatio (5).
Ergo omnis cogitatio objectum suum représentât. Porro
non repraesentaret, si quale est non pingeret. Ergo.. . .&c.
" L'idée est toujours vraie, inquit D. de Bonald, et il n'y
** a d'erreur que dans le jugement ou le rapport que nous
*' supposons entre nos idées.'* Recherches philos, tom. l.
pag. 414.
38. Quidam philosophi contendunt quasdara cogitationes
esse veras, et quasdara esse falsas, quia existimant objec-
tum externum esse proprium cogitationis objectum. Illud
autem est falsum (24, 25),
2. De Cogitationum claritate et distinctione.
39. Cogitatio clara est ea quae objectum suum ità re-
prsesentat, ut cognosci possit quid sit objectum istud. Co-
gitatio obscura huic opponitur.
40. Cogitatio distincta est ea quae rite objectum suum
ab omni alio distinguit. Cogitatio confiisa per oppositionem
cogitationi distinctae definitur.
41. Aliud est cogitationem esse claram, aliud illam ex-
hibere omnes rei dotes. Quamvis enim non omnes reprae-
sententur, quse tamen reprsesentabuntur, ilise clarè. Idcircô
alia cogitatio est compléta seu adœquatttf quse omnes rei do-
B
IS LOGICA.
tes repraesentat ; talis est cogitatio quâ Deus omnia co-
gnoscit. Alla incompleta seu inadœquata, quie plures vel
pauciores rei dotes exhibet.
Proposîtio.
42. Omnis cogitatio est clara et distincta.
Prob. lo. Est clara. Omnis enim cogitatio objectum
suum reprsesentat (5. 6,); atqui illud non reprsesentaret,
nisi ità reprœsentaret ut cognosci pcsset. Ergo lo....&c.
2o. Est distincta. Nam omnis cogitatio verè et clarè
objectum suum reprsesentat (37. 42). Ergo illud repraesen-
tare débet quale est. Ergo illud ab omni alio distinguere
débet. Ergo .... &c.
43. Seepè, quando paucas objectorum novimus proprie-
tates, dicimus nos non habere nisi ideas (cogitationes) ob-
scuras et confusas. Eo sensu non plurimas sunt cogitatio-
nes rerum clarse et distincta;, nemo diffitetur. Sed hic lo-
quendi modus non est stricte philosophicus, quia objectum
externum non est proprium cogitationis objectum (26).
V. De sîmplîcitate et composîtione cogitatiunum.
44. Omnem cogitationem in se simplicissimam esse,cer-
tissimum est : non enim datur média, vel tertia pars cogi-
tationis, ut inepte contendunt quidam hodierni materia-
listse (a). Hic itaque non agitur de cogitatione in seipsâ,
sed de cogitatione quoad objectum consideratâ.
45. Cogitatio simplex ea est cujus objectum ità unum est,
ut nullo modo dividi possit : taies sunt idcte attributorum
entis infiniti essentialiura, v. g. sapientiœ, justitiœj poten-
46. Cogitatio compositaesi est cujus objectum ex pluribus
aliis constat, talis est ïdea facidtatum mentis humanœ, {Intel-
ligentia, imaginatio et sensibilitas) , vel imago arboris,domiiSf
oppidi, 8fc.
Si objectum componatur ex pluribus aliis ejusdem speciei,
cogitatio vocatur coUectiva, talis est, v. g. idea omnium
angeîorum, vel imago omnium hominum,
47. Mens humana ut potè finita non potest unico in-
tuitu omnes rerum respectus in suâ cogitatione complecti,
Teaetur ergo suas decomponere cogitationes ut respectum
(a) " Nos pliysiologistes veulent que le cerveau digère les sensations pour en (aire la
" pensée, comme l'estomac digère les alimena et en fait le ciiyle." Législat. vrim. tom.
2, pas. 182. " 3 ^ y
LOGICA. 19
aîiquem ab aliis abstrahat et praecindat, et sic faciliùs ple-
niiisque contempletur. Haec mentis operatio dicitur ah-
stractio seu pi-œcisio.
48. ^&5^rach*o multiplici modo lieri potest ; le. çùm mo-
dus concipitur non attendendo ad istius substantiam ; sic
considero corporis velocitatem, non attendendo ad ipsum
mobile. 2o. Cùm modus consideratur aliquis, alio omisso ;
V. g. considero in homine ideandi facultatem, non cogi-
tando quôd possit res sensibiles imaginari. 3o. Cùm in re
aliquâ considerantyr quae sunt pluribus communia, non
attendendo ad ea quae sunt istius rei propria : sic in Petro
considero humanitatem, reraovendo quae sunt Pétri pro-
pria. 4o. Cùm considerantur cogitationes collectivag quai
repraesentant modificationes seu proprietates corporum ;
taies sunt cogitationes albitudinis, aciditatis, longitudinis,
latitudinis, &c.
49. "L'entendement, inquit D. de Bonald, a encore la
" faculté d'abstraire ou de séparer par la pensée, des corps
•' eux-mêmes, les accidens ou attributs, qui en sont phy-
** siquement inséparables, et de nommer par un seul mot,
" la collection ou la totalité de ces attributs.
'' Ainsi, tandis que l'imagination ne peut se représenter les
" couleurs, les saveurs, les étendues, les figures qu'attachées
" en quelque sorte au corps qui en est le sujet et qu'elles
*' modifient, l'entendement nomme blancheur, acidité, loii-
*' gueur, rondeur, Sic. et, par ces mots, il exprime la collection
" des corps blancs, acides, ronds, &c. et en exprime ainsi,
" non des idées, mais des images, ou des sensations
" abstraites et composées, et des accidens qui ne peuvent
*' réellement ou physiquement subsister indépendamment
" des corps ou des substances auxquelles ils sont unis.
" Ainsi les expressions ordre, sagesse, justice, &c.
" attributs nécessaires de l'être infini, qui ne sont fixés ni
" à un tems, ni à un lieu, et qui ne seraient pas moins
** vérité, même quand il n'y aurait jamais eu de création,
" représentent des idées générales ou simples (45). Les
" mots blancheur, odeur, longueur, &c. expriment des
" images généralisées et abstraites d'un grand nombre de
** corps." Recher. phil. tom. 1. pag. 390, &c.
20 LOGICA.
VI. De variis cogitatiomim speciehus.
50. Cogitatio dividitur, lo. Ratione originis in înnafam
adventitiam, factitiam, et înnatam simul et acquisitam (13,
17). 2o. Ratione modi quo objectum suum reprsesentat,
dividitur in adœquatam et inadœquatam. (41).
51. 3o. Ratione objecti dividitur in universalem, partî-
cularem et singularem. Cogitatio universalis ea est quœ
omnia sui objecti individua complectitur ; v. g. omnes
homines. Cogitatio partîcularis eaest quag partem duntaxat
individuorum exhibet et non déterminât ; v. g. aliqui
homines.
Cogitatio singidarîs ea est quae quoddam individuum,
seu quœdam individua exhibet et déterminât ; v. g.
Cicero, hic homo, isti homines, &c.
52. Haec major vel minor individuorum coniplexio dici-
tur extensio cogitationis qu£e sedulodistinguenda est ab ejus
comprehensione.
53. Comprehensio cogitationis est collectio attributorum
cogitationi essentialium ; v. g. intclligentia et organa sunt
comprehensio cogitationis hominis.
Extensio cogitationis est collectio subjectorum quibus
cogitatio convenit ; v. g. Cicero, Virgilius. . . . &c. perti-
nent ad extensionem cogitationis hominis.
54. Comprehensio essentialis est cogitationi, ac proindè
augeri vel minui non potest. Extensio autem accidentalis
est, et potest augeri vel minui.
VII. De cogitatione prout signis extra mentem manifestatur.
55. Signum generatim est illud quod priùs notum ad
alterius cognitionem ducit. Sic fumus est signum quo
cognoscitur adesse ignem. Signum dividitur in naturale et
arbitrarium, in certum et incertum.
^Q. Signum naturale est illud quod ex se et naturâ duce
aliquid significat ; sic gemitus sunt signum naturale
doloriSj et risus lœtitiae.
Signum arbitrarium est illud quod ex arbitrio hominum
aliquid significat ; sic inclinatio capitis est signum arbitra-
rium assensûs.
57. Signum certum est illud quod necessariam habet
connexionem cum re significatâ ; sic respiratio est signum
certum vitœ animalis. Signum incertum est illud quod
LOGICÀ. 21
cum re significatâ necessariam non habet connnexionem ;
talis est puisus arteriae praecipitatus, qui ordinariè signum
est febris, licèt ab aliâ causa, v. g. à vividâ animi commo-
tione, provenire possit.
Triplicis sunt generis signa quibus cogitationes nostrae
exteriùs manifestari possunt, scilicet gestus, locutio et scrip-
tura. De bis seorsim breviter dicendum est.
1. De gestu.
58. Nomine gestâs omnes intelliguntur sensibiles motus
et situs corporis, quibus diversse mentis operationes et
aifectiones exteriiis prodeunt aliisque manifestantur. Qua-
druplicis sunt generis, scilicet naturales, arbitrarii, simplices
et mixti.
59. Gestus naturales illi sunt qui^ naturâ duce, présentes
mentis afFectiones manifestant, taies sunt lacrymœ, clamo-
res, gemitus, tremores, risus, &c.; iidem sunt apud omnes
gentes, et ipsum rationis usum prœveniunt ; sic ubiqiiè
vagit infans dolorem sentiens, raovet bracbiola, tendit
manus ad objecta quae cupit, &c.
60. Gestus arbitrarii ex libero prœcipuè hominum statuto
suam babent significationem ; taies sunt, v. g. gestus ope
quorum surdi-muti, in societate viventes, coUoquuntur,
confabulantur, suasque omnes cogitationes perfectè expri-
mere possunt.
61. Gestus simplices sunt, inquit D. Bouvier, Log. pag.
35, quidam motus corporis vel quaedam actiones externae
ad alias actiones significandas usurpaîse, vel ad eventus aut
facta exprimenda : sic pantomimi aliquoties qucedam facta
solis gestibus repraesentant ; sic Jeremias abscondit
lombare suum in foramine petrae {cache la ceinture qui est
autour de ses reins dans le creux d'un rocher) et educit
illud putridum, ut ostendat Deum putrescere facturum
esse superbiam Juda et superbiam Jérusalem multam,
Cap. 13. ver. 4 et seq. Sic idem propheta conterit Jagun-
culam figuli testaceam f brise un vase de terre qu'il avait
acheté d'un potier) ut ostendat conterendum esse populum
Jérusalem, Cap. 19. ver. 1, 10, &c. Modus iste loquendi
frequens erat apud Judœos et populos Orientales ; undè
patet quàra immerito quidam impii hujusmodi figuras
suggillent in prophetis.
22 LOGICA.
62. Gestus mixti ii sunt qui sibi adjunctas habent voces,
vel potiùs qui vocibus et sermonibus adjunguntur, ut ima-
gines mentis vividiùs pingantur et auditores efficaciùs rao-
veantur : sic actores in theatris et omnes veri nominis
oratores, tùra sacri, tùm prophani, jucundè et efficaciter
variis utuntur signis manuum, vultûs, oculorum, &c.
2. De Voce seu de Locutîone.
63. Vox prout hic sumitur, est sonus articulatus ab ho-
mine prolatns cum intentione aliquid significandi.
lo. Dicitur5o?2W5 articulatus, id est, per syllabas, tanquàm
per articules distinctus ; undè essentialiter differt tùm à
risu et gemitu, tùm à confusis animalium sonis ; v. g. à
mugitu boum, balatu ovium, latratu canum, sibilatu
ayium, &c.
2o. Dicitur cum intentione aliquid significandi; undè
essentialiter distinguitur àloquelis psittacorum,picarum, &c,
" La faculté de répéter la parole, inquit D. de Bonald,
" n'appartient pas à l'homme seul, puisque cette faculté
'* se montre chez quelques animaux. C'est la faculté de la
" comprendre quand elle frappe notre oreille, et d'y atta-
*' cher une pensée, qui est la propriété exclusive de l'es-
" pèce humaine et sa plus noble prérogative ; car les ani-
*' maux entendent notre parole sans la comprendre, et elle
" n'est pour eux qu'un son, devenu par une répétition
'* fréquente, un signe matériel et sensible, inséparable de
" certains mouvemens dont on leur a fait contracter Iha-
*' bitude. Ce qui le prouve, est que le chien qui rapporte
" si fidèlement au mot ou son apporte, n'obéirait plus si on
" se servait d'une périphrase pour lui faire entendre la
'' même chose." Recher. Philos, tom. I. pag. 198.
64. Quando cogitatio voce exprimitur, terminus vocatur.
Hinc termini non secùs ac cogilationes possunt esse univer-
sales, singulares, et particulares (51).
65. Usus actualis vocum, inquit D. Bouvier, Log. pag.
37, prout ubiquè est receptus, dicitur locutio ; collectio
vocum et locutionum appellatur lingua, à mirabili vocis
organo quod sic vocatur. Dicitur etiam idioma, quando
agitur de modo loquendi uni genti, et prœsertim portion!
tantùm unius gentis proprio. Quandoquè vocatur etiam
patois.
LOGICA. 23
€6. Numéro propè infinitce sont linguœ diverse apud
varios orbis terrœ populos nunc existentes, et multee aliœ,
olini usitatee et percelebres, qure nunc mortute sunt, id est,
desierunt esse vulgares ; in veteribus libris tantùm reperi-
untur, ut hebraica, chaldaica, greeca, latina, &c., idcirco
vocantur linguœ eriiditorum.
67. Cùm in omnium mentibus eodem modo percipiantur
objecta, eaedemque proindè sint rerum cogitationes, quse-
dam sunt loquendi principia ferè omnibus linguis commu-
nia ; sic communiter reperiuntur nomen, tùm substantivum,
tùm adjectivum, pronomen, verhiim, adverbiiim, pi'œpositîones,
conjunctiones, et inte?jectiones ; sic in diversis linguis tria
sunt in verbo tomporo. prœsens, prœteTiîum etfuturum,
'• Le langage, inquit D. de Bonald, est partout le même,
" quoique les idiomes soient difFe'rens. On trouve dans
" toutes les langues les mêmes espèces de mots, et ils sont
'* assujettis aux mêmes accidens. Et c'est précisément à
" cause de cette identité dans la constitution de toutes les
" langues, ou plutôt du langage universel, que tous les
** idiomes peuvent se traduire les uns les autres, et que je
" poux rendre dans ma langue ce que le Hottentot ou le
" Cufre pense dans la sienne Sans doute le vocabu-
" luire d'une langue s'étend avec les arts et lesévénemens ;
^' la prononciation cbange avec les mœurs ; l'arrangement
" des mots, plus arbitraire en apparence que tout le reste,se
" modifie avec le tour d'esprit et de caractère de celui qui
" parle ; mais le fond, l'essence, la constitution du langage
" restent les mêmes, aussi invariables que la société, la
'* nature et le tems." RecherchesPhil. tom.l. ipa.^. 159.161.
3. De Invêntîone linguarum.
G^. Certum est lo. homines, in hypothesi quùd unam
quamcunque linguam, sive inventione, sive traditione, no-
verint, facile potuisse linguam suam perficere, novas vôces
instituere, innumeras verborum compositiones (com&m«fson5)
efFormare, et itù sensim varias linguas procreare ; id enim
quotidianâ experientià confirmatur.
69. Certum est 2o. homines primam linguam de facto non
invenisse, sed eam ab ipso creatore accepisse ; ex historiâ
quippè genesis certo constat primos totius generis humani
parentes usum habuisse sermonis. Sic Adam cum Deo lo-
quitur, appellat nominibus suis cuncta animantia, et uni-
24 LOGICA.
versa volatilia cœli, et omnes bestias terrae ; Eva audit
serpentera illique respondet ; Gain et Abel secum confé-
rant, &c. NuUum igitur fait tempus quo aliqua non
exstiterit lingua. Hinc tota quœstio ad hoc reducitur,nempè,
an primam linguam homines adinvenire potuissent.
70. Abbas Condillac fatetur quidem primos generis hu-
mani parentes usam sermonis habuisse. ** Adam et Eve,
" inquit, ne durent pas à l'expérience l'exercice des opéra-
*' tions de leur ame. Ils furent, par un secours extraordi-
" naire, en état de réfléchir et de se communiquer leurs
*' pensées." Sed positive affirmât, prœsertim in Gramma-
ticâ sua (1ère, partie, chapitre 8.), et in Logicâ (2de. par-
tie chap. 2.), homines, etiam in hypothesi quod nuUum
sermonis usum habuissent, potuisse taraen linguam adinve-
nire. *' J'ai cru, inquit, qu'il ne suffisait pas, pour un phi-
*' losophe, de dire qu'une chose avait été faite par des voies
*' extraordinaires ; mais qu'il était de son devoir d'expli-
*' quer comment elle aurait pu être faite par des moyens
*• naturels."
Heec média abundanter quidem et latè exponuntur ab
auctore ; sed nedùm sufficiant, e contra experientise adver-
santur(21).
71. CivisGenevensis (Jean Jacques Eousseau), Discours
sur r origine et les fondcinens de l'inégalité parmi les hommes
supponit primos homines fuisse silvaticos et nullam primi-
tiis habuisse societatem nisi cum feris ; sic tamen mentem
suam, circa linguarum originem, explicat.
" Quant à moi, effrayé des difficultés qui se multiplient,
" et convaincu de l'impossibilité presque démontrée que les
" langues aient pu naître et s'établir par des moyens pure-
" ment humains, je laisse à qui voudra l'entreprendre, la
** discussion de ce difficile problème, lequel a été le plus
** nécessaire, de la société déjà liée à l'institution des lan-
*' gués, ou des langues déjà inventées à l'établissement de
•' la société." Undè sic concludit : " La parole me paraît
** fort nécessaire pour inventer la parole."
72. D. de Bonald, Legisl. primit. tom. 1er. Discours pré-
liminaire, et chap. 1er. tom. 2. pag. 144 ; Recher. Phil.
tom. 1. chap. 2. 7. 8, rectè observât homines varias expe-
riri sensationes, diversasque rerum sensibilium sibi effor-
raare imagines, quas omnes, solâ duce naturâ, exteriùs
LOGICA. 25
signis manifestare possunt, ut in infantibus experi-
entiâ constat : at siraul contendit homines non so-
lùm primam linguam per seipsos invenire non potu-
isse, sed nec uUam ideam rerura merè intellectualiura
habere posse, sine nominibus eas exprimentibus : quod
sic probat.
73. lo. Nihil verè cognoscimus, nisi objecta per charac-
teres sibi proprios distinguamus ; objecta sensibilia per
circumstantias, quibus terminantur, facile distinguimus ;
sed objecta pure intellectualia à se invicem distingui non
possunt nisi propriis nominibus donentur.
" Quand on ne fait que penser, inquit auctor, on a des
*' paroles dans l'esprit, comme on peut dire de celui qui
" parle, qu'il a des pensées sur les lèvres ; et de même que
" l'homme ne peut penser à des objets matériels^ sans avoir
** en lui l'image qui est l'expression ou la représentation
" de ces objets ; ainsi, il ne peut penser aux objets incor-
" porels, et qui ne tombent directement sous aucun de ses
" sens, sans avoir en lui-même et mentalement les mots
" qui sont l'expression ou la représentation de ces pensées,
'* et qui deviennent discours lorsqu'il les fait entendre aux
" autres. C'est ce que J. J. Rousseau a très-bien apperçu.
" Lorsque V imagination s'arrête, dit-il, V esprit ne marche
*' qu'à Vaide du discours : ce qui veut dire qu'on ne peut
" penser qu'au moyen de paroles, lorsqu'on ne pense pas
" par le moyen des images." Recher. Phil. tom, 1er.
pag. 125.
74. 2o. Cogitare, est nobismetipsis interiiis loqui ; por-
ro nobismetipsis interiùs loqui non possumus, nisi per
verba interna. Ergo ideas rerum intellectualium reverà ha-
bere non possumus, quin simul propria earum habeamus
nomina, id est, quin simul eas verbis expressas apud nos
habeamus.
" Si nous ne pouvons parler sans pensée, c'est-à-dire,
*' sans attacher une idée à nos paroles^ ni être entendus
" des autres sans qu'ils attachent les mêmes pensées aux
" mots que nous leur adressons, nous ne pouvons penser
" sans parler en nous-mêmes, c'est-à-dire, sans attacher
'' des paroles à nos pensées, vérité fondamentale que l'on
*' peut exprimer ainsi ; r homme pense sa parole avant de
** parler sa pensée ; ou, de cette autre manière, l'homme ne
" peut parler sa pensée, sans penser sa parole."
26 LOGICA.
"■ Ainsi penser, c'est parlera soi, comme parler, c'est
** penser pour les autres, penser tout haut : et de là vient
*' qu'on dit, s'entretenir avec soi-même, s'entendre soi-même,
*' comme on dit ; s'entretenir avec les autres; être entendu
d'eux'* LégisL primit. tom. 2. pag. 158. Recher. phiL
tom. 1. pag 125.
75. 3o. Quotidio in raemoriam revocare nitimur cogita-
tiones praeteritas^ nec possumus, nî earum expressiones de
novo nobis présentes liant.
" Quand nous cherchons nos propres idées, nous ne fe-
*' sons réellement que chercher les mots qui les expriment,
" puisque l'idée ne se montre â l'esprit que lorsque le mot
*' est trouvé ; ainsi j'ai besoin d'exprimer par un seul mot
" l'idée d'un esprit à la fois juste et pénétrant ; je cherche
*' l'idée que j'ai sans doute en moi, puisque j'en attends
*' l'expression. . ..Les mots vivacité, pénétration, subtilité,
*' s'offrent à ma mémoire; mon esprit les rejette, et l'on
" dirait que l'idée les refuse après les avoir essayés, comme
** un vêtement qui n'est pas fait pour elle. Le mot sagacité
*' vient enfin, et mon idée l'adopte comme son expression
" propre, et alors seulement, mais à l'instant, elle se mani-
" feste à mon esprit dans toute sa plénitude." Recherches
philos, tom. 1. pag. 375, 376.
76. 4o. Homines ex naturâ suâ destenati sunt ad socie-
tatem (Ethica 168); ergo quod ab ipsorum inventione
pendet ad societatem necessarium esse non potest ; atqui
linguaî necessariîe sunt ad societatem. Ergo linguae, non
pendent ab hominum inventione.
** Le langage est nécessaire ^ dans ce sens que la société
*' humaine n'a pu exister sans le langage, pas plus que
** l'homme hors de la société; nouvelle preuve que l'homme
*• n'est pas l'inventeur du langage. L'homme découvre
*' l'utile et l'agréable ; il invente même le mal ; mais il
" n'invente pas le nécessaire par lequel il est, et qui existe
" avant lui et hors de lui." Recher. phil. tom. 1er. pag. 170.
77. Hinc concludit illustrissimus auctor facultatem lo-
quendi esse naturalem et loquelam esse acquisitam.
Deus illam primis parentibus nostris concessit; societas
eam conservât et veluti depositum posteris transmittit.
*' Si le langage n'a pu être inventé par l'homme ni
** par les hommes, il a donc été donné primitivement au
LOGICA. 27
* genre humain dans la personne d'un premier homme,
' transmis par lui à ses premiers descendans, et par
' ceux-ci à tous les autres, et au genre humain. La
' constitution une et identique du langage, est une preuve
* que le langage vient d'un seul et premier être parlant,
' et l'unité de langage est une démonstration de l'unité
' de son origine, parce qu'il en est une conséquence. Une
' famille a pu former le genre humain, et lui transmettre
' un langage, puisqu'il suffirait encore d'une famille pour
' recommencer le genre humain, si par quelque catastrophe
' il venait à être détruit ; et cette famille transmettrait
' encore sa langue à tous les hommes qui naîtraient d'elle.
' Cette langue s'altérerait à la longue, comme les figures ;
' mais les différens idiomes qui en viendraient conserve-
' raient des vestiges ineffaçables de la langue originaire ;
* comme les individus, malgré des différences accidentelles
* de physionomie et de couleur, conserveraient les princi-
' paux traits de la figure de leurs premiers auteurs."
Recheixhes philosophiques, tom. 1. pag. 171.
78. Htec doctrina confirmari potest exeraplo hominum à
nativitate surdorum-mutorum et hominum silvaticorum qui
extra consortium alio^um hominum à primulâ infantiâ
vixerunt (20, 21). Eâ autem admissâ, funditùs ruunt
varia systemata à recentioribus quibusdam philosophis
excogitata, quibus omnia falso et fréquenter absurde tri-
buuntur homini et nihil Deo, ut loquitur D. Bouvier,
Metaphy. pag. 208.
4. De Scripiurd.
79. Ciim gestibus corporis et sermonibus oris suas
cogitationes alii aliis manifestare ii duntaxat possint qui
eodem tempore et iisdem in locis vivunt, eô pervenit humana
industria ut absentes cum absentibus, et viventes cum
posteris quasi colloquerentur : euni ob finem inventa est
scriptura, quas duplex est, hierogliphica scilicet et alphahe-
tica seu phonetica. Prior cogitationes, posterior vero sonos
80. In ipsâ scripturse origine, objecta sensibiha pmge-
bantur propriis figuris et cum praecipuis circumstantiis ut
absentibus et etiam posteris manifestarentur : sed cùm haec
methodus immensam voluminum copiam exigeret, excogi-
28 LOGICA.
taverunt homines scripturam hieroglyphicara, quae apud
varios populos signis et caracteribus varia fuit.
81. lo. Assumebant prsecipuam rei circurastantiam, ut
tota res significaretur ; sic, v. g. ut pugnam reprsesentarent,
duas manus pingebant, quarum una arcum, et altéra
clypeum teneret : arcus agressionem, clypeus verô defen-
sionem indicabat.
2o. Instrumentum reale aut metaphoricum loco ipsius rei
substituerunt ; sic oculus in extremo baculo positus Dei
Providentiam, ala velocitatem, manus potentiam, &c. desi-
gnabant.
3o. Rem quandoquè significabant alterius imagine, quae
cum ipsâ re aliquam similitudinem vel analogiam habebat ;
sic orbem universum exhibebant sub imagine serpentis, per
gyros sinuosos in seipsum redeuntis, ità ut macularum
varietas stellarum multudinem indicaret.
Nonnullae hujus generis figurse sunt adhuc in usu, etiam
apud nos, quando, v. g. virtiis spei repraesentatur per statuam
mulieris anchorâ innixee, vigilantia per figuram galli,
abundantia per spicas, imperii maritimi principatus per tri-
dentem, &c.
82. Apud Sinenses singulae cogitationes et mentis opera-
tiones signis seu characteribus quibusdam propriis modo
simplicibus, modo compositis, pinguntur [a). Si nova ver-
(a) L'écriture des Chinois est véritablement hiéroglyphique. Chez ce peuble, chaque
pensée susceptible d'être énoncée d'un seul mot, est exprimée par un signe particulier.
Comme le noml)re des images simples est assez borné, on est convenu de combiner de
diflférentes manières et d'après des règles fixes et invariables, les signes qui les expriment,
afin de former des images composées. Quelques exemples feront mieux comprendre le
principe fondamental de ces sortes de combiniiisons. Les signes de l'œiV et de Veau (quel-
ques ondes) combinés d'une certaine manière, expriment l'action de;?/e«rer ou da répandre
des larmes, les signes de feu (une pelite flamme) et d'un trait lancé forment l'image de la
Inmiîre ou de la chaleur selon la manière dont ils sont combinés. On voit d'après cela pour-
qtioi oiseau et bouche signifient chanter; oreille et porte, écouter ; œil et viain, regarder,
saisir par les yeux \ car/t et un /io//i7/je (au milieu), prisonnier; cœur et trait, s oujf r ir ao'il
au physique, soit au moral, selon la manière de combiner ces signes.
Il est aisé de voir que, dans cette écriture, on doit inventer de nouveaux signes îi mesure
que l'on introduit de nouveaux mots non composés, ou de nouveaux noms propres. On in-
dique alors la prononciation par des signes simples ou composés, qui s'aniculent et s'accen-
tuent de la même manière. Supposons, par exemple, que le nouveau signe inventé ré-
ponde au nouveau nom propre Grand-pré; on ajoutera îi ce signe l'image composée de
Grand-Pré avec une trait particulier qui indique que cette image n'est adjointe que pour la
partie phonétique. Annale de Philosophie Chrétienne, tom 7. pag. 443. &.c.
Mr. de Paravey. célèbre et savant orientaliste, prétend, dans son Essai sitr l'origine uni-
que et hiéroglyphique des chi/fres et des lettres de tous les peuples, et dans une suite de sa-
vans mémoires qu'il a publiés sur l'écriture et l'astronomie d^'S anciens peuples de l'Asie, lo.
Que, chez tous les peuples connus les chiffres et les caractères hiéroglyphiques ont eu pri-
mitivement une seul et même source commune, et qu'ils se sont conserves jusqu'à nous dan3
lea hiéroglyphes de l'Egypte, de la Chine et des autres peuples de l'Asie. 2o. Que les
traditions historiques, les institutions civiles et religieuses, les premiers élémens des sciences
et des arts en général, et de l'astronomie en particulier, l'histoire de la civilisation, «Sec. de
ce que l'on appelle les tevis primitifs, dérivent d'un centre commun ou berceau unitjue placé
dans la Haute Assyrie. 3o. Qu'à la dispersion des peuples après le déluge universel, ces
précieux souvenirs se sont graduellement répandus dans l'Egypte et dans les difl'érentes cou-
LOGICA. 29
ba adsciscuntur, pingi non possunt, -quin novi cbaracteres
vel novtE characterum jam existentium compositiones exco-
gitentur. Hinc fit ut apud ipsos numerus signorum seu
characterum, juxta quosdam, excédât octoginta millia
(80,000). Hœc scribendi methodus valdè ditticilis est, ut
patet, et non rainimas scientiarum progressibus moras af-
ferre débet : ex eâ tamen non modica haec exoritur utilitas,
ut qui semel eam noscunt, sensum signis depictum intelli-
gere valeant, licet linguce appellationera et idiomata penitùs
ignorent.
83. ^gyptii, sicut et alii veteres populi, prirnitùs signis
seu cbaracteribus hieroglyphicis usi sunt (&) : dein vero la-
irées de l'Asie, et s'y sont perpétués jusqu'à présent par le moyen de l'écriture hiérogly-
phique et des planisphères, où l'on avait désigné les constellations zoùiacales connues des
anciens.
Ainsi, une seule famille source unique de tout le genre humain, un centre commun de civi-
lisation et de traditions antiques, une langue, une écriture et un zodiaque primitifs et antédi-
luviens, telles sont les bases du système que Mr. de Paravey a établi d'aijrès le récit de
Moyse et la confrontation approfondie des annales, des caractères hiéroglyphiques etdes Zo-
diaques, des Egyptiens, des Babyloniens et des autres peuples de l'Asie.
Il est aisé de voir que, dans ce système, l'origine unique des hiéroglyphes et l'identité des
symboles attachés aux mêmes signes du zodiaqui; chez tous les peuples, sont les deux seules
points qui poui raient présenter des difficuliés réelles : aussi Mr. de Paravey s'est-il attaché
plus particulièrement à les démontrer, et on peut dire qu'il y a réussi de la manière la plus
satisfaisante au jugement de tous les savans qui ont étudié et approfondi ses ouvrages.
De tout teins ou a observé que les Chinois ne font aucun progrès dins les sciences et dans
les arts, et que, chez ce peuple, les connaissances civiles et religieuses, les lois, les cou-
tumes, les usages, la manière de vivre, le cérémonial, ifcc. restent constamment les mêmes
dans chaque ordre de la société- Eimemis de toute espèce de changemens, les Chinois sont
peu propres à en introduire par eux-mêmes, et ils ont un si profond mépris pour leurs voi-
sins,qu ils croiraient se déshonorer s'ils adoptaient quelques unes de leurs coutumes ou de
leurs découvertes. Aussi leur écriture est-elle demeurée à peu-près la même depuis Con-
fucius, né vers l'an 550 avant l'ère chrétienne, jusqu'à nous, tandis que celle des Egyptiens
a été tronquée, altérée et réduite enfin en caractères alphabétiques plus ou moins compli-
qués.
De tous ces faits, Mr. de Paravey conclut avec raison que c'est à la Chine que l'on doit
chercher le type originel de l'écriture hiéroglyphique primitive. Ibid, tom. 2, page
286, &c.
(é) Ou avait toujours cru, jusqu'à la fin du dernier siècle, que les hiéroglyphes des
E>gypti«ns n'etnient que des figures qui représentaient des idées ou des images. Ce n'est que
depuis 1820, que le célèbre Mr. Champollion, le jeune, a démontré de la manière le plus évi-
dente que, dans le système graphique égyptien, on employait simultanément des .sj^ne*
d'idées ou d'images^ et des signes de sons, et par conséquent que l'on distinguait princi-
palement deux sortes d'écritures chez ce peuple célèbre, celle de pensées et celle de sons.
La première était purement hiéroglyphique ; elle était peu en usage ; à prine en trouve-t-
on quelques exemples sur les plus anciens monumens et sur les papyrus de quelques mo-
mies.Celle des sons ou l'écriture phonétique était beaucoup plus commune. On en distinguait
de trois sortes ; lo. l'écriture qui était composée d'hiéroglyphes-lettres , c'est celle qui cou-
vre les ruines de l'Egypte. Les signes en sont toujours la représentation d'un être ou d'un
objet, quelquefois fantastique, plus souvent réel, dont le nom en égyptien commence par
la lettre que l'hiéroglyphe représente : ainsi un aigle, un agneau, une araignée, <tc. repré-
sentent un A ; un bœujf, un bouc, une bécassine &c. un B ; et ainsi des autres lettres. 2o.
L'écriture sacerdotale ou sacrée, dont les lettres étaient représentées par des hiéroglyphes
abrégés; dans cette écriture, une ancre, un angle, dtc. pouvaient représenter un A, comme
nu bras, nn bâton, une béqniUe, Sec, pouvaient représenter un B, &c. On fesait usage de
celle écriture dans les matières religieuses; on la retrouve sur la plupart des papyrus des
momies. On l'avait inventé pour abréger la première écriture dont on vient de parler. 3o.
L'écriture démolique nu populaire, qui était une véritable écriture alphabétique. Dans cette
écriture comme dans la nôtre, les mômes lettres étaient toujours exprimées par les mêmes
signes ou caractères. Il est aisé de voir que cette écriture était bea'.icoup plus expéditive
que les deux précédentes. C'était celle dont on fesait usage dans les relations civiles et
privées. Les plus anciens manuscrits sur papyrus que l'on connaisse, sont écrits en carac-
tères démutiques ou populaires. Quelques uns, et ce sont les plus rares et les plus importans
30 LOGICA.
bentibus sœculis, huic scribendi methodo aliam clariorem
inultoque expeditiorem substituerunt, scripturam scilicet
phoneticam seu alphabeticam, quœ nunc apud nos viget.
In hâc scripturâ paucœ sunt litterœ, sed singulis ità specia-
lis tribuitur sonus, ut si diversis modis rectè ordinentur,
omnes omnino sonos articulâtes, ideôque ipsuni ser-
monem exprimere et quasi pingere valeant. Hinc scrip-
turâ alphabetica seu phonetica definiri potest : " Ars
'• pingendi sermonem, seu ad oculos loquendi, diversas
*' componendo litteras alphabeticas.''
84. Varise sunt eruditorum opiniones circa scripturae
alphabeticîE originem. Alii contendunt Cadmum Tlieba-
rum in Beotiâ conditorem, ex Phœniciâ oriundum et tem-
pore Moysis circiter viventem, litterarum et usûs scribendi
fuisse inventorem : cui opinioni sulFragatur Lucanus poëta,
his versibus ;
** Phœnices primi famée si creditur, ausi
" Mansuram rudibus voc€m signare liguris." .
Quos sic reddit poëta gallicus (Brébœul) :
" C'est de lui que nous vient cet art ingénieux
** De peindre la parole et de parler aux yeux ;
'* Et par des traits divers de ligures tracées,
*' Donner de la couleur et du corps aux pensées."
Alii autera doctissimi viri concedunt quidem Cadmura
usum litterarum in Grseciam detulisse, sed negant euni
fuisse illarum inventorem, variisque monumentis ostendunt
scripturam alpliabeticam in Phœniciâ et in ^gypto longé
ante Cadmi tempora extitisse. Ità prœsertim D. D. War-
burton et Renaudot ; quod evidenter demonstravit D.
ChampoUion, junior.
pour rhistoirt*, présentent tles actes de diiïérens genres des anciens monarques égyptiens, et
portent leurs noms et les dates des années dft leur rcc;nf . C'est à celte classe qu'appartien-
nent plusieurs frngmens de pupyius qui sont déposés dans le musée de Turin. Le plus an-
cien et le plue remarquable que Mr. ChampoUion y ait reconnu, contient un acte de la cin-
quième année du règne de Thoutdmosis UI. Ce monarque est le Pharaon qui gouvernait
l'Egvpie au plus tard vers le tems où .Toseph y fut conduit comme esclave, et par conséquent
plus de deux siècles avant le tems où Moyse écrivit le Pentaieuque.
Parmi un assez grand nombre de pnpyrus que possède Mr. Saillier, riche propriétaire
d'Aix en Provence, Mr. ChampoUion a trouvé un manuscrit daté de laOme. année du règne
de Sèsoslris ou Rh.imsès V. communénient appelé Rhamsès le Grand, qui succéda îi son
père Aménophis III, l'an 1473, avant l'ère Chrétienne, environ 18 ans après la sortied'E-
gypte, qui avait eu lieu vers l'an 14Di avant la même ère (b). La date de ce manuscrit ré-
pond donc il peu-près ;i la 27e. année après la sortie d'Egypte. Voyez le Précis du Sys-
tème hiéroglyphique des anciens Egyptiens p&r Mr. CliampoUion, le jeune, 2 vol. in 8o.
édition Je ffî^iu, et les yl«na/e* de Philosophie Chrétienne, \om, 1. pag. 4"-23 ; tom. 2, pag.
422 ; toin 3. pag. 148 ; tom. 5. pag. 176 ; lom. 8. pag. 113, &.C.
(*) Selon «le savans chronologistes, Aménophis III succéda à Rhainsès IV. surnommé
Meiamoun, qui fut englouti, avec don armée, dans les flots de la mer Rouge en poursuivant
les Hébreux, et qui lui-même, avait succédé a Achenclierès II. le Maiidouéi ildes Monu-
tnen3, sous lequel Moyae était né.
LCK3ICA. 31
85. Moyses in ^gypto natus, et artibus -^gyptiacis
eruditus, modum scribendi in hâc regione receptum certo
ediscere potuit et debuit. Hinc coliigere est quae fides
adhibenda sit D. de Voltaire, qui Pentateuchum à Moyse
scribi potuisse eam ab causam negat, quia ipsius tempore
ars scribendi nondùm erat inv^enta. Hâc de re consuli
possunt, Bible vengée à D. Duclos, tom. 1. pag. 125 •
Lettres de quelques Juifs à D. Guénée, contra D. de Voltaire,
tom. 1. pag. 87, &c.
86. D. de Bonaid, Recherches Philosophiques, tom. 1.
chap. 3j contendit scripturara alphabeticam vires humanas
omninô superare, proindèque ab ipso Deo concessam fuisse
Patriarchis qui ante Moysem vixerunt, et ab Hebrîeis ad
caeteras nationes paulatim transiisse. Ut probet suam
assertionem auctor plurimas afFert rationes, quas omnes ut
demonstrativas tradere non auderemus {a).
CAPUT SECUNDUM.
DE SECUNDA MENTIS OPERATIONE, SEU DE JUDICIO.
JUDICIUM considerari potest vel prout in mente latet,
vel prout extra mentem manifestatur verbis.
I. De Judicio prout in mente latet.
87. Mens suas cogitationes alias cum aliis comparât ut
detegat utrùm secum invicem conveniant an disconveniant.
Si convenire videat, illas jungit ; si disconvenire, séparât.
Actus ille jungendi vel separandi cogitationes post obser-
vatam earum relationem, dicitur judicium, quod definiri
solet; "operatio mentis de cogitationum habitudine (le
** rapport) pronunciantis."
88. Duplex est judicium, affirmans etnegans. Judicium
affirmans est, cùm mens jungit cogitationes ; v. g. Deus
est bonus. Judicium negans est, cùm mens séparât cogita-
tiones ; V. g. Deus non est crudelis.
89. Tria sunt in omni judicio distinguenda, subjectum
de quo aliquid affirmatur aut negatur ; attributum quod
de subjecto affirmatur aut negatur, et copula seu nexus ope
cujus attributum affirmatur aut negatur de subjecto ; v. g.
32 LOGICA.
in hoc judicio ; " circulus est rotundus :" circuhis est sub-
jectum; rotundus est attributum; est copula seu nexus est.
Judiciura dividitur, ratione motivi quo mens judican-
do nititur, in verum etfalsum, certum et incertum, evidenset
non evidens, probahile et improbabile.
90. lo. Verum est judicium quandô res de facto est
sicut mens pronunciat, v. g. sol major est terrd ; falsum
est autem quando res non est ut mens eam enuntiat, v. g.
terra major est stellis.
91. 2o. Judicium est cer/wm quando tam raanifestis ratio-
nibus nititur, ut nuUa sit errandi formido, v. g. existunt
corpora ; est verô incertum cùm omnis errandi formido non
excluditur, v. g. omnes stellœ magnitudine œquales sunt.
92. 3o. Judicium evidens est illud quod nititur motivo
tam manifeste ut nullâ probatione indigeat ; dicitur non
evidens quando illius motivum aliquâ indiget probatione :
undè judicium evidens confundi non débet cum judicio cer-
to ; V. g. evidens est triangulum tribus angulis tribusque
lateribus constare, et certum est très angulos ejus duobus
angulis rectis aequivalere (" les trois angles d'un triangle
" rectiligne valent ensemble deux angles droits") ; hoc ulti-
mum judicium non est evidens per se, et tamen est certis-
simum,
93. 4o- Judicium probahile est illud quod gravibus qui-
dem,sed non infallibilibus nititur motivis, v. g. probabile est
aegrotum, quem sanandum esse pronunciant plures medici
doctissimi, reverà sanitatem recuperaturum esse. Judicium
est improbabile quando nuUo alicujus momenti fundatur
motivo ; sic improbabile est alterum œgrotum quem iidem
medici judicant moriturum, sanandum fore.
II. De judicio prout verbis manifestatur, seu de propo-
sitione.
94. Judicium verbis manifestatum vocatur propositio ;
undè propositio vocari solet traductio judicii, ut terminus
vocatur traductio cogitationis (64).
95. In quâlibet propositione, sicut et in judicio, tria
sunt distinguenda, subjectiim, attributum et copula (89).
Necessarium tamen non est uthsec tria distincte expriman-
tur ; ssepè unicâ vel duabus vocibus fit propositio ; v. g,
sum, id est, ego sum existens ; Lentulus ambulat, id est,
LOGICA. 33
Lentulus est ambuîans ; pluit, id est, pluvia est cadens ;
licet, id est, res est îicita, &c.
96. Nunc nobis agendum est de propositionum proprie-
tatibus, quee duplicis sunt generis, nimirùm,aliae sunt abso-
lutœ et aliae sunt relativœ. Absolutœ sunt illœ quae uni pro-
positioni seorsim sumptœ conveniunt : relativœ è contra, illae
sunt quae uni propositioni cum aliâ comparatee competunt.
1 . De proprietatibus absolutis propositionum.
Proprietates absolutse propositionum sunt ipsarum quan-
titas et qualitas.
De quantitate propositionum.
97. Quantitas propositionum est ipsamet subjecti exten-
sio (52) , id est, est ipsarum universalitas, particularitas et
singularitas .
98. Propositio universalis est ea cujus subjectum est ter-
minus universalis (51. 64), id est, terminus qui sumitur
secundùm totam suam extensionem ; v. g. omnis homo est
substantia.
99. Fropositio paiiicularis ea est cujus subjectum est ter-
minus particularis, id est, terminus qui sumitur secun-
dùm partem indeterminatam extensionis suœ ; v. g. aîi-
quis homo est doctus ; nonmilU liomines sunt nigri.
100. Propositio singularis ea est cujus subjectum est
terminus singularis, id est, terminus qui sumitur secundùm
partem determinatam extensionis suée ; v. g., Cicero erat
orator ; hic homo est doctus, &c. Haec propositio ad uni-
versalem revocari débet ; ejus enim subjectum sumitur
secundùm totam extensionem suam, siquidem tantùm ex-
tenditur quantum extendi potest.
101. Addunt Logici quartam propositionem quam inde-
finitam vocant. Indefinita propositio ea est cujus subjec-
tum nullâ universalitatis, particularitatis aut singxilaritatis
nota afficitur; v. g., virtus est amancla. Heec propositio,
quandô est in materiâ necessariâ, ad universalem metaphy-
sicè refertur ; sic, v. g.,, sensus hujus propositionis, circulus
est rotundus, est, omnis circulus, nullo excepto, est rotundus.
Quandô verô propositio indefinita est in materiâ contin-
genti, vel quandô est in materiâ quœ ad mores pertinet,
tune refertur ad propositionem physicè, vel moratiter uni-
'versalem ; sic heec propositio ; jliqnen recedit à fonte, refer-
34 LOGICA.
tur ad propositionem physicè universalem, siquidem excep^
tionem non patitur, nisi per miraculum ; ista autem pro-
positio, homines inîiiant divitiis, revocatur ad propositionem
moraliter universalem, siquidem ejus attributum enuntiatur
de plerisque, seu de majore individuorum numéro.
De qualitate propositionum.
102. Qualitas propositionum est ipsarum affirmatio aut
negatio, veritas aut falsitas.
De affirmatione aut negatione propositionum,
103. Propositio affirmans ea est cujus attributum jungi-
tur cum subjecto ; negans ea est cujus attributum separatur
à subjecto.
Axioma primum.
104. Attributum propositionis affirmantis est particulare.
Prob. Sit enim ista propositio ; " omnis homo est sub-
" stantia ;" atqui attributum substàntia sumitur particula-
riter ; sensus enim est, " omnis homo est aliqua substan-
" tia ;" non autem, " omnis homo est omnis substàntia."
Ergo attributum substàntia restringitur in suâ extensione.
Ergo est particulare. Ergo. . . . &c.
105. Si autem eadem est attributi et subjecti extensio,
vel si propositio est exclusiva, attributum sumitur univer-
saliter, non vi affirmationis, sed vi materiee : sic v. g., sen-
sus hujus propositionis, *' omnis homo est intelligentia cui
" ministrant organa,'* ( " l'homme est une intelligence
*' servie par des organes"), est " omnis intelligentia cui
" ministrant organa est homo ;" et sensus istius, " so)i
*^ homines sunt raedici,'' est, " omnes medici sunt ho-
" mines."
Axioma secundum.
106. Attributum propositionis negantis est universale.
Prob. Propositio enim negans séparât attributum à sub-
jecto. Ergo séparât omnia attributi individua. Ergo
attributum excluditur in totâ extensione suâ, seu uni-
versale est. Sic cùm dicitur : " homo non est lapis ;"
idem est ac si diceretur ; " nuUus homo est lapis pos-
" sibihs ," " homo nullus est ex individuis lapidis."
107. Hinc lo. In propositione universali affirmante, uni-
cus est terminus universalis, nempè subjectum.
LOGICA. 35
108. 2o. In propositione universali negante, duo sunt
termini universales, subjectuni et attributum.
109. 3o. In propositione particulari affirmante, nullus
est terminus universalis.
110. 4o. In propositione particulari negante, unicus est
terminus universalis, nempè attributum.
De verîtate et falsitate propositionum.
111. Propositio considerari potest vel prout est cjramma-
tîcalis, vel prout est îo^ica.
Propositio dïciinr grammaticalis, quando sola ipsius verba
spectantur, utrùm scilicet, hoc vel illud sit subsiantivum,
adjectîvum, verbum, &c. ; vel utrùm regat singularem vel
pluralem numerum, &c.
Propositio verô appellatur logica, quando consideratur
ut aliquem sensum habens. De solâ propositione logicâ
hic agitur,
1 12. Propositio vera ea est quse pronuntiat de subjecto suo
quod est pronuntiandum. Falsa ea est quae pronuntiat de
subjecto suo quod non est prununtiandum.
113. Hinc sequitur omnem propositionem logicam veram
esse aut falsam. Vel enim pronuntiat de subjecto suo
quod est pronuntiandum, vel non ; si prius, vera est ; si
posterius, falsa est.
114. Propositio sœpè duplicem sensum involvit, tunc-
que vera esse potest uno sensu intellecta, et falsa altero.
Ut itaque detegatur nùm sit vera aut falsa, assignari débet
quo sensu sit intelhgenda. Multiplex est iste sensus, scih-
cet, proprius seu naturalis et litteralis,extraneus seu aîienus,
metaphoricus, compositus et divisus, &c.
115. Sensus propriusy qui etiam vocatur naturalis seu
îitteralis, est ille quem voces ex naturâ suâ et primariâ in-
stitutione pree se ferunt ; v. g. '' Ignis comburit."
116. Sensus extraneus seu alienus est ille quem voces ex
primariâ institutione non habent ; v. g., hœc propositio in
ore incredulorum : " Superstitio noxia est hominibus ;" in
quâ vox superstitio ab incredulis intelHgitur de quâcumque
religione ; undè falsa est sensu extraneo, quamvis vera sit
sensu proprio.
117. Sensus metaphoricus ille est in quo verba à proptiâ
significatione ad alteram, ob simiUtudinera, transferuntur ;
sic Scipio fulmen helli vocatur.
36 LOGICA.
118. Sensus divisus locum habet quando actus aliquis
jungitur, non quidèm cum actu opposite, sed cum potentiâ
ad actum oppositum, ut in hâc propositione, dormiens vigi-
lare potest. Sensus compositus est quando secum jungun-
tur duo actus oppositi ; v. g., actu dormiens vigilat actu.
Duo illi sensus sedulô notandi sunt. Saepiùs enim fit ut
propositio vera sensu diviso, falsa sit sensu composite.
Sic V. g., istse propositiones Christi ; " caeci vident ; surdi
audiunt ; claudi ambulant," verae sunt sensu diviso, quo
dictas sunt ; scilicet, " qui erant caeci, nunc vident ; qui
" erant surdi, nunc audiunt," &c. ; sed falsa sunt sensu
composite. Haec verô propositio Sancti Pauli vera non est
nisi sensu composite, quo dicta est ; " neque avari, neque
" ebriosi. . . . regnum Dei possidebunt ;" sensus est enim ;
** neque avari, neque ebriosi, rémanentes avari et ebriosi.. .
*' regnum Dei possidebunt."
2. De proprietatibus relativis propositionum.
Duae sunt, conversio et oppositio.
De conversione propositionum,
119. Conversio propositionum est mutatio subjecti in
attributum, et attributi in subjectum. Propositio quse con-
vertitur, convertenda vocatur ; propositio quœ ex conver-
sione oritur, vocatur conversa ; v. g.
Convertenda ; " nullus horao est lapis :"
Conversa ; " nullus lapis est homo."
Convertenda ; " Omnis homo est substantia :"
Conversa; " Aliqua substantia est homo."
Régula prima.
120. In conversione servanda est affirmatio aut negatio,
Veritas aut falsitas.
Prob. lo. Servari débet affirmatio aut negatio, alioquin,
postquàm in convertenda junctum fuisset attributum cum
subjecto, in conversa removeretur ab eodem subjecto ; aut
vice versa. Ergo non idem servaretur sensus. Ergo. . . .
lo. &c.
2o. Servari débet veritas aut falsitas. Propositio enim
convertitur ut ejus detegatur natura. Atqui conversione
non detegeretur natura convertendœ, si conversa non serva-
ret veritatem aut falsitatem. Ergo. . . .2o. &c.
LOGICA. 37
Régula secunda.
121. Nec attributum nec subjectum universaliùs sumi
debent in convers-d quàm in convêrtendâ.
Prob. In conversa enim nihil affirmari aut negari r^ebet,
quod non faerit affirmatum aut negatum in convertendd ; at-
qui si attributum aut subjectum universaliùs sumerentur in
conversa quàm in convêrtendâ, tune aliquid affirmaretur. . &c.
Ergo....&c.
Hinc lo. valent istse conveifsiones :
" Oranis homo est substantia,"
" Aliqua substantia est homo."
'* Omnis homo est inteUigentia cui ministrant organa ;"
" Omnis intelUgentia cui ministrant organa est homo."
(105).
*' Nullus homo est marmor ;"
*' NuUum marmor est homo."
** Nullus homo est lapis ;"
*' Aliquis lapis non est homo."
" AUquis homoest sanctus ;"
" Aliquis sanctus est homo."
Hinc 2o. non valent istse conversiones :
" Omnis homo est substantia ;"
" Omnis substantia est homo."
" Aliquis homo est doctus ;"
** Omnis doctus est homo."
'* Aliquis homo non est doctus ;"
*' Aliquis doctus non est homo."
De oppositione propositiommi.
122. Oppositio propositionum est pugna duarum propo-
sitionum quarum una refelUt quod dicit altéra. Hinc inter
duas propositiones negantes non potest esse oppositio ; sed
potest esse inter duas affirmantes, vel inter affirmantem et
negantem.
123. Oppositio duarum propositionum afiirmantium con-
sistit in repugnantiâ duorum attributorum quse de eodem
38 LOGICA.
subjecto et sub eodem respectu affirmantur ; v. g. " Cir-
" lus estrotundus :" '' circulus estquadratus :" rotunditas
enim destruit quadraturam.
124. Oppositio inter affirmantem et negantem consistit
in affirmatione et negatione unius et ejusdem attributi de
eodem subjecto et sub eodem respectu ; v. g. " Petrus est
" logicus. Petrus non est logicus."
125. Duplex est propositionum oppositio, contraria et
contradictoria. Propositiones contraries sunt illse quarum
una plus dicit quàm requiritur ad refellendam alteram ; v. g.
*' Petrus est doctus ; Petrus est ignarus."
126. Propositiones contradictoriœ eag sunt quarum una
prœcisè dicit quod sufficit ad refellendam alteram ; v. g.
" Petrus est doctus : Petrus non est doctus." " Omnes
*' homines sunt docti ; aliquis homo non est doctus."
Propositio prima.
127. Duse propositiones contradictoriae non possunt esse
simul verœ nec simul falsce.
Prob. Idem enim non potest esse simul et non esse : at-^
qui idem esset simul et non esset, si duse propositiones con-
tradictoriae possent esse simul verae et simul falsee (126).
Ergo. . . .&c.
128. Ergo ex unius veritate concluditur falsitas alterius ;
et vice versa, ex unius falsitate concluditur veritas alterius.
Propositio secunda.
129. Duse propositiones contrariée non possunt esse si-
mul verœ, sed possunt esse simul falsœ.
Prob. la. pars. Nam ex duabus contrariis una plus dicit
quàm requiritur ad refellendam alteram (125). Ergo dicit
quod sufficit. Ergo. . . .&c.
Prob. 2a.pars. Inter enim duas contrarias, saltem in materiâ
contingenti, dari potest média propositio ex cujus veritate
sequatur falsitas duarum propositionum contrariarum ; v. g.
inter istas, *' Omnes homines sunt justi ;" " nulli ho-
mines sunt justi ;" datur haec média propositio ; " aHqui
homines sunt justi." Ergo. . . .&c.
130. Ergo ex veritate unius propositionis contrarise se-
quitur alterius falsitas ; sed ex falsitate unius propositionis
contrariée concludi non potest alterius veritas.
LOGICA. 39
CAPUT TERTIUM.
r>E TERTIA MENTIS OPERATIONE SEU DE DISCURSU.
T^ISCURSUS seu Ratiocinium est mentis operatio
131. -JL^ quâ unum judicium infertur ex alio ; v. g., ex
hoc judicio ; " Deus est summè perfectus,'' infertur hoc
aliud ; " Ergo est amandus."
132. In omni ratiocinio tria sunt distinguenda, antece-
dens, consequens et consequentia. Antecedens est judicium
seu séries judiciorum ex quo vel ex quibus aliud infertur.
Consequens est illud quod infertur. Consequentia est con-
nexio seu vinculum antecedentis cum conséquente. Res
illustretur exemple.
*' Omne vitium est fugiendum ;
" Atqui mendacium est vitium ;
'^ Ergo mendacium est fugiendum."
Duo priora judicia sunt antecedens, tertium est consequens:
et nexio hujus tertii cum prioribus, designata per particulam
ergo, est consequentia.
133. Vera potest esse consequentia, licèt consequens sit
falsum ; v. g. '' Materia cogitât ; ergo potest esse beata."
Vice versa, verum potest esse consequens, licèt conse-
quentia sit falsa; v. g. "Homo est substantia ; ergo
" cogitare potest."
134. Discursus verbis manifestatus vocatur argumenta-
tio, et definitur, '' oratio discursûs interpres." Septem
vulgô numerantur argumentationum species ; Inductio,
Exemplum, Sorites, Dilemma, Epicherema, Enthymema, et
Syllogismus.
135. Inductio est argumentatio quâ ex multis singula-
ribus aliquid générale concluditur ; v. g. " Omnis homo
" est sensitivus ; omne brutum est sensitivum ; ergo
" omne animal est sensitivum." Valet haec argumentatio,
si perfecta sit singularium enumeratio.
136. Exemplum est argumentatio in quâ ex aliquo
singulari aliud singulare concluditur : triplex est, à pari, à
fortiori, à contrario.
A pari: " Sancti multa passi sunt ut vitam seternam
" consequerentur ; ergo à pari, et nos multa pati debemus,
'* si vitam aeternam consequi velimus."
40 LOGICA.
A fortiori : " Fugiendum. est peccatum veniale ; Ergo
" à fortiori, et mortale,"
A contrario : '' Vitium est mors anim8e; Ergo à contrario,
** virtus est anirase vita."
137. Sorites seu Gradatio est argumentatio in quâ plures
sunt propositiones ità inter se connexœ, ut attributum
primée fiât subjectum secundcC ; attributum secundae^ fiât
subjectum tertise, et sic deinceps donec subjectum primas
jungatur cum attributo ultimîe in conséquente ; v. g.
" Avarus multa desiderat ;
" Qui multa desiderat, multis eget ;
^ '* •* Qui multis eget, miser est ;
" Ergo avarus miser est."
Valida est hsec argumentatio si quœque propositio ex
praecedenti fluat, et si nullae sint voces aequivocœ.
138. Dilemma est argumentatio duo proponens adversa-
rio eligenda, quorum utrumlibet eligat, causa cadit ; v. g.
si _ quis probare velit lïoniines esse in vitâ miseros, sic
arguere poterit.
" Quisquis hanc vitam degit, vel servit cupiditatibus, vel
*' cupiditatibus resistit ;
" Si resistit, miser est ; vim enim perpetuam sibi infert ;
*' Si servit, miser est ; eas enim explere nequit ;
" Ergo quisquis hanc vitam degit, miser est."
Dilemma nuncupatur argument um cornutum, quia est
quasi feriens utroque cornu : ut validum sit, necesse est
ut nuUum inter utramque partem detur médium.
139. Epicherema est argumentatio cujus alterutri vel utri-
que propositioni antecedenti sua adjungitur probatio ; v. g.
" Omne quod cogitât, existit ; priùs est enim existere
*' quàm cogitare ;
" Atqui ego cogito, res enim in mente mihi reprœsento :
'' Ergo existo."
140. Enthymcma est argumentatio duabus constans pro-
positionibus, quarum una dicitur antecedens et altéra
consequens. v. g., ** Cogito : ergo existo."
141. Syllogismus est argumentatio tribus constans pro-
positionibus ità inter se connexiS;, ut ex duabus prioribus
tertia necessariô sequatur ; v. g.
" Omnis virtus est amanda ;
" Atqui diligentia est virtus ;
" Ergo diligentia est amanda."
LOGICA. 41
142. Ambîe priores vocantur prœmissœ ; ex his una
dicitur major et altéra minor ; tertia propositio vocatur
conclusio.
143. Major ea est quse continet attributum conclusionis,
dictum majiis extremum; minor ea est quœ continet minus
extremum, seu subjectum conclusionis.
144. Attributum et subjectum conclusionis dicuntur
extrema, quia comparantur inter se ope tertii termini, qui
médius terminus vocatur. Hic médius terminus reperitur
in majore et minore, nunquàm verô in conclusione.
145. Majus extremum sic vocatur, quia majorera exten-
sionem habere solet ; et minus extremum sic dicitur, quia
ordinariè minorera extensionem habet. In hoc syllogismo ;
" Omne vitium est fugiendum ;
** Atqui mendaciura est vitium ;
*' Ergo mendaciura est fugiendura."
Fugiendum est majus extremura ; me.ndacium, minus ex-
tremum ; et vitium, médius terminus. Sic in hoc syllo-
gisme, prima propositio est major, secunda est minor, tertia
conclusio.
Major igitur non est semper prima syllogismi propositio.
In sequenti secunda est.
" Nullum extensum est cogitans ;
*' Atqui omnis Spiritus est cogitans ;
" Ergo nullura extensura est Spiritus."
146. Ex his sequitur majus extremum comparari in ma-
jore cum medio termino ; minus extremum cura eodem
termine comparari in minore, et relationem detectam
inter majus et minus extremum enuntiari in conclu-
sione. Hœc omnia supponunt istud principium duplex ;
'' Duo qua sunt eadem cum tertio, sunt eadem inter se."
" Duo quorum unum idem est cum tertio, alterum vero
*' non idem, non sunt eadem inter se."
Nunc agemus lo. de syllogismorum reguUs ; 2o. de va-
riis syllogismorum speciebus; 3o. de communioribus sophis-
matibus.
I. De Regulis Syllogismorum.
Octo sunt his versibus expressae.
la. '* Terminus esto triplex, médius, majorque, mi-
'* norque.
42 LOGICA.
2a. " Latiiis hune quàm pra^missae conclusio nonvult.
3a. " Aut semei aut iterùm médius generaliter esto.
4a. " Nequaquàm médium capiat conclusio fas est.
5a. " Utraque si praemissa neget, nihil indè sequetur.
6a. " Ambae affirmantes nequeunt generare negantem.
7a. *' Pejorem sequitur semper conclusio partem.
8a. " Nil sequitur geminis ex particularibus unquàm.''
Régula prima.
147. " Terminus esto. . ..&c.", id est, très esse debent
in syllogismo termini, nec plures, nec pauciores.
Prob. Syllogismus enim est comparatio duorum cura
tertio. Atqui ad talem comparationem très et très tantùm
requiruntur termini, nempè duo qui comparentur et tertius
ope cujus comparentur. Ergo. . • . &c.
Obj. Valet iste syllogismus ;
'' Omnis virtus est laudabilis ;
*• Atqui omne vitium est vituperabile ;
" Ergo nuUum vitium est virtus.
Atqui tamen quatuor sunt in hoc syllogismo termini.
Ergo. . . .&c.
Resp. neg. min. Vox enim virfuperabile idem significat
ac non laudabile. Ergo in hoc syllogismo très sunt tantùm
termini.
Régula secunda,
148. " Latiùs hune. . .&c.", id est, nullus terminus
universalior esse débet in conclusione quàm in praemissis.
Prob. Conclusio enim erui débet ex prcemissis ; atqui si
aliquis terminus esset universalior in conclusione quàm in
prsemissis, conclusio non erueretur ex prasmissis ; ,
Ergo. . . .&c. Hinc non valet iste syllogismus : '^
** Omnis scholasticus est studiosus ;
*' Atqui Petrus non est scholasticus ;
" Ergo Petrus non est studiosus."
Terminus enim non studiosus universâVior est in conclusi-
one, quàm in praemissis studiosus (104, 106).
Obj. Valet iste syllogismus ;
" Soli homines sunt medici ;
*' Atqui nullum brutum est homo ;
" Ergo nullum brutum est medicus."
LOGICA. 43
Atqui tamen vox medicus universalior est in conclusione
quàm in praemissis. Ergo. . . .&c.
Resp. neg. min. Sensus enini majoris est ; " Omnes me-
dici sunt homines" (105). Ergo vox medicus non est uni-
versalior in conclusione quàm in praemissis. Ergo. . . . &c.
Régula tertîa.
149. Aut semel. . . . &c.", id est, médius terminus sal-
tem semel universaliter sumi débet.
Prob. Médius enim terminus bis particulariter sumptus
duo diversa significat. Ergo duobus terminis œquivalet.
Ergo tune quatuor essent in syllogismo termini, quod fieri
nequit (147). Ergo. . . . &c. Hinc non valet iste syllo-
gismus ;
" Omnis homo est substantia ;
•' Atqui omnis angélus est substantia ;
*' Ergo omnis angélus est homo."
Obj. Valet iste syllogismus;
" Aliqua substantia est extensa ;
" Atqui omne corpus est substantia ;
" Ergo omne corpus est extensum."
Atqui tamen médius terminus bis particulariter sumitur.
Ergo. . . . &c.
Resp. Dist. Maj. Valet iste syllogismus vi materiœ et
consequentis ; conc. rcidi].Viformœ et consequentiœ ; neg. maj.
Itaque in hoc syllogismo verum est consequens, sed nulia
est consequentia. Si enim concluderet hic syllogismus vi
formae et consequentise, servatâ eâdem forma, ex prœmissis
veris semper sequeretur optima conclusio ; quod falsum est,
ut patet ex eodem syllogismo sic mutato ;
" Ahqua substantia est extensa ;
^ " Atqui omnis spiritus est substantia :
" Ergo omnis spiritus est extensus."
Inst. Rectè concludit iste syllogismus ;
" Joannes est sanctus ;
" Atqui Joannes est doctus ;
" Ergo aliquis doctus est sanctus;"
Atqui médius terminus bis particulariter sumitur.
Ergo. . . . &c.
Resp. neg. min. Médius enim terminus Joannes est
singularis et non particularis, ideoque ad universalem
refertur (100). Ergo &c.
44 LOGICA.
Régula quart a.
150. "Nequaquàm. . . . &c.", id est^ médius terminus
non débet ingredi conclusionem.
Prob. Solum enim probandum ingredi débet conclusio-
nem. Atqui médius terminus non est probandus. Ergo
&c.
Corollarium.
Ibl. Ergo plures esse debent termini universales in
prœmissis quàm in conclusione.
Prob. Nullus enim terminus universalior esse débet in
conclusione quàm in prœmissis (148). Ergo saltem tôt
esse debent termini universales in preemissis quàm in con-
clusione. Sed médius terminus saltem semel universaliter
sumi débet (149), et non débet ingredi conclusionem (150).
Ergo &c.
152. Hinc, si sint duo termini universales in conclu-
sione, très esse debent in preemissis ; si duo sint tantùm in
prœmissis, uriicus débet esse in conclusione ; si unicus
sit in praemissis, nullus sit oportet in conclusione.
Régula quinta.
153. *' Utraque si.. . .&c.", id est, ex duabus negantibus
nihil concludi potest.
Prob. Quandô enim ambœ prsemissse sunt negantes, duo
extrema separantur à medio termino. Atqui ex eo quôd duo
extrema separentur à medio termino, non sequitur ea inter
se convenire aut disconvenire, Ergo. . . . &c. Sic ex eo quôd
homo non sit equus.et equus non sit rationalisa non sequitur
hominem non esse rationalem.
154. Saipè iieri potest ut propositio, quse extra syllogis-
mum esset negans, intra syllogismum sit affirmans. Sic
in hoc syllogismo ;
*' Qui non studet, non erit doctus ;
" Atqui Petrus non studet ;
*' Ergo Petrus non erit doctus."
Minor, '' Petrus non studet, " reverà est affirmans,
quamvis extra syllogismum sit negans. Nam médius ter-
minus idem débet esse in minore ac in majore (147),
Atqui in majore non est duntaxat studens, sed qui non
studet; Ergo ut idem sit médius terminus in utrâque prae-
missâ, minor sic resolvenda est ; "Petrus est ille qui non
LOGICA. 45
studet ;" vel, " Petrus est non studens,'* quœ propositio
evidenter est affirmans. Idem dicendum est de sequenti
syllogismo ;
*' Petrus non est miser ;
'* Atqui Petrus non est dives ;
" Ergo aliquis non dives, non est miser.
In quo minor, quee extra syllogismum est negans, in
hanc affirmantem resolvi débet ; " Petrus est non dives," ut
patet ex conclusione, in quâ non dives est minus extremum.
Obj. Illae propositiones sunt negantes in quibus reperitur
particula non. Atqui in propositionibus allatis. . . . &c.
Ergo. .. . &c.
Resp. Dist. Maj. Quando particula non cadit in copu-
lam ; conc. maj. Quando particula no7i cadit in subjectum
aut in attributum ; neg. maj. " Atqui in propositionibus
•' suprà allatis reperitur particula non ;" dist. min. Reperi-
tur particula non, sed hsec particula cadit in subjectum aut
in attributum, conc. min. Cadit in copulam, neg. min. et
consequentiam. Solutio patet ex dictis.
Inst. Syllogismus non mutât propositiones. Atqui extra
syllogismum propositiones sunt negantes. Ergo et intra
syllogismum.
155. Resp. Dist. Maj. Syllogismus non mutât proposi-
tiones quoad materiam ; conc. maj. Quoad formam, neg.
maj. Concessâ minore, dist. consequens, Intra syllogis-
mum debent esse negantes quoad materiam ; conc. conse-
quentiam. Quoad formam ; neg. consequentiam.
Sedulo igitur distinguenda est materia à forma in propo-
sitionibus. Materia propositionis sunt termini ex quibus
constat propositio. Forma est terminorum dispositio.
Reverà propositio mutari non potest in syllogismo quoad
materiam ; tune enim idem non remaneret sensus, sed mu-
tari potest quoad formam ; nam in syllogismo propositiones
secum invicem sunt comparandse. Atqui comparatio illa
aliquandô requirit ut propositiones mutentur quoad for-
miam ; quando scilicet idem se*sus ejusdem termini non
.servaretur in utrâque prsemissâ, aut in conclusione et in
unâ prœmissarum, et hsec mutatio légitima est, quia pro-
positionis non mutatur sensus, Ergo. . . .&c.
46 LOGICA.
Régula sexta.
156. *' Ambœ affirmantes. . . .&c.'', id est, ex duabus
affirmantibus non potest erui conclusio negans.
Prob. Quandô enini ambee prcemissse affirmant, duo ex-
trema junguntur cum medio termino. Ergo inter se jun-
guntur (146). Ergo conclusio débet esse affirmans (103,
144). Ergo &c.
Obj. Rectè concludit iste syllogismus ;
" Omnes sancti sunt felices ;
" Atqui omnes amici Dei sunt sancti ;
" Ergo qui non sunt felices, non sunt
" amici Dei."
Atqui tamen ex praemissis affirmantibus eruitur conclusio
negans. Ergo. . . . &c.
Resp. Dist. Min. Eruitur conclusio negans sequivalens
affirmanti ; conc. min. Eruitur conclusio reverà negans ;
neg. min. et consequentiam. Hœc enini conclusio huic
œquivalet affirmanti ; " Omnes amici Dei sunt felices ;"
alioquin non essent iidem termini in conclusione ac in prae-
missis. Ergo. . . . &c.
Régula septima.
157.'*Pejorem. . .&c.", id est, si una prsemissarum est ne-
gans, conclusio débet esse negans ; si una est particularis,
conclusio débet esse particularis.
Prob. la. pars. Nam quando una prsemissa est affir-
mans et altéra negans, unum extremum jungitur cum me-
dio termino, et alterum ab eo separatur. Ergo duo extre-
ma separantur (146). Ergo conclusio débet esse negans.
Ergo. . . . &c.
Prob. 2a. pars. Vel enim ambae prasmissîe affirmant, vel
affirmât una et altéra negat (153). Atqui in utroque casu,
si una prœmissa est particularis, conclusio débet esse par-
ticularis.
lo. Quidem si ambae praemissee affirmant, nam in dua-
bus prœmissis affirmantibus quarum una est particularis et
altéra universalis, unicus est terminus universalis, nempè
subjectum propositionis universalis (107). Ergo nuUus
débet esse terminus universalis in conclusione (152). Ergo
conclusio débet esse particularis.
LOGICA. ^
2o. Si ex duabus praemissis una sit negans. Namin du-
abus prœraissis quarum una est negans et altéra affirmans,
«na universalis et altéra particularis, duo sunt termini uni-
versales, nempè subjectum propositionis universalis et attri-
butum negantis. Erga unicus débet esse terminus univer-
salis in conclusione (152). Sed conclusio débet esse negans,
ex prima parte regulœ ; ergo conclusio erit particularis ne-
gans. Ergo. .. . &c.
Obj. Contra priraam partem regulse. Valent syllogismi ;
" Nihil est increatum quod non sit œternum ;
" Atqui Deus est increalus ;
*"' Ergo Deus est seternus."
" Quidquid non est corporeum, est spirituale ;
'* At(|ui anima non est corporea ;
" Ergo anima est spiritualis."
Atqui in istis syllogismis conclusio est affirmans, licèt
ima preemissarum sit negans. Ergo. . . . &c.
Resp. neg. min.quoad 2am. partem. Ad primum : major
est affirmans \ sic enira resolvi débet (154); " omne increa-
tum est œternum." Ad 2um ; minor est affirmans, sicque
resolvenda est; "anima est aliquid non corporeum, seu
quod idem est ; *' anima est non corporea." Ergo. &c.
Régula octava,
158. " Nil sequitur. .. .&c.", id est, ex duabus particu-
laribus nihil concludi potest.
Prob. Vel enira ambse prsemisspe affirmant, vel una
affirmât et altéra negat (153) ; atqui in utroque casu nulla
erui potest conclusio.
lo. Quidem si ambee praemisge affirmant. Nam in dua-
bus propositionibus affirmantibus et particularibus simul,
nullus est terminus universalis. Ergo médius terminus bis
particulariter sumeretur, quod fieri nequit (149). Ergo
••• . . &c.
2o. Si una prsemissa sit affirmans et altéra negans.
Nam in duabus praemissis particularibus quarum una est
affirmans et altéra negans, unicus est terminus universalis,
nempè attributum negantis (109. 110). Ergo nullus débet
esse terminus universalis in conclusione (152): atqui si
quaBdam esset conclusio, cùm debeat esse negans (157),
48 LOGICA.
ejus attributum foret universale ( 106). Ergo hsec conclusio
est impossibilis. Ergo. . . . &c.
II. De variis syllogismorum speciebus.
159. Syllogismus potissimùm dividitur in simplicem,
complexum et compositum.
Syllogismus simplex est il le de quo hue usque actum est.
Syllogismus complexus est ille qui constat propositionibus
complexis, et cujus prtEsertim conclusio est propositio com-
plexa, qualis est iste ;
'* Lex divina jubet honorare reges ;
" Atqui Claverius est rex ;
" Ergo lex divina jubet honorare Claverium."
Ut très termini istius syllogismi cognoscantur, sicque de
eo regulis suprà ailatis judicetur, propositiones ex activo in
passivum mutandœ sunt hoc modo :
" Reges sunt honorandi, id enim jubet lex divina; atqui
" Claverius est Rex. Ergo Claverius est honorandus."
Syllogismus complexus est ille cujus major est propositio
composita. Triplex distinguitur, nempè conditionalis,
disjunctivus et copulativus.
160. lo. Syllogismus conditionalis est ille cujus major
est propositio conditionalis, seu propositio quae duas com-
plectitur partes per particulam si conjunctas, quarum una,
qu?e conditionem includit, vocatur antecedens, et altéra
dicitur consequens ; talis est iste :
" Si Petrus studet, erit doctus ; atqui Petrus studet ;
" ergo Petrus erit doctus."
161. Valet syllogismus conditionahs quando in minore
affirmatur antecedens, ut ejus consequens affirmetur in con-
clusione, vel quando in minore negatur consequens majoris,
ut ejus antecedens negetur in conclusione ; hinc valent isti
syllogismi ;
" Si sol lucet, dies est ; -
" Atqui sol lucet ;
*' Ergo dies est."
" Si sol lucet, dies est ;
" Atqui dies non est ;
" Ergo sol non lucet." .
Ex hâc duplici régula nata sunt heec axiomata : " Verum
antecedens ; ergo et consequens ;" seu " Verum prius;
LOGfCA. 49
** ergo et posterius." " Falsum consequens ; ergo et an-
" tecedens."
162. Non valet syllogismus conditionalis, quando in mi-
nore affirmatur consequens, ut in conclusione affirmetur
antecedens ; vel quando in minore negatur antecedens, ut
in conclusione negetur consequens. Hinc non valent se-
quentes syllogismi ;
" *!f : Petrus studet, laudabitur ;
" Atqui Petrus laudabitur ;
" Ergo Petrus studet."
" Si negarem esse Deum, essem improbus ;
" Atqui non nego esse Deum ;
" Ergo non sum improbus."
163. 2o. Syllogismus disjunciivus est ille cujus major est,
propositio disjunctiva, seu duas complectens partes per
particulas aiit, vel, sive, sibi coUigatas.
Valet iste syllogismus quando una pars majoris afiSrma-
tur in minore, ut altéra negetur in conclusione ; vel quan-
do una pars majoris negatur in minore, ut altéra affirmetur
in conclusione. Hinc valent isti syllogismi :
" Vel sol vel terra movetur ;
" Atqui terra movetur ;
" Ergo sol non movetur."
" Vel mens humana est intelligens, vel cognoscere
** non potest bonum morale ;
** Atqui cognoscere potest bonum morale ;
'* Ergo est intelligens."
164. Non valet syllogismus disjunctivus, quando una pars
majoris affirmatur in minore, ut altéra in conclusione affir-
metur ; vel quando una pars majoris negatur in minore, ut
altéra negetur in conclusione ; vel denique quando datur
médium inter duo membra majoris. Hinc non valent se-
quentes syllogismi :
" Vel Petrus studet, vel est piger ;
" Atqui Petrus studet j
" Ergo est piger."
" Vel Petrus studet, vel est piger ;
" Atqui non est piger ;
" Ergo non studet."
50 LOGICA.
" Vel adest in brutis principium intelligens seu ideandi
" capax, vel bruta sunt niera automata ;
" Atqui nullum adest in brutis principium intelligens
" seu ideandi capax ;
** Ergo bruta sunt mera automata."
Non valet iste syllogismus, quia inter propositionis dis-
junctivae membra datur istud médium ; '' Adest in brutis
principium imaginandi et sentiendi capax, licèt principi-
um istud non sit intelligens, seu ideandi capax," et con-
sequenter, bruta non sunt mera automata.
165. 3o. Syllogismus copukUivus est ille cujus major est
propositio copulativa, seu plures habens partes conjunctio-
nibus et, ac, atque, &c. sibi unitas, v. g. '' nemo servire
" potest Deo et Mammonœ ; atqui avarus servit Mammo-
" nse ; ergo avarus non servit Deo."
Valet iste syllogismus quandô una pars majoris affirma-
tur in minore, ut altéra negetur in conclusione, ut in
exemplo allato : non valet autem, si una pars majoris
negatur in minore, ut altéra affirmetur in conclusione ;
hinc vitiosus est sequens syllogismus : '' Nemo servire po-
** test Deo et Mammon?e ; atqui popinator non servit
*' Maramonse ; ergo popinator servit Deo."
m. De communioribus sophismatibus.
166. Sophisma seu paralogîsmus est argumentum constans
propositionibus falsis, sed apparenter veris. Sophismata
quatuordecim preecipuè numerantur.
167. I. Fallacia grammatica est sophisma quod in vocum
ambiguitate consistit ; v. g. "Omnis canis latrat ; atqui
" quoddam sidus est canis ; ergo quoddam sidus latrat."
....*' Qui lepores (lepus-oris, lièvre) venantur, canibus
** indigent ; atqui oratores venantur lepores (lepor-oris,
" ornemens du langage); ergo oratores canibus indigent."
" . . . . Deus est itô/ç-wè ; atqui w^ig-Mè est abverbium ; ergo
'* Deus est adverbium."
168. 2. Fallacia accidentis est sophisma quo eruitur
conclusio absoluta ex eo quod est verum solummodô per
accidens ; sic quidam hteretici in dies festivos invehuntur,
ex eo quod videant illis diebus quosdam ebrios.
169. 3. Transitus à vero secundàm quid ad verum simpli-
citer, cùm eruitur conclusio absoluta à principio duntaxat
logica. 51
/ vero sub aliquo respectu ; v. g. ** Galli sunt levés ; ergo
" altioribus scientiis, quae maximam mentis attentionem
*' requirant, studere non valent."
170. 4. Fallacia compositionis et divisîonis, cùm fit tran-
sitas à sensu composito ad sensuni divisum, et vice versa,
à sensu diviso ad sensum compositum (118).
171. ô.Transitus à sensu collectivo ad sensum distributivum,
et vice versa, à sensu distributivo ad sensum collectivum ;
v. g. " Episcopi sunt infallibiles ; atqui Chrysanthus est
*• episcopus ; ergo Chrysanthus est infallibilis". ..." Sin-
"■ guli episcopi separatim non sunt infallibiles ; ergo
" episcopi in Concilium congregati non sunt infaUibiles."
172. 6. Transitus à génère ad genus, cùm probatur res
aliqua per principium generis omninô diversi ; v. g.
*' Miracula superant vires naturœ; ergo sunt impossibilia."
173. 7. Transitus à minus noto contra magis notum, cùm
quis argumentatur ex re minus nota ut impugnet rem
magis notam ; sic materialistee ex belluarum animis minus
notis argumentantur, ut probent animas nostras esse
materiales.
174. 8. Ignorantia quœstionis seu Elenchi, cùm aliquid
probatur quod in quaestione non est, ut si quis probare
vellet Summum Pontificem esse infallibilem, dû m proban-
dum esset adesse in Ecclesiâ Romanâ judicem infallibilem."
175. 9. Petitio principii, cùm suppcnitur ut probatum
quod est probandum ; ut si quis probaret terram circa solem
moveri, quia ipse sol quiescit.
176. 10. Circulus vitiosus, cùm quis, in eâdem quœstione
et contra eosdem adversarios disputans, duas propositiones
per se invicem probare conatur ; v. g., si quis contenderet
lo. evidentiam esse infallibilem, quia Deus est summè
verax, et 2o. Deum esse summè veracem, quia illud est
evidens.
1 77. 1 1. Argumentum de falso supponente ,ciim aliquid sup-
ponitur tanquàm verum, quod reipsà est faisum ; taUs foret
sequens argumentatio : "si essent antipodes, verso in
'' terram capite deambularent ; ergo non sunt antipodes."
178. 12. Non causa pro causa, cùm quis ex eo quod non
est causa, argumentatur quasi esset causa. In hujusmodi
sophisma duphci praesertim modo labuntur homines incauti ;
lo. quando, vel per ignorantiam, vel ne ignari videantur,
D 2
52 LOGICA.
vanas et fictitias assignant efïectibus causas ; sic, v. g., rudes
magicis artibus tribuunt naturales efFectus quorum veras
causas detegere non valent ; 2o. quando pro causa datur
quod efFectum duntaxat prœcedit ; sic ratiocinari soient
pîurimi, post hoc, ergo yropter hoc; v. g., quia magna
interdùm contigerunt infortunia, his circiter temporibus
quibus cometœapparuerunt, vel aliud cœleste pbœnomenon,
multi existimaverunt cometas esse causas subsequentium
morborum, bellorum, pestilentics et aliarum calamitatum.
179. 13. Enumeratio parliiim imperfecta, cùm ex une aut
ex altère aliquid universale colligitur ; sic ex eo quod
plurima sint nobis incognita, concludunt sceptici nihil à
nobis certo cogncsci. In quotidiano vitse usu, innumeri
occurrunt hujusmodi paralogismi. Sic, v, g,, si quis serael
aut iterùm imprudenter sese gesserit, universim concluditur
illum ese imprudentem ; sic pariter ex eo quôd sub emen-
titse pietatis larvâ quidam homines turpia tegant vitia,gene-
ratim inferunt libidinosi pietatem meram esse hypocrisim.
180. 14. Figura dictionis, seu transitus à re ad modum ;
V. g., " quos habuisd pedes, nunc habes ; atqui puer par-
" vulos habuisti pedes ; ergo nunc habes parvulos pedes."
CAPUT QUARTUM.
DE QUARTA MENTIS OPERATIONE, SEU DE METHODO.
li/J ETHODUS est quarta operatio mentis quâ ce-
181. t/r_# gitationes suas, judiciaet ratiocinia eo disponit
ordine qui aptior sit ad ignotam veritatem detegendam, vel
ad eam cognitam aliis faciliùs manifestandam ; undè duplex
est, analytica scilicet et synthetica.
182. Methodus analytica est dispositio cogltationum
mentis ad inveniendam veritatem ; procedit à singularibus
ad generaliora, à consectariis ad principia. Adhibetur
prœsertim ad solvendas qusestiones problematicas ; hinc vo-
catur methodus resolutionis et inventionis.
183. Methodus synthetica est dispositio cogltationum
mentis ad demonstrandam veritatem ; procedit à generalio-
ribus ad singularia, à principiis ad consectaria ; vocatur
etiam methodus compositionis et doctrinœ.
Sunt utrique leges communes, sunt et propriœ, quas
priusquàm exponamus, dicendum est quid sit Dejinitio et
quid sit Divisio. Itaque
LOGIC A. ')3
I. De Dcfinitione.
184. Ut cognoscatur quid sit Definitio, cognosci débet
quid sit esseidia rei.
Essentia seu natura rei alicujus est complexio attributo-
rum sine quibus res illa nec esse nec concipi pote-^t. Sic
triangulus ità constat tribus aagulis tribusque lateribus, ut
sine his nec existere nec concipi possit. Duee sunt in es-
sentia partes, genus et differentia.
185. Genus est pars essentiss communier quâ res aliqua
convenit cum aliis rébus. Genus autera aliud est proximum
et aliud remotum.
Genus proximum est illud per quod res convenit proximè
cum paucis aliis rébus ; v. g. intelligentia in homine est
genus proximum, Genus remotum est illud per quod res
convenit cum multis aliis rébus ; v. g., substantia in homine
est genus remotum,
186. Differentia est pars essentiœ specialior per quam res
distinguitur ab aliis rébus. Duplex est, 3.\ia. proxiraa, alia
remofa. Dïf^erent'ia proxima rem distinguit ab omnibus aliis
rébus ; v, g., cùm dico ; " homo est intelligentia cui mi-
nistrant organa," secerno hominem ab omni quod non est
homo. Differentia remota rem discriminât tantùm ab aii-
quot rébus ; v. g., cùm dico ; " angélus est spiritus cre-
atus/' secerno angelum à Deo, qui est spiritus increatus,
sed eum non secerno à mente humanâ, quœ pariter est spi-
ritus creatus,
187. Rei genus et differentia dicuntur prindpia rei constû
tutiva, seu attributa rei primaria, quia tribuu.ntur ante
omnia alia attributa, quœ ideô secunduria vocantur. Kis
preemissis
188. Definitio est oratio expiicans quod est obscurum in
re vel in nomine ; undè duplex est, alia nominis,, alia rei.
Definitio nominis ea est quîe vocissigniticaiionem exponit,
juxta vulgareset receptas sermonis leges. Definitio rei est
oratio expiicans naturam seu essentiam rei ; ut sit légitima
quatuor requiruntur conditiones.
189. I. Ut sit c/ara, alioquin rei naturam non explicaret.
IL Ut sit brevis, id est, ut in eâ nulli sint termini redun-
dantes, Hinc peccaret ista definitio ; " homo est intelligen-
" tia ideandi capax cui ministrant organa ;" vox euim ide-
, andi capax continetur in voce intelligentia. III. Ut sit
54 LOGICA.
reciproca, id est, ut omni et soli rei definitse conveniat ;
hinc peccarent istae definitiones : " mens humana est spiri-
*' tus creatus ;" " circulus est figura plana." IV. Ut con-
stet génère proximo et difFerentiâ proximâ, id est, ut ex-
primat attributa rei primaria.
II. De Divisione.
190. Divisio est totius in suas partes distributio. Divisio-
nis très sunt doles. I. Ut sit adc^quata, id est, partes seu
membra divisionis debent adsequare totum. Hinc divisio
quadrupedum in boves, canes et leones, peccaret, quia alii
sunt quadrupèdes. IL Ut membra divisionis sint opposita,
id est, ut unum membrum non includatur in altero ; hinc
non valet divisio entis (de l'être) in substantiam, corpus et
spiritum ; corpus enim et spiritus includuntur in substan-
tiâ. III. Ut membra divisionis sint quàm paucissima, ut
vitetur confusio.
III. Leges analysi etsynthesi communes.
191. I. Nulli rei prcebeatur assensus, nisi perspectce.
II. A minus difficilibus ad difficiliora sensim progrediatur.
III. In omnibus inquisitionis gradibus adhibenda est sedulo
comes evidentia, nec ab unâ propositione ad alteram dela-
bendum est, nisi quâdam continuatione priori connexa sit
et alligata.
IV. Leges Analysis.
192. I. Diligenter observetur et determinetur status
quœstionis ; certa ab incertis cautè separeniur ; circum-
stantiœ inutiles omninô circumcidantur ; ipsaque quœstio
Claris, intelligibilibus et quàm paucissimis fieri poterit verbis
exprimatur.
II. Diversoe cogitationes quasstionem necessariô ingredi-
entes separentur, ità ut quaestio in plures alias particulares
resolvatur. Istius resolutionis ope difficultas examinis mi-
nuitur et sœpè omninô tollitur.
III. Quœrantur cogitationes et rationes ope quarum pe-
culiares qusestiones solvi possint, et singulae ad palmarem
prsecipuamque reduci.
IV. Tamdiii singularum qucestionum examini inhseren-
dum est, quamdiia satis est ut jure credamus singula à nobis
perspecta fuisse.
LOGICA. Ô5
V. Leges Syntheseos.
193. I. Ordiatur à definitionibus vocum, ne aliqua sit in
posterum aequivocatio. A definitionibus datis non est rece-
dendum. Pariter ssepè à definitionibus rerum ordiendum
est, ut res clariùs et distinctiùs intelligantur.
II. Deindè axiomata sunt stabilienda ex quibus ratioci-
nia deducantur, quorumque medio ad veritatis qusestionisve
solutionem perveniatur. Si per se clara non sunt, explicari
vel demonstrari debent.
m. In ratiociniis conclusiones tanliim erui debent ex^
axiomatibus,vel ex propositionibus praemissis et probatis^nec
ista conclusionum et probationum sibi connexarum peren-
nitas deserenda est, donec tandem in sufficienti lamine pro-
posita qusestio fuerit collocata.
QucC omnia ut faciliùs intelligantur, exemplum utriusque
methodi subjiciemus.
194. Problema invenienduni analysis ope ; utrùm mens
humana judicet, ex eo quôd res sibi reprœsentare possit.
Resol. Quisquis res sibi repraesentat, habet cogitationes.
Quisquis habet cogitationes, unam tantiim, vel duas, vel
plures habet cogitationes. Quisquis unam tantùm, vel
plures. . . . &c., illas cogitationes alias ab aliis distin-
gu't. Quisquis cogitationes alias ab aliis distinguit,
illas comparât. Quisquis cogitationes comparât, aii-
quam inter eas convenientiam aut disconvenientiam per-
cipit. Quisquis convenientiam aut disconvenientiam in-
ter cogitationes percipit, illas jungit quandô inter se con-
veniunt, aut séparât quando non conveniunt. Quisquis
jungit cogitationes quando inter se conveniunt, aut séparât
quandô non conveniunt, judicat. Ergo mens humana
judicat.
195. Theorema demonstrandum syntheseos ope, scilicet
mentem humanam judicare, ex eo quod res sibi reprai-
sentet.
Prob. Nam judicare est jungere cogitationes quandô in-
ter se conveniunt, aut illas separare quandô non conveni-
unt : atqui mens humana potest. .. .&c. Ad hoc enim
satis est, si inter illas convenientiam aut disconvenientiam
percipere possit: atqui.... &c. Ut enim hanc conveni-
entiam aut disconvenientiam percipere possit, sufficit si co-
gitationes comparare queat ; atqui &c. Ut enim eas
56 LOGICA.
comparare possit, requiritur tantùm ut alias ab aliis distin-
guere vaîeat ; atqui. . . . &c. Ut enim cogitationes alias
ab aliis distinguere possit, requiritur solùm ut habeat unam
tantùm, aut duas, aut plures cogitationes ; atqui mens hu-
mana. . . . &c. Ut enim unam tantiim. . . . &c , sufficit si
habeat cogitationes ; atqui mens humana habet cogitatio-
nes ; nam habere cogitationes, est res sibi repra?sentare :
atqui mens humana res sibi repraesentat. Ergo mens hu-
mana judicare potest.
CAPUT QTJINTUM.
DE MOTIVIS INFALLIBILIBUS JUDICIORUM NOSTRORUM.
H M sunt regulae quce communiter traduntur in
Logicis ad dirigendas mentis operationes ;
verùm quidquid sit de hujusmodi regulis, vana foret et
inutihs veritatis inquisitio, si nulla darentur principia
certa, quibus innixi tutè et securè illam assequi possemus.
Quapropter investiganda sunt certitudinis nostree princi-
pia, seu motiva infallibilia judiciorum nostrorum.
197. Septem sunt heec prœcipua motiva, scilicet lo.
Sensiis intimus, 2o. Evidentia, 3o. Sensuum relatio, 4o.
Testimonîum hominiim, 5o Memoria, 60. Revelatio divma,
7o. Analogia. Hinc septem nascuntur articuli, quibus
octavum addemus de Dubio scepticorum. Sed antequàm
deveniamus ad hsec motiva, abs re non erit, si breviter
exponamus novas quorumdam philosophorum opiniones
circa fundamentum certitudinis, seu ut aiunt, circa Crité-
rium veritatis.
198. Cartesius principium istud ut générale statuit,
** quidquid ità clarè et distincte percipitur, ut quodlibet
" dubium sit impossibile, habendum est ut verum."
Ex hoc principio plures alias deducit veritates, scilicet,
distinctionem mentis et corporis, Dei existentiam, corpo-
rum in génère et aliorum hominum existentiam, &c.
Veritates sic demonstratas recognoscit veluti totidem prin-
cipia quae ad alias veritates demonstrandas sibi inservirent,
&c. Sic, juxta Cartesium et omnes philosophos qui ejus
doctrinam tenent, Critérium veritatis est sola evidentia, id
est, perceptio seu visio veritatis tam clara et distincta ut
quodlibet dubium sit impossibile.
LOGICA. 0/
199. Lockius, Abbas Condillac et eorura asseclœ con-
tendunt cunctas cogitationes nostras oriri à sensibus (14.
15); hinc concludunt auctoritatem sensuum esse funda-
mentum totius certitudinis, licèt evidentiam summoperè
sibi vindicent et ad eam jugiter recurrant. Panai les
Philosophes, " les uns, inquit Abbas de la MennaiSj ont
*' placé dans les sens le principe de certitude; c'est
" le système de Locke, Gondillac, Helvétius, Cabanis ; sys-
" tème matérialiste, et dès-lors essentiellement sceptique;
" aussi ses partisans, qui ne reconnaissent que des êtres
" matériels, ont-ils fini par soutenir qu'on peut douter de
" l'existence de la matière elle-même." Défense de l'Essai
sur Vindifférence en matière de Religion, pag. 23.
200. Emmanuel Kant ('a >> contendit nostras impressio-
nes internas, seu ut ipse vult, unitatem personalem, intel-
lectualem et absolutam esse fundamentum totius certitudi-
nis. Systema suum ità obscure evolvit, ut ad mentem suam
illud interpretari possit quisque Deista.
" D'autres philosophes^ inquit D. de la Mennais, ibidem,
" ont cherché dans nos impressions internes la base de la cer-
*' titude. Mais nos sentimens n'ayant de rapport nécessaire
'* qu'à nous,ces philosophes ont été d'abord conduits à dou-
'* ter de la réalité des objets extérieurs, et bientôt après de la
" réalité de leurs sentimens même. C'est l'idéalisme
*' enseigné par Kant et modifié par ses disciples. Sous
" quelque forme qu'on le présente, ce système n'est,
*' comme le précédent, que le scepticisme pur."
201. D. de la Mennais in opère cui titulus ; Essai sur
Vindifférence en matière de Religion, tom. 2. an. 1822, et
in opère suprà laudato ; Défense de V Essai sur Vindiférence
en matière de Religion, an. 1821, doctrinas Lockii, Abbatis
Condillac et Kant, quoad cognitionum nostrarum funda-
mentum totis viribus profligat ; deindè consueta judiciorum
nostrorum motiva prorsiis rejicit ut insufiicientia et sœpè
ut nos fallentia, affirmatque solam auctoritatem seu sen-
sum communem generis humani esse regulam veritatis om-
ninô infallibilem seu fundamentum certitudinis, et conse-
quenter, esse critérium veritatis,
202. Ut suam stabihat doctrinam, docet auctor homi-
nem seorsim sumptum nullius certitudinis esse capacem, et
(a) Emmanuel Kant, professeur de Philosopliie à Kœnigaberg en Pmsse, naquit dans
cette ville en 1724, et y mourut en 1804.
58 LOGICA.
eum neque per sensus ( par les sens et par les sensations
qu' ils font naître), neque per mentis affectiones [les sentimens) ,
neque per ratiocinium ad veritatem unquàm infaliibiliter per-
venire posse (a). Nec excipit quidem veritates mathema-
ticas, et contendit illas absolutè demonstrari non posse ope
ratiocinii et evidentise (pag. 33).
203. His positis, auctoritatem generis humani assignat
tanquàm critérium veritatis et solam regulam infallibilem
judiciorum nostrorum. ** Le consentement commun, sen-
'* sus communis, inquit, est pour nous le sceau delà vérité;
*' il n'y en a point d'autre." Essai, tom. 2. pag. 29. Haec
autem auctoritas generis humani testatur Deum existere et
eum esse summè perfectum, et consequenter eum esse infi-
nitam veritatem et totius certitudinis fundamentum. Audi-
atur ipse D. de la Mennais ; " L'existence de Dieu étant
*' admise, l'homme éclairé d'une nouvelle luaiière, aper-
*' çoit clairement la raison des faits, qu'il était obligé de
" reconnaître sans pouvoir les expliquer .... La raison géné-
" raie des hommes ou la raison humaine est donc la règle
" de la raison particulière de chaque homme, comme la
" raison de Dieu primitivement manifestée, est le principe^
" et la base de la raison humaine ; et l'on ne détruit pas
*' plus la raison individuelle en lui donnant une règle hors
" d'elle-même, qu'on ne détruit la raison générale, en la
*' rappelant à son origine qui est Dieu. . . .La doctrine du
" sens commun considère l'homme tel qu'il est, dans son
" état naturel, c'est-à-dire, croyant mille et mille choses ;
" et partant de cette foi invincible, elle lui dit : seul tu peux
" te tromper ; mais compare tes croyances à celles des autres
" hommes, et regarde comme vrai ce qu'ils croient tous ; car
'' si la raison universelle, la raison humaine pouvait errer, il
** n'existerait pour l'homme ni vérité ni certitude. Là, nul
" embarras, nulle contradiction ; et cette règle est telle-
*' ment vraie, tellement conforme à notre nature, qu'il est
•* impossible de ne la pas suivre en tout ce qui tient à la
" vie physique et aux relations sociales ; et la société pé-
" rirait, si l'on y substituait la règle philosophique," le
doute méthodique de Descartes, Défense de VEssai, pag.
14G. 148, et la note.
fa) " Les seuls moyens de connaître que chacun trouve en soi, sont les sens, le sentiment
'• et le raisonnement, Essai, tom. 2. pag. 5. . , .Le seniiment, et sous ce nom je comproiuls
" l'évidence, n'est pas une preuve plus certaine de vérité que les sensations.". Ibid,
" pag. 12.
LOGICA. 59
204. Hinc, juxta D. de la Mennais,quantumvis claram et
lucidam cognitionem habeat quisque privatus, seorsim ab
omnibus aliis consideratus,illius tamen convictio non potest
esse nisi certitudo provisoria et incojnpîeta, si consentanea
non fuerit sententiis omnium aliorum hominum, et non lu-
erit ab eis approbata (a).
205. Hœc doctrina aliis visa est nova, inutilis, periculosa
et noxia, ideoque rejicienda ; è contra, pluribus aliis ma-
gnoperè arrisit, quia sensu catholico eam interpretabantur.
Nunc verô, heec doctrina nullo modo propugnari et defendi
potest à viro catholico, siquidem ab hodierno nostro Summo
Pontifice Gregorio XVI, in Epistolâ Encyclicâ (ô), édita die
25à Junii, an. 1834, prohibita est tanquàm novum et fallax
philosophiae systema, plané improbandum, quo queeritur
Veritas extra Catholicam Ecclesiam, id est, " quo ex pro-
jectâ et efFrenatâ novilatum cupiditate veritas, ubi certo
consistit, non quœritur, sanctisque et apostolicis tradi-
tionibus posthabitis,doctrinse aliœ inanes, futiles incertae-
que, nec ab Ecclesiâ probatseadsciscuntur, quibus verita-
tem ipsam fulciri, ac sustineri vanissimi homines perpe-
ràm arbitrantur."
Episcopi Gallicani communi plausu hanc Encyclicam
receperunt et promulgârunt, systemaque philosophicum D.
de la Mennais documentis publicis prohibuerunt.
His dictis, deveniamus ad singula motiva infallibilia judi-
ciorum nostrorum,
I. De sensu intimo.
206. Sensus intimus est conscicntia quam mens habet
suî ipsius et suarum affectionum (7) . Dicitur etiam consci-
cntia, seu nostrt scientia.
Certum est sensûs intimi nullam esse vim ad cognoscen-
dam rerum extra nos positarum essentiam. Status igitur
quaBstionis est utrùm sensus intimus infallibilem habeat
connexionem cum veritate judiciorum quse ferimus circa
prsesentem animae nostrœ statum, vel, quod idem est, utrum
certa sintjudicia sensu intimo verè innixa. Hispositis, sit
(a) " D. de la Mennais suam melhodum cum metliodo catholicorum adversus hasreticos,
et auctoritatera ab ipso invocatam ciim auctoritate Ecclesine soepè sscpiùs comparât ; atia-
men inter utramque ingens datur discrimen ; nam lo. utriusque auctoritaiis exisientia eodem
modo demonstrari non potest ; 2o. clarè et distincte loquiiur Ecclesiâ, non iiù verù genua
humanum ; 3o. privilegio divine ceitissimè concesso et jugiter permansuro infallibilis est Ec-
clesiâ ; auctoriias ver6 generalis, nobis exhibita, non eodem modu loquiiur, neo singulari
hoc iiifallibilitatis privilegio divinitùs concesso donatur.
fb) Hàc Encyclicâ Sumraus Pontifex reprobat et damnât libelium moli quidem exiguum,
pravilate tamen ingentem, cui titulus, Paroles d'un Croyant, h D, de la Rlennais pervul-
gatum.
GO LOGiCA.
Propositio,
207. Sensus intimus est motivum infallibile judicandi de
prcesenti animae nostraî statu.
Prob. Idem eniai non potest esse simul et non esse : at-
qui idem esset simul et non esset, si sensus intimus non
esset motivum infallibile. . . .&c. Nam quandô judicamus
de preesenti animse nostrœ statu, aliquid sentimus ; atqui
si judicium quod tune ferimus posset esse falsum, possemus
non sentire quando sentire supponimur ; ergo idem esset
simul et non esset. Ergo .... &c.
Solvuniur objectiones.
Obj. lo. Ilîud non est motivum infallibile judicandi,
quod potest ad judicium falsum impellere ; atqui sensus
intimus potest. . . . &c. Ergo. . . .&c.
Resp. Neg. min. Absolutè enira répugnât ut, dùm senti-
mus, non sentiamus.
Inst. lo. Ex duobus judiciis contradictoriis unum est
necessariô verum et alterum necessario falsum ; atqui sen-
sus intimus potest impellere ad duo judicia contradictoria
circa praesentem animée statuai. Ergo. .. . &c.
Resp. Neg. min. Nam si sensus intinms impelle-
ret ad duo judicia contradictoria circa eumdem aniraœ sta-
tum, eadem affectio existeret in mente simul et non existe-
ret, quod répugnât. Ergo. . . . &c.
Inst. 2o. IIa3C duo judicia, ego caleo, ego non caleo,
sunt contradictoria ; atqui sensus intimus potest impellere
ad haec duo judicia. Ergo. . . . &c.
Resp. Dist. Maj. Ha^c duo judicia, ego caleo, ego non
caleo, sunt contradictoria, si proferantur ab eodem homine,
eodem tempore, et sub eodem respectu ; conc. maj. Si pro-
ferantur à diversis hominibus, aut ab eodem homine, sed
diverso tempore, vel sub vario respecta ; neg. maj. " Atqui
*' sensus intimus potest. . . . &c". Dist. Min. Potest impel-
lere diverses homines,.,vel eumdem hominem, sed diverso
tempore, aut sub vario respecta ; conc. min. Potest impel-
lere eumdem hominem, eodem tempore et sub eodem re-
spectu ; neg. min. et consqam. Solutio patet ex dictis.
Inst. 3o. Sit homo qui sinistrâ ignem, dextrâ vero gla-
ciem tangat ; atqui hic homo eodem tempore et sub eodem ,
respectu hœc duo judicia, ego caleo, ego non caleo, proferet.
Ergo. . . . &c.
LOGICA. 61
Kesp. Neg. min. Ibi enim divers! sunt respeclus, ubi
variœ sunt corporis partes ad quarum occasionem proferun-
tur heec duo judicia, ego caleo, ego non caleo ; atqui ex hy-
pothesi varise sunt corporis partes ad quarum occasionem
.... &c. Ergo. . . . &e.
Inst. 4o. Ex illâ responsione sequeretur mentem posse
simul et eodem tempore plures experiri sensationes ; atqui
istud est impossibile. Ergo nuUa responsio tua.
208. Resp. Neg. maj. Nihilominiio enim vera esset rcr
sponsio mea, quamvis sensationes plures non existèrent
simul in anima, sed tantâ celeritate sibi succédèrent, ut ne
minimum quidem inter illas percipi posset intervallum,
quod prorsùs ignoramus, quia naturam animœ nostree non
satis cognoscimus.
Obj. 2o. Sensus intimus ssepè testatur somniantibus et
delirantibus, v. g., se videre magnificas sedeSj se audire
concenlus musicos, &c. Atqui tamen neque vident, neque
audiunt. Ergo. . . . &c.
209. Resp. Neg. min. Vident enim intùs, audiunt
intiis : ergo eodem modo afRciuntur ac si reipsà oculis vidè-
rent et auribus audirent ; et istud nihil contra nostram
assertionem probat, siquidem sensus intimus de praesenti
animae nostrse statu nos tantùm admonet, non verô de re- '
bus extra nos positis (206).
Inst. Aliquandô judicamus in somno nos vigilare. Atqui
istud judicium sensu intimo nititur. Ergo. . . . &c.
Resp. Dist. Maj. Aliquandô judicamus in somno nos
vigilare, sed expeditam conscientiam vigilise non liabemus ;
conc. maj. Et expeditam conscientiam vigiliœ habemus; neg.
maj. Etenim ubi primiim expergefacti sumus, clarè adver-
timus nos sommasse et nunc vigilare, sicque statum vigilise
à statu somni aut deliramenti perfectè distinguimus. Prae-
tereà motiva infallibilia judicandi ad solos vigilantes sanae
mentis, non autem ad sommantes et délirantes spectant.
Obj. 3o. Miles in acie acriter certansvulneratur et vul-
nera non sentit ; atqui, si sensus intimus esset motivum
infallibile judicandi, ipsi dolorem referre deberet. Ergo. . &c.
Resp. Neg. min. Miles enim tune omnem attentionem
suam ad arma et certamen confert ; nullam verô ad sui
corporis et mentis statum. Ergo nullus est ei sensus inti-
mus de vulnere ; ergo sensus intimus non débet ei
referre hune dolorem. Ergo. . . . &c.
ê2 LOGICA.
Obj. 4o. Homo cui araputatum est brachium sibi videtur
dolere ab eâ parte quse in eo jàm non est. Atqui ab eâ
parte quae jàm in eo non est, dolere nequit. Ergo. . . . &c.
Resp. neg. consqara. Ex eo quod enim homo iste sibi
videatur dolere in brachio, non sequitur sensum intimum
non esse motivum infallibile judicandi ; non enim ei dicit
sensus intimus se dolere in brachio, sed tantùm se dolere ;
huncque dolorem iste homo praecipitanter, per consuetu-
dinem et nervorum correspondentiam refert ad brachium
in quo non est. Ergo. . . . &c.
Scholium.
210. Sœpè fit ut vox sensûs intimi vix audiatur à mente,
vel quia debilior est, vel quia distrahitur vividioribus im-
pressionibus, vel prsefocatur prîejudiciis. Priusquàm
igitur judicemus de alicujus impressionis praesentiâ, versiis
illam convertenda est omnis attentio nostra ; aliter sœpè
decipi possemus.
II. De Evidentid.
211. Evidentia est perceptio seu intuitio convenientise
aut disconvenientiœ cogitationum inter se ità clara et di-
stincta, ut etiam inviti, ad assensum illi praebendum rapi-
amur.
Proposîiio.
212. Evidentia est motivum infallibile judicandi de con-
venientiâ aut disconvenientiâ cogitationum inter se.
Prob. lUud est motivum infallibile judicandi de conve-
nientiâ aut. ...&c., quod nunquàm fallere potest circa
convenientiam aut disconvenientiam cogitationum inter se:
atqui evidentia nunquàm fallere potest circa. . . . &c. Nam
eadem convenientia aut disconvenientiâ cogitationum inter
se non potest esse simul et non esse ; atqui si evidentia
falleret circa. . . . &c., eadem convenientia aut disconve-
nientiâ cogitationum inter se esset simul et non esset : lo.
quidem esset, cùm perciperetur, et cùm prius sit esse quàm
percipi : 2o. non esset, cùm mens banc convenientiam aut
disconvenientiam percipiendo falleretur. Ergo si evidentia
falleret circa. . . . &c., eadem convenientia aut disconve-
nientiâ cogitationum inter se esset simul et non esset.
Ergo. . . . &c.
LOGICA. G3
Soîvuntur ohjectiones.
Obj. lo. Evidentia non est motivura infallibile judi-
candi. . . &c., si aliquando abesse potest quandô judicatur
adesse : atqui evidentia aliquando abesse potest quandô
judicatur adesse. Ergo. . . . &c.
Resp. Dist. Maj. Evidentia non est. . . . &c., si aliquando
abesse potest, quandô judicatur adesse post maturum exa-
men et cum fundamento ; conc. maj. Si praecipitanter et
sine fundamento judicatur adesse ; neg. maj. Dist. pariter
Min. Evidentia abesse potest, quandô praecipitanter et
sine fundamento judicatur adesse ; conc. min. Quandô post
maturum examen et cum fundamento judicatur adesse;
neg. min. et consqam. ob rationes allatas.
Inst. Saepiùs accidit ut duo philosophi disputent et uter-
que credat affulgere sibi evidentiam : atqui tamen istud est
impossibile; ergo evidentia potest abesse, cùm judicatur
adesse etiara post maturum examen et cum fundamento.
213. Resp. Dist. Maj. Ssepiiis accidit. . . . &c., quia prae-
cipitatione et prœjudiciis abripiuntur ; conc. maj. Etiam
cùm sapienter et cum legitimo fundamento judicant, neg.
maj, Concessâ minore, nego consequentiam.
Fateor equidem in disputationibus invocari saepiùs evi-
dentiam, et tamen in errore versari disputantes ; id verô
accidit, quia praecipitatione abrepti, vanâ gloriâ aut aliis
motivis obcaecati homines, contra apertam lucem obstina-
ciùs pugnant. Si maturum examen adhiberent, si praeju-
dicia deponerent, brevi recognoscerent se aut de re eâdem
litigare^ aut non satis omnes explorasse respectus, Ergo
&c.
Obj. 2o. Illud non est motivum. . . . &c., cujus necessaria
cum veritate connexio demonstrari non potest. Atqui. . , ,
&c. Ergo. . . . &c.
214. Resp. Dist. Maj. Illud non est motivum. . . . &c.,
cujus necessaria cum veritate connexio neque directe neque
indirecte demonstrari potest ; conc. maj. Cujus necessaria
cum veritate connexio demonstrari non potest directe tan-
tùm ; neg. maj.
Illud directe demonstratur, quod ope alicujus medii à se
distincti et magis noti demonstratur ; illud indirecte demon-
stratur, quod demonstratur per suî explicationem et evolu-
64 LOGICA.
tionem, qu?e quidem evolutio, cura attentionem mentis
excitet, persuasionem générât et perficit.
Rêvera illud non est motivum. . . . &c., cujus necessaria
cum veritate connexio neque directe neque indirecte demon-
strari potest; sed nego illud non esse motivum. . ..&c., cujus
necessaria. . . . &c. demonstrari non potest directe tantiim :
proprium est enim régulée fundamentalis non posse directe
demonstrari, quia primum principium nihil seipso clarius
admittit.
*' Atqui evidentiae connexio cum veritate demonstrari
" non potest ;" dist. min. Demonstrari non potest directe,
conc. min. Indirecte, neg. min. et consqam. Istud
enim indirecte demonstratur quod, quando explicatur aut
evolvitur, ità clarè et distincte percipitur, ut illud omnes,
et etiam inviti, admittere cogantur : atqui omnes coguntur
admittere evidentiam necessariam habere cum veritate con-
nexionem, ut patet ex multis propositionibus evidentibus ;
v. g., " totum est majus suâ parte ;" ** quod est, est ;"
" idem non potest esse simul et non esse," &c. Ergo
&c.
Obj . 3o. Evidentia non habet necessariam cum veritate
connexionem. Ergo non est motivum. . . . &c.
Resp. Neg. ant. Si enim evidentia non haberet. . . . &c.,
eadem convenientia posset esse simul et non esse (212),
quod répugnât.
Inst. lo. Illud non habet necessariam cum veritate con-
nexionem, sine quo potest esse veritas. Atqui sine eviden-
tia potest esse veritas. Ergo evidentia non habet. . . . &c.
215. Resp. Neg. maj. Ut enim evidentia necessariam
habeat cum veritate connexionem, hoc solum sufRcit, '* ut
** quidquid est evidens, sit pariter verum ;" seu quod
idem est, *' ut evidentia non possit esse sine veritate ;" non
autem requiritur, " ut quidquid est verum, sit pariter evi-
" dens ;" seu quod idem est, " ut veritas non possit esse
*' sine evidentia."
Inst. 2o. Evidentia competit rébus falsis. Ergo potest
esse sine veritate.
Resp. Dist. Ant. Evidentia competit rébus falsis cognitis
ut falsis ; conc. ant. Cognitis ut veris, neg, ant. et conse-
quentiam. Reverà evidentia competit rébus falsis cognitis
ut falsis, (juia mens tune percipit repugnantiam ubi reipsà
LOGICA. 65
adest repugnantia ; secl evidentia non potcst competere
rébus falsis cognitis ut veris ; tune cnini perciperetur con-
venientia, ubi adesset repugnantia, id est, impossibile per-
ciperetur ut possibile, quod répugnât (33).
Obj. 4o. NuUum datur médium quo admoneri possimus
de prœsentiâ evidentiae. Ergo evidentia non est moti-
vum. . . . &c.
21 G. Resp. Neg. ant. Evidentia enim seipsam manifes-
tât, ac proindè non indiget alio medio quo manifestetur ;
quemadmodùm lumen non indiget alio lumine ut admonea-
mur de ejus prœsentiâ.
'' Les idées que l'on <ipipe\\e premières, inquit D. Frays-
" sinous, brillent de leur propre clarté : elles frappent -l'es-
" prit de leur éclat, comme le soleil frappe l'œil de ses
" rayons. Où est l'homme qui puisse résister au sentiment
*' de sa propre existence, et ne pas croire qu'il existe? Ces
" vérités résistent à toute sorte de preuves : on les expose,
"'on ne les démontre pas, faute de pouvoir partir d'un
" principe plus lumineux qu'elles-mêmes. On ne peut pas
" plus les combattre avec succès que les prouver ; on y est
'^ ramené sacs cesse par le penchant impérieux de la na-
*' ture. Voilà ce qui fait dire à Pascal ces paroles éner-
" giques : // est une force de vérité invincible à tout le
** scepticisme ; il y a une impuissance de démontrer invincible
" à tout le dogmatisme. Un des caractères des vérités ^re-
" mièrcs, telle que celle de notre existence individuelle, est
"■ d'être si évidentes qu'elles ne puissent pas être prouvées
" par un principe plus évident ; et c'est précisément par-
" ce qu'elles sont la base de tous les raisonnemens, qu'elles
" ne sont pas susceptibles d'être raisonnées." (Conférence
de la Vente', tom. 1. pag. 55)-
Inst. Evidentia non habet characteres proprios. Ergo
admoneri non possumus de ejus praesentiâ.
Resp, Neg.ant. Characteres enim evidentiae proprii sunt
hœc perceptio seu intuitio convenientite aut disconvenientire
cogitationam inter se ità clara et distincta, ut etiam inviti
ad assensum illi prEebendiim rapiamur (211). Ergo admo-
neri possumus de ejus prœsentiâ.
III. De Sensuum relatione.
217. Quintuplici modo corpora in mentem nostram im-
pressiones suas exercent, scilicet, per Visiim, per Auditum,
66 LOGICA.
per Olfactum, per Gustum et per Tactum. Propria est unius-
cujusque istius sensûs impressio, quEe sensatio vocatur (7).
Hanc sensationem inviti referimus ad objectum externum
tanquàm ad occasionem. Hinc judicamus et credimus inviti
existere objecta externa quœ corpora nuncupantur. A Phi-
losophis disputatum fuit, quomodo haec veritas persuasionis
stricte et philosophicè demonstrari possit.
218. Cartesius insufficientem credidit relationem sensu-
um solitariè sumptam, et asseruit recurrendum esse ad
summam Dei veracitatem ut solide probetur existentia cor-
porum.
219. P. Mallebranche insufficientem existimavit Cartesii
probationera, et arbitratus est existentiam corporum demon-
strari non posse nisi per revelationem.
220. Bayle (a) contendit nullo modo posse demonstrari
corporum existentiam, et sic pro suo more septicis favet.
221. Georgius Berkley, in Hiberniâ anglicanœ reforma-
tionis episcopus, confitenter affirmavit nullum esse corpus,
neque proprium, neque alienura, nullam materiam, nuUum
mundum physicum, sed tantùm adesse mentis nostrœ modi-
ficationes à Deo in nobis impressas, quarum objecta sunt
mera phantasmata quibus perpetuo deludimur. Ejus secta-
tores Immaterialistœ vocantur.
222. Emmanuel Kant quasdam intellectûs nostri formas
assignans ut fundamentum et originem omnium cognitio-
num nostrarum (200), contendit realem corporum existen-
tiam stricte demonstrari non posse.
223. Nota 1. Sensationes, ut ipsis fides adhibeatur, de-
bent esse lo. rationi conformes ; hâc conditione adhibitâ,
non judicamus baculum in aquis obliqué immersum esse
fractum, quamvis eum talem référant oculi ; 2o. debent
esse constantes, uniformes et sibi cohœrentes ; hinc nulla
fides sensationibus quœ nos dormientes aut délirantes affi-
ciunt ; 3o. sensus unus non débet alteri contradicere ;
hinc decipiuntur qui dolorem ad membrum recèns amputa-
tum referunt ; 4o. sensus debent esse benè dispositi ;
hinc quidam oculis vel auribus laborantes judicare non pos-
sunt de coloribus vel de sonis ; 5o. debent esse in légitima
distantiâ ; hinc propter distantiam non possumus judicare
de verâ solis, lunœ et stellarum magnitudine ; Go. ut majus
(a) Pierre Bayle naquit au Cariât, petite ville du Comte de Fois, en 1617, et mourut h.
Rotterdam en 1706.
LOGICA. 67
testimonium relation! sensuum non contradicat ; sic licèt in
Eucharistiâ sensus référant panem, revelatione divinâ sci-
mus non esse panem.
224. Nota II. Cuique nostrûm in semetipsnm reflectenti
constat esse quasdam sensationes quas quandolibet et ad
nutum nostrum habere, aut retinere, aut avertere possu-
mus ; esse autem quasdam quas quandolibet et ad nutum
nostrum habere, aut retinere, aut avertere non possumus ;
V. g., sensu intimo certus sum me posse excitare sensa-
tionem corporis mei, aut numraorum quos habeo in cru-
menâ positos. Pariter eodem sensu intimo certus sum me
non posse habere ad nutum sensationem visûs, v. g., Si-
nensis Imperatoris.
Hic quœritur utrùm sensationes debitis vestitœ dotibus
probent esse corpora.
Propositio.
225. Sensationes debitis vestitaî dotibus probant esse
corpora.
Prob. Sensationes enim probant esse objecta externa, à
quibus vel ad quorum praesentiam excitantur in nobis illse
sensationes ; atqui pariter probant istœ sensationes ob-
jecta externa esse corpora. Ergo sensationes probant esse
corpora.
Probatur major, Vel enim existunt objecta externa à
quibus vel ad quorum prœsentiam excitantur in nobis
sensationes ; vel ipsi nos excitamus in nobis sensatio-
nes independenter à quibuslibet objectis externis ; vel
ens à nobis distinctum excitât in nobis sensationes inde-
pendenter ab objectis externis. Atqui duo posteriora répu-
gnant, lum. quidem répugnât. Nam tune quaslibet et
quandolibet ad nutum nostrum sensationes excitare, aut
retmere, aut avertere possemus. Atqui istud prcesenti rerum
statui répugnât. Ergo. . . . &c. Ilum. quoque répugnât.
Ens enim illud eas sensationes excitaret vel ad nutum nos-
trum, vel ad suum, vel partim ad suum et partim ad nos-
trum ; atqui nullum ex his dici potest. Non lum ; tune
enim quaslibet, prout vellemus, sensationes habere, aut reti-
nere, aut avertere possemus, quod répugnât (224). Non
2um ; tune enim nuUas ad nutum nostrum habere, aut re-
tinere, aut avertere possemus sensationes, quod pariter
répugnât. Non Sum ; cùm enim ignoremus qute sit ejus
E 2
68 LOGICA.
voluntas, pariter nobis constare non posset quandù posse-
mus quasdam habere, aut retinere, a ut avertere sensationes.
Ergo ens à nobis distinctum non potest, in prœsenti rerum
statu, excitare in nobis sensationes independenter ab ob-
jectis externis ; aliundè nec nosmetipsi istud efficere pos-
sumus. Ergo sensationes probant existere objecta externa à
quibus, vel ad quorum prœsentiam excitantur in nobis sen-
sationes.
Prob. minor. Sensationes probant illa objecta externa
esse corpora. Nam corpus est ens extensum in longum, la-
tum et profundum, variisque proprietatibus donatum : at-
qui sensationes probant objecta externa esse extensa in lon-
gum, latum et profundum, variisque proprietatibus donata.
Sit in exemplum liber ; atqui varias unius pagina? lineas,
varias unius lincœ litteras, varias demùm totius libri pagi-
nas percurrendo, variée quibus afficior sensationes mihi
referunt hune librum esse extensum in longum, latum et
profundum ; pariter mibi referunt varias hujus libri quali-
tates ; v. g., colorem, duritiem, pondus, impenetrabilita-
tem, &c. Ergo sensationes probant librum esse corpus.
Idem ratiocinium institui posset circa quodiibet aliud ob-
jectum externum. Ergo sensationes probant objecta ex-
terna esse corpora. Ergo. . . . &c.
Solvuntîir ohjectiones.
Obj. lo. Eeedem possunt esse in nobis sensationes, quin
sint corpora. Ergo sensationes non. . . . &c.
Resp. Dist. Ant. In alio rerum ordine esedem possunt
esse sensationes, quin sint corpora ; conc. ant. In praî-
senti rerum ordine ; neg. ant. et consqam. Porrù nostra
probatio non procedit à sensationibus absolutè et in se
spectatis, sed prout junguntur cum duplici sensu intimo de
que locuti sumus (224); atqui admisso hoc duplici sensu
intimo, impossibile est existere sensationes quin sint corpora.
Ergo. . . . &c.
Inst. In prcesenti rerum statu Deus excitât in nobis sen-
sationes occasione corporum ; atqui Deus potest excitare
sine corporibus easdem sensationes in nobiS;, quas occasione
corporum excitât. Ergo in praesenti rerum statu eœdem
possunt esse sensationes quin sint corpora.
22G. Resp. Dist. Maj. In prœsenti rerum statu Deus
occasione corporum excitât in nobis sensationes j.unctas cum
LOGICA. 69
duplici prœfato sensu intirno ; conc. maj. Sejunctas ab
illo duplici sensu intimo ; neg. maj. Dist. pariter Min.
Deus sine corporibus potest excitare in nobis sensationes
sejunctas ab illo duplici sensu intimo; conc. min. Con-
junctas cum hoc duplici sensu intimo ; neg. min.
Itaque hic non agitur utrùm corpora ipsa in nobis pro-
ducant sensationes, vel utrùm Deus ipsas in nobis excitet
sensationes occasione corporum ; sed utrùm, posito duplici
sensu intimo prœfato, Deus possit producere in nobis sine
corporibus sensationes quas experimur, quod negamus.
Eas enim tune produceret vel ad nutuni suum, vel ad. . . .
&c.; atqui nuUum ex his dici potest quin destruatur alter-
utrum ex his duobus sensibus intimis. Ergo. . . . &c.
Obj. 2o. Ex te, ideo sensationes probant esse corpora,
quia in corporibus adsunt qualitates sensibiîes. Atqui in
corporibus nullpe sunt qualitates sensibiîes. Ergo. . . . &c.
227. Resp. Dist. Maj. Ideô. . . . quia in corporibus ad-
sunt qualitates sensibiîes, si per qualitates sensibiîes intelli-
gatur ea partium dispositio quam habent corpora ad
excitandas in nobis quas experimur sensationes, quocumque
modo excitentur istœ sensationes; conc. maj. Si per qua-
litates sensibiîes intelligantur ipsce quas experimur sensa-
tiones ; neg. maj. "Atqui in corporibus nullee adsunt
qualitates sensibiîes ;" dist. min. Si intelligantur per
qualitates sensibiîes ipsœ quas experimur sensationes ; conc.
min. Quis enim crederet ignem, v. g., experiri sensationem
caloris? Si per qualitates sensibiîes intelligatur ea partium
dispositio quam habent corpora ad excitandas in nobis sen-
sationes quas experimur, quocumque modo excitentur istae
sensationes ; neg. min. lidem enim sensus intimi qui
probant esse corpora, pariter probant banc partium dispo-
sitionem esse in corporibus. Ergo. . . . &c.
Inst. Eadem aqua calida videtur homini frigore confecto,
et frigida homini calore incandescenti. Ergo non sunt
qualitates sensibiîes in corporibus.
Resp. Neg. consqam. Nam eadem aquœ dispositio has
diversas sensationes caloris et frigoris in his variis homini-
bus producere débet. Hœc enim aqua plures calorici partes
(plus de calorique) continet quàm homo frigore confectus,
ideoque calida ei videri débet. Sed cùm eadem aqua
pauciores calorici partes(moins de calorique) contineat quàm
^0 LÔGiCA.
hoiïlo calore incandescens, mirum non est si ei frigida
videatur.
Obj. 3o. In somniis et in phrenesi easderh experimur
sensationes, non existentibus corporibus, qùas experimur
occasione corporum. Ergo eœdem possunt esse sensationes
quin sint corpora.
228. Resp. Neg. ant. Nam unicuique constat sensu
intimo non esse prorsiis easdem illas sensationes. In
somniis enim et in phrenesi non sunt constantes, uniformes,
nec sibi cohœrentes, sicut et in vigiliis. Hinc statum
vigiliœ à statu somnii et phrenesis certissimè distinguimus.
Inst. lo. Saltem supernaturaliter experiripossumus eas-
dem sensationes non existentibus corporibus.
Respondeo in his occasionibus adesse nobis médium
detegendi erroris, nempè revelationem divinam, cujus
testimonium omni sensuum testimonio superius est,quando
agitur de corporibus distributivè sumptis, quorum existentia
non œquè certa est ac existentia corporum collective sump-
torum.
Inst. 2o. Possumus falli circa corpora distributivè sump-
ta; ergo et circa corpora collective surapta.
Resp. Conc. ant. Neg. consqam. Sensus enim possunt
non rectè applicari circa corpora distributivè sumpta ; sed
fieri non fotest ut nunquàm rectè applicentur circa ullum
corpus. Ergo. . . . &c.
Obj. 4o. Sensus sunt failaces. Ergo. . . . &c.
Resp. Dist. Ant. Sensus sunt failaces, quando cohdi-
tionibus requisitis carent ; conc. ant. Quando conditionibus
requisitis donantur ; neg, ant. et consqam., ob rationes
allatas.
Inst. Sensus turrim quadratam eminùs conspectam re-
prsesentant veluti rotundam ; baculum aquis obliqué im-
mersum exhibent tanquàm fractum eâ parte quâ aquis
immergitur ; soiem et lunam referunt veluti non majores
unius pedis disco. stellas vero punctis lucidis adcequant.
Ergo &c.
229. Resp. Neg. consequentiam, quia istœ relationes
onmibus conditionibus requisitis non donantur (223); sic,
V. g. , testimonium visûs referentis turrim quadratam emi-
liùs conspectam veluti rotundam, baculum ut fractum,
refellilur testimonio tactûs. Tactu enim recognoscitur
LOGICA* 71
turris quadratura, baculi rectitudo. Quantum vero ad
solis, lunae et stellarum magnitudinem, prœterquàm quùd
oculi non est sed tactûs judicare de magnitudine corpo-
tum, adest in nobis recta ratio quœ corrigit et emendat
oculorum testimoniura, demonstrando nimirùrn, juxta op-
tices régulas, objectorum magnitudinem eo magis minui,
quô major est eorum ab oculis distantia.
Obj. 5o. Fieri posset ut non existèrent corpora ; ergo
certum esse non potest existera corpora.
Resp. lo. Retorqueo argumentum. Fieri posset ut
non existerem ; ergo cerlus esse non possum me existefe.
Resp. 2o. Conc. ant. Neg. consqam. Ut enim corpo-
rum existentia sit certa, non requiritur ut corpora non
possint absolutè non existere, sed sufficit ut non possint
non existere in hypothesi sensationum, seu duplicis sensûs
intimi (224).
Itist. lo. Certum non est metaphysicè existere corpora.
Ergo nnlla tua solutio.
Resp. Neg. ant. Illud enim certum est metaphysicè
quod rèrum naturâ fundatur ; atqui corporum extistentia
ferum naturà fundatur (225). ErgO; . . . &c.
Inst. 2o. Omnis certitudo metaphysica vel oritur à sensu
intimOjUbi agitur de rébus intra nos positis, vel ab evidentiâ,
ubi agitur de rébus extra nos positis ; atqui neque sensus
intimus testatur corporum existentiam, cùm corpora sint
extra nos posita, neque evidentiâ, cùm evidentiâ versetur
circa rerum essentiara. Ergo certum non est metaphysicè
existere corpora.
230. Resp. lo. Neg. maj. et contendo omnem certitu-
dinem metaphysicam non oriri à sensu intimo et ab evi-
dentiâ. Relatio enim sensuum, ut jàm vidimus, revelatm
divina, testimonium hominum, ut videbitur, pariunt derti-
tudinem metaphysicam ; atqui tamen, saltem immédiate,
neque à sensu intimo, neque ab evidentiâ oriuntur. Ergo
. . . . &c.
Resp. 2o. Dist. Min. Sensus intimus et evidentiâ non
testantur corporum existentiam immédiate; conc. min.
Médiate; neg. min. et consqam. Sensus intimus et evi-
dentiâ rem aliquam immédiate testantur, quandô illam
testantur absque ullo discursu ; et testantur médiate, quando
eam ope discursûs testantur. Reverà sensus intimus et
72 LOGICA.
evidentia non lestaiitur immédiate corporuiii existentiam,
sed eam médiate testantur. Sensus enim intimus, in pra3-
senti rerum statu, nobis testatur adesse quasdam sensatio-
nes quas habere^ aut retinere, aiit avertere possumus ad
nutum nostrum, et adesse quasdam quas habere, aut reti-
nere, aut avertere non possumus ad nutum nostrum (224),
et demonstrat evidentia illas sensationes, in preesenti rerum
statu, venire ab objectis externis, et illa objecta esse corpora
(225).
IV. De Testimonio hominum.
231. Testimonium hominum duo complectitur, facta
scilicet et testes.
Facta alia sunt lo. coœtanea, quae eorum quibus nar-
rantur œtate peracta sunt, et alia prœterita, qu?e scilicet
aetatem eorum quibus referuntur prœcesserunt : 2o. alia
dicuntur privata, quia paucos habuerunt testes, et alia
publica, quia coram multitudine fuerunt patrata, aut saltem
multos habuerunt testes: 3o. alia sunt gravissimi momenti,
quœ videlicet aliquid eximii prce se ferunt et attentionem
hominum naturaliter excitant, et alia levis momenti, quae
nihil magni ponderis habent, nec proindè idonea sunt ut
attentionem hominum promoveant : 4o. alia pra?judiciis
favent, cùm moribus hominum et pristinis opinionibus con-
sentanea sunt ; alia vero prœjudiciis adversantur, quando
receptis opinionibus, cupiditatibus et commodis hominum
contraria sunt : 5o. aHa sunt clara et perspicua quœ ab
omnibus facile intelliguntur, et alia obscura quœ facile non
perspiciuntur : 6o. denique alia sunt naturalia, quœ solitis
naturee legibus consentiunt, et alia supernaturalia seu
miraculosa, quee easdem leges evidenter superant, seu,
quod idem est, qua: iisdem naturœ legibus derogant.
232. Miraculum, prout est factum supernaturale, à
sensibus apprehendi non potest, et est solummodo duorum
factorum naturalium légitima consecutio ; v. g., resurrectio
mortui, prout est miraculum, est consecutio duorum fac-
torum naturalium, hoc modo ; " hic homo mortuus erat ;
" atqui hic homo nunc vivit ;" en duo facta naturalia ;
" Ergo hic homo revixit ;" en légitima consecutio.
" Le miracle, inquit D. Frayssinous, se trouve enfermé
'^ entre deux faits naturels, savoir, la mort de cet homme
" et sa vie présente. Les témoins ne sont assurés du
LOGICA. 73
*' miracle de la résurrection, que parce qu'ils sont assurés
" du fait naturel. Ainsi je puis dire que le miracle n'est
** qu'une conclusion de deux faits naturels. On peut
*' s'assurer des faits naturels, le sceptique l'avoue ; le
** miracle est une simple conséquence de deux faits dont
" on est sûr ; ainsi le miracle que le sceptique me conteste,
*' se trouve, pour ainsi dire, composé de trois choses qu'il
" ne prétend point me disputer, savoir, de la certitude de
" deux faits naturels, la mort de cet homme et sa vie
" présente, et d'une conclusion métaphysique que le scep-
" tique ne me conteste point ; elle consiste à dire : cet
**" hornme qui vit maintenant était mort ; il est donc rendu
" de la mort à la vie." (Conférence sur les Miracles en
ge'néral, tom. 2 pag. 132).
233. Ilinc sequitur miraculum, ut miraculum, non esse
objectum testimonii ; quia testimonium in sola facta cadit.
Undè ubi agitur de facto supernaturali, testes referunt duo
facta naturalia, quorum miraculum est necessaria con-
secutio.
234. Testes sunt lo. Vel ocw/a<z,quando ipsi viderunt vel
audierunt factum quod narrant ; vel auriculati, quandô ab
ahis acceperunt factum quod narrant.
2o. Sunt vel coœvi, vel posteriores factis qua? referunt ;
sunt coœvi, quando eâ vixerunt aetate quâ exstiterunt facta ;
et posteriores, si référant facta ante œtatem suam jàm per-
acta.
235. Quando agitur de factis gravioris momenti,duo ex-
trema sunt vitanda, nimia scilicet credulitas, quœ sine ullo
examine crédit, et nimia incredulitas, quae factis omnibus
fidem denegat, sicque subvertit omnia societatis et religio-
nis fundamenta.
236. Hic non quseritur utrùm adhibenda sit fides omni
hominum testimonio ; plerumquè enim fieri potest ut deci-
piant homines aut decipiantur, ubi agitur de factis obscu-
risj parvi momenti, ubi pauci sunt testes, quorum interest
ut factum admittatur.
237. Status igitur quœstionis est utrùm, ubi agitur de
factis maximi momenti, publicis, claris, et coram multitu-
dine patratis, haberi possit certitudo metaphysica ; quœ
quœstio priusquàm solvatur, queedam praenotandse sunt le-
ges morales.
74 LOGICA.
238. î. lîomincs iiaturu sua vcritatem amant, mendaces-
nue non sunt, nisi ducantur aliquo motivo, vel aliquâ cupi-
ditate. II. Ubi plurimi sunt homines, ibi diversa sunt
commoda, diversœque libidines. Ilf. Libidines et commo-
da non possunt plurimos homines adducere in consensionem
ejusdem facti faisi ; proprium est enim libidinum mentes
dividere, soliusque est veritatis eas conjangere. IV. Plurimi
homines, quorum ut factum negetur interest, solâ veritate ac
evidentiâ facti, in ejus consensionem adduci possunt.
239. Istce leges générales humanitatis tam invariabiles
sunt, ut nec Deus ipse possit illis derogare, salvisbonitate,
sapientiâ et summâ veracitate. In his legibus tota fundatur
certitudo testimonii. Hœc igitur certifudo est metaphysida ;
fundatur enim essentiis hominum moralibus.
240." Le monde nàoraljinquit D. Frayssinous, ne marche
pas plus au hasard que le monde physique ; il est des
règles fixes, universelles, pour les esprits comme pour
les corps ; il est des lois qui régissent l'espèce humaine,
qui se manifestent, comme celles de la nature, par des
phénomènes constans, et dont on peut prév^oir et annon-
cer d'avance les résultats. Ainsi nous sommes faits de
manière qu'un certain nombre d'hommes inconnus les
uns aux autres, placés dans des situations diverses, op-
poses d'âge, de caractère, d'intérêts, de passions, de pré-
jugés, et qu'on ne peut soupçonner d'Une fraude concer-
tée, ne se rencontreront pas par hasard à se donner pour
les témoins oculaires des mêmes faits, qu'ils ne seront
pas méchans et fourbes sans motif, qu'ils ne sacrifieront
pas leur conscience, l'amour naturel de la vérité, leurs
intérêts présens et à venir, leurs passions les plus chères,
au plaisir d'affirmer un mensonge. Plus on me fera ob-
server que les hommes sont bizarres, capricieux, intéres-
sés, passionnés, plus on me convaincra que leur accord
fortuit sur le même fait devient impossible." {Ibid, pag.
81. 82).
Propositio prima.
241. Testimonium hominum, omnibus conditionibus
requisitis vestitum, parit certitudinem metaphysicam circa
facta naturalia coastanea.
Prob. Tune enim adest certitudo metaphysica circa facta
naturalia coœtanea, quando clarè constat testes nec fuisse
LooicA, 75
deceptos, ncc deceptores ; atqui qu.Tdani sunt facta quo-
rum testes clarè nobis videntur nec fuisse decepti nec de-
ceptores.
I. Clarè videtur illos non fuisse deceptos. Agitur enim
de factis publicis, obviis, claris, maximi momenti, et coranl
multis testibus patratis ; atqui circa hujusmodi facta evi-
dens est plurimos testes non fuisse deceptos. Ut enim fuis-
sent decepti circa ista facta, deberent existimare se vidisse
quod non viderunt, se audivisse quod non audierunt, se
tetigisse quod non tetigerunt ; atqui istud non potest sup-
poni (225), et si supponeretur, jàm actum esset de societate
et de religione. Ergo T. .. . &c.
IL Clarè videtur illos non fuisse deceptores. Il!i enim
non fuerunt deceptores qui nec voluerunt decipere, nec
potuissent, etiamsi voluissent : atqui utrumque certum est.
lo. Quidem non voluerunt decipere. Nam id fieri ne-
quit nisi hoc duplici modo, lo. conveniendo et quasi con-
spirando ad contexendam eamdem fabulam ; 2o. ut, nullâ
conspiratione factâ, unusquisque fabulam suam excogitet
separatam ad alios decipiendos, nullâ sui consilii cum cae-
teris factâ communicatione ; atqui hœc duo sunt absurda.
lo. Quidem non potuerunt inter se convenire ad contexen-
dam eamdem fabulam. Eaest enim hominum indoIes,ut non
possint in idem consilium, factâ conventione, conspirare,
nisi gravi aliquâ cupiditate cunctis communi abripiantur ;
atqui nuUa gravis cupiditas cunctis communis potest abri-
pere plurimos testes commodis, prœjudiciis et libidinibus
diverses, ut evidens est. Ergo lo. testes non potuerunt
inter se convenire ad contexendam eamdem fabulam. 2o.
Unusquisque testis, ad alios decipiendos, non potuit suam
separatam excogitare fabulam cum iisdem circumstantiis,
nullâ cum cseteris sui consilii factâ communicatione. Istud
enim tam absurdum est quàm absurdum esset dicere plures
auctores de re eâdem scribentes posse convenire in easdem
sententias, eademque verba. Huj us ratio est, quia diversi
homines diversâ sunt indole, ingenio, moribus.. &c., et quia
causse diversœ diverses producunt effectus. Ergo 2o. unus-
quisque testis. . . .&c.; aliundè. . . . &c. Ergo lo. clarè vi-
detur testes non voluisse decipere.
2o. Etiamsi voluissent decipere, non potuissent. Ibi
enim impossibilis est fraus, ubi levissimum examen sufficit
76 LOGICA.
ad illam dctcgendam, et lamen gravissinium adhibetur.
Atqui ubi agitur de factis publiais,. . . .&c., lo. levissimum
examen Kufficit ad detegendam fraudera ; in omnium enim
ore versantur, in omnium memoriâ inscribuntur. 2o. gra-
vissimum examen adhibetur. Supponitur enim factum gra-
vissimi momenti ; atqui ubi agitur de tali facto, non sine
maturo examine admittitur illius veritas. Ergo 2o. etiamsi
voluissent decipere, non potuissent. Aliundè non voluerunt
decipere. Ergo clarè videtur testes non fuisse deceptores ;
aliundè clarè videtur iilos non fuisse deceptos. Ergo. . .&c.
Soîvuntur ohjcctiones.
Obj. lo. Testiraonium unius hominis non parit ccrtitu-
dinem metaphysicam ; ergo nec plurimorum hominum tes-
timonia.
Resp. Neg. consqam. et paritatem. Ratio disparitatis
est, quia cùm unicus est testis, tune clarè constare non
potest illura non fuisse deceptum aut dcceptorem ; at quan-
dô plurimi testes referunt factum publicum. . . . &c., tune
clarè constat illos non fuisse deceptos aut deceptores.
Ergo. . . .&c.
Inst, Quod convenit uni, convenit omnibus ; atqui
unius testis testiraonium non parit certitudinem metaphysi-
cam. Ergo nec plurimorum tcstimonia
242. Resp. Dist. Maj. Quod convenit uni, convenit om-
nibus, in his quœ rerum naturâ fundantur ; conc.maj. In
his qu?e collectione individuorum fundantur ; neg. maj. et
consqam. Itaquc in his quas rerum naturâ fundantur, nec
pendent à collectione, quod potest affirmari aut negari de
uno, affirmari aut negari potest de omnibus ; sic ex eoquod
unus homo sit rationalis, scquitur omnes homines esse ra-
tionales. At in his quœ rerum naturâ non fundantur, sed
qua3 pendent à collectione, quod competit uni, non ideo
competit omnibus. Sic ex co quod singulus miles non pos-
sit urbcm expugnare, non sequitur exercitum non posse.
Idem diccndum est de testimonio hominum, cujus tota vis
fundatur in diversitate indolum, commodorum, prœjudicio-
rum. cupiditatum, &c. Jàm vero ex eo quod haec diversitas
non possit reperiri in unico teste aut in paucis, non sequi-
tur illam non posse reperiri in plurimis testibus, et reipsà
reperitur ; atqui ubi existit hsec diversitas, tune clarè con-
stat testes nec fuisse deceptos nec deceptores.
LOGICA. 77
• Obj, 2o. Quod est tantùm probabile, non parit cerlitu-
dinem mctapbysicam ; atqui testiinonium bominum est tan-
tùm probabile. Ergo. . . . &c.
Resp. Neg. min. Testimonium bominum omnibus con-
ditionibus requisitis vestitum nunquàm potest esse ialsum ;
ergo non est tantùm probabile.
Inst. lo. Testimonium bominum est mera probabilita-
tum congeries. Ergo. . . . &c.
243. Resp. Neg. ant. Testimonia enim collective consi-
derantur ; atqui sic considerata non sunt congeries proba-
bilitatum, sed intégra certitudo. Nam adest certitudo,
quando tam multi sunt testes ut clarè videantur nec fuisse
decepti nec deceptores : atqui quaedam sunt facta quorum
tam multi sunt testes ut clarè videantur nec fuisse decepti
nec deceptores (241). Ergo quando testimonia collective
considerantur, non sunt mera probabilitatum congeries, sed
intégra certitudo.
Inst. 2o. Testimonium quodlibet seorsim spectatum non
nisi probabilitatera parit. Ergo congeries testimoniorum
nibil aliud est quàm congeries probabilitatum.
Resp. Neg. consqam. Ratio cur testimonium seorsim
spectatum non pariât nisi probabilitatem, est quia vix con-
stare potest unicum testem non fuisse deceptum aut decep-
torem ; id vero dici non potest^ quando plurimi testes nar-
rant factum publicum. . . . kc; tune enim clarè constat illos
non fuisse deceptos aut deceptores. Ergo. . . .&c.
Inst, 3o. In ordine pbysico earumdem rerum collectio
non mutât earum naturam ; ergo nec in ordine morali.
Resp. Dist. Ant. In ordine physico. . . .&c. non mutât
earum naturam, sed efficere potest ut majorem effectum ali-
quando producant; conc. ant. Et etïicere non potest ut majo-
lem effectum producant; neg. ant. Sic,v. g.,quamvis plurimi
bomines non magis sint homines quàm unicus liomo, ferre
tamen possunt pondus quod unicus bomo ferre non posset.
Idem dici potest de testimonio bominum cujus tota vis
nititur, ut jàm observavimus, diversitate indolum, commo-
dorum, prarjudiciorum et cupiditatum,. . . .&c., quee diver-
sitas reperiri non potest nisi in plurimis testibus.
Inst. 4o. Illud nullatenùs in veritatem facti influere po-
test, quod est prorsùs veritati extrinsecum ; atqui major
vel minor testium numerus veritati prorsiis extrinsecus est.
Ergo,. . .&c.
78 LOGICA.
244. Resp, Dist. Maj. Illud nullateniis in veritatem fac-
ti in se spectatam influere. . . . &c.; conc. maj. Illud nul-
latenùs in veritatis facti cognitionem certain influere. . . .&c.
neg. maj. " Atqui major vel minor. . . .&c".; dist min,
Prorsiis extrinsecus est veritati facti in se spectatœ ; conc.
min. ProrsLis extrinsecus est cogniiioni certes veritatis
facti ; neg. maj. et consqam.
Reverà major vel minor testium numerus prorsùs
extrinsecus est veritati in se spectatœ alicujus facti ;
contigit enim vel non contigit factum independenter à
majori vel iTiinori testium numéro. Sed hic numerus
non est extrinsecus cognitioni certas facti ; impossibile
est enim injçentem hominum multitudinem inter se con-
venire ad decipiendum circa factum publicum. . . . &c ;
undè cùm numerus testium habeat necessariam con-
nexionem cum veritate, necessario ducit ad ipsius cogni-
tionem certam.
Inst. 5o. Testimonium hominum non potest parère cer-
titudinem metaphysicam quin perspecta sit singulorum
testium probitas ; atqui^, quando multi sunt testes, perspici
non potest singulorum probitas. Ergo. . . . &c.
Resp. Neg. maj. Ut enim testimonium hominum pariât
certitudinem metaphysicam, necesse non est scire utrùm
singuli testes tantâ sint probitate ut nec velint decipere ;
sufficit si clarè constet testes collective sumptos nec velle
nec posse decipere : atqui ut hoc sciatur minime opus est
singulorum testium probitatem expendere. Ergo. . . . &c.
Propositio secunda.
245. Testimonium hominum omnibus conditionibus re-
quisitis vestitum parit certitudinem metaphysicam circa
facta antiquiora.
Prob. Testimonium enim hominum omnibus. . . . &c., si
plurimee sint via3 quibus eorum veritas ad remotissimam
posteritatem certo pervenire possit. Atqui plurimae sunt
vise quibus. . . . &c., nempè traditio, historia et monumenta.
I. Traditio. Traditio enim, de quâ hic agitur, est veluti
quœdam concatenatio testium sibi invicem succedentium
sine uUâ interruptione, ab ipso facti tempore, usque ad
tempus quo idem factum harratur. Atqui haec testium
concatenatio parit certitudinem metaphysicam circa facta
antiquiora. Nam, ex probatis, numcrosissinii testes oculati
LOGICA. 79
pariunt certitudinem metapbysicam. Atcjui traditio inte-
gram transmittit testium oculatoruin certitudinem. Piures
enira ex prima cetate, qui vixerunt cum testibus oculatis,
transeunt in secundam eetatem, secum ferenles integram
primée œtatis certitudinem. Factuni referunt secundee
œtati, quœ sic de iliis ratiocinari potest, quemadmodùm
ipsi de testibus oculatis ratiocinati sunt ; scilicet, illi testes
nec decipi nec decipere potuerunt. Ergo secandaœtas tam
certa est de facto quàm prima, et sic de cœteris œtatibus.
Ergo traditio humana integram transmittit testium ocula-
torum certitudinem. Ergo. . . . &c. Et verô, traditio
bumana parit certitudinem metapbysicam circa facta
preeterita, si nullum sit tempus traditionis quo error
obrepere potuerit. Atqui nullum est traditionis tempus
quo error obrepere potuit. Si enim error obrepere potuis-
set, vel prima œtate, vel secundâ, vel posterioribus aetati-
bus. Atqui nullum dici potest. Non prima œtate ; tota
enim constat testibus oculatis, vel saltem facto coeetaneis ;
atqui circa factum publicum, obvium et maximi momeati,
testes non potuerunt decipi aut decipere cotetaneos. Ergo
error non potuit obrepere prima œtate. Neque secundà
labente. Generationes enim non siraul evanescunt, nec
subito à se invicem separantur, sed ità sensim sibi succer
dimt, ità invicem concatenantur, ut nullum temporis punc-
tum assignari possit, quo simul non existant proavi, avi,
patres et filii. Atqui talis concatenatio generationum
omnem errori viam recludit. Supponamus enim omnes
annis quadraginta natos veile generationes antécédentes et
subséquentes decipere : atqui in hûc suppositione, quamvis
sit absurda, impossibilis est deceptio ; statim enim recla-
marent antécédentes et subséquentes. Supponamus iterùm
solos viros octoginta annorum secum conspirare ad deci-
piendos cosetaneos juniores, et subito narrare factum quod-
dam illustre, obvium,. . . . &c.; nonne statim reclamarent
juniores ; nonne dicerent taie factum non potuisse tam diii
celari, prœsertim cùm tantas secum importare debuisset
mutationes ? Ergo in nuUâ aetate error obrepere potuit,
cùm idem semper ratiocinium institui possit. Ergo nullum
est tempus quo error obrepere potuit. Ergo. . . . &:c.
246. " Notandum est tamen, inquit D. Bouvier, Log.
" pag. 240, traditionem oralem seorsim sumptam non esse
" motivum infallibile judicandi, prajsertim de factis remotis,
80 LOGICA.
" nisi sit clara et uniformis ; plurimre siuit enim traditiones
" vagae et obscuree, vel quœ variœ suiit pro diversis pro-
'^' viriciis aut familiis ; nulla fides tuto adhiberi potest
*' rumoribus istis ; uiidè de solâ factorum substantiû
'• ordinariè certo constare potest ex traditione orali seorsim
*' spectatâ, quia in solâ substantiâ uniformis esse solet."
247. II. Historia : juxta enini severioris criticce régulas,
historiée fides adhibenda est, quando certissimè constat
riiam esse authenticam, veram etintegram; atqui certissimè
constare potest historiam esse. . . . &c.
le. Historia est authentica, quando est auctoris cui
tribuitur ; atqui recognoscitur eam esse auctoris cui tiibui-
tur, id est, eam non fuisse suppositam, quando temporis ad
quod refertur moribus, institutis, monumentis et opinioni-
bus consentanea est ; quando auctoris, cui tribuitur, indolem,
ingenium, mores et stylum, aliundè nota, refert; quando
fuit à scriptoribus cosevis vel posterioribus fide dignis laudata
tanquàm genuinum opus auctoris cui tribuitur : quandù ipsi
soli per continuas generationes ab omnibus adscriptuni fuit
hujusmodi scriptum ; quando nullum detegiîur suppositio-
nis motivum, sive quoad auctorem, sive quoad locum, sive
quoad tempus. . . . &c. Hâc ratione cognoscimus autlien-
tica esse opéra sub Virgilii, Ciceronis, Horatii, Csesaris,
&c. nominibus édita.
2o. Historia est vera quando refert facta qualia evene-
runt : atqui recognoscitur in eâ referri facta qualia evene-
runt, quando deprebenditur scriptorem non ex rumoribus
incertis, sed ex relationibus fide dignis, ex traditione Con-
stantin ex monumentis et scriptis certis suam narrationem
deprompsisse ,- quando in ejus scriptis eminet amor veritatis
et probitatis ; quando in eis sese produnt ingenuitas, candor,
bona fides, nusquàm autem credulitas, praejudicia et cupi-
ditates quibus delusus aut abreptus fuerit ; quando tempore
que scripsit auctor, aderant testes ocuiati qui ipsum
facile mendacii arguere potuissent, si falsa fuisset ejus
narratio. Quis enim crediderit historicum potuisse impo-
nere testibus oculatis et coaevis? Si quis hodiè historiam
vulgaret, in quâ facta gravia et splendida narraret, quasi
si temporibus nostris contigis^sent, qua3 tamen nemo vidis-
set et de quibus nihil audivisset ; numquid hujusmodi opus
ad posteritatem, tanquàm veridicum transiret ? Nonne
LOGICA. 81
statim contradiceretur, et subito oblivionis piaeda factura,
in pulverem rediret ? Sic quandô scriptor aliquid testât ur,
non contradicentibus ipsius coeevis, cùm id facile fieri
posset, omnes fiunt testes cum scriptore.
3o. Historia est intégra, quandô non fuit adulterata ;
atqui recognoscitur eam non fuisse adulteratam, quandô,
post collecta ex locis et temporibus varia exemplaria, sive
impressa, sive manuscripta, inter ipsa plena conformitas
reperitur, saltem quoad substantiam operis. Si varia
enim exemplaria tantùm in ievissimis discreparent, illa
discrepantia, nediim infirmaret^confirmaret potiiis historiée
integritatera ; nam si adulteratores non alias mutationes
adhibuerunt, necessario coerciti fuerunt solâ vi veritatis.
Ergo certissimè constare potest historiam esse authenticam,
veram et integram. Ergo historia est via tutissima quâ
Veritas factorum ad remotissimam posteritatem certissimè
pervenire potest.
248. III. Monumenla : veritas enim factorum prseteri-
torum infallibiliter obtineri potest ex monumentis in memo-
riam eorum erectis, si cum illis necessario sit conjuncta :
atqui veritas factorum prseteritorum necessario conjuncta
est cum monumentis in eorum memoriam erectis : nam
impossibile est monumenta fuisse erecta in memoriam fac-
torum omninô inauditorum, qualia tamen essent facta
fictitia ; quis auderet, v. g., statuam erigere in honorera
alicujus celeberrimi ducis, qui hue usque penitùs fuisset
ignotus ? Si illam reverà erigeret, nonne in publicum
ludibriura deveniret ? Quis è contra in dubiura revocare
vellet factura publicum insigni monumento ad nos trans-
missura? Quis, v, g., in posterura aliquam mirabilem
columnam in plateâ pubhcâ erectam considerans, dubitare
posset an realiter exstiterint victorise in eâ descriptas. Ergo
monumenta possuntesse via tutissima quâ veritas factorum
ad remotissimam posteritatem certissimè pervenire potest.
AUundè &c. Ergo. . . . &c.
Et verô, si unaquœque via superiùs exposita, seorsim
sumpta,plenè quandoquè sufficiat ut veritas factorum, etiam
antiquissimorum, certissimè constet, quanto magis patebit,
cùm omnes vice suprà dictse simul concurrent ! Atqui fré-
quenter omnes illse viee simul concurrunt ad testanda facta
preeterita et etiam antiquissima ; ergo testimonium. . . . &c.
F
82 LOGICA.
Solvuntur objeciiones.
Obj. lo. Certitudo factorum decrescit lapsu temporum ;
certitude enim primae selatis major est secundae. Ergo
.... &c.
Resp. Neg. utrumque antecedens. Integra enim certitu-
do testium oculatorum pervenit etiam ad remotissimas
aetates. Ergo....&c.
Inst. lo. Testis oculatusfide dignior est auriculato teste.
Ergo .&c.
Resp. Dist. Ant. Testis oculatus fide dignior est auricu-
lato teste, si uterque spectetur extra catenam testium ;
conc. ant. Si consideretur uterque intra catenam testium,
.neg. ant. Intra catenam enim testium, testes auriculati in-
tegrara habent certitudinem testium oculatorum.
Inst. 2o. Quo factum est antiquius, eô de pluribus tes-
tibus sciendum est utrùm decipi aut decipere potuerint.
Atqui quô de pluribus testibus. • • . &c., eo difficilius est ha-
bere certitudinem facti. Jàm vero certitudo facti decrescit
ratione difficultatum vincendarum ad rem demonstrandara.
Ergo. . . &c.
249. Resp. Neg. maj. Nam ubi agitur de testimoniis,
non eveniunt examinanda singula testimonia seorsim, sed
in gloho considerantur hoc modo ; traditio qua» nunc existit
de tali facto protenditur usque ad tempus quo factum con-
tigisse narratur. Ergo testes non fuerunt decepti aut de-
ceptores. Si enim fuissent decepti aut deceptores, sanè vel
prima œtate, vel secundâ, vel posterioribus setatibus : atqui
nibil horum dici potest (245). Ergo non difficilius est ha-
bere certitudinem de facto antiquiori quàm de facto cose-
taneo.
Inst. 3o. Atqui certitudo factorum decrescit lapsu tem-
porum. Si factum ipse viderim, habeo certitudinem inte-
gram de eo ; si idem factum alteri narraverim, hic auditor
non nisi dimidiam certitudinis mea? partem habebit. Si pri-
mus ille auditor factum alteri narret, ille secundus auditor
non nisi quartam certitudinis meee partem habebit ; tertius
octavam ; quartus decimam sextam, et sic sensim minue-
tur certitudo, quô longiùs producetur linea traditionalis.
Ergo....&c.
Resp. Dist. Ant. Si auditor factum accepit ab unico teste;
conc. ant. Si factum accepit per multas lineas traditionales;
LOGICA. 83
neg. ant. et consqara. Tune enim eamdem habet certitudi-
nem quara habebant et ipsi coeetanei. Sic tam certus sum
de existentiâ Alexandri, Ceesaris, &c., quàm et ipsi qui eos
propriis oculis viderunt.
Obj. 2o. Populus maximâ cum aviditate accipit varios
rumores, et mira crédit facilitate. Atqui hoc posito, potue-
runt transmitti plurima facta quse non evenerunt, imo et de
facto transmissa sunt, et etiam per multas lineas traditio-
nales. Ergo,...&c.
250. Resp. Dist. Maj. Populus varios rumores. . . . &c.,
circa facta nullius aut ferè nullius momenti ; conc. maj.
Circa facta publica, maximi momenti. . . . &c.; neg. maj.
Rêvera, quse populo favent, facile admittuntur ; nullius
enira interest reclamare ; at sic non est quando agitur de
factis publicis, quee vel cupiditatibus adversantur, vel gen-
tis vanam gloriam aut honorem Isedunt.
Ad probationem, respondeo facta illa nuilatenùs gau-
dere conditionibus requisitis : nam firmiter à doctis non
credebantur, nuUi nociva erant ; è contra vanœ gloriœ popu-
lorum ssepiùs favebant ; ab ipso tempore quo contigisse
narrabantur, per traditionem, sive oraleni, sive scriptam,
sine uUâ intermissione non profluebant.
Obj. 3o. Scriptores, quando plurimi sunt, variant circa
facta quse narrant. Ergo illis nulia fides.
251- Resp. Dist. Ant. Circa facta publica et maximi mo-
menti variant quoad circumstantias et adnotationes ; conc.
ant. Quoad existentiam factorum ; neg. ant. et consqam.
In quolibet igitur scriptore duo sunt observanda, factum
scilicet quod refert, et adnotationes quas facit xîirca factum.
Supponamus, v. g., plurimos scriptores alios Anglos, alios
Galles, referre pugnam commissam in planis Quebecensibus
ante felicissimam hujus urbis reductionem. In hoc consen-
tient omnes, quod Galli victoriâ Anglis cesserint. Sed sin-
guli scriptores singulae parti addjcti, virtutem suorum plus
aequo toile nt ; multô magis numerosos fuisse hostes dicent;
fraudes hostibus tribuent ; deuique circa adnotationes
et circumstantias variabunt, non autem circa factum.
Ergo licèt varient scriptores circa circumstantias, non sequi-
tur haberi non posse certitudinem de factis antiquioribus.
252. Nota. Si varient scriptores circa factum ipsura,
tune haberi potest aliquandô certitude de existentiâ vel de
F 2
84 LOGICA.
non existentiâ facti ex consequentibuset eifectibus. His in ca-
sibus, prudentis viri est testimonia scriptorum attenté ponde-
rare, certa ab incertis sedulô discernere, et summoperè
cavere tùin à faciliori credulitate, tùm à nimiâ incredulitate.
Propositio tertia,
253. Testimonium hominum omnibus conditionibus re-
quisitis vestitum, eamdem parit certitudinem metaphysicam
circa facta supernaturalia, quam parit circa facta naturalia.
Prob. Testimoniara enim hominum eamdem parit certi-
tudinem metaphysicam circa facta supernaturalia quàm
circa facta naturaha, si nihil efficere potest ut testes oculati
faciUiis decipiantur aut facihiis decipiant circa facta super-
naturaha quàm circa facta naturaUa; atqui nihil efficere potest
ut testes oculati. . . .&c. Si quid enim efficere posset ut testes
faciliùs deciperentur aut ut faciliùs deciperent circa facta su-
pernaturaHa quàm circa facta naturalia, esset sanè quia facta
naturalia consuetis naturse legibus consentanea à causis libe-
ris aut necessariis producuntur, facta verô supernaturalia,
extra consuetum naturœ cursum, à solo Deo producuntur.
Atqui produci à solo Deo extra consuetum naturse cursum
efficere non potest ut testes faciliùs decipiantur aut ut faci-
liùs decipiant.
lo. Quidem non potest efficere ut faciliùs decipiantur.
Quocumque enim modo producantur facta, sive à causis
liberis aut necessariis, sive à solo Deo extra consuetum na-
turse cursum, semper remanet eadem testium physica con-
stitutio^et consequenter eaedem semper rémanent sensatio-
nes. Ergo eadem ut decipiantur impossibilitas. Ergo. . &c.
2o. Non potest efficere ut faciliùs decipiant. Quod enim
majorem aut minorem non dat decipiendi facilitatem^ non
potest efficere ut testes faciliùs decipiant circa facta ; at-
qui produci à solo Deo extra consuetum naturae cursum non
dat majorem aut minorem. . . . &c.
Quicumque enim sit modus quo facta producantur, eadem
semper remanet testium indoles et eadem cupiditatum,
prËBJudiciorum et commodorum diversitas ; atqui ubi eadem
est testium indoles, et eadem cupiditatum, praejudiciorum
et commodorum diversitas, ibi eadem est decipiendi impos-
sibilitas. Ergo 2o. produci à solo Deo extra consuetum na-
turcE cursum, non potest efficere ut testes facihùs decipiant.
Aliundè nec ut faciliùs decipiantur. Ergo &c.
LOGICA. 85
Soîvuntur objectiones.
Obj. Ut haberi possit alicujas facti certitudo, requiritur
ut sit possibile ; atqui miraculum non est possibile. Ergo
.... &c.
Resp. Neg. min. Miraculum enim est infractio legum
physicarum ; atqui talis infractio est possibilis. Deus
enim qui leges physicas stabilivit, iis derogare potest.
Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Miracula sunt physicè impossibilia; atqui circa
facta pbysicè impossibilia, testimonium hominum non
potest parère certitudinem metaphysicam. Ergo. . . . &c.
Resp Neg. min. Ut enim testimonium hominum pariât
certitudinem metaphysicam circa facta physicè impossibilia,
sufficit si clarè constare possit testes nec esse deceptos, ne»
deceptores. Atqui utrumque clarè constare potest (253).
Ergo. . . . &c.
Inst. 2o. Certum est moraliter tantùm miraculum ex-
istere, dùm certum est physicè illud non existere. Atqui
hœc duarum certitudinum pugna demonstrat non existere
miraculum. Ergo. . . . &c.
254. Resp. lo. Neg. maj. Testimonium hominum non
tantùm parit certitudinem moralem, sed et metaphysicam
circa miracula (241).
Resp. 2o. Neg. min., et contendo nullam esse duarum
certitudinum pugnam. Quid enim significant istse duae
propositiones ; ''certum est moraliter (metaphysicèj existere
" miraculum ; certum est physicè non existere miracu-
" lum?" Id solum asserit certitudo physica miraculum non
existere quin derogatum fuerit legibus physicis, et asserit
certitudo moralis (metaphysica) iis legibus derogatum fuisse.
Ergo nulla est duarum certitudinum pugna.
Inst. 3o. Certitudo physica major est certitudine morali.
Ergo prudentius est rejicere testimonium hominum ut
falsum, quàm credere Deum derogavisse consuetis naturae
legibus.
255. Resp. Neg. ant. et consqam. Facile enim concipitur
Deum summè bonum, ad manifestandam suam potentiara,
vel ad patefaciendam aut confirmandam aliquam veritatem
saluti necessariam, posse derogare consuetis naturae legibus
quas ipse stabilivit ; at nullo modo concipi potest Deum
consuetas ordinis moralis leges et congenitas animas pro-
86 LOGICA.
pensiones velle mutare, ut homines crudeliter in errorera
invincibilem positive injiciat, nullumque tune eis suppe-
ditet mediura detegendi errons. Ergo nedùm certitudo
physica major sit certitudine morali, è contra certitudo
moralis major est certitudine pliysicâ. Ergo. . . . &c. Hâc
de re vide D. Frayssinous, Conférence sur les Miracles en
général, tom. 2. pag. 128, &c.
Obj. 2o. Ideô facta naturalia facile credimus, quia nul-
lum est in eis vincendum obstaculura ; atqui istud dici
nequit de miraculis, siquidem in illis vincenda est impossi-
bilitas physica. Ergo. . . , &c.
Rcsp. lo. Neg. maj., ut potè nimis generalem. Non
ideo facile credimus facta naturalia, quia in illis nullum est
vincendum obstaculum^ sed quia tune clarè constat testes
nec fuisse deceptos nec deceptores.
Resp. 2o. Neg. min. Impossibilitas enim illa non potest
esse obstaculum quominiis credantur miracula, quse tota stat
ex parte causarum naturalium, non autem ex parte Dei :
atqui, ex probatis, impossibilitas illa tota stat ex parte
causarum naturalium, non autem ex parte Dei. Ergo non
potest. . . . &c.
Inst. Difficiliùs credimus miraculum quàm factum natu-
rale. Ergo adest in miraculo obstaculum vincendum, quod
non reperitur in facto naturali.
256. Resp. lo. Difficiliùs credimus miraculum quàm
factum naturale; ergo difficiliùs est testes decipi aut decipere.
Resp. 2o. Dist. Ant. Quando probabilitatibus ducti
credimus ; conc. ant. Quando certitudine ducti credi-
mus ; neg. ant. et consqam. Haec differentia oritur ex
60 quôd sœpiùs in meris probabilitatibus stamus, quando
agitur de facto naturali ; quando autem agitur de miraculo,
non in meris probabilitatibus stare volumus, sed ad certi-
tudinem assurgere. At ubi facta severè expendimus, et ea
respuimus aut admisimus ducti evidentiâ testimoniorum,
nullus est sensatus, qui difficiliùs fidem adhibeat miraculo
quàm facto naturali, si utrumque iisdem evidentibus testi-
moniis nitatur.
Obj. 3o. Homines non possunt testari resurrectionera
hominis. Homines enim non possunt testari factum su-
pernaturale ; atqui resiirrectio est factum supernaturale.
Ergo. . . '. &c.
LOGICA. 87
257. Resp. Neg. ant.; ad prob. dist. maj. Non possunt
testari factuni supernaturale, si consideretur prout est
factura supernaturale; conc. maj. Si consideretur prout
est duorum factorum naturalium légitima consecutio ; neg.
maj. " Atqui resurrectio est factum supernaturale ;" dist.
min. Est factum supernaturale, sed considerari potest
prout est duorum factorum légitima consecutio; conc. min.
Secùs, neg. min. et consqam. Reverà homines non possunt
testari factum supernaturale, si consideretur ut factum
supernaturale, seu quoad modum, cùm ille modus sit ipsa
operatio divina, quae sub sensus cadére non potest ; sed
possunt testari factum supernaturale, prout est duorum
factorum naturalium légitima consecutio; sic, v. g., possunt
testari hominem fuisse mortuum ; pariter testari possunt
huncce hominem nunc vivere. Ergo testari possunt hune
hominem revixisse.
Inst. lo. Cum Davide Hume. Testimonium viginti aut
centum hominum nullius est roboris contra testimonium
uniforme omnium aliorum hominum qui anteà viserunt et
qui nunc existunt ; atqui testimonio omnium hominum
constat homines non resurgere, dum testimonio viginti aut
centum hominum refertur aliquot homines fuisse ressusci-
tatos. Ergo. . . . &c.
258, Resp. Dist. Maj. Testimonium viginti aut centum
hominum. . . . &c., si testimonium aliorum hominum sit
positivum, de re eâdem et oppositum ; conc. maj. Si sit
negativum, vel non de re eâdem, nec directe oppositum ;
neg. maj. " Atqui testimonio omnium hominum constat
. . . . &c ;" dist. min. Sedistud testimonium est merè nega-
tivum, dùm testimonium viginti aut centum hominum qui
referunt aliquot homines fuisse ressuscitâtes est positivum ;
conc. min. Secùs, neg. min. et consqam.
Testimonium est positivum, quandô testes factum quod
narrant, viderunt aut audierunt, &c. Testimonium est
negativum, quandô alii testes nihil contrarium huic facto vi-
derunt, audierunt, &c.
Reverà, si testimonium omnium hominum circa aliquod
factum sit positivum et directe oppositum testimonio quo-
rumdam hominum circa idem prœcisè factum, credendum
est potiùs testimonio omnium uniformi quàm paucorum.
Sed si testimonia non sint de re eâdem, vel si testimonium
88 LOGICA.
omnium uniforme sit duntaxat negativum, dùm testimo-
nium paucorum hominum est positivum, jàm horum testi-
monio fides adhibenda est.
Porrô quandô homines judicantomnes mori,et neminem,
juxta consuetas naturœ leges, reviviscerC;, eorum testimoni-
um est duntaxat negativum, nec est oppositum testimonio
viginti aut centum hominum de resurrectione alicujus ho-
minis operatione Dei patratâ. Ergo hoc testimonium nuU
hus est roboris.
Inst. 2o. Facihus est credere horainem non fuisse mor-
tuum, quàm credere illum resurrexisse. Ergo testes
etiam numéro plures non possunt aflSrmare resurrectionem
mortui.
259. Resp. Dist. Ant. Quandô non adsunt characteres
évidentes et certissimi mortis, quales sunt fetor, vermes,
certum tempus elapsum ab inhumatione ; conc. ant. Quan-
dô isti adsunt characteres ; neg. ant. Tune enim clarè
constat hune hominem fuisse mortuum, dum percipitur il-
lum posse reviviscere. " Ergo testes, etiam numéro plures,
" non possunt affirmare resurrectionem mortui ;" neg. cor-
sqam. Possunt enim isti testes percipere in homine omnes
characteres evidentissimse mortis, et consequenter affir-
mare possunt hune hominem reverà esse mortuum. At-
qui post ejus mortem sic perceptam, pariter percipere
possunt ejusdem hominis vitam. Ergo possunt et debent
concludere hune hominem resurrexisse. Ergo. . . . &c.
Obj. 4o. Plurimis ab omni retrô aetate anilibus fabulis,
falsisque miracuUs decepti sunt homines. Ergo rejicien-
dum est, semoto examine, quodcumque miraculum.
Resp. Neg. consqam. Ex eo quôd homines sic decepti
fuerint, sequitur duntaxat rejicienda esse omnia miracula
quae debitis conditionibus carent, non autem ea quae his
conditionibus donantur ; isto enim argumente induceretur
dubium générale historicum hoc modo ; " Omnes gen-
" tes plurima facta, quœ falsa sunt, referunt ; ergo re-
•' jicienda sunt omnia facta, nullo prsemisso examine :"
porrô quid absurdius? " En vain, inquit D.Frayssinous,on
" fait observer que l'histoire de tous les peuples abonde en
" prodiges ; les faux ne détruisent pas les véritables ;
" c'est comme si l'on faisait observer qu'il n'est pas d'his-
** toires fidèles, parce qu'il en est de fabuleuses, qu'il n'est
LOGICA. 89
" pas de véritable monnaie, parce qu'il s'en trouve de fausse
** dans la circulation." {Ibid, page 133.)
Principîa objectîoiium et soîutio.
Objectio la. Adeô portentosarum rerum amans est ge-
nus humanum, ut quodlibet portentum, etiam nuUo prae-
misso examine, credere inclinentur homines. Si huic pro-
pensioni adjungitur studium religionis, statim evanescit
communis sensus. Tanto ssepiùs teneri potest delirio homo
alicui religioni deditus, ut sibi videatur videre quod non vi-
det. Imô religionis studio abreptus, credet se narrare posse
facta quce falsa novit, ut tam sanctœ causae faveat.
260. Solutiola. Siistaportenta everterent religioneraseve-
rae moralis ad stabiliendam religionen quae faveret cupidita-
tibus, istad posset esse verum ; sed si everterent religionem
quae faveret cupiditatibus ut stabilirent religionem severae
moralis, istud esset irapossibile.
Sol. 2a. Quis admiserit sensum communem religione
evanescere (a) ? 3a. Religio Christiana tam severse moralis
est, ut à mendacio et etiam levissimo abhorreat, quantum-
vis ex eo religionis profluat utilitati.
Obj. 2a. Plurima referunt scriptores pagani miracula de
Diis suis, quse etiam monumentis et solemnitatibus confir-
mabantur : atqui tamen haec omnia inter fabulas annume-
randa sunt.
261. Sol. la, Inter fabulas annumeranda sunt, quia ca-
rent conditionibus ad stabiliendam alicujus facti veritatem
necessariis.
Sol. 2a. Facta illa absurda èrant, aut privata, etnulli ad-
versa : nulli unquàm appellati sunt testes ; publica non
erant. Cupiditatibus, commodis, famsepopulorum non ad-
versabantur ; è contra saepiùs favebant. Pleraque ut falsa
rejiciebantur.
Obj. 3a. Quô magis ignorantise et barbarie! tenebris ob-
volvuntur gentes, eô plura inter eas narrantur miracula ;
sic, si fides adhibeatur testimonio hominum, non pauca
tribui debent miracula Alexandre Paphlagonio, Appollonio
(a)\Ju philosophe peut voir, sans rougir, son nom à la suite de ceux des Bacon, des Des-
cartes, des Mallebranche, des Newton, dea Leibnitz, des Pascal, des Bussuet des Fénélon,
des Eiiler, des De Luc, des Cuvier, des Chainpoliioti, le jeune, des Abel Rémusat, «fec.
TouB ces génies supérieurs, faits pour reculer les bornes de l'intelligence humaine, révé-
raient la rt-ligion chrétienne comme l'ouvrage de Dieu, et prenaient hautement la défense
des livres saints, quoique plusieurs parmi eux n'eussent pas le bonheur de professer la vé-
rité toute entière.
90 LOGICA.
Tyanseo et pluribus aliis impostoribus qui, prasstigiis et
falsis prophetiis, populos illuserunt. Cur Ibrsau idem
dici non posset de miraculis quibus fundatur christiana
religio ?
262. Sol. la. Reverà gentes rudes et incultse facile dici-
pi possunt circa naturara et qualitates factorum ; undè fré-
quenter assumunt ut miracula facta merè naturalia. Eo
sensu frequentiora apud eas narrari debent miracula. Sed
ex aliâ parte, gens indocta et rudis minus idonea est ad ex-
cogitanda facta imaginaria, ut ea testetur tanquàm testis
oculatus. Si quandoquè aliquod factura portentosum narrent
homines rudes et inculti, minime ipsis à doctis creditur,
nisi evidens sit illos non fuisse deceptos aut deceptores.
Sol. 2a. Miracula quse tribuuntur Alexandro, Apollonio,
aliisve impostoribus, carent omnibus conditionibus requisi-
tis hominum testimonio, et omninô differunt à miraculis
quibus fundatur christiana religio ; miracula Christi, v. g.,
mundum illustrârunt, ad verum Dei cultum homines revo-
cârunt, &c ; Alexandri et ApoUonii prsestigia nihil talium
efFecerunt. Hœc falsitatis et imposturse esse plena osten-
derunt scriptores non solîam christiani sed et pagani ; ista
esse falsa nunqùam demonstrârunt hostes infensissimi reli-
gionis christianse, Hâc de re vide D. Feller, Dictionnaire
historique, art. Alexandre de Paphlagonie et Apollonius de
Tyane.
Obj. 3o. Cum Spinosâ. Miracula sunt impossibiha. Dé-
créta enim Dei sunt immutabilia ; atqui leges naturag nihil
aliud sunt quàm ipsa Dei décréta. Ergo. . . . &c.
263. Sol. la. Leges natures stabilitte sunt à voluntate
Dei ; ex hâc voluntate deducuntur ; sed minime sunt quid
unum et idem cura Dei voluntate, seu, quod idem est, non
sunt ipsissima Dei décréta.
Sol. 2a. Deus, qui ab omni œternitate in suis decretis
stabilivit leges physicas, pariter ab omni œternitate sta-
bilivit iisdem legibus derogatum iri in tali vel tali cir-
cumstantiâ.
Obj. 4a. Cum cive Genevensi ( J. J. Rousseau). Non
potest haberi certitudo de existentiâ miraculi, quin priùs
noscatur nùm Deus potuerit et voluerit patrare miraculum
istud. Potuit quidem : sed voluitne ? Quis unquàni legit
in decretis divinis ?
LOGICA. 91
Sol. la. Qusestio hic non est nùm Deus voluerit patrare
miraculum, sed nùm potuerit, et niim reipsà patraverit ?
Sol. 2a. Eodem modo dubitari posset nùm Deus creave-
rit mundum ? quia incertum est nùm potuerit et nùm volu-
erit illum creare ?
Obj. 5a. Vera miracuîa àprœstigiis secerni non possunt.
Ergo sunt inutilia.
264. Sol. Sunt régulée infallibiles quibus facile secerni
possunt. la. Quando invocatione veri Dei patrantur ; Deus
enim, si tune essent falsa, nos ineluctabiliter,etiam invites,
in errorem invincibilem projiceret. 2a. Quando patrantur
ad patefaciendam vel ad confîrmandam aliquam veritatem
salurti necessariam, et hic est miraculi finis, qui semper dé-
bet esse bonus, honestus et sanctus. 3a. Quando ità pa-
trantur miracuîa, ut severrimo examini subjici possit utrùm
sint reverà operationes supernaturales.
V. De Revelatione divinâ.
265. Revelatio divinaest alicujus veritatis externa mani-
festatio à Deo facta. Evidens est Deum plura coguoscere
nobis prorsùs incognita, et quse mens, ut potè finita, nulla-
tenùs percipere potest. Res illse dicuntur esse supra ratio-
nem, quia rationis vires superant.
Propositio prima.
266. Licèt aliquid sit supra rationem, non idcircô est
contra rationem.
Prob. Illud enim est supra rationem, cuj us mens percipere
non potest connexionem cum principio clarè cognito ; v. g.
•' natura unionis mentis cum corpore :" illud autem est
contra rationem quod principio certo répugnât ; v. g.,
'' materia cogitare potest ;" atqui hsec duo plané diversa
sunt. Ergo. . . .&c. Hinc omnes, et etiam philosophi, innu-
raeras, tùm in ordine intellectuali, tùm in ordine physico,
veritates necessariô inter se connexas et cum principio
certo, admittere cogantur, quamvis hanc connexionem per-
cipere non possint.
Propositio secunda.
267. Revelatio divina parit certitudinem metaph3'sicam.
Prob. Testimonium enim entis quod essentialiter nec
falli nec fallere potest, parit certitudinem metaphysicam ;
92 LOGICA.
atqui reveîatiô divina est testimonium entis quod essentia-
liter nec falli nec fallere potest. Ergo. . . . &c.
268. Hinc lo. Revelationi divinœ debetur assensus etiam
in his quse sunt supra rationem. Semper enim debetur
assensus, etiam in his quge sunt supra rationem, auctoritati
quse parit certitudinem metaphysicam ; atqui revelatio divina
parit certitudinem metaphysicam (267). Ergo. ...&c.
" Quand je suis certain que c'est Dieu qui parle, inquit D.
*' de Montazet, je n'ai plus qu'à l'écouter, et à me taire.
*' Les vérités que je connais, et celles qui passent ma
*' portée, viennent de la même source." ^Instruction
pastorale sur les sources de Vincre'dulité et sur les fondemens
de la Religion).
269. Hinc 2o. Mysteria religionis christianae firmissimè
credenda sunt, licèt sint supra rationem. Rev^elationienim
divinee debetur assensus etiam in his quse sunt supra ratio-
nem (268). Atqui revelatio nobis proponit mysteria reli-
gionis christianae. Ergo. . . . &c.
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Debemus sequi solam rationem. Ergo. . . . &c.
Resp. lo. Neg. ant. Deus enim cognoscit plures veri-
tates saluti necessarias, quas penitùs ignorât humana ratio.
Ergo potiùs Deum sequi debemus quàm ipsam rationem.
Resp. 2o. Neg. consqam. Debemus sequi rationem, ex
argumento; atqui ratio praecipit ut sequamur Deum veritates
suas revelantem. Ergo. . . .&c.
Obj. 2o. Ea sola mens credere potest et débet, quee
sunt evidentia : atqui mysteria religionis christianae non
sunt evidentia. Ergo mens non débet nec potest. . . . &c.
270. Resp. Dist. Maj. Ea sola mens credere potest et
débet quae sunt evidentia vel objective, vel testimonialiter,
Conc. maj. Quœ sunt evidentia objective ; neg. maj. "Atqui
" mysteria religionis christianœ non sunt evidentia ;" dist.
min. . . . non sunt evidentia objective ; conc. min. . . . non
sunt evidentia testimonialiter ; neg. min. Illud evidens est
objective cujus mens clarè percipit necessariam connexio-
nem cum principio certo ; illud autem evidens est iestimo-
nialiter^ quod mens videt relatum ab auctoritate quae nullo
modo falli aut fallere potest.
Reverà mens nihil credere potest et débet quod non sit
evidens aliquo modo ; sed non idcircô ea sola credere débet
LOGICA. 93
et potest quœ sunt evidentia objective. Mens enim credere
potest et débet ea quse certissimè novit esse vera ; atqui
mens certissimè novit ea esse vera, quai sunt evidentia
testimonialiter. Ergo mens credere potest et débet ea quse
sunt evidentia testimonialiter. Mysteria religionis chris-
tianae non sunt quidem evidentia objective, sunt enim supra
rationem ; sed evidentia sunt testimonialiter ; revelantur
enim ab ipso Dec qui essentialiter nec falli nec fallere potest.
Hâc de re audiatur D. Frayssinous, (Conférence sur la Reli-
gion considérée dans les Mystères, tom. 3, pag. 230, kcj
Mais, dit encore l'incrédule, je dois être raisonnable
avant d'être chrétien ; pourquoi voulez-vous que je me
soumette aveuglément à ce que je ne comprends pas ?
La foi doit-elle étouffer la raison ? Non, Messieurs,
non ; quand on s'entend bien, on voit clairement que la
raison elle-même nous conduit à la foi. C'est elle qui
nous ouvre les portes du divin Sanctuaire ; là elle nous
remet dans les bras de la religion et nous laisse sous
son empire. Guidé par la raison je découvre que Jésus-
Christ et les apôtres ont paru sur la terre, qu'ils ont donné
des preuves manifestes de leur mission divine; j'ai sur
ces faits le même genre de certitude que sur l'existence de
César et de ses conquêtes dans les Gaules. Ces faits, la
raison les discute, les approfondit : voilà sur quoi tombe
l'examen du chrétien. Je vous invite au nom de la
religion à examiner les titres qu'elle croit avoir à vos
hommages ; ils sont à l'épreuve du tems, de la critique
et des passions conjurées, et quelques argumens de nos
jours ne renverseront pas ce que dix-huit siècles de
combat n'ont fait qu'affermir. Mais aussi, une fois que
la raison nous a convaincus de l'autorité divine de Jésus-
Christ et de ses disciples, cette même raison nous com-
mande impérieusement de nous soumettre à leurs ensei-
gnemens et d'abaisser notre faible intelligence devant
l'intelUgence suprême. Quand Dieu parle, il faut que
l'homme se taise. Ainsi dites tant qu'il vous plaira, que
la foi est obscure dans les objets de la croyance ; qu'im-
porte, si elle est très-lumineuse dans les motifs que nous
avons de croire ? Oui, si la raison ne rend pas les
mystères intelhgibles, elle les rend certainemt croyables.
....Lorsque nos jeunes incrédules se permettent de
94 LOGICA.
*• traiter nos mystères avec tant de légèreté, et croient y
" apercevoir des contradictions, ont-ils bien pensé que les
*' difficultés qui les arrêtent n'ont point arrêté les plus beaux
" génies de la terre, et que ces contradictions prétendues
*' ont été extiminées, discutées par ce que l'Europe a produit
"^ depuis trois siècles de plus grands philosophes, tels que
" Bacon, Descartes, Pascal, Leibnitz, &c. Et quand on
** est à peine initié soi-même aux secrets de la haute
** métaphysique, comment ose-t-on sans réflexion voir
*' dans nos mystères des absurdités que n'y ont point
" aperçues ces mêmes hommes que nous révérons encore
*' comme les princes et les créateurs des sciences mo-
*' dernes."
VI. De Memoriâ.
271. Mens affectiones suas percipit, vel quateniis actu
prœsentes et existentes, tuncque sensum intimum aut seri-
sationes habere dicitur, vel quatenùs praeteritas, et tune
memoriam seu recordationem, vel reminiscentiam habet.
272. Eo plura è memoriâ evaserunt, vel quô longius
effluxit tempus ex quo illa experti sumus, vel quô minorem
impressionem in nobis eiFecerunt, ut experientiâ constat.
Status igitur qugestionis non est utrùm memoriâ sit iufal-
libilis eo sensu quod référât omnia quee experti sumus, sed
utrùm sit infallibilis eo sensu, quod non possint homines
sibimet ipsis testari se audivisse aut vidisse facta quae neque
audierunt neque viderunt.
Propositio.
273. Memoriâ est motivum infallibile judicandi de prse-
teritis affectionibus nostris.
Prob. Deus non potest nos decipere ; atqui si memoriâ
non esset motivum infallibile. . . . &c., Deus ipse nos deci-
peret ; naturali enim et invictâ propensione ferimur ad ju-
dicandum quasdam in nobis exstitisse affectiones,qu£e tamen
non exstitissent, si memoriâ non esset. . . .&c. Ergo tune
in errorem invincibilem, etiam inviti, induceremur. Ergo
Deus auctor illius propensionis, pariter auctor esset erroris.
Ergo. . . . &c.
Et verô, memoriâ est motivum. . . &c.j si sit ultima
ratio quam reddere possimus de nostrâ certitudine circa
res praeteritas: atqui memoriâ est ultima. ... &c.; si enim
LOGIC A. 95
ab aîiquo queeratur car certus sit se, v. g., heri exslitisse,
hanc domuni esse suam, &c., statim reponet id sibi memo-
riâ constare. Ergo. . . . &c.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. Sœpè ssepiùs dicimus memoriam nos fallere. Ergo
&c.
Resp. Neg. consqam. Ideô enim dicimus memoriam nos
fallere, vel quia nitimur aliquid in memoriam revocare nec
possumus, vel quia levi suspicione animique prœcipitatione
res quasdam prseteritas nos afFecisse judicamus, quamvis
reipsà nos non afFecerint, nec propensionem invincibilem
habeamus quse nos ad taie judicium impellat. Tune ergo
potiùs defectu memoriae quàm ipsâ raemoriâ falliraur.
274. Hinc ut memoria sit motivum. . . . &c., requiritur
ut mens sit sana, et ut recordatio sit constans, uniformis
et invincibilis ; si quis cum invincibili hâc propensione
vagam, fugacem, et transitoriam inclinationem confundat,
errabit quidem, sed error ex ipsius prsecipitatione et teme-
ritate orietur, non verô ex memoriâ propriè dicta. Ergo
&c.
VIL De Anaîogia.
275. Anaîogia est quoddam argumentandi genus ex simi-
litudinibus deductum, quo, de ignotis nondiim observatis,
judicamus ex eis quse in eodem génère cognoscimus. Ex eo
quôd, V. g., corpora in America gravitent, rectè concludi-
tur ea in aliis terrée partibus gravitare. Pariter ex eo quôd
adsit in hominibus, qui nunc existunt, principium ideandi
capax saltem potentiâ, concludi débet idem principium
semper adfuisse in omnibus hominibus qui anteà vixe-
runt.
Ne anaîogia nos in errorem inducat, summoperè curan-
dum est, ut inter rem observatam et rem nondùm observa-
tam, plurimse et verœ sint similitudines.
Sic erraret incola zonœ torridse qui, judicans aquam essen-
tialiter esse liquidam, mendacii accusaret qui narrarent flu-
mina, in quibusdam aliis regionibus,ità aliquoties constrin-
gi, ut ferre possint maxima pondéra.
Propositio.
276. Anaîogia pluribus in circumstantiis est motivum
omninô certum judicandi.
96 LOGICA.
Prob. Tota vis enim analogise consistit in constantiâ le-
gum naturalium : atqui constantiâ legura naturalium est
motivum judicandi omninô certum. Nisi enim res ità foret,
hominum vita perpetuis anxietatibus torqueretur, cùm sem-
per in dubio essemus niim similes causas sirailes producerent
efFectus : atqui istius modi anxietas divinae providentiss ad-
versatur. Ergo constantiâ legum naturalium est motivum
judicandi omninô certum. Ergo. . . . &c.
VIII. De Dubio.
277. Dubium generatim est suspensio assensûs ex metu
errandi. Duplex est, methodicum et e-ff^ectivum.
278. Dubium methodicum est libéra et simulata mentis
hgesitatio ; sive est actus quo quis eodem modo se gerit ac
si reipsâ dubitaret, ut maturiùs expendat et perlustret ra-
tiones quibus aliquid nititur aut refellitur. Hoc est dubium
Cartesii.
279. Dubium effectivum est suspensio assensûs propter
œquales hinc et indè rationes. Quidam fuerunt olim philo-
sopiii qui se de omnibus dubitare affirmabant. In duas
classes dividebantur. Alii nomine Sceptici seu Pyrrhonii,
nullateniis dubitantes de rerum apparentiis et de his quse
sensu intimo nituntur, dubitabant de rébus prout in se sunt,
quia œquales bine et indè rationes ubiquè apprehendere sibi
videbantur. Eorum axioma erat ; "omni rationi sequalis op-
" ponitur ratio." Non negabant tamen quaedam esse judicia
suis contradictoriis probabiliora, ideoque concedebant spem
esse detegendse veritatis. Alii nomine Acateleptici verita-
tem unquàm detegi posse desperantes, de omnibus omninô
dubitabant, et etiam de illis quœ sensu intimo nituntur.
Cum hujuscemodi hominibusnullapotest esse sana contro-
versia. Itaque contra scepticos sit
Projwsilio.
280. Dubium générale effectivum admitti non potest.
Prob. lo. Est impossibile. Dubium enim est suspensio
assensûs propter œquales hinc et indè rationes ; atqui plura
sunt circa quœ hœc suspensio est impossibilis. Sit,v. g.,
ista propositio ; " qui cogitât, existit ;" atqui circa hanc
propositionem nemo sanœ mentis potest esse suspensus
propter œquales hinc et indè rationes. Ergo dubium géné-
rale effectivum est impossibile.
LOGICA. 97
Prob. 2o. Dabiuni générale efFectivum est contradicto-
rium. Sceptici non dubitantes de rébus quse sensu intimo
nituntur dubitant de judiciis quP3 rerum naturâ fundantur :
atqui heec duo sunt contradictoria. Veritas enim sensûs
intimi nititur hoc axiomate ; " idem non potest esse simul
" et non esse ;" quod ipsuin axioma rerum naturâ funda-
tur. Ergo. . . . &c.
Prob. 3o. Dubium effectivum subvertit omnia principia :
atqui ubi nuUa sunt principia^ ibi nulla est spes detegendas
veritatis. Ergo Pyrrhonii frustra veritatem inquirunt frus-
tràque sceptici vocantur, id est, inqiiisitores.
Prob. 4o. Dubium effectivum subvertit omnia principia
juris tùm civilis, tùm divini, tiira naturalis. Ergo fun-
ditùs subvertit societatem, mores et religionem. Ergo est
rejiciendum.
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Pyrrhonii dubitant de omnibus. Ergo dubium
générale effectivum est possibile.
281. Resp. Dist. Ant. Ore tenus ; conc. ant. Reipsà ;
neg. ant. et consqam. Sua enim agendi ratio eos mendaces
arguit. Nam ipsi Pyrrhonii, si esuriant, edunt ; si sitiant,
bibunt ; si segrotent, medicum consul unt ; si bonis suis in-
juste spolientur, cogitant de mediis ad ea recuperanda ne-
cessariis ; efficaciora pras cseteris reipsà eligunt et adhibent ;
sicque abstinent à dubio in commercio civili, et insani esse
volunt tantùm in speculatione. Ergo. . . . &c. Insuper^ cùm
se de omnibus dubitare jactitant, vel volunt sibi fidem ad-
hiberi, vel nolunt. Si prius, ergo agnôscunt aliquid esse ve-
rum, scilicet, de omnibus dubitandum esse ; si posterius,
ergo sentiunt contra id quod ore profitentur.
Obj. 2o. Illud dubium non est rejiciendum, quod confu-
tarinequit; atqui dubium scepticorum. . . . &c. Ergo.. . .&c.
Resp. Neg. min. Demonstratur enim hoc dubium esse
impossibile (280). Ergo confutari potest.
Inst. Illud dubium confutari nequit, quod,diim refelli in-
cipit, eo ipso jàm confutatum supponitur. Atqui dubium
scepticorum. . . . &c. Vel enim supponitur aliquod principi-
um certum ut refellatur, vel non supponitur : si prius ;
ergo jàm confutatum supponitur : si posterius ; ergo non
validé confutatur. Ergo, . . .&c.
98 LOGIC A.
282. Resp. lo. Dist. Maj. Illiul dubiura confutari ne-.
quit....&c., si principium confutationis indigeat aliquâ
probatione ; conc. maj. Si principium confutationis non in-
digeat probatione ; neg. maj. ''Atqui dubium scepticorum,
*• dùm refelli incipit, jam confutatum supponitur ;" dist.
min. Sed principium confutationis nullâ indiget probatione ;
conc. min. Principium confutationis aliquâ indiget proba-
tione ; neg. min. Reverà dubium scepticorum in ipso dis-
putationis initio supponitur confutatum, sedper principium
ità per se clarum et evidens, ut mentis assensum necessario
rapiat, insanusque sit qui tanta:^ luci resistit.
Resp. 2o. Neg. min. Illud dubium confutatum non sup-
ponitur, quod rejicitur demonstratione ab absurdo ; atqui
dubium scepticorum rejicitur demonstratione ah absurdo.
Sic enim ratiocinari licet ; supponamus hoc dubium ad-
mitti ; jàm via patet omnibus flagitiis, rumpuntur societa-
tis vincula ; nulla fides juramentis ; jàm evanescit omnis
religio ; jàm Imic propositioni, " totum est maj us suû par-
'* te," datur propositio contradictoria sequalibus nixa ratio-
nibus : atqui hœc omnia nullo modo admitti possunt.
Ergo dubium scepticorum rejicitur demonstratione ab absur-
do. Ergo....&c.
Obj. 3o. Mens humana non est cognitionis capax ; ergo
de omnibus dubitandum est.
Resp. Neg. ant. Mens enim plurimarum propositionum
veritatem infallibiliter percipit; sic infallibilitcr pcrcipit "to-
" tum esse majus sua parte." Ergo est cognitionis capax.
Inst. lo. Mens errori obnoxia est. Ergo non est, . . .&c.
283. Resp. Dist. Ant. Inquibusdam; conc. ant. In om-
nibus ; neg. ant. Reverà ciim mens judicat ex motivo in-
certo et faÙaci, errori obnoxia est : sed quoties ex motivis
infallibilibus judicat, nullum est errandi periculum. Atqui
plurima sunt motiva infaliibilia judicandi, ut jàm vidimus.
Ergo....&c.
Inst. 2o. Errori mens obnoxia est, quia est finita : atqui
finita est in omnibus. Ergo errori olinoxia est in omnibus.
284. Resp. Dist. Maj. Mens errori obnoxia est in qui-
busdam, quia est finita ; conc. maj. Errori obnoxia est in
omnibus ; subdist. maj. In omnibus adœquatè sumptis ;
conc. maj. In omnibus inadccquatc sumptis ; neg. maj. Con-
cessâ min. dist. consequens. Ergo mens errori obnoxia est
LOGICA. 99
iii omnibus adrcquatè sumptis ; conc. consqam. In omnibus
inadœquatè sumptis ; neg, consqam.
Res aliqua considerari potest adœquate vel inadœquatè.
In priori casu, consideratur sub omnibus respectibus suis ;
in posteriori vero, sub aliquot tantùm respectibus conside-
ratur. Reverà mens errori obnoxia foret in onmibus, quia
finita est, si cognoscere deberet omnes rerum respectus, ut
quid certi pronuntiaret ; sed haec cognitio omnium respec-
tuum alicujus rei non est necessaria, ut quid certi mens de
eâ pronuntiet ; sic, v. g., licèt non cognoscam omnes mentis
mctE proprietates, hanc optimè cognosco, illam cogitare.
Inst. 3o. Ideo Deus infallibilis est in omnibus, quia in
omnibus infinitus est. Ergo à pari, mens in omnibus falli-
bilis esse débet, quia in omnibus est finita.
Resp Neg. consqam. et paritatem. Ex eo quod Deus
sit in omnibus infinitus, rectè quidem concludi débet illum
esse in omnibus infallibilem ; rerum enim omnium respec-
tus omnes cognoscit : at ex eo quôd mens humana sit fini-
ta, concludi non potest illam nuUos rerum respectus cog-
noscere, nec proindè eam in omnibus esse faliibilem^ si res
inadœquatè spectentur.
Obj. 4o. Dubium eiFectivum est libratio mentis inter
tequales et oppositas hinc et indè rationes. Atqui hœc li-
bratio in omnibus est possibilis ; omnienim rationi reperiri
potest opposita ratio.
Resp. Neg. min. Ad probationem, dist. ant. Omni rati-
oni reperiri potest opposita ratio futilis et insana ; conc.
ant. Sana et œquiponderans ; neg. ant. et consqam. Sic,v. g.,
rationi quae mibi testatur totum esse majiis sud parte opponi
non potest nisi ratio futilis et insana. Porro talis ratio nul-
latenùs mentem sollicitare potest. Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Licèt hcec ratio nondùm apparuerit, fortassis
est in rerum naturâ et aliquando apparebit. Ergo omni ra-
tioni opponi potest ratio sana et œquiponderans.
Resp. Neg. ant. Sunt enim queedam axiomata adeo ve-
ra, certa et evidentia, ut nullœ sint, nec esse possint ratio-
nes quee eorum veritatem contralibrare queant.
Inst 2o. Rationes Dogmaticorum non apparuerunt ante
dogmaticos, erant tamen in rerum naturâ. Ergo à pari, li-
cèt omnibus rationibus rationes oppositae et œquales nondimi
apparuerint, fieri tamen potest ut sint in rerum naturâ.
g2
100 LOGICA.
285. Resp. lo. Neg. suppositum antecedentis. Supponit
enim antecedens fuisse tempus quo homines ignoraverint
his duo dure quatuor : idem non posse esse simul et non esse :
porro quid absurdius ?
Resp. 2o. Neg. consqam. et paritatem. Disparitas est
quod rationes dogmaticorum, de quibus nunc agitur, cùm
sint totidem veritates ex principiis veris evideiiter flu-
entes, antequàm detegerentur, necessario fuerunt in rerum
naturâ. Contra verô, cùm rationes scepticorum, veritatibus
illis oppositse, sint quid fictitium et contradictorium, nun-
quàm fuerunt nec esse possunt in rerum naturâ.
Obj. 5o. De omnibus dùbitandum est, si res nullœ
certa3 sint quoad existentiam ; atqui nulla3 res....&c.
lUœ enim res certae non sunt quoad existentiam, quœ tam
possunt concipi non existentes quàm existentes : atqui res
omnes. ...&c. Ergo....&c.
286. Resp. lo. Neg. maj. Ut enim dùbitandum esset de
omnibus, non sufficeret, si res nullte essent certae quoad
existentiam ; requireretur insuper ut certœ non essent quoad
essentiam,
Resp. 2o. Ad probationem, neg. maj. Licèt enim res
aliqua posset concipi non existens sequè ac existens, nihilo-
miniis certum esse potest illam existere, si possit esse, et
sireveràsit motivum infallibile judicandi illam existere;
atqui soepè sœpiùs est motivum infallibile judicandi rem
existere, licèt res ilia possit concipi non existens aequè ac
existens, ut experientiâ constat. Ergo. . . .&c.
Obj. 6o. Si quaedam daretur certitudo, vel de universali-
bus, vel de singularibus. Atqui neque de universalibus
&c. Ergo. . . . &c.
Resp. Neg. min., quoad utramque partem. Danturenim
propositiones tùm universales, tùm singulares certissimae :
V. g., omnis circulus est rotundus : ego cogito, S^c. Ergo
&c.
Inst. lo. De universalibus certitudo haberi non potest,
quin fiât singularium enumcratio. Atqui haec cnumeratio
est impossibilis. Ergo. . . . &c.
287. Resp. E^st. Maj. In materiâ contingenti ; conc.
maj. In materiâ necessariâ ; neg. maj. et consqam. In
materiâ enim necessariâ sufiicit si clarè percipiatur attribu-
tum propositionis universalis essentialiter convenire subjec-
LOGICA. loi
to ; tune eiiim quod dicitur de uno, dicitur de omnibus :
porrô dantur hujusmodi propositiones. Ergo. . . . &c.
Inst. 2o, Cognosci non potest an propositio sit in mate-
riâ necessariâ, an sit in materiâ contingenti. Ergo. .. . &c.
Resp. Neg. ant. Nam propositio est in materiâ necessa-
riâ, quandô attributum essentialiter convenit subjecto, seu,
quod idem est, quandô subjectum concipi non potest sine
attributo ; atqui istud cognosci potest. Ergo. . . . &c.
Inst. 3o. Omnia singularia sunt contingentia : atqui non
potest haberi certitudo de contingentibus. Ergo. . . . &c.
288. Resp. lo. Neg. maj. Deus enim est maxime sin-
gularis : atqui tamen non est contingens. Ergo. . . . &c.
Resp. 2o. Dist. Min. Haberi non potest certitudo abso-
luta de contingentibus ; con. min. Certitudo hypothetica ;
neg. min. et distincto conséquente, neg. consqam.
Certitudo àbsoluta ea est quae rerum naturâ fundatur in-
dependenter à quâcumque hypothesi ; sic absolutè certum
est circulum esse rotundum. Certitudo hypothetica ea est
quœ pendet ab aliquâ hypothesi ; v. g., si fallor, exista.
Reverà haberi non potest certitudo àbsoluta de contingenti-
bus, cùm absolutè possint existere vel non existere ; sed de
his haberi potest certitudo hypothetica, si consequenter ab
aUquâ hypothesi certâ constare possit rem aliquam contin-
gentem reipsà existere, seu, quod idem est, attributum con-
tingens reipsà convenire subjecto. Atqui res ità se habet.
Sic ex hypothesi quod cogitem, certum est me exis-
tere. Ergo de contingentibus haberi potest certitudo hy-
pothetica, quae quidem est vera certitudo, omneque tollit
dubium.
Finis Logicœ,
102
INDEX LOGIC^E.
• Num.
Definitio et divisio philosophiae, 1
Pars prima Philosophiae.
Logica. 3
Caput primum, de prima mentis operatione, seu de
cogitatione.
I. De naturâ cogitationum, 5
IL De origine cogitationum, 12
III. De cogitationum objecto, 24
Propositio prima, 27
Solvuntur objectiones, 28
Propositio secunda, 33
Solvuntur objectiones, 33
CoroUarium, 35
IV. De cogitationum proprietatibus.
1. De cogitationum veritate, 36
Propositio. Omnis cogitatio est necessario et essen-
tiaUter vera, 37
2. De cogitationum claritate et distinctione, 39
Propositio. Omnis cogitatio est clara et distincta, 42
V. De simplicitate et compositione cogitationum, 44
VI. De variis cogitationum speciebus, 50
VII. De cogitatione prout signis extra mentem mani-
festatur, 55
1. De gestu, 58
2. De voce seu de locutione, 63
3. De inventione linguarum, 68
4. De scripturâ, 79
Caput secundum, de secundâ mentis operatione, seu
de judicio.
I. De judicio prout in mente latet, 87
II. De judicio prout verbis manifestatur, seu de propo-
sitione, 94
1. De proprietatibus absolutis propositionum.
De quantitate propositionum, 97
De quaUtate propositionum, 102
De affirmatione aut negatione propositionum, 103
Axioma lum, attributum propositionis afRrniantis
est particulare, 104
INDEX LOGIC.E. 103
Num.
Axioma Ilum, attributum propositionis negantis
est universale, 106
De veritate et falsitate propositionum, 111
2. De proprietatibus relativis propositionum.
De conversione propositionum, 119
Régulas conversionum, 120
De oppositione propositionum, 122
Propositio prima. Duee propositiones contradictoriœ
non possunt esse simul verae nec simul laisse, 127
Propositio secunda. Duee propositiones contradicto-
riae non possunt esse simul verœ, sed possunt esse
simul falsœ, 129
Caput tertium, de tertiâ mentis operatione, seu de
discursu, 131
I. De regulis syllogismorum.
Régula prima; très esse debent in «yllogismo ter-
mini, nec plures nec pauciores, 147
Régula secunda ; nuUus terminus universalior esse
débet in conclusione quàm in prœmissis, 148
Régula tertia ; médius terminus saltem semel uni-
versaliter sumi débet, 149
Régula quarta ; médius terminus non débet ingredi
conclusionem, 150
Régula quinta ; ex duabus prœmissis negantibus
nihil concludi potest, 153
Régula sexta; ex duabus affirmantibus erui non
potest conclusio negans, 156
Régula septima ; si una prœmissarum est negans,
conclusio débet esse negans ; si una est particu-
laris, conclusio débet esse particularis, 157
Régula octava ; ex duabus praemissis particularibus
nihil concludi potest, 1 58
IL De variis syllogismorum speciebus.
De syllogismo simpliei, l^î)
complexe, 159
conditionali, 160
disjunctivo, 163
copulativo, 165
HT. De communioribus sophismatibus, 166
Caput quartum, de quarta mentis operatione seu de
methodo, 181
104 INDEX LOGICiE.
Num
I. De definitione, 184
II. De divisione, 1 90
III. Leges analysi et synthesi communes, 191
IV. Leges analysis, 192
V. Leges syntheseos, 193
Exemplum utriusque methodi, 194
Caput quintum j de motivis infallibilibus judiciorum
nostrorum, 196
Novae quorumdam philosophorum opiniones circa
fundamentum certitudinis, ] 98
Opinio Domini de la Mennais, • 201
I. De sensu intimo, 206
Propositio. Sensus intimus est motivum infallibile
judicandi de praesenti animae nostrse statu, 207
Solvuntur objectiones.
IL De evidentiâ, 211
Propositio. Evidentiâ est motivum infallibile judican-
di de convenientiâ aut disconvenientià cogitatio-
numinterse, 212
III. De sensuum relatione, 217
Propositio. Sensationes debitis vestitse dotibus pro-
bant esse corpora, 225
Solvuntur objectiones.
IV. De testimonio hominum, 231
Propositio prima. Testimonium hominum omnibus
conditionibus requisitis vestitum, parit certitu-
dinem metaphysicam circa facta naturalia cose-
tanea, 241
Solvuntur objectiones.
Propositio secunda. Testimonium hominum. . . .
&c., parit certitudinem metaphysicam circa facta
antiquiora, 245
Solvuntur objectiones.
Propositio tertia. Testimonium hominum. . . . &c.,
eamdem parit certitudinem metaphysicam circa
facta supernaturalia, quam parit circa facta natu-
ralia, 253
Solvuntur objectiones.
Principia objectionum et solutio, 260
V. De revelatione divinâj 265
INDEX LOGIC^. 105
Aum.
Propositio prima. Licèt aliquid sit supra rationeni,
non idcîrcô est contra rationem, 266
Propositio secunda. Revelatio divina parit certitu-
dinem metaphysicam, 267
Solvuntur objectiones.
VI. De memoriâ, ^ 271
Propositio. Memoria est motivum infallibile judi-
candi de prœteritis afFectionibus, 273
Solvuntur objectiones.
VIL De analogiâ, __ ^'^
Propositio. Analogiâ pluribus in circumstantiis est
motivum omninô certum judicandi, 276
VIII. De dubio, . . ^'^'^
Propositio. Dubium générale efFectivum admitti
non potest, 280
Solvuntur objectiones, 281
Finis Indicis Logicœ.
106
JNSTITUTIONUM PHILOSOPHICARUM
PARS SECUNDA.
METAPHYSICA.
METAPHYSICA est ea pars Philosopbiae quee de
entibus supra naturam corpoream positis trac-
tât. Duplici modo ens aliquod à naturâ corporeâ secerni
potest ; nempè, per mentis abstractionem, et per suam na-
turam. Qu3e per mentis abstractionem à naturâ corporeâ
secernuntur, sunt ens in génère et ejus proprietates, et sunt
objectum Ontologiœ^ seu Metaphysicœ geueralis. Quœ verô
per suam naturam à materiâ secernuntur, sunt spiritus, et
constituunt objectum Pneumatologiœ seu Metaphysicœ par-
ticularis.
De Ontologiâ speciatim non disseremus, et notiones quae
in eâ tractari soient, exponemus prout opus erit. Itaque
DE PNEUMATOLOGIA,
SEU DE METAPHYSICA PARTICULARi.
2. Pneumatologia idem significat ac sej-mo de spiritu.
Spiritus autem vel est increatus, vel creatus. Sol us Deus
est spïritus inci'eatus. Mens humana et Angeli sunt 6'pm-
tus creati. De angelis nibil dicemus, eorum enim sola pos-
sibilitas à viro philosopbo astrui potest. De Deo et de men-
te humanâ duntaxat agemus. Pars in quâ disseritur de Deo,
Theodicea seu Theologia naturalis vocatur, et pars in quâ de
mente humanâ agitur, PsycJiologia dicitur.
PARS PRIMA PNEUMATOLOGIiE SEU METAPIIYSICiE
PARTICULARIS.
DE THEODICEA.
3. Theodicea seu Theologia naturalis est scientia Dei na-
turali lumine cogniti, id est, cogniti per quamcumque tra-
ditionem, quam sibi transmittunt homines in socictate vi-
ventes. Hâc igitur prselucente rationis face, invcstigabimus
lo. An sit Deus ? 2o. qucenam sint ipsius attributa ?
CAPUT PRIMUM.
AN SIT DEUS.
4. Nomine Dei intelligitur ens quod in se continet omncs
perfectiones possibilcs et in summo çradu ; ens quod nul-
METAPIIYSICA. 107
lam suî causam externam agnoscat, et sit omnium omiiino
rerum causa. Hœc est Dei notio quam tenent Theistœ et
Athei.
5. Theista est ille qui Deum esse crédit. Vocatur .Mono-
theista, Tritheista, Polytheista, &c., proutunicum, très vel
plures Deos admittit. Deîsta est ille qui admittens Deum,
negat aliquam ejus perfectionem, vel ipsam revelationem.
6. Atheus ( id est, sine Deo) est ille qui Deum esse vel
ignorât, vel negat. Atheus negativus est ille qui, vel ob men-
tis stupiditatem, vel ob totalem commercii seu communica-
tionis cum aliis hominibus defectum, (Log. No. 20, &c.)
nunquàm de Deo cogitavit.
7. Atheus practicus ille est qui, voluptatibus liberiùs in-
dulgendi causa, sibi aliisque Deum non esse suadere cona-
tur. Atheus systematicus ille est qui sophismatibus deceptus
Deum esse pertinaciter negat. In hoc capite ostendemus
lo. quibus argumentis demonstrari possit Dei existentia ;
2o. quccnam sint atheismi incommoda ; 3o. quinam sint
ejus defensores et quomodo confutentur.
I. DE PR^CIPUIS ARGUMENTIS
QUIBUS EXISTENTIA DEI DEMONSTRATUR.
8. Argumenta, quibus demonstrari potest Dei existentia,
alla sunt moralia, dilm physica, alla metaphysica.
Argumenta moralia ea sunt quorum principium consti-
tuunt mores hominum ; physica ea sunt quorum principia
sunt materia, motus et materiae dispositio ; metaphysica
denique ea sunt quorum principium ex rerum essentiâ nas-
citur.
9. In ordine morali, nomine Dei intelligendum est ens
supremum, vitii vindex, virtutisque remunerator. In ordine
physico, ens creator, motor et ordinator materiee. In or-
dine metaphysico, ens summè perfectum, existens vi natu-
rse suse, seu ens necessarium.
1 . Argumenta moralia existentiœ Dei.
10. H'ic notandum est lo. aliud esse omnino demon-
strari Dei existentiam ex consensu omnium populorum,
aliud demonstrari illius attributa. Possunt enim homines
cognoscere ens mundi rectorem et gubernatorem, licèt non
cognoscant omnes ejus proprietates essentiales; imù licèt
aliquid, quod ejus naturai répugnât, ipsi tribuatur.
Î08 METAPHYSICA.
11. Notandum est 2o. aliud esse istud argumentum con-
fici ex consensu singulorum hominum, aliud coiifici ex va-
riarurn nationum consensu. Quemadmodùm enim licèt
quidam horaines monstra potiiis videantur quàm homines
propter physicam deformitatem, nihilominùs tamen asseri-
tur homines incunctanter habere quemdam vultûs et corpo-
ris habitum; ità, licèt quidam homines sint animo tam per-
verso, ut negent esse Deum, cùm tamen longé major pars
hominum constanter Deum esse prœdicet, singularia illa
hominum portenta non possunt impedire quominiis ex illo
consensu Deum esse concludatur.
Propositio prima.
12. Conscientiae stimuli Deum esse probant.
Prob. Reus quisque, post patratum scelus, conscientiae
stimulis cruciatur ; atqui illi conscientiae stimuli probant
esse Deum, cùm à solo Deo oriantur. Vel enim à Deo ori-
untur, vel ab ipsâ mente, vel ab alio ente quod non sit
Deus. Atqui neutrum posterius dici potest. lo.non oriuntur
ab ipsâ mente. Tune enim orirentur vel necessariô, vel
libéré. Si necessariô, omnes homines, sive nocentes, sive
innocentes, eos similiter experirentur ; si libéré, nunquàm
inviti eos experirentur : atqui utrumque falsum est. Ergo
lo. . . . &c. 2o. non ab alio ente ab anima distincto quod
non sit Deus : nam atheus nihil prêter materiam agnoscit ;
atqui manifesté répugnât materiam inertem, caecam et rati-
one destitutam, esse causam efficientem stimulorum qui so-
les nocentes post patratum scelus cruciant. Ergo 2o. . . .
&c. Aliundè. . . . &c. Ergo conscientiae stimuli oriuntur à
solo Deo. Ergo. . . . &c.
Propositio secunda.
13. Unanimis populorum consensus Deum esse demon-
strat.
Prob. Ut enim unanimis populorum consensus Deum
esse demonstret, duo requiruntur et sufficiunt, nempé I.
semper viguisse apud omnes populos opinionem divinita-
tis ; II. hanc opinionem constantem aliundè quàm à rei
veritate oriri non posse. Atqui haec duo certa sunt.
I. Semper viguit. . , . &c. Nam in quaestione facti, qua-
lis est ista, judicandum est ex testimonio scriptorum tùm
METAPHYSICA. 109
antiquorum, tùm recentiorum ; atqui constat ex testimonio
scriptorum apud onines populos tùm antiquos, tùm recenti-
ores, semper viguisse opinionem , . . &c.
lo. Apud veteres populos. " Ut firmissimum hoc afFerri
*' videtur cur Deos esse credamus, inquit Tullius, quod
" nuUa gens tam fera, nemo omnium tam sit immanis, cu-
** jus mentem non imbuerit Deorum opinio." Tuscul. quœs.
lib. 1. No. 13.
Idem sichabet, lib, 1, de legîbus, No. 24, " Nulla gens
" est tam immansueta, neque tam fera, quœ non, etiamsi
" ignoret qualem Deum haberi debeat, tamen habendum
** sciât." " Deos esse colliges, inquit Seneca, quod omni-
" bus de Diis opinio insita sit, nec ulla gens unquàm adeo
" est extra leges moresque projecta, ut non aliquos Deos
" credat." Epist. 177. " Peregrinantibus, inquit Plutar-
*' chus, multas continget occurrere urbes sine musis, sine
*' studiis litterarum, sine legibus. . . . quibus nullse sunt do-
" mus sed tuguria ; nusquàm exstat urbs aut oppidum, qui-
" bus nullus sit Deus." Idem testantur Herodotus, Plato,
Aristoteles, plurimique numéro alii scriptores, quorum tes-
timonio constat opinionem divinitatis semper viguisse apud
Chaldœos, ^gyptios, Persas, Tartaras, Scythas, Indos,
Sinas, Arabes, Grsecos, Romanos, Gallos, Germanos,
Carthaginienses, ^Ethiopes et generatim omnes Africos.
Ergo lo. apud veteres populos semper viguit divinitatis
opinio,
2o. Apud recentiores. Relationibus enim viatorum et
navigatorum constat populos nuper détectes, quamvis
moribus, educatione, legibus, prœjudiciis discrepantes, in
admittendo et colendo supremo numine unanimes et con-
cordes esse. Sic, v. g., antiquioribus consentiunt Caraïbte
(les anciens habitans indigènes des Antilles), Mexicani,
Peruviani, Brasilienses, Canadienses, Estotilandienses (les
Eskimaux), Groïnlandienses, insularum Sonditc (des îles
de la Sonde), Novee Hollandiee, NovcC Zelandiœ, insulœ
Otaïti et aliarum insularum maris austraîis indigeni
incolaî, omnesque populi nuper detecti. Ergo 2o. . . . &c.
Aliundè. . . . &c. Ergo I. . . . &c.
Hâc de re audiatur D. Barruel sic atheum alloquens :
** Interroge les peuples et les nations qui te devancèrent ;
" remonte jusqu'à ceux qui les premiers entendirent sa
110 METAPHYSICA.
" voix', et jouirent de sa lumière. Demande-leur à qui
" furent offerts ces vœux, ces sacrifices, ces victimes dont
" l'histoire sera toujours mêlée au souvenir des premiers
*' hommes ? Qu'ils te disent à qui furent érigés ces autels
^' et ces temples qu'éleva l'Assyrien et le Perse, l'Egyptien
" et le Grec, le Romain et le Sarmate, aussitôt qu'il se
" put élever une demeure à lui-même. Dans l'histoire du
" genre humain, trouve, si tu le peux, une nation sans
*' Dieu, une ville sans temple. Fouille dans leurs débris et
** leurs ruines -, et quand ton œil découvrira les vestiges
'* d'un superbe édifice, dis-nous à quel autre qu'à un Dieu
" protecteur fut consacré ce monument auguste ? Pendant
** tant de siècles la nature n'aura donc eu pour l'homme
*' qu'un flambeau séducteur ! elle se sera plu à nous cacher
" sa puissance, pour se dire elle-même l'ouvrage d'un fan-
" tome, et pour transporter l'hommage des humains à l'autel
** de la chimère ! D'un pôle à l'autre encore, elle se joue
" des peuples, et l'univers est séduit par sa voix !
** Du palais des monarques et du sein des capitales,
" descends dans la chaumière du pauvre, dans la tanière
" du Lapon ; dis-nous s'il est un lieu où la raison conserve
" un reste de ses droits, et oii le Dieu du ciel ait perdu
*' tous les siens? Dis-nous lequel des deux outrage la
** nature et la raison ? ou l'univers, ou toi? Helviennes,
tom. 2. pag. 48.
14.11. Hic unanimis populorum consensus aliundè quàm à
rei veritate oriri non potuit. Vel enim oritur à solâ veri-
tate, vel est prœjudicata opinio ex errorum nostrorum
fontibus orta : atqui poslerius dici nequit. Pontes enim
errorum nostrorum sunt sensus fallaces, imaginatio delu-
dens, cupiditates, educatio, sophismata et politica ; atqui
unanimis populorum consensus circa Dei existentiam oriri
non potuit ab istis errorum nostrorum fontibus. lo. Non
à sensibus, cùm Deus cadere non possit sub sensus. 2o.
Non ab imaginatione, cùm Deus imaginationis et phanta-
siœ captum superet. 3o. Non à cupiditatibus, cùm ipsis
potentissimum frenum injiciat opinio Dei scelerum vindicis.
4o. Non ab educatione ; nam educatio varia est pro varia
hominum indole, successione temporum, locorum distantià,
morum, propensionum et prœjudiciorum discrepantiâ, S:c.;
constans verô fuit apud omnes populos opinio de existentià
METAPHYSICA, 111
Dei. 5o. Non à sophismatibus ; impoasibile est enim
vitium sophismatis per omnes rétro œtates semper viguisse,
et detectum non fuisse. 60. Non à politicii ; si enim
principes liane promulga vissent opinionem, ut sibi populos
devincirent, si eam admisissent populi, tam stupendse muta-
tionis vestigia quœdam in historiâ reperirentur ; assigna-
rentur ejus auctores^, progressus, &c. Atqui nihil horum
deprehenditur in historiû. " Quel fut-il donc cet homme,
" inquit D. Barruel, qui, pour asservir ses semblables, fit
*' le premier descendre des cieux le fantôme de la divinité?
** son nom aura vécu du moins comme celui des Minos, des
*' Lycurgue et des Solon. En vain je le demande à l'his-
'" toire. Me cachant à la fois sa patrie^, l'époque de son
" empire, et celle de ses lois ; partout elle s'obstine à
" montrer un Dieu et des autels, avant des trônes et des
" usurpateurs." Ibid pag. 52. Ergo II &c. Aliundè
.... &c. Ergo. . . . &c.
Solvuntur objectîones.
Obj. lo. Consensus qui favet opinionibus falsis, non
probat Deum esse. Atqui unanimis populorum consensus
favet. . . . &c. Ergo. . . . &c.
15. Resp. Dist. Maj. Si aliundè non probetur istum
consensum ortum fuisse à solâ veritate ; conc. maj. Si
probetur istum consensum ortum fuisse à solâ veritate ;
neg. maj. Atqui populorum consensus. . . . &c.; dist. min.
Sed tune non probatur istum consensum ortum fuisse à
solâ veritate ; conc. min. Et tune probatur consensum
ortum fuisse à solâ veritate ; neg. min. et consqam. Itaque
h]c non probamus Deum esse preecisè quia populi hanc
opinionem tenuerunt, sed quia eam hauserunt à solâ veri-
tate, quod sic probamus, " vel enim hanc opinionem
" hauserunt à solâ veritate, vel orta est à fontibus errorum
" nostrorum ; atqui posterius répugnât. Ergo eam hause-
" runt à solâ veritate." Hâc de re audiatur D. Barruel ;
^' l'incrédule se fera-t-il seul sage ? Le Dieu des Pascal,
" des Bossuet, des Fénélon ne sera plus qu'un préjugé,
" qu'une erreur sucée avec le lait? Qu'il nous montre
*' donc sur la terre un préjugé de tous les âges, de tous les
" états, de tous les peuples, de tous les siècles. Qu'il
" nous montre un préjugé qui ne cède ni à la maturité des
" années, ni aux méditations du génie, ni à la diversité des
1 12 METAPHYSICA.
" climats, ni à la force des intérêts et des passions." Ibid,
pag. 69.
Inst. lo. Folytheismus est opinio falsa ; atqui consensus
populorum favet polytheismo : ergo consensus populorum
l'avet opinioni falsœ.
10. Resp. Dist. Maj. Folytheismus est opinio falsa evi-
denter fluens à fontibus errorum nostrorum ; conc. maj.
Est opinio falsa fluens à solâ veritate ; neg. maj. Concessâ
minore, dist. consequens. Ergo consensus populorum
fluens à fontibus errorum nostrorum, opinioni falsse favet ;
conc. consqam. Consensus à solâ veritate fluens opinioni
falsse favet, neg. consqam.
Reverà consensus populorum favet polytheismo ; sed
polytheismi causa fuit^, timi iraaginatio, tùm cupiditates.
Ideô enim plures Deos finxerunt idololatrse,quia Deum uni-
cum omnibus rébus simul providentem animo non capie-
bant ; sic cœlum Jovi, infernum Plutoni, maria Neptuno,
&c., demandaverunt. Pariter libido Deos vitiosos finxit.
At sic non est, quandô agitur de consensu unanimi popu-
lorum circa Dei existentiam, siquidem hic consensus à solâ
veritate ortum ducit (14).
Obj. 2o. Populorum consensus circa Dei existentiam
non est universalis; nescimus enim quid cogitaturae sint
generationes futurse. Ergo. . . . &c.
17. Resp. Neg. ant., ob rationes allalas. Ad probatio-
nem, neg. ant. Hic enim consensus ortum ducit à solâ
veritate ; atqui istud sufïicit ut sciamus illum gentibus
posteris futurum esse, cùm eamdem naturam habiturœ sint.
Il faut bien reconnaître, inquit D. de la Mennais, avec
Cicéron, dans ce consentement unanime des peuples, la
loi même de la nature {a): car la nature et ses lois, même
physiques, ne se reconnaissent qu'à ce caractère de per-
manence et d'universalité." Essai, tom. 2. pag. 72.
Inst. Constat ex veteribus scriptoribus et viatorum rela-
tionibus exstitisse et nunc existere gentes intégras quae
nullam habebant divinitatis ideam. Veteres ipsi Philosophi
omnes materiam esse aeternam affirmabant, ideôque Deum
rejiciebant. Ergo. . . . &c.
18. Resp. Neg. ant. Omnibus viatorum relationibus non
facile, in praesenti qusestione, fides adhibenda est, lo. quia
(a) " In omiii re consensio omnium geniium, Icx nalurac pulauda est." Ttiscul. lib. 1 .
cap. 13.
METAPIIYSICA. 1 13
saepè non satis diù morati sunt apud illos populos ut veram
eorum opinionem de Deo agnoscerent. 2o. Quia eoruin lin-
;2;uae ignari, cum illis sermonem de Deo habere non potu-
erunt ; hinc contigit multos populos, qui primo atheismi
accusati fuerunt, eâ nota postremo purgatos fuisse ab aliis
viatoribus qui res maturiùs examinarunt ; taies sunt Cana-
rien ses, Caraïbae, Brasiliense3,Canadienses,&c. 3o. Sœpè via-
tores existimaverunt quosdam populos nullum recognoscere
Deum, quia nec templa, nec altaria, nec sacriticia apud eos
viderunt ; at istud arguraentum est prorsùs invalidum
quandô agitur de populis vagis et errantibus.
" Je sais bien, inquit D. Frayssinous, que des vo5^ageur3,
"trop hardis à prononcer sur ce qu'ils n'avaient eu ni le
' tems ni les moyens d'observer, avaient jeté des soupçons i
' d'athéisme sur les habitans des îsles Antilles, les Brési-'
* liens, les Canadiens, les Hurons, les Souriquois, les Hot-
* tentots ; nos sceptiques, nos athées en triomphaient. . ..
' Qu'est-il arrivé ? c'est que ces premières relations très-
* hasardées, ont été formellement démenties par des rela-
' tions subséquentes plus fidèles et plus circonstanciées, et
* si la croyance de ces peuples est très-grossière, si l'on
' n'aperçoit parmi eux que des linéamens informes de reli-
' gion, du moins elle n'est plus un problème. Pour n'en
' citer qu'un exemple entre plusieurs autres, on avait
* douté quelque tems de la religion des Otaïtiens ; eh bien!
' Cook et après lui Van-couver ont reconnu leurs dogmes
* et leurs cérémonies religieuses." Conférence sur l'exis-
tence de Dieu prouvée par la foi du genre humain. Tom. 1 .
pag. 125.
19. Insuper etsi concederetur populos illos barbares
nuUam habuisse aut habere divinitatis ideam, . quid seque-
retur contra unanimem populorum consensum? Nihil sanè ;
nam ut optimè notât Porphyrius, " ex gentibus illis tam
" efferatis et inhumanis non oportet ab aequis judicibus
" convicium fieri naturss humari?e." Undè meritô impios,
qui ex istis barbaris arguunt contra existentiam Dei, sic allo-
quitur Racine, junior, Poëme de la Religion, chant T. vers 387.
" Qu'à bon droit, libertins, vous êtes méprisables,
*' Lorsque dans les forêts, vous cherchez vos semblables."
Quoad veteres philosophos, nostriim hic non est eos se-
cum invicem conciliare et à contradictionibus excusare.
H
114 . METAPHYSICA.
Sed historiâ compertum est omnes, quamvis materiatu esse
seternam crederent multi, confesses fuisse (si Epicurios et
paucos alios excipias), omnes hujus orbis partes à principio
intelligente dispositas fuisse, ejusque nutu perseverare.
Obj. 3o. Homines â nativitate surdi-muti, m signis vel
scripturâ doceantur, nullam habent divinitatis ideam. Idem
dicendum est de hominibus silvaticis (hommes sauvages) qui
à primulâ infantiâ cum aliis hominibus nullam quocumque
modo habuerunt communicationem, ut experientiâ con-
stat. Ergo opinio divinitatis ortum ducit ab educatione.
20. Resp. Conc. ant. Neg. consqam. Omnes isti ho-
mines nullas, actu, habent ideas, sed solummodô imagines
(Log. 19, 20, 21). Cùm idearum cognitionem per earum
expressionem, id est, per vocem, à solâ societate accipere
potuissent, mirum non est, si actu nullam divinitatis ideam
habeant. At ideô concludi non potest opinionem divinitatis
ortum ducere ab educatione. Reverà posteris cognitio ideae
divinitatis, sicut et vita, per societatem transmittitur, et
naturaliter mentem ingreditur, quia innata est in homine
hœc idea ; at eam societas non excogitavit seu finxit ; sed
ejus cognitionem à solo creatore, tanquàm deposituiu ac-
cepit, sicut et ipsam vocem accepit et non excogitavit, ut
utramque posteris communicet, sicut eis communicat vi-
tam. " Cette idée (de la divinité), inquit D.de Bonald, toute
naturelle (innée) qu'elle est, attend, pour luire à l'esprit
de l'homme, l'expression qui doit la produire, et elle reste
inconnue à l'homme lui-même, jusqu'à ce qu'il ait reçu
de sa société avec l'être semblable à lui, cette expression
qu'une tradition ou parole héréditaire conserve dans les
familles et qu'une écriture impérissable conserve chez les
nations. Il est donc physiquement et métaphorique-
ment impossible que les hommes aient inventé l'idée de
la divinité; car ou l'inventeur ne se serait jamais enten-
du lui-même, s'il avait inventé le mot avant d'avoir
l'idée, ou il n'aurait jamais été entendu des autres, s'il
leur avait adressé des mots auxquels ils n'eussent pu
attacher aucune idée." Législation primitive, tom. 2.
pag. 202, 203.
21. Doctissimus Cardinalis Gerdil, in opère cui titulus
Caractères distinctifs de l'homme et des brutes, aliara suppe-
ditat responsionem his qui ideas innatas propugnant ut eas
METAPHYSICA. 115
iuteliigit Descartes (Log. 13). **Un sourd-muet, inquit,
" n'a, dit-on, aucune idée de Dieu et de l'ame, ni du Sien
" et du mal moral : soit. Je crois qu'il ne sait pas non
" plus que les trois angles d'un triangle sont égaux à deux
" angles droits. Que conclure de là, sinon que son atten-
" tion ne s'est pas encore portée à ces objets, et qu'il n'a
" pas fait usage des idées qu'il a réellement, et qui, par de
" justes applications et quelques conséquences déduites
" l'une de l'autre, auraient pu s'élever jusqu'à la connais-
" sance de la vérité ? Ce n'est pas la voix du maître qui
'* imprime dans l'esprit du disciple l'intelligence des
" vérités qu'il enseigne. Un géomètre qui donne des leçons
'' ne fait que présenter à son élève les objets sur lesquels il
" doit fixer son attention ; il l'aide à les démêler, pour
" qu'il ne prenne pas l'un pour l'autre; mais c'est au
" disciple à voir de lui-même ce qu'on lui met sous les
" yeux. En vain le maître prêcherait-il le contraire de ce
*' que l'écolier a conçu démonstrativement, celui-ci ne l'en
" croirait pas sur parole: c'est que la connaissance du
'' vrai n'est pas uniquement l'ouvrage de l'instruction. . . .
*' Un géomètre n'aurait point dû être étonné de ne pas
" trouver dans le sourd-muet la moindre teinture des
" clémens de géométrie^ et pourtant l'ignorance de ce sourd-
" muet ne lui aurait jamais fait soupçonner que les con-
*' naissances géométriques...., ne sont fondées que sur
" l'éducation et le préjugé." Hinc juxta illustrissimum
auctorem, concludi non potest nec débet non esse Deum,
ex eo quod surdi-muti, à nativitate, nullam habeant divi-
nitatis ideam.
Obj. 4o. Consensus populorum circa Dei existentiam est
fictus et simulatus ; aliter enim juxta illum composuissent
homines. mores suos, quod non effecerunt. Ergo nullius
est roboris.
22. Resp. Neg. ant. et probationem. Hic enim praeser-
tim valet illud Medeae apud poëtam ; " video meliora
" proboque ; détériora sequor." Nimiriim licèt homines
noverint ens supremum, virtutis remuneratorem et vitii
ultorem, tamen ciim objecta prœsentia sensum suî vividio-
rem excitent, quàm absentia, qualia sunt virtutis merces,
vitii supplicium, &c., indè fit, ut quem ratione noverint,
factis negent, ut experientiâ constat.
H 2
IIG METAPHYSICA.
Obj. 5o. Opinio divinitatis oriri poluit à timoré ; ut
enim ait Lucretiiis, " primus in orls Deos fecit timor."
Illud est facile intellectu ; homines enim horrendis tonitrui
iragoribus et fulminis jactibus territi, Deum suis cervicibus
impendentem finxerunt.
23. Resp. Neg. ant. lo. E contra timorés pœnarum,
quibus scelerati anguntur, arcerent potiùs quàm accercirent
Deum sceleris vindicem, ut liberiùs et tutiùs sibiipsis ad
nutum satisfacerent. 2o. Impudenter genus humanum
calumniantur athei, qui supponunt oranes homines timoré
lymphatos, rationem amisisse, diim soli athei m^gno con-
stantique animo praediti, fanaticum timorem excusserunt.
3o. Cognitis vani metûs causis, cadere debuisset hesc opinio.
Prectereà timor non fidem générât, sed conquaestus perpe-
tuasque reciamationes.
" Pour flétrir à la fois et l'homme et la divinité, inquit
" D. Barruel, que l'incrédule cesse de mentir à l'histoire.
" Etait-ce donc la crainte qui offrit au Dieu du ciel les
" prémices des troupeaux et des fruits qu'il bénissait? La
" peur présidait- elle encore à ces hymnes d'allégresse, aux
" danses religieuses, aux concerts harmonieux, à ces excès
** de joie, qui régnaient dans les fêtes du Romain et du
" Barbare ? Que l'athée parcoure tant qu'il voudra les
" fastes de l'histoire; les fêtes de l'Israélite, du chrétien et
" de l'idolâtre^ lui rappelleront toujours les bienfaits de la
" divinité plutôt que ses fléaux." Helviennes, tom. 2.
pag. 50.
Gbj. 6o. nie consensus oriri potuit lo. ab avaritiâ sacerdo-
tum, qui, ut à populis copiosè et abundanter alerentur, illis
Deos cultu publico adorandos proposuerunt : 2o. ab igno-
rantiâ ; prisci enim homines causis supernaturalibus pluri-
mos tribuerunt efFectus, qui nunc solis naturee legibus expli-
cantur, Ergo à veritate ortum non ducit.
24. Resp. ad primum. Cognitio Dei pontifici et sacer-
doti prtECurrere debuit, et populi sanè nunquàm eos insti-
tuissent aut sustentassent, si priiis non cognovissent sacri-
ficia esse peragenda, oblationes esse oflferendas, &c.
" Mais, inquit D. Barruel, des prêtres avares ou ambitieux
" .... Oui, sans doute, l'idée de la divinité n'aura point
'* devancé celle du pontife ! et les peuples nourrirent des
*' sacrificateurs avant de croire au Dieu qui recevait leur
METAPHYSICA. 117
" encens. Et lec patriarches rassemblant leurs nombreuses
*' familles autour du môme autel, pères, pontifes, rois, en
*' offrant la victime au Très-Hau^ les patriarches ne furent
" que des prêtres avares de la substance de leurs propres
** enfans, ou jaloux d'altérer par le mensonge l'empire
*' qu'ils tenaient de la nature." Ibid, pag. .00.
Ad secundum. Evidens est opinionem divinitatis ab
ignorantiâ legum naturœ oriri non poîuisse, cùm eo
firmior évadât, qu6 magis in legum naturalium cognitio-
nem proficiamus.
" Prêterons-nous encore l'oreille à l'impie? inquit D.
" Barruelj et daignerons-nous lui r/'pondre, quand aussi
" ridiculement entié de ses prétendues lumières, que sotte-
" ment grossier envers tout le genre humain, il affectera
" de ne voir dans l'idée de la divinité, que le fruit d'une
*' ignorance universelle des forces et des lois de là nature?
" O le plus vain des êtres ! étale donc aux j^^eux de l'univers
'' les progrès que fit à ton école l'étude de la nature et de
'* ses lois. Ton œil perçant a-t-il le premier découvert
** cette force secrète qui transporte les astres mobiles
" autour d'un même centre? Est-ce par tes calculs pro-
" fonds que furent fixés et les tems et les vitesses de leurs
"■ révolutions ?. . . . Le premier pesas-tu l'océan et l'astre
'' qui soulève et abaisse alternativement ses flots ? Est-ce
" donc à l'école de l'athée que parurent les Kepler, les
" Newton, les Eu 1er, les Bernouilli ? Et parmi tes secta-
" teurs, en fut-il jamais un seul digne d'être nommé dans
" le temple delà physique ? Depuis le chantre d'Epicure
'' jusqu'à nos modernes Lucrèces, l'ignorance la plus com-
" plète des lois de la nature n"a-t-elle pas été le caractère
*' distinctif de leurs vaines productions, le sceau de leur
" école? Où verra-t-on ailleurs mieux accueillis et ce
" mouvement qui na'it de l'inertie, ces générations sans
'' principes, ces océans sortis de leur niveau et bâtissant
" le sommet des montagnes, ces soleils encroûtés qui flottent
" au hasard et s'entrechoquent dans le vague des airs?
"" Les physiciens s'égarent quelquefois, mais l'observation
" les ramène à la nature. L'athée se nourrit de leurs
** rebuts : il ne cherche qu'à rendre nos écarts éternels et
*' l'erreur universelle. Eh ! c'est à la connaissance des
" lois de la nature qu'il ose en appeler ! Qu'il étudie ces
118 METAPHYSrCA.
" lois de l'univers ; l'école de Newton est le temple du
" Dieu qui les porta. . . . Que l'impie célèbre avec faste
*' Epicure, Lucrèce, Spinosa. Où sont-ils donc ces hommes
*' qui devaient effacer de nos cœurs toute idée de la
*' divinité? Epicure, Lucrèce, Spinoêa, sont morts. La
" foudre roule encore sur leur tombe, et annonce le Dieu
*' qui leur survit." Ibid, pag. 52 et suiv.
Obj. 7o. Si unanimis populorum consensus circa Dei
existentiam ortum duceret à solâ veritate, omnes gentes
unum et eumdem Deum summè perfectum agnovissent.
Falsum consequens ; ergo et antecedens.
25. Resp. lo. Eodem ratiocinio probari posset hominum
consensum circa solis existentiam non oriri à solâ veritate ;
si enim hic consensus oriretur à solâ veritate, omnes de sole
unum et idem sentirent; falsum consequens, ergo et ante-
cedens. Porrô quid absurdius ?
Resp. 2o. Neg. maj., ob disparitatem. Ut enim cognos-
catur Deum esse, satis est si ejus idea per suam expres-
sionem (vocem) manifestata menti prsesens sit ; si attenda-
tur ad nosmetipsos, ad terram, animalia, plantas, ad cœ-
lum et sidéra suos motus absolventia ; è contra ad cognos-
cendas Dei perfectiones longius maluviusque requiritur
examen. Ergo homines diversimodè sentire potuerunt circa
Dei perfectiones, licèt circa ejus existentiam inter se con-
sentirent. " L'homme, inquit D. de Bonald, conçut avec
" facilité la pensée d'une volonté qui a produit la généra-
" lité des êtres et du pouvoir qui les conserve. ... Là aurait
" dû s'arrêter la raison, et Dieu était connu de l'homme.
" Mais l'imagination voulut aller plus loin. L'homme
" avait l'idée claire et distincte de la volonté de Dieu dans
*' la production des créatures ; et comme il voyait ses pro-
" près organes être l'instrument de son action particulière,
'• il attribua des organes à la divinité, pour expliquer son
" action, et il s'en fit des images taillées ; en lui attribuant
*' ses sens, il lui attribua ses sexes, ses passions, ses fai-
" blesses. De là les absurdités de l'Idolâtrie, et les abomi-
*' nations de son culte, qui commença par faire un hom-
" me de Dieu, et qui finit par faire ses Dieux des hommes."
Législation primitive y Tom. 1. pag. 376.
Obj. 8o. Multi populi plures admiserunt Deos ; atqui
plures admittere Deos, idem est ac nuUum admittere ; ne-
METAPHYSICA. 119
gat enim Deum, qui principium divinitatis eversivum ad-
raittit. Ergo....&c.
26. Resp. Dist. Min. In ordine ad verum Dei cultum ;
conc. min. In ordine ad qucestionem ipsiusexislentiseDei ;
neg. min. Supponamus enim rem aliquam, v. g., manuale
horologium (une montre) ostendi plurimis hominibus, qui
nunquàm quid simile vidissent vel audivissent. Alii pluribus
opificibus illud tribuent, alii unico. Sed in hoc consentient,
quod ejus constructioni aliqua prccfuerit intelligentia, licèt
varient circa istius intelligenlise qualitates. Ingens ergo est
discrimen inter eorum generalem opinionera circa opilicem
et eorum in singulis diversas opiniones circa istius opificis
attributa. Idem dicendum est de unanimi populorum con-
sensu circa divinitatem. Omnes in admittendâ ejus existen-
tiâ consentiunt, licèt varient circa ejus attributa. Ad pro-
bationem, dist, Negat Deum qui principium divinitatis
eversivum admittit, si sibiipsi constare veiit, et si principii
consequentias videat ; concedo : si sibiipsi non constet,
vel si principii consequentias non videat ; nego. Porro quot
homines qui sibimetipsis non constant ? quot qui non vi-
dent falsi principii consequentias ? Ergo ex eo quod paga-
ni plures admiserint Deos, nihil concludi potest contra una-
nimem populorum consensum circa Dei existentiam, prse-
sertim cùm piuralitatis Deorum clarè videantur causa et
origo. " Les familles, inquit D, de Bonald, qui habitaient
" un même territoire ayant des besoins communs à satis-
" faire, ou des dangers communs à éviter, se réunirent en
" corps d'Etat pour se défendre, ou même pour attaquer :
*' tout devint public dans ces familles devenues publiques,
'• fonctions, événemens, et les sentimens qu'ils faisaient
** naître. Alors la religion passa des familles dans l'Etat.
" Le culte devint public comme les sentimens ; c'était la
•* même religion, comme les familles réunies en corps d'Etat
" étaient les mêmes familles, et comme les hommes devenus
" publics étaient les mêmes hommes.. . .De là naquit le Pa-
** ganisme, religion de plusieurs Dieux, ou plutôt des Dieux
" de plusieurs familles, qu'elles adorèrent en commun."
Ihid, pag. 416, 417.
2. Argumenta physica exislentiœ Dei.
27. Argumenta physica ea sunt quae sumuntur à con-
templatione naturse corporeee. Antequàm deveniamus ad
120 METAPHYSICA.
hsec argumenta, prœmittenda sunt quœdam axiomata, quae
ab omnibus admittuntur.
28. I. Causa prior est effectu (a).
29. 11. Non datur efFectus sine causa, vel, sublatâ
causa, tollitur effectus, id est, adeô necessaria est effectûs
cum suâ causa connexio, ut si nulla supponatur causa, nec
esse nec concipi possit effectus.
30. Ergo nullus effectus tribuendus est nihilo, casui for-
tuito, fortunae aut fato. Tune enim daretur effectus suie
causa. " La fortune et le hazard, inquit D. de Voltaire,
" sont deux mots vides de sens, qui, selon toute apparence,
" doivent leur origine à la profonde ignorance dans laquelle
*"' croupissait le monde, lorsque Ton donna des noms va-
*' gués aux effets dont les causes étaient inconnues."
31. III. Causa in se quodam modo continet quidquid est
perfectionis in effectu. Non datur enim effectus sine causa ;
atqui si esset aliqua perfectio in effectu quse non esset in
causa, tune daretur. . . . &c. t^-rgo.. . *&c. Triplici modo
causa continere potest effectum. lo.formaîiter, id est, in pro-
priâ forma et natura; sic, v. g., quercus in glandine contine-
tur. 2o.FiVhta/i^e?%CLiraomnes perfectiones effectûs eo sensu
continet causa, quôd cas producere valeat ; sic, v. g., vir
eruditus totum in se continet librum quem efficere potest»
3o. Eminenter, quando causa effectum suum eminentiori
quodam modo in se complectitur ; sic, v. g., Deus continet
quidquid est perfectionis in mundo ; sic mens humana
eminenter continet motus omnes spontanées quos produ-
cere potest corpus.
32. IV. Quod est causa causse, est causa causati ; sic avus
est causa filii, quia est causa patris.
33. V. NuUum ens potest esse suî ipsius causa.
Prob. Idem enim non potest esse simul et non esse ; at-
qui si ens aliquod posset esse suî ipsius causa, idem esset
simul et non esset ; lo. quidem esset, cùm prius sit esse
quàm agere ; 2o. non esset, cùm existentiâ indigeret.
Ergo. . . .&c.
34. VI. Duo entia non possunt esse sibi rautuô causae.
Prob. Idem enim non potest esse simul et non esse ; at-
qui si duo entia. .. .&c., idem esset simul et non esset.
Sint enim illa duo entia-, Petrus et Joannes. Atqui ut Pe-
(uj Causa est illuj cujus efBcaciâ nliquid fit. Effectus est illud quod efficaciâ alteiius fit.
METAPHYSICA. 121
trus largiretur existentiam Joanni, existera deberet simul
et non existere : lo. existera deberet, ut existentiam lar-
giretur Joanni, prius est enim esse quàm operari ; 2o. Pe-
trus non deberet existere, ut à Joanne acciperet existentiam.
Idem dicendum est de Joanne. Ergo. . . . &:c.
35. Hinc in série successivâ causarum productarum et
producentiura, necessariô agnoscenda est prima causa, quae
ipsa procreata non fuerit à Cceteris, seu non datur progres-
sas in infinitum ; alioquin vel esset effectus sine causa,
vel duo entia sibi invicem darent existentiam, quod utrum-
que répugnât.
Hic abs re non erit si bieviter exponatur quid sint infini-
tum, Jinitum, necessarium, et contingens.
S6. Infinitum est illud quod tantum est et tam perfectum,
ut nec majus, nec minus, nec perfectius concipi possit :
talis est solus Deus. Confundi non débet cura infinito ma-
thematico, seu verius, cum indefinito. Porro indefinitum
vocatur quidquid tantum est ut numeris exprimi seu assig-
nari non possit.
37. Finitum est illud quod limitatur in suis perfectioni-
bus : talia sunt omnia entia creata.
38. NecessariuM est illud quod ità necessitate naturae suae
existit, ut concipi non possit non existens, quin destruatur
ejus essentia ; talis est solus Deus. Ens contingens est illud
quod ità existit ut possit non existere, cujusque natura non
magis postulat existentiam quàm non-existentiam ; his
prsemissis, sit
Propositio prima,
39. Ex creatione materiœ demonstratur Deum existere.
Prob. Vel enim existit Deus creator materiae, vel mate-
ria sibi dédit existentiam, vel illam accepit à nihilo, vel à
casu fortuito, fortunâ aut fato, vel demùm est œterna et ne-
nessaria. Atqui hsec quatuor posteriora répugnant.
lo. Non sibi dédit existentiam ; tune enim esset suî ip-
&ius causa, quod fieri nequit (33).
2o. Existentiam non accepit à nihilo ; tune enim daretur
effectus sine causa, quod répugnât (29).
3o. Non à casu fortuito, fortunâ aut fato ; siquidem
casus fortuitus, fortunâ aut fatum sunt voces sensu desti-
tut^e, merumque nihil (30).
1^2 METAPIIYSICA.
4o. Materia non est seterna et necessaria. Si enim esset
aeterna et necessaria, supponi non posset non existens quin
destrueretur ejus essentia (38) : atqui supponi potest non
existens quin destruatur ejus essentia. Ergo 4o, . . .&c.
Et verô, si materia esset seterna et necessaria, aliquis
existendi modus ipsi esset essentialis ; res enim non potest
existere sine aliquo existendi modo : atqui tamen nullus est
existendi modus materia3 essentialis, siquidem nuUa est
forma, nulla combinatio vel dispositio, nullus situs quibus
carere non possit. Ergo 4o. . . . &c. Aliundc. . . &c. Ergo
materia existentiam accepit à solo Deo. Ergo ex crea-
tione. . . . &c.
*' On ne peut expliquer avec l'athéisme, inquit D.
" Frayssinous, l'existence de la matière. ... En effet, si la
" matière n'est pas l'ouvrage d'un Dieu créateur, à qui
" doit-elle son existence ? Ce n'est pas au néant ; le rien
*' ne produit rien ; il faut donc dire que la matière existe
" par elle-même, qu'elle a été de toute éternité, que sa
" nature est d'exister nécessairement, qu'ainsi elle est ce
** que les métaphysiciens appellent Vétrc nécessaire. Or,
" cette assertion n'est pas seulement gratuite, mais con-
" traire à la raison. Je fais observer d'abord que la matière
*"' est un composé de parties unies entre elles ; dès-lors, si
*' la matière existe nécessairement, chacune de ses parties
'* a aussi une existence nécessaire, si bien qu'il serait
" impossible, sans se contredire, de la supposer non-exis-
" tante : ainsi il n'y aura pas un grain de sable, une
" molécule d'air, un atome de matière, dont l'existence ne
" soit aussi essentielle que la rondeur est essentielle à un
•' cercle. L'idée du cercle et celle de la rondeur sont
'' tellement inséparables, qu'il est absolument impossible
" de les séparer sans se contredire soi-même. Or je
*' demande s'il en est de même de l'idée d'un atome et de
'' l'idée de son existence, et en quoi Tessence des choses
" serait blessée, parce que je supposerais que cet atome
■' n'existe pas : donc cet atome n'existe pas nécessairement,
'' et ce que je dis de l'un, je le dirai de tous : donc la
" matière n'existe pas par elle-même ; donc elle a été
'"' créée ; donc il y a un Pieu. ... La matière n'existe
• qu'avec les attributs qui lui sont naturels, qu'avec une
" certaine disposition de parties, une certaine manière
METAPHYSICA. 123
" d'être^ une figure quelconque ; donc la matière n'a pu
" exister de toute éternité sans avoir une forme déterminée,
'* éternelle comme elle, dès-lors indestructible, immuable ;
" et cependant cette immutabilité est démentie tous les
*' jours par la variation perpétuelle de ses formes." Con-
" ference sur l'athéisme, tom. 1. pag. 199 et suiv.
Solvimtur objectiones.
Obj. lo. Creatio est impossibilis. Ergo nullus est raa-
teria3 creator,
Resp. Neg. ant. Creatio reipsà peracta est. Ergo est
possibilis.
Inst. lo. Quod nuUo modo existit, nuUo modo existere
potest. Ergo creatio est impossibilis-
40. Resp. Neg. ant. Reverà absurdum est rem existere
simul et non existere ; at rem anteà non existentem posteà
existere ad nutum potentissimee causœ, nuUam involvit
contradictionem. Imo, vel ens quod non existit, existere
potest, vel omne ens est necessariura. Falsum consequens ;
ergo et antecedens.
Inst. 2o. Creatio est eductio rei alicujus è nihilo ; atqui
liaec eductio est impossibilis. Ergo. . . . &c.
41. Resp. Dist. Maj. Creatio est eductio è nihilo, eo
sensu quod aliquid non existens évadât existens ; conc. maj.
Eo sensu quod nihilum sit materia ex quâ aliquid compo-
natur; neg. maj. Dist. min. Hsec eductio est impossibilis
eo sensu quod nihilum sit materia ex quâ aliquid compona-
tur ; conc. min. Eo sensu quod aliquid non existens
évadât existens -, neg. min., alioquin nulla causa producere
posset effectum ; ideôque nec novre spiritibus cogitationes,
nec novœ motuum determinationes corporibus accedere
possent, quod experientiœ adversatur. Si autem entiuni
modalium creatio enti finito possibilis sit, quidni enti infi-
nito possibilis esset substantise creatio ?
Inst. 3o. Concipi non potest quomodo res non existens
évadât existens. Ergo res non existens non potest fieri
existens.
42. Resp. neg. consqam. Ex eo quod aliquid concipi non
possit, non sequitur illud esse impossibile. Quemadmo-
dùm enim cœcus qui colores, surdus qui sonos possibiles
esse ob id negarent, quia non noverint quâ ratione sint
possibiles, meritô riderentur ; ità lisu excipiendus esset,
124 METAPHYSICA.
quicunque creationem impossibilem esse ob id juclicaret,
quia eam concipere non posset. Quando agitur de créa-
tione, quseri non débet quâ ratione materia creari potuerit,
sed utrùm rêvera creata fuerit. Porro demonstravimus
illam fuisse creatam (39). Hinc auctor sacer, modum et
rationem prœtermittens, solum factum creationis simpliciter
enuntiat: " dixitque Deus : fiât lux, et facta est lux."
Gen. cap. 1. ver. 3. " Ipse dixit, et facta sunt ; ipse
" mandavit, et creata sunt." Psal. 32. ver. 9.
Hâc de re audiatur D. Frayssinous : "Vous ne com-
'' prenez pas la création, inquit, comment l'univers est
" sorti du néant; mais prenons garde ici d'attribuer aux
" adorateurs de la divinité des idées absurdes qu'ils n'ont
*' pas. On ne dit pas que le néant soit une cause produc-
*' trice qui ait fait le monde ; on ne dit pas que le néant ait
" fourni la matière dont il est composé ; que la matière ait
" été extraite des abîmes du néant, comme on extrait les
" métaux des mines qui les receJlent ; il y aurait alors
" contradiction dans les termes, absurdité manifeste. Mais
" on dit que Dieu, par sa puissance infime, a donné l'exis-
*' tence à ce qui ne l'avait pas ; que ce qui était possible
** dans les idées de son entendement divin, il l'a rendu réel
'* par la force de sa volonté. Sans doute nous ne conce-
■■ " vons pas cette manière d'opérer ; il faudrait être dans le
" sein de la divinité pour comprendre quelle est sa manière
" de vouloir et la puissance de sa volonté. . . . L'homme
*' peut bien donner aux objets préexistans de nouvelles
" formes ; il peut modifier la matière et non la créer:
" mais au contraire, infini dans sa puissance. Dieu donne
*' l'existence actuelle à ce qui n'avait qu'une existence
'* possible, et c'est ce qu'on appelle créer, tirer du néant.
" Ne faut-il pas qu'il y ait une différence infinie entre le
" pouvoir de l'homme et le pouvoir de Dieu? et si
" la puissance bornée peut créer des modifications, pour-
" quoi la puissance sans bornes ne pourrait-elle pas
** créer des êtres ? Nous avons en nous-mêmes une image
*' imparfaite de cette puissance créatrice. Voilà, je sup-
" pose, mon bras immobile ; cet état de repos est l'absence,
" le néant du mouvement ; je- veux, et mon bras se remue ;
" son mouvement possible s'est réalisé : son mouvement,
*' qui était dans une sorte de néant, en a été tiré par un
METAPHYSICA. 125
" acte de ma volonté : espèce de création imparfaite, qui
*' est une figure de la création parfaite, dont Dieu seul est
" capable." Ihid, pag. 192, &c.
Obj. 2o. Causa continere débet quidquid est in efFectu ;
nemo eniai dat quod non habet. Ergo aut Deus non
creavit materiam, aut ipse est materialis.
43. Resp. Dist. Ant. Causa continere débet aut formali-
ter, aut virtualiter, aut eminenter (31). . . .conc. ant. For-
maliter; neg. ant. et consqam. Quis enim dicat architec-
tam formaliter continere in se capacitatem et distributionem
palatii quod usdificat ? aut hominem formaliter in se con-
tinere omnes motus quos producit ? Sufficit si causa
virtutera habeat effectùs producendi. "Créer la matière,
*' inquit D. Bergier, ce n'est pas la prendre où elle n'était
'' point; c'est lui donner l'existence qu'elle n'avait pas.
" Quand nous produisons une pensée, un mouvement,
" nous ne les prenons pas; mais nous les mettons où ils
'* n'étaient pas. L'essence du pouvoir actif est de faire
" exister ce qui n'existait pas." Traité de la Religion,
tom. 2. pag. "278.
Propositio secunda.
44. Ex necessitate primi materiœ motoris demonstratur
Deum existere.
Prob. Vel enim existit Deus primarius matericc motor,
vel raateria sibi dédit motum, vel illum accepit à nihilo,
casu fortuite^ fortunâ aut fato, vel ipsa corpora alia ab aliis
moventur successivis impressionibus sine fine, vel tandem
motus est essentialis materice : atqui quatuor posteriora
répugnant.
lo. Non sibi dédit motum ; tune enim motus esset in
materiâ simul et non esset ; lo. esset, cùm materia illum sibi
daret; 2o. non esset, siquidem materia eo indigeret. Ergo
lo &c.
2o. Materia non accepit motum à nihilo, casu fortuite,
fortunâ aut fato ; tune enim daretur efFectus sine causa (30),
quod répugnât (29). Ergo 2o &c.
3o. Corpora alia ab aliis successivis impressionibus non
moventur. Vel enim motum quem alia aliis communica-
rent ab alio ente, à materiâ distincto, accepissent, vel non :
si prius, ens istud est Deus ; si posterius, répugnât ; tune
enim adesset séries successiva causarum productaruni et
126 METAPHYSICA.
produceiitium, in quâ nulla agnosceretur causa prima, quee
à cseteris non produceretur. Atqui talis séries répugnât
(.S5). Ergo. . . &c.
4o. Motus non est essentialis materise. lilud enina non est
essentiale materiae, sine quo raateria esse et concipi potest.
Atqui materia esse et concipi potest sine motu ; tiim quia
corpus facile quiescens concipitur quin ejus destruatur
essentia, et reverà plurima corpora quiescunt ; tùm quia
experientiâ constat materiam esse inertem et indifferentem
ad motuiïi vel ad quietem, ità ut quodiibet corpus motum
aut quiescens in suo statu })ermaneat constanter, donec ab
aliquâ causa deturbetur ab hoc statu. Ergo 4o. . . . &c.
Aliundè. . . . &c. Ergo existit primarius materiae motor;
atqui iste primarius materiœ motor est Deus. Ergo. . . . &c.
" Je dis en second lieu, inquit D. Frayssinous^ que sans
'• recourir à Dieu, le mouvement est inexplicable : unepro-
" priété des corps, c'est de pouvoir être transférés d'un
*' lieu à un autre; de pouvoir être agités ; c'est lace qu'on
*' appelle mouvement. Or je demande d'oii vient le mouve-
*' ment de la matière ? Direz-vous que le mouvement lui
'' a été communiqué dans le principe, ou direz-vous que le
" mouvement lai est essentiel ? Choisissez. Si vous dites
•• que le mouvement lui a été communiqué, je demanderai
" de qui elle l'a reçu : ce nest pas d'elle-même ; par la
" supposition elle ne le trouve pas dans son propre fond :
'* c'est doFxC d'une cause distincte d'elle-même, d'une cause
" motrice : et voilà le premier moteur distingué de la ma-
*' tière, c'est Dieu. On aurait beau dire que le mouve-
" ment a été communiqué d'une partie de la matière à l'au-
*' tre, sans aucune cause originale, primitive, extrinsèque
'* de son existence ; que c'est ici une succession sans fin
" de mouvemens qui passent d'un corps à un autre : c'est
" vouloir s'abuser soi-même ; il faudra toujours arriver au
*' premier atome qui a été mis en mouvement, et je deman-
•* derai quelle a été ici la cause efficiente. Eh bien ! direz-
*' vous, je soutiens que le mouvement est essentiel, inhé-
•* rent à la matière ; et moi je prétends que par là vous
" vous jetez dans un embarras aussi grand que le premier ;
" car j'ai l'idée d'un corps et l'idée du mouvement, et je sens
" très-bien que je puis séparer ces deux choses. Je puis
" supposer un corps en repos, sans le détruire : je vois
METAPHYSICA. 127
** même par expérience qu'un corps reste immobile s'il
** n'est ébranlé par un autre ; donc l'idée d'un corps n'em-
" porte pas celle du mouvement : donc les corps ont toute
•' leur essence, sans qu'on leur attribue aucun mouvement ;
*' donc le mouvement ne leur est pas essentiel : donc il
** leur a été communiqué par une cause préexistante ; et
** nous voilà ramenés à la cause première, à Dieu. "(a) Ib.
pag. 202, 203.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. Cum auctore libri cui titulus : le Système de la na-
ture. iMateria non potest supponi existens, quin illius par-
tes alisB in alias pondèrent ac gravitent, quin mutuô colli-
dantur, attrahantur et repellantur ; uno verbo, quin move-
antur. Ergo motus essentialis est rnateriae.
45. Resp. Neg. ant. Materia enim concipitur ut indiffe-
rens ad motum aut ad quietem, imô quotidianâ experientiâ
constat illam saepè quiscere (44). Ileveràquidera omnia cor-
pora ad centrum gravit atis feruntur. Sed hœc lex, sicut
omnes alia3 physicse leges, repetenda est à voluntate primi
motoris, qui libère eam stabilivit. Supponit igitur haec lex,
nedùm destruat, Dei existentiara.
Inst. Cum eodem auctore. Spiritus non potest materiam
movere per tactum ; atqui tamen materia nisi per tactum
moveri non potest. Ergo materia non movetur à spiritu,
sed à seipsâ.
46. Resp. Neg. min. Nullo argumente demonslrat auc-
tor (le Baron d'Holbac) materiam à spiritu alio modo quàm
per tactum moveri non posse. Etsi autem nos lateat quo-
modô spiritus materiam movere possit, sicut nos latent in-
numerabilia quse sunt in rerum naturâ, non minus certum
est materiam reipsà à spiritu moveri, ut invictis argumentis
demonstratur et quotidianis experientiis confirmatur.
Praetereà non ità difficile concipitur corpora vi actûs di-
vinae voluntatis, id est, potentise infinitse moveri posse,
nec quicquam in eo repugnare videtur.
(a) " La nature ne nous otTre.dit Mr.Beudnnt, aucun exemple d'un corps inorganique qui
" passe de lélat de reposa rélat de mouvement, et réciproquement, sans que ce clinno-e-
" ment ne soit la suite iTiine action exercée sur ce corps par un agent pxit'rieur. Si les
" animaux ont la faculté de se motivnir de difléreiites manières, ce ne peut être encore que
" par l'action d'un agent qui est inilé|)endant de la enalière, puisque ces corps, une (bis
" privés de la vie, ne peuvent prendre d'eux-mêmes aucun mouvement. D'après cela, on
" admet comme vérité de lait, que la matière ne peut, par elle-même, c'esi-h-dire, sans l'ac-
" tion d'un agent qui en est independancchanger son élut de repos ou de mouvenieni. C'est
" cette loi qu'on nomme inertie de la matière.'* Traita éUmenlaire de Physique, ns". 7.
Omnes scientiaruni pbysicaium veiè periii idem confilcntui ad uiiiiin.
128 METAPHYSICA.
Propositio tertia.
47. Mirabilis totius orbis dispositio Deum esse demon-
strat.
Prob. Mirabilis ordo existit in mundo ; atqui taîis ordo
Deum esse demonstrat.
Prob. maj. Nam ibi existit mirabilis ordo, ubi unde-
quaquè mirifica sunt opéra, sapientissimi fines, eorumque
consequendorum média idonea : atqui sive oculos ad cœ-
lum attollamus, motus et revolutiones sideruiu, statas tem-
pestatum vicissitudines. . . . &c., conspecturi ; sive ad ter-
ram oculos dimittamus, innumera animantia, plantas, me-
talla, herbas,. . . . &c., aspecturi ; sive nosmetipsos intuea-
mur, mirum prorsùs habitum corporis ad omnes motus
exercendos apti, illam animée vim prœterita recordantis,
praesentia 8estimantis,f"utura prœsagientis, inspccturi ; unde-
quaquè cernimus opéra mirificè disposita, fines sapientissi-
mos, eorumque consequendorum média idonea. Ergo....&c.
Prob. min. Hic mundi mirabilis ordo Deum esse de-
monstrat. Ut enim hic mirabilis ordo mundi demonstret
esse Deum, duo requiruntur, 1. ut existât ens distinctum à
cseteris entibus hune mundum constituentibus ; IL ut ens
istud sit sapientissimum et intelligentissimum ; atqui hœc
duo certa sunt.
I. quidem existit ens distinctum. . . . àc; vel enim existit
ens distinctum. . . . &c., vel ille aspectabilis mundus sibi
dédit existentiam, vel eam accepit à nihilo, casu fortuito,
fortunâ aut fato, vel est œternus : atqui tria posteriora
répugnant, lo. Non sibi dedit existentiam (3.3). So.Eam
non accepit à nihilo, casu fortuito, fortunâ aut fato (30).
3o. Mundus non est eeternus. Ad id enim oporteret ut ma-
teria esset aeterna, utque motus materi83 esset essentialis,
quod utrumque répugnât (39, 44). Ergo I. existit. . . .&c.
II. Ens illud est sapientissimum et intelligentissimum.
Ens enim illud est sapientissimum et intelligentissimum
quod omnia raensurâ, pondère et numéro ità disponit ut
idonea sint ad fines assequendos ; sapientia enim et intelli-
gentia consistunt in electione mediorum aptissimorum ad
finem assequendum : atqui ens distinctum à Cceteris enti-
bus. .. . &c., omnia in hoc mundo ità mensurâ. . . . &c,, ut
idonea sint ad fines assequendos. Ergo II. . . . &c. Aliundè
&c. Erp-o. . . . &c.
METAPHYSICA. 129
Prœtereà si mirati sint omnes Newtonis et aliorum philo-
sophorum in explicandis naturae phsenomenis sagacitatem,
ingenium ac mentis aciem, quanta laude dignus est
mimdi auctor qui orbis universi compagem tam sapi-
enter ordinavit ! Arguitne minus intelligentite mundi
formatio quàm explicatio ?
Et vero, nonne deliraret qui, spheeram systematis Co-
pernici, varies siderum motus mira ratione exprimentem,
à seipsâ, vel à casu fortuito^ nullâ prœside intelligentiâ,
fuisse formatam assereret ? Quid igitur sentiendum est de
iis, qui ipsam mundi machinam, mirabilemque orbis uni-
versi ordinem fortuitis raateriaî portiuncularum combina-
tionibus assignaret ?
48. ''' A quel titre, inquit D. Virey, un vrai naturaliste,
** tel qu'on peut supposer tout homme raisonnable, aimant
" à s'instruire de la vérité, pourrait-il être athée ? Com-
*' ment ne reconnaîtrait-il pas, au contraire, l'ordre su-
" blirae, la beauté, l'industrie merveilleuse qui président à
" la perpétuité de cet univers ? Les cieuoc racontent la gloire
'•' de la divinité, la terre est couverte de ses magnificences.
'' Ouvrez un seul insecte et voyez ! Ce fait éclaire si vive-
'' ment toutes les intelligences, que le matériahste le plus
" renforcé, comme celui q,ue nous citions tout à l'heure,
" (l'auteur du Système de la nature, le Baron d'Holbac) ne
'^ sait plus que se contredire : il tombe, pour ainsi dire, à
*' genoux et atterré, en confessant ces mots : je réponds en
" p'emier lieu, que nous ne pouvons douter que la nature ne
'• soit très-puissantè et très -industrieuse ; nous admirons son
" industrie, &c. ; car qu'est-ce qu'il appelle ?ia^tire ici, si-
" non la suprême inteUigence ? Le voilà donc qui déclare
" un Dieu malgré lui.
" On ne peut empêcher des raisonneuj's d'attribuer à
" des causes secondaires, des effets très-considérables et
" très-étendus dans le monde, de sorte qu'ils croient pou-
" voir se passer d'un premier moteur, pour arranger, selon
" leur tête, leur petit univers. C'est ce qui fait dire à Ba-
" con que, si l'on ne goûte que légèrement des sciences na-
" turelles, on peut être conduit à l'athéisme, mais qu'en
" s'abreuvant pleinement de cette féconde source de philo-
" Sophie, l'on est ramené invinciblement vers la divinité
130 METAPHYSICA.
** (a). Voilà pourquoi furent religieux, Newton, Linneeus,
" et tous les profonds savans, les plus grands hommes qui
'* ont scruté les secrets de la nature. ..." Si vous remar-
" quez les raisonnemens des hommes qui prétendent se
" passer de cette première des causes, tous sont obligés
•' de multiplier les ressorts et les explications en trai-
•' tant des créatures organisées. Pour cet effet, il faut
" qu'ils accordent à la matière des pouvoirs extraor-
*' dinaires ; ils concèdent gratuitement l'intelligence et
*' la sensibilité aux pierres mêmes, à la terre, à l'air,
*' aux moindres molécules, pour étançonner leur écha-
" faudage ; ils sont obligés de mettre Dieu en pièces,
'* de le démembrer en morceaux, pour ainsi dire, et
" d'en incorporer les divers attributs dans les matières les
** plus brutes : tant il leur est impossible de se passer d'une
*' puissance intelligente dans l'univers !" Nouveau diction-
*' nuire d'histoire riaturelle, Verbo, Créature.
Circa prsesens argumentum utilissimè legi possunt Nieu-
wentyt, l'Existence de Dieu démontrée par les merveilles de la
nature ; Fénélon, Traité de V existence de Dieu ; Pluche,
Spectacle de la nature ; Duguet, Explication de Voiivrage
des six jours ; Racine, Poëme de la Religion ; Bernardin de
St. Pierre, Etudes de la nature ; Cousin Despréaux, les Le-
çons de la nature ; Chateaubriand, Génie du Christianisme j
&c. &c.
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Orbis finitus est ; ergo causam infinitam non
requirit.
49. Resp. Neg. consqam. Licèt enim mundus ratione
suî sit finitus, ratione tamen modi quo creatus est, requirit
causam infinitam, siquidem ex nihilo creatus est ; atqui
creatio ex nihilo causam infinitam postulat, seu causam ad
cujus vocem fiant omnia.
Inst. lo. Médium demonstrationis débet esse necessari-
um. Atqui mundus et ejus ordo non sunt necessarii. Ergo
&c. ^'^ ^'^ ' • •■ - •" ••----■ //'^'' ''^■- ■' ■'/ y-'--
50. Resp. Dist. Maj. Médium demonstrationis débet
esse necessarium, necessitate connexionis cum re demonstran-
dâ ; conc. maj. Necessitate existentiœ ; neg. maj. Quamvis
(a) " Levée gustus in philosophiâ movere possunt ad atheismum, sed pleniores haustn»
" ad religionem reducunt." De augmenta scientiarum, lib. 1.
METAPHYSICA. 131
mundus non existât necessariô, ex hypothesi quôd existât,
necessariani habet connexionem cum existentiâ alicuius
causœ suprêmes a qua esse suum accepit.
Inst. 2û. Existentiâ mundi est solumraodô hypotheticè
certa, dùm existentiâ Dei est absolutè certa : atqui ab exis-
tentiâ solammodô hypotheticè certâ, concludi non potest
existentiâ absolutè certa. Nam concliisio non débet esse for-
tior praemissis : atqui si ab existentiâ solummodô hypothe-
ticè certâ concladeretur existentiâ absolutè certa, conclusio
foret fortior praemissis. Ergo. . . . &c.
51. Resp. Neg. min.; ad prob.dist. maj, Conclusio /or-
maliter sumpta non potest. . . . &c. ; conc. maj. Conclusio
matérialité?- sumpta non potest. . . . &c.; neg. maj. Dist. pa-
riter min, Conclusio materialiter sumpta fortior esset prae-
missis : conc. min. Formaliter sumpta. . . . &c .; née;, min,
et consqam. ^ /^
Reverà hsec conclusio, ergo existit Deus, si materialiter^" t'^^
consideretur, fortior est praemissis materialiter sumptis,'^"''^
scilicet, existit mundus, quia in conclusione aîtributum 7ie-
cessario conveuit subjecto, in praemissis verô attributum
contingenter convenit subjecto. Sed conclusio formaliter
sumpta non est fortior prsemissis ; ab existentiâ enim mun-
di id solum concluditnr, scilicet, existere primam causam à
quâ mundus existentiam accepit ; sed ciim haec causa non
possit esse quin sit necessaria, sequitur, vi materiae, illam
necessariô existere.
Inst. 3o. Inter Deum et creaturas nulla est proportio ;
ergo creaturse non probant existentiam Dei.
Resp. Neg.| ant. Adest proportio effectûs ad causam.
Inst.4o. Proportio effectûs ad causam non potest demons-
trare existentiam Dei. Nam médium demonstrationis débet
esse priùs notum re demonstrandâ ; atqui créatures non
sunt priùs notœ quàm creator. Correlata enim sunt simul
naturâ et cognitione ; atqui creator et creaturee sunt cor-
relata. Er2:o. . . . &c.
52. Resp. Neg. ant.; ad prim. prob. neg. min.; ad se-
cundam, dist, maj. Correlata sunt simul naturâ et cognitio-
ne, si considerentur /ormaZz^e?- ut correlata ; conc. maj. Si
materaliter considerentur ; neg. maj. Rev^erà creaturœ con-
sideratse ut creaturae non sunt priiis notae quàm creator, si-
cut filius consideratus ut filius priùs pâtre non cognoscitur.
I 2
132 METAPHYSICA.
At creaturœ consideratœ ut sunt entia contingentia, finita
et mutabilia.priùs noscuntur quàm creator. Atqui ex ipsis
ad cognitionem primse caus2e facile assiirgimus : entia enim
finita et contingentia à seipsis esse non possunt. Ergo cre-
aturse consideratse ut entia fmita et contingentia creatorem
esse demonstrant. . . . Uno verbo, creaturse, quando ex eis
Deum esse probatur, neque considerantur ut entia preecisè,
neque ut entia creata, sed ut entia finita et contingentia ;
et fit transitus à notione entis finiti ad notionem entis
creati ; undè concluditur existere creatorem seu Deum.
Obj. 2o. Multa sunt in hoc mundo reprebensionè digna,
V. g., animalia noxia, plantse venenosœ, monstra deformia,
grandines, fulgura, &c.; ergo mundus et ejus ordo non pro-
bant Dei existentiam.
53. Resp. Dist. Ant. Multa sunt in hoc mundo repre-
bensionè digna, id est, multa nobis videntur reprebensionè
digna, quia eorum fines particulares et debitam cum ceeteris
consensionem non advertimus ; conc. ant. Id est, multa
sunt realiter reprebensionè digna ; neg. ant. et consqam.
Itaque ubi agitur de opère ahquo, nemo illud reprebensionè
dignum judicare potest et prudenter débet, si perfectè non
noverit et universitatem et singulas partes totius operis, vel
si ignoraverit ejusdem operis et finem generalem et singula-
rum partium fines particulares debitamque cum ceeteris
consensionem. Aliter, quo quis ignorantior esset, eo ma-
gis jus haberet opéra peritissimorum opificum reprehendere,
quod est absurdo absurdius.
Reverà quœdam sunt in orbe partes quarum cum reliquis
consensionem non videmus : istud autem probat solùm
ignorantiam nostram, non opificis insipientiam. Multa sunt
in mundo admiratione dignissima, qu?e eximiura omnium
rerum ordinem demonstrant;, et ques creatorem sapientissi-
mum arguunt, ex quibus sequitur, ea quse minus benè dis-
posita videntur, relative ad totum rectè ordinari.
54. Et verô, multa sunt quse primo intuitu inutilia vel
noxia videntur, et quœ tamen ex nostrâ experientiâ habent
suam utilitatem et finem proprium ; sic, v. g., plantas ve-
nenosse, serpentes, colubri, bufones (les crapauds), &c.,
praeterquàm quod noxios vâpores combibendo aërem salu-
briorem reddant, prsebent insuper efïicacissima medicamen-
ta quœ maximee sunt utilitatis. Sic pariter omnes insectee
METAPHYSICA. 133
et venues terram veneno purgant, et alimenta aliis anima-
libus prœbent.
" Les incre'dules, inquit D. Virey, ramassent, de toutes
parts, tous leurs efforts pour combattre les causes finales.
Tels que les mauvais anges de Milton, ils soulèvent en
vain leurs têtes audacieuses et rebelles contre les épées
flamboyantes des anges de lumière. Ils appellent à leur
secours la peste, les poisons, les maladies, la mort, les
ouragans, toutes les puissances infernales, pour dégra-
der, noircir, envenimer les cbefs-d'œuvre du Très-Haut.
. . " Pour eux tout est imperfection, sujet de blCirae ou de
plainte contre la nature, comme on le voit en lisant leurs
ouvrages ; et pour peu qu'ils souffrent de la piqûre d'une
puce, l'univers n'est que le produit d'Ahrimane ou du
Démon du mal («).
" Nous ne cherchons point à justifier ici les desseins de
la nature, ou plutôt de son sublime auteur ; et, en vérité,
nous ne croyons point qu'il ait besoin d'avocat vis-à-vis
de ses créatures. . . . N'est-il pas étrange de voir un atome
se redresser contre le suprême ordonnateur des mondes,
et oser lui dire ; tu as mal fait. ... ...
'' L'on demandera pourquoi créer des serpens? Mais
de combien de vermines dégoûtantes, de crapauds im-
mondes et d'êtres nuisibles à certains égards, utiles sous
d'autres points de vue, ne nous délivrent pas les serpens ?
Ce sujet se rattache ainsi à la hiérarchie des fonctions que
chaque créature doit remplir en ce monde. Il est cer-
tainement à croire que la nature n'a rien créé mal à
propos et sans nécessité, sans quelque utilité générale
que nous n'apercevons pas toujours, mais qui n'en est
pas moins importante.
*' Au moins, poursuivra-t-on, les plantes vénéneuses sont
une espèce de méchanceté sur la terre. Mais vous qui
parlez ainsi, avez-vous assez réfléchi, et bien considéré
ce fait sous toutes ses faces ? Je vous dis qu'en cela
brille la sage prévoyance de la nature : en voici les
preuves.
Mr. Virey, après avoir mentionné plusieurs plantes qui sont
un poison violent pour l'homme, et qui sont une excellente
nourriture pour certains animaux, poursuit ainsi :
(a) Chez les Perses, Ahrimane o Arimanc était le principe du mal ; il était opposé
à Oromaado ou Oromase, principe de tout bien.
134 METAPHYSICA.
" Voilà par quels exemples positifs il faut repousser les
*' imputations qu'une téméraire ignorance élève en aveugle
*' contre les plus merveilleuses combinaisons de la nature.
*' Nous ne prétendons pas que l'on trouve ainsi des utilités
** à toutes choses, comme à la peste et aux maladies qui
*' nous affligent, puisque nous ne sommes point admis dans
*' les hauts secrets de la Providence : mais nous devons être
'* persuadés, par tout ce que nous connaissons, qu'il n'est
" point de mal absolu dans l'univers, et que l'inconvénient
" pour un être devient l'avantage de l'autre^ afin que tout
" se maintienne." Ihid.
55. Qui contendunt creatorem non fuisse sapientissi-
mum quia qusedam sunt monstra, tam perverso sunt judicio,
quàra forent ii qui contenderent aliquem fundendi metalli
opificem esse imperitum, quia aliquando in ejus officinà
videntur quœdam figurse malè efformatae, qusedam inflatio-
nes (des bouffissures), qusedam moles, scorise, &c. Hcec
monstra, quse aliquando videntur in mundo, nedùm insi-
pientiam creatoris demonstrent, probant omnia tam sapien-
ter à creatore fuisse formata, ut quidquid est extra ordinem
ab eo stabilitum, sit necessariô difforme et sœpissimè hor-
rendum.
Tonitrua, fulgura, grandines, &c., oriuntur ex causis
utilibus, videlicet, ex variis legibus, diversisque corporum
motibus, sine quibus nec aër purgaretur, nec prata germi-
narent, nec silvse frondescerent, nec campi frugescerent,
nec ipsa animalia viverent, &c Vide D. Cousin Despréaux,
les Leçons de la Nature, Considérations 238, 279, &c.
Inst. Ex illâ responsione sequeretur omnia quse nobis
videntur reprehensione digna, ideo talia nobis videri quia
finem Dei generalem ignoramus ; atqui hsec responsio nulla
est. Nam ex solis notionibus quas habemus ratiocinari pos-
sumus. Atqui rerum notiones quas habemus tam evidenter
nobis ostendunt eas esse reprehensione dignas, quàm de-
monstrant alias esse ordinis et harmoniae plenas. Ergo
possumus affirmare illas esse reprehensione dignas.
56. Resp. Neg. utramque minorera et dico notiones,
quas habemus de rébus quse nobis videntur reprehensione
dignae, non tam probare eas esse reprehensione dignas,
quàm notiones, quas habemus de rébus quae nobis videntur
harmoniee et ordinis plense, probant eas esse taies. Nam
METAPHYSICA. l35
quandô agitur de rébus qu9e nobis videntur reprehensione
dignse, desunt nobis notiones satis adaequatae ut posaimus
judicare de earum utilitate aut inutilitate; at sapientiae
characteres quos videmus evidenter in ferè infinitis parti-
bus, apertè demonstrant sapientiani et intelligentiam illius
qui eas creavit. Inspiciendo igitur tantam sapientiara,
affirmari potest eamdem sapientiam esse in omnibus aliis
partibus. Et verô.defectus isti, sive reaies, sive apparentes,
nihil aliud sunt quàm imperfectiones, quibus creator voluit
mundum signari, ut nos moneret illum fuisse creatum. Si
enim mundus non limitaretur in suis perfectionibus, eo ipso
perfectus seu infinitus esset ; sicque creatura esset Deus ;
haberet enim, inquit D. de Fénélon, plenitudinem perfec-
tionis, quae est ipsa divinitas (a).
" Est-on bien assuré, inquit D. Ge'rard, qu'il n'y a ni
'' intelligence ni dessein dans ces défauts prétendus ? Ce
*' que nous croyons inutile ne pourrait-il pas avoir ses
" usages? Ce que nous jugeons nuisible ne serait-il pas
" nécessaire par quelques endroits? Sommes-nous placés
" assez haut dans la nature pour juger sûrement de ses
" diverses parties ?. . . . Ce qui me surprend, ce qui m'em-
" barrasse et que je ne puis m'expliquer ni comprendre, ne
" me fera pas nier ce qui est évident. Il existe un être
" nécessaire, indépendant, unique source de toute perfec-
" tion, absolument, infiniment parfait, un être par consé-
" quent souverainement sage. D'un autre côté, ces carac-
*' tères si évidens d'intelligence et de sagesse que j'aper-
" çois à chaque instant dans presque tous les objets qui
'* m'environnent, suffisent pour me faire juger par une
" parité de raison toute naturelle des choses que je ne
** conçois pas: ainsi tout ce que je pourrais objecter ensuite
" peut bien m'étonner, mais il ne saurait détruire en moi
" cette première conviction que les vérités les mieux
*' établies y ont fait naître." Essai sur les vrais principes
relativement à nos connaissances les plus importantes. Liv.
III. chap. VII.
(a) " Tf»nt ce qui n'est point Dieu ne peut avoir qu'une perfection bornée ; et ce qui^n'a
" qu'une perfection bornée demeure toujours iraparfair, par l'eniiroit où la borne se fait
" sentir, et avertit que l'on y pourrait encore beaucoup ajouter. La créature serait le créa-
" teur même s'il ne lui manquait rien ; car elle aurait la plénitude de la perfection, qui
" est la divinité même ; dès qu'elle ne peut ôtre infinie, il faut qu'elle soit bornée en perfec-
"* tion, c'est-ii-du-e, imparfaite par quelque côte. Elle peut avoir plus ou moins d'imperfec-
" tion ; mais enfin il faut toujours qu'elle soit imparfaite." Traité de l'existence de Dieu,
Ire. partie, conclusion générale.
136 METiVPHYSICA.
Obj. 3o. Natura suâ fœcunditate est principium omnium
rerum ; ergo mundus non probat Dei existentiam.
57. Resp. Quidquid per naturam intelligatur, nihil con-
cludi potest contra Dei existentiam. Vel enim per natu-
ram intelligitur lo. collectio omnium entium quœ hune mun-
clum constituunt ; sed natura hoc sensu intellecta, nihil aUud
est quàm ipse mundus ; non potuit igitur producere
niundum ; alioquin mundus sibi dedisset existentiam ; quod
répugnât (33).
2o. Vel per naturam intelligitur ipse Deus omnia regens et
conservans, sive legihus generaîibus, quas ipse stabilivit, sive
interventione seu medio creaturarum quas ipse efformavit et
conservât : in hoc casu, natura verè produxit mundum ; sed
natura tune nihil aliud est quàm ipse Deus.
3o. Vel denique per naturam intelligitur Systema legum
generalium quibus entia existunt, conservantur et reproducun-
tur : in hoc casu, natura non potuit mundum creare, ens
enim non est. Imo natura sic intellecta, nediim destruat,
supponit Dei existentiam. Leges enim necessario legisla-
torem requirunt ut existant. Ergo quidquid per naturam
intelligatur, nihil concludi potest contra Dei existentiam.
3. Argumenta metaphysica existentiœ Dei.
58. Argumenta metaphysica existentiee Dei ea sunt quae
rerum essentiis fundantur. Multiplicis sunt generis hœc
argumenta ; prsecipua deducuntur ex ente necessario, ex
ideâ et possibilitate entis summè perfecti, ex mentis hu-
manse creatione, illiusque cum corpore unione, &c,; inter
hîec argumenta solummodo, brevitatis causa, primum seli-
gemus.
Propositio.
59. Existentia entis necessarii Deum esse demonstrat.
Prob. Existit ens necessarium ; atqui ens necessarium
est Deus. Ergo existit Deus.
Frob. maj. Vel enim existit ens necessarium, vel omnia
entia quse existunt ex natura suâ sunt contingentia : atqui
posterius répugnât. Nam ens contingens ex natura suâ,
indifFerens est ad existendum vel ad non existendum : atqui
omnia entia quse existunt, non possunt esse indifFercntia
ad existendum vel ad non existendum. Ens enim indiffe-
rens ad existendum vel ad non existendum, debuit deter-
METAPHYSICA. 137
minari ad existendum potiùs quàm ad non existcndunî :
atqui si omnia entia quae existunt, essent indifferentia ad
existendum vel ad non existendum, non potuissent deter-
minari ad existendum potiùs quàm ad non existendum.
Nam illa entia deterrainata fuissent ad existendum potiùs
quàm ad non existendum, vel sibi dando existentiam, vel
eam accipiendo à nihilo, casu fortuito, fortunâ aut fato, vel
ab alio ente ; vel demùm alla ab aliis successive procreata
fuissent : atqui nihil horum dici potest. lo. Quidem non
potuerunt sibi dare existentiam ; tune enim idem fuisset
simul et non fuisset (33). 2o. Existentiam accipere non
potuerunt à nihilo, casu fortuito, fortunâ aut fato (30). 3o.
Non ab a)io ente; nam lo. Hic agitur de collectione
omnium entium : atqui extra omnium entium collectionem,
nulJum est aliud ens. 2o. Vel ens istud est necessarium,
vel est contingens : si prius, ergo existit ens necessarium,
quod contendimus ; si posterius, eadem est difficultas, à
quo scilicet existentiam accepit. 4o. Denique alia ab
aliis existentiam non acceperunt. Tune enim adesset
progressus in infinitum, quod répugnât (35). Ergo. . . .
&c. Aliundè. . . . &c.; ergo omnia entia quae existunt non
sunt contingentia. Ergo existit ens necessarium.
Hâc de re consuli potest D. Le François, Preuves de la
Religion, première partie, tom. 1. pag. 120, &c.
60. Prob. min. Ens necessarium est Deus. Nam Deus
est ens in omni perfectionum génère infinitum ; atqui ens
necessarium est. . . . &c. Si enim res ità non foret, ens
necessarium limitaretur in suis perfectionibus ; atqui istud
fieri non potest. Si enim ens necessarium limitaretur in
suis perfectionibus, vel à seipso, vel ab alio ente : atqui
neutrum dici potest. lo. Non à seipso. Vel enim seip-
sum limitaret libère, vel necessario : atqui utrumque ré-
pugnât, lo. Seipsum libéré limitare non potest, cùm ab ip-
sius arbitrio non pendet quod ipsi essentiale est. 2o. Limi-
tari non potest necessario seu ex naturâ suâ. Quod enim
ex naturâ suâ nullam respuit perfectionem, in nullâ perfec-
tione limitari potest ex naturâ suâ. Atqui ens necessarium
nullam respuit perfectionem ex naturâ suâ. Si enim ex
Biaturâ suâ aliquam respueret perfectionem, illam respueret
vel quia est ens, vel quia est ens necessarium : atqui
neutrum dici potest. Non prius; ratio enim preecisa entis
138 METAPHYSICA.
nullam excludit perfectionem, imù nulla est perfectio
possibilis nisi in ente. Non posterius ; ens enim necessa-
rium in summo gradu existit, et ideô in summo perfectionis
gradu. Ergo lo. non limitatur in suis perfectionibus à se-
ipso. 2o. Non ab alio ente. Ens enim necessarium à
nullo alio pendet ut existât. Ergo pariter à nullo alio
pendet ut existât tali vel tali modo. Ergo 2o. non limi-
tatur in suis perfectionibus ab alio ente. Aliundè nec à se-
ipso. Ergo ens necessarium non limitatur in suis perfec-
tionibus. Ergo est in omni perfectionum génère infinitum.
Ergo est Deus. Undè sic resumo : "■ Existit ens necessa-
** rium : atqui ens necessarium est Deus. Ergo existit
'♦ Deus."
" L'idée d'un être nécessaire, inquit D. Le François,
*' renferme toutes les perfections ; et il ne faut pas s'en-
'^ tendre soi-même, pour le nier. Etre par soi, c'est être
" pleinement, c'est exister au suprême degré de l'être, et
*• par conséquent au suprême degré de perfection : car
" l'être et la perfection ne sont qu'une même chose. Une
" chose n'est qu'autant qu'elle a de perfection, et elle n'a
*' de perfection qu'autant qu'elle est. La perfection ne peut
" convenir au néant, non plus que l'être. Ce qui n'est
" qu'un peu parfait, n'a qu'un peu d'être. Ce qui est plus
" parfait, est d'avantage. ... Ce qui a donc l'être par soi,
" est dans la suprême perfection. On ne peut rien conce-
**" voir qui soit plus être. . . . On ne peut rien lui ajouter.
" Il est par lui-même tout ce qu'il peut être, et il ne peut
" jamais être moins que ce qu'il est. Donner des bornes à
'^ sa perfection, ce serait en donner à son être. Il est au-
" tant absurde de dire qu'il n'est pas infiniment parfait,
" qu'il serait absurde d'avancer qu'il n'est pas infiniment
" existant.
" Mais quelles sont les perfections qui peuvent convenir
" à l'être souverainement parfait ? La réponse s'offre d'elle-
•' même : toutes les perfections qui ne renferment dans
" leur idée ni bornes, ni limites. Car il est clair que, s'il
" lui en manquait une de ce genre, il ne serait plus infini-
*' ment parfait, puisqu'il pourrait y avoir un être plus
" parfait : savoir, celui qui aurait toutes les perfections,
'' et de plus celle qui lui manquerait." Ihid, pag. 125, &c.
METAPHYSICA. 139
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Supponi potest séries infinita entiura ab œterno
sibi succedentium : atqui in hâc hypothesi nullum require-
retur ens necessarium. Ergo omnia entia possunt esse
contingentia.
61. Resp. lo. Neg. maj. Talis enim séries actualiter
infinita, et tamen semper crescens, répugnât (35) ; quod
sic exponit D. Bergier, Traité de la Religion, tom. 2,
pag. 162.
" Cette chaîne infinie de générations et de productions
" est évidemment absurde. On la suppose infinie ; cepen-
" dant elle ne l'est point. Si elle se termine ou finit au
**■ moment présent, elle n'est donc pas infinie; si elle aug-
" mente, elle l'est encore moins ; il est absurde que l'infi-
** ni actuel puisse augmenter. On peut commencer actu-
" ellement une chaîne successive. . . . qui ne sera jamais
" terminée, qui n'existera jamais toute entière : mais une
*' chaîne successive, actuellement infinie, et actuellement
" terminée, est une contradiction.
" Ou mille ans avant nous elle était déjà infinie, ou elle
*' ne l'était pas. Si elle l'était, mille ans de plus ne l'ont
'* pas rendue plus longue : il est absurde que l'infini actuel
*' puisse devenir plus grand. Si elle ne l'était pas, mille
'* ans sont une durée bornée ; il est absurde que deux
*' quantités bornées, ajoutées l'une à l'autre^ produisent une
" quantité infinie."
Resp. 2o. Neg. min, Etiamsi, per impossibile, séries en-
tium contingentium ab œterno sibi succedentium admitte-
retur, nihilominiis requireretur ens necessarium ; répugnât
enim dari seriem infinitam eflfectuum sine causa ; atqui in
hâc hypothesi daretur séries infinita effectuum sine causa :
singula enim entia, ut supponitur, essent producta ; ergo
ipsamet tota coUectio esset producta. Ergo in hâc hypothe-
si nulla adesset causa primaria producens, quod sic expli-
cat D. Bergier, ibid, pag. 263.
" Tous les êtres étant produits, il n'en est aucun duquel
'* on ne puisse demander, quelle est sa cause ? En remon-
*' tant à l'infini, loin de résoudre la question, l'on donne
** lieu de la renouveler à l'infini. En descendant la chaîne,
** tous les êtres sont causes de ceux qui suivent ; mais en
*' remontant, ce ne sont plus que les effets de ceux qui
140 METAPHYSICA.
" précèdent ; s'il n'y a point de première cause, ce sera
'' une chaîne infinie d'effets sans cause."
Obj. 2o. Nostra demonstratio nititur hoc argumente ;
vel existit ens necessarium, vel omnia entia quas nunc ex-
" istunt, sunt contingentia. Atqui omnia entia quae nunc
'* existunt, non sunt contingentia. Ergo existit ens neces-
" sarium :" atqui major et minor hujus syllogismi sunt
fals?e. Ergo. . . . &c.
62. Resp. Neg. min., et dico majorem et minorem hu-
jus syllogismi veras esse. lo. major vera est : est enim
propositio disjunctiva inter cujus partes nullum datur mé-
dium : 2o. minor vera est ; si enim omnia entia tùm exis-
tentia,tùm possibilia essent contingentia, tune nullum exis-
tere posset ens. Vel enim existeret per causara internam,
vel per causam externam. Si prius ; existeret ergo ens ne-
cessarium : si posterius ; adest contradictio.
Inst. Hsec propositio ; " Vel existit aliquod ens necessa-
" rium, vel omnia entia sunt contingentia," non magis
vera est quàm ista ; *' Vel existit in hoc mundo aliqua spi-
*•■ ritualis substantia finita, vel omne quod existit est cor-
*^' pus ;" atqui falsa est posterior propositio ; ergo et prior.
63. Resp. Neg. maj., et paritatem. Inter partes enim
posterioris propositionis datur hcec média propositio : " spi-
*' ritualis substantia finita est possibilis :" nulla vero datur
média propositio inter partes priori s. Si enim daretur, sanè
hsec ; '^ ens necessarium est possibile ;" atqui haec propo-
sitio non est média inter duas disjunctionis partes, quia
eumdem sensura habent ac ista ; " ens necessarium exis-
" tit ;" in necessariis enim existentia et possibilitas sunt
quid unum et idem. Si enim ens necessarium esset solum-
modo possibile et non existeret^ jàm desineret esse possi-
bile, cùm ad existentiam nunquàm pervenire posset. Ergo
nulla est paritas. Ergo. . . . &c,
II. DE ATHEISMI INCOMMODIS.
Homines spectari possunt vel ut privati, vel ut societa-
tem constituentes. Sub utriusque respectu consideratis
atheismus valdè noxiiis est, ut ex sequentibus propositio-
nibus patebit.
Propositio prima.
64. Atheismus noxius e^ hominibus privatis.
METAPHYSÏCA. 141
Prob. Illud enim noxium est hominibus privatis, quod
in prosperis securitatem, quod in adversis solatium, quod
denique omnem solidœ felicitatis spemfanditùs evertit. At-
qui atheismus in prosperis. . . .&c.
lo. Quideni omnem in prosperis securitatem funditùs
evertit. Si enim nuUus est Deus, tune mundus iste regituu
vel casu fortuito, vel fatali necessitate ; atqui sive casu
fortuitOj sive fatali necessitate regatur mundus, omnis evcr-
titur in prosperis securitas. Si enim casu fortuito cuncîa
regantur, fieri potest ut subito fortunée ludo è summâ pros-
peritate in miserrimam vitœ conditionem dejiciamur imme-
riti. Si vero cuncta gubernentur fatali necessitate, nemo sibi
promittere potest se non statim dejiciendum esse in sum-
raas cerumnas teterrimaque mala quœ nullâ prudentiâ averti
poterunt ; diim è contra sub Deo summè bono, summè
provido, summè potenti, quisque certus est se non futurura
esse miserum nisi mereatur, vel si non merealur, liujus
misericc se prœmia accepturum. Ergo lo. . . .&c.
2o. Nulium in adversis solatium relinquit. Tn va-
riis enim multisque bujus vitee miseriis nibil prorsùs
auxilii sperandura est h casu fortuito, vel à fatali et
ineîuctabili necessitate. Contra vero theista in ad-
versis ad Deum recurrere potest, patremque tenerrimum
invocare. Ergo 2o. , . . &c.
3o. Atheismus omnem verse felicitatis spem funditùs
evertit. Nullam enim nisi prœsentem vitam-agnoscit atheus.
Atqui in hâc mortali vitâ nulla potest obtineri vera since-
raque félicitas ; tùm quia in terris nulium est bonum nisi
fiuxum et caducum ; tùm quia omnes ferè homines plura
experiuntur mala quàm bona ; tùm quia quœlibet atheorum
bona et gaudia inècere débet horrenda mortis expectatio.
Ergo 3o. . . ,&:c. Aliundè. . . .&c. Ergo,...&c.
" De combien de douceurs, inquit civis Genevensis,
n'est pas privé celui à qui la religion manque ? Quel
sentiment peut le consoler dans les peines ? Quel spec-
tateur anime les bonnes actions qu'il fait en secret ?
Quelle voix peut parler au fond de son ame ? Quel prix
peut-il attendre de la vertu ? Comment doit-il envisager
la mort ?"
142
METAPHYSICA.
Solvuntur objectiones.
Obj. Atheismus hominem libérât ab inferni terroribus,
qui theistas vehementer exagitant. Ergo. . . . &c.
65. Resp. Neg, consqam. Timor enim inferni solos viti-
osos homines angit et cruciat ; viros autem bonos et probos
non cruciat, sed potiiis eos recréât spes œternse felicitatis :
ad hanc igiturre vocanda est hase objectio; " hominum inter-
'* est absque ullo inferni timoré posse sese omni sceleruni
" génère et turpi voluptatum cœno inquinare ; atqui stante
" atheismo possunt homines absque ullo inferni timoré sese
" . . . . &c ; ergo hominum interest stare atheismum." Porrô
quis, nisi sit ex grege Epicuri, admiserit hanc argumen-
tationem ?
" Les athées, s'il en est, inquit D.Blanchard (l'Ecole des
" Mœurs, iom. 1, pag. 57, édition de 1804), sont des mons-
** très d'ingratitude qu'on doit regarder avec horreur, ou des
" fous dignes de pitié, et qui ne méritent pas qu'on leur
** parle. La raison indignée se révolte contre un si absurde,
" si insoutenable système. L'existence de Dieu est une de
*' ces vérités fondamentales qui ont été gravées dans no-
*' tre ame par la main de son divin auteur, et dont la croy-
'' ance est inséparable de l'usage de la raison. Il n'est pas
" plus possible d'en douter que de douter de tout avec les
" sceptiques. La philosophie de l'athéisme n'est donc pas
" une philosophie sérieuse. C'est un mensonge, c'est une
"^ imposture, qui ne prouvent dans ceux qui se déclarent
'' athées, que le désir qu'ils auraient de l'être. C'est une
" chimère qu'on a tenté inutilement de réahser, et que dé-
" ment le témoignage de tous les peuples et de toutes les
" créatures. Aussi l'athéisme est-il, comme l'assure le Roi-
" Prophète et comme le confirme l'expérience, bien plus le
*' langage du cœur que de l'esprit, Dixit însipiens in corde
•' suo : non est Deiis. Psal. 13. L'impie désire qu'il n'y ait
•' point de Dieu, parce qu'il le craint, et qu'il est de son
" intérêt qu'il ne soit pas. Mais c'est en vain que les va-
*' peurs infectes qui s'élèvent d'un cœur vicieux et corrom-
'* pu tâchent d'obscurcir les traces lumineuses qu'offre de
" toutes parts l'univers de l'existence de son divin auteur,
" elles ne pourront jamais lès effacer entièrement de l'es-
" prit de l'impie. Dans le calme qui lui laissent quelque-
*' ibis la fureur et les emportemens de ses passions, s'il
METAPHYSICA. 143
" veut rentrer en lui-même, s'il lui reste encore la plus pe-
*' tite et la plus faible étincelle de cette raison qu'il se vante
" uniquement de prendre pour guide ; ne lui découvrira-
** t-elle pas que Dieu ayont fait l'homme pour le connaître,
'^ le servir et l'aimer, il a fait tout le reste pour l'homme ;
" puisque seul être raisonnable dans la nature, il peut, par
" son esprit et son industrie, rapporter à son usage tous
" les biens de la terre. L'homme né pour adorer le Créa-
" teur, dit Mr.de Bufion, commande à toutes les créatures.
" Vassal du ciel, roi de la terre, il l'ennoblit, la peuple et
" l'enrichit."
Propositio secunda.
66. Atheismus noxius est societati naturali (^aj.
Prob. Illud enim societati naturali noxium est, quod
mutua hominum inter se officia naturalia subvertit ; quod,
etiamsi ea officia penitiis non subverteret, ad miniis tamen
tollit ad illa prsestanda perfectam obligationem : atqui
atheismus mutua. . . . &c.
lo. Tollit mutua hominum inter se officia naturalia.
Nam officia naturaha fundantur vel essentiali boni et mali
discrimine, vel lege naturali cujus latorem Deum putamus.
Atqui, sublato Deo, toUitur essentiale discrimen inter
bonum et malum morale, ut confitentur omnes. Pariter,
sublato Deo legislatore, tollitur omnis lex naturalis et nuUa
relinquitur vitae régula praeter cujusque libidinem. Ergo
&c.
2o. Etiamsi atheismus omnia naturalia officia penitùs
non subverteret, ad minus tollit ad illa prgestanda perfec-
tam obligationem. Perfecta enim obligatio, prout distin-
guitur ab ipso officii sensu, est qusedam moralis nécessitas
rectè agendi orta ex consideratione utilitatis nostrae quam
videmus conjunctara cura honestate, et prsecipuè ex metu
numinis cui placere necessarium judicamus, quia maximis
prsemiis nos remunerare, et gravissimis pœnis plectere valet.
Atqui hanc moralem necessitatem tollit atheismus, ut evi-
dens est, nullamque relinquit rectè agendi normam, praeter
propriam utilitatem et felicitatem quâcumque via utraque ac-
quiratur. Ergo 2o. . . . &c. Aliundè. . . . &c. Ergo. . . . &c.
'^ Sortez de l'idée d'un Dieu, inquit civis Genevensis,
** et d'un Dieu juste qui punit et qui récompense, je ne
(a) Societas naturalis est conjunctio qnam liabent homines alii cuin allia ad liunc finem
aesequenduro, scilicet, ut reproducantur, conserventur et perficiantur.
144 METAPHYSICA.
" vois plus qu'injustice, hypocrisie et mensonge parmi les
" hommes. L'intérêt particulier, qui l'emporte sur tout le
*' reste, leur apprendra à parer ie vice du masque de la
'^ vertu: chacun dira : que tous les hommes fassent mon
"^ bonheur aux de'pens du leur ; que tout se rapporte à moi
** seul ; que le genre humain meure, s'il le faut, dans la
*' peine et la misère, pour m'épargner un moment de
*!■ douleur ou de faim."
*' Vous êtes au dessus de ces faiblesses, inquit Napoleo,
** medicum suum D. Antommarchi alloquens ; mais que
" voulez-vous ? Je ne suis ni philosophe ni médecin. Je
" crois à Dieu, je suis de la religion de mon père; n'est
**^ pas athée qui veut." Puis revenant au prêtre (l'abbé
Vignali): "je suis né dans la religion catholique, je veux
" remplir les devoirs qu'elle impose et recevoir les secours
" qu'elle administre. Vous direz tous les jours la messe
*' dans la chapelle voisine et vous exposerez le saint-sacre-
*' ment pendant les quarante heures. Quand je serai
" mort, vous placerez votre autel à ma tête, dans la
'' chambre ardente ; vous continuerez à célébrer la messe,
" vous ferez toutes les cérémonies d'usage. Vous ne
" cesserez que lorsque je serai en terre." L'abbé se retira;
*' je restai seul." Napoléon me reprit sur ma prétendue
" incrédulité. Pouvez-vous la pousser à ce point? Pou-
" vez-vous ne pas croire à Dieu ? Car enfin tout proclame
" son existence, et puis les grands esprits l'ont crue. —
" Mais, sire, je ne la révoquai jamais en doute. Je suivais
" les pulsations de la fièvre. Votre Majesté a cru trouver
" dans mes traits une expression qu'ils n'avaient pas. —
" Vous êtes médecin, docteur, me répondit-il, en riant.
*' Ces gens-là ne brassent que de la matière ; ils ne croiront
'' jamais rien." Mémoires du docteur F. Antommarchi,
tom. 2. pag. 118.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. Athei possunt percipere discrimen quod est inter
bonum et malum morale, et habere sensum justi et injusti ;
atqui in istâ perceptione discriminis inter bonum et malum
morale, et in isto justi et injusti sensu posita est natura et
vis officiorum, Ergo atheismus non subvertit mutua ho-
minum inter se officia.
METAPHYSICA. 145
G 7. Resp. lo. Dist. Maj. Athei possunt. . . . &c., si sibi
non consentiant ; conc. maj. Si sibi consentiant ; neg.
maj. Itaque, cùm omnis homo à prima infantiâ naturaliter
imbuatur opinione Dei et omnibus principiis quae ex hâc
opinione fiuunt, fieri potest ut quidam, excusso divinitatis
jugo, non continua excutiant orania principia quce ex illâ
iiaunt. Sed tune sibi non consentiunt. Vel enim omnia fa-
tali necessitate sine ullâ libertate agi credunt, vel fortunam
mundireginamstatuunt. Atquiinhocutroque casu nuUum
potest esse discrimen inter bonum et malum morale. Pari-
ter nulla foret legis raoralis sanctio, cùm nulla esset, ncc
esse posset potestas à quâ lex sanciretur, quœque subditos
obligatione verâ adstringeret. Ergo. . . . &c.
Resp. 2o. Neg. min. Vis enim officiorum omnis consis-
tit in efficaciâ motivorum ad virtutis exercitationem condu-
centium : atqui stante atheismo nullum est molivum satis
efficax quod possit ad virtutis exercitationem movere salt^m
athées qui non fuerunt ingénue educati \ aut quorum culta
non fuit ratio, qui hominum numerus est major. Si enim
vigente opinione existentiss Dei virtutum remuneratoris
et scelerum vindicis, tôt sint in raundo flagitia, quot essent
si non existeret hœc opinio ?
Inst. Atheorum animis, ut aliorum hominum, insitus
est amor et appetitus laudis et gloriee ; atqui hsec suffici-
enter movent ad prœstanda matua vitse officia. Ergo
&c.
68. Resp. lo. Neg. maj. Laudis enim et glorise appeti-
tus in solos viros optimas indoUs et mehoris institutionis
agit, nullatenùs vero in iufimam plebeculam, ut experientiâ
constat.
Resp. 2o. Neg. min. lo. Motivum istud semper mini-
mam vim habet apud majorem hominum partem, nec effi-
cere potest ut expleantur mutua vitse officia, ut jàm vidi-
mus. Cùm plerumquè laus et gloria divitiis et potentise
adjungantur, hoc motivum non ad virtutem sed ad divitias
comparandas excitaret. 2o. Hominera duntaxat à pubhcis
criminibus, quibus sohs, ut expellantur, efficax est infamiae
nota, non autem ab occultis avocaret. Hypocrisim igitur
non virtutem gigneret. " Partout où il y a une société, in-
" quit D. de Voltaire, une religion est nécessaire. Les
** lois veillent sur les crimes publics, et la rehgion sur les
K
146 METAPHYSICA.
" crimes secrets." Traité de la Tolérance. 3o. Appetitus
laudis et gloriae cum inferni timoré simul junctus non po-
test coercere pravas hominum cupiditates ; quid si solus
remaneret appetitus ?
Proposîtio tertia.
69. Atheismus noxius est societati politicae.
Prob. lUud enim societati politicae nocet, quod veram
et propriam legum et magistratuum auctoritatem labefac-
tat ; quod perfectam legum sanctionem evellit ; quod auc-
toritatem sine freno, subditos sine moribus, universamque
societatem sine principiis relinquit : atqui hœc omnia
efficit atheismus.
lo. Veram et propriam legum et magistratuum auctori-
tatem labefactat. Omnis enim legum et magistratuum
auctoritas tota stat bonâ fide et obligatione ad servanda
fœdera inter magistratum et plebem : atqui stante atheis-
mo bona fides, sicut qusslibet alia virtus, res est ludicra,
nuUaque est alia obligatio quàm coactio civilis ad servanda
jura civilia seu leges : quisque autem naturali inclinatione
propriis, ante omnia, studet utilitatibus. Ergo lo. veram
2o. Perfectam tollit legum sanctionem. Perfecta enim
legum sanctio consistit in eo quod quisquis leges observât,
remuneretur pro meritis, puniatur verô quisquis eas violât :
atqui hœc justa prsemiorum et suppliciorum distributio est
impossibilis sub atheismo. Magistratus enim solis prsemiis
et suppîiciis temporalibus afRcere potest : atqui non satis
araplam habet copiam bonorum et suppliciorum quam
cuique pro meritis distribuere possit. Imo qui sint boni,
quive mali sint, cognoscere non potest, cùm illud pendeat
ab interiori uniuscujusque dispositione. Prœtereà, plurimae
sunt legum infractiones secretae quse magis societati nocent,
quàm publicse. Insuper possentne facile puniri istse legum
infractiones quae infractorem tyrannum societatis redde-
rent ? Ergo 2o. . . , &c.
3o. Auctoritatem sine freno relinquit. Supponaraus
enim supremi numinis existentiam à regibus et magistra-
tibus haberi nullam. Quis audeat sibi promittere ut infra
légitimes auctoritatis limites sese contineant qui nuUum in
cœlis judicem nuUumque in terris supericrera agnoscerent ?
Ergo 3o. . . . &c.
METAPHYSICA. 147
70. "Le sénat de Rome, inquit D. de Voltaire, était
** presque tout composé d'athées de théorie et de pratique ;
** c'était une assemblée de philosophes, de voluptueux,
** d'ambitieux, tous très-dangereux et qui perdirent la
*' république. ... Je ne voudrais pas avoir affaire à un prince
" athée qui trouverait son intérêt à me faire piler dans un
** mortier. Je suis bien sûr que je serais pilé. Je ne
'' voudrais pas, si j'étais souverain, avoir affaire à des
'* courtisans athées, dont l'intérêt serait de m'empoisonner ;
** il me faudrait prendre au hasard du contre-poison tous les
" jours. Il est donc absolument nécessaire pour les princes
*' et pour les peuples, que l'idée d'un être suprême, créa-
" teur, gouverneur, rémunérateur et vengeur^ soit profon-
** dément gravée dans les esprits. L'athée fourbe, ingrat,
" calomniateur, brigand, sanguinaire, raisonne et agit con-
*' séquemment à ses principes, s'il est sûr de l'impunité de
*' la part des hommes. Car, s'il n'y a point de Dieu, ce
** monstre est son Dieu à lui-même ; il immole tout ce qui
" lui fait obstacle. Les prières les plus tendres, les meil-
'• leurs raisonnemens ne peuvent pas plus sur lui que sur
*' un loup affamé de carnage. ... Si le monde était gouver-
" né par des athées, il vaudrait autant être sous l'empire
** immédiat de ces êtres infernaux que l'on nous dépeint
" acharnés contre leurs victimes." Dictionnaire philos.,
article Athéisme » . . .Homélie sur l'athéisme.
4o. Subditos sine moribus relinquit, siquidem rautua
hominum inter se naturalia officia subvertit, et veram
perfectamque ad ea praestanda toUit obligationem (66).
5o. Denique societatem sine principiis rehnquit. Prin-
cipia enim quibus innititur societas sunt justitia, bona
fides, et pactorum conventorumque firmitas. Atqui stante
atheismo hcec principia sicut omnia aha evanescunt ; tune
enim hominis uniuscujusque finis ultimus est hujus vitae
félicitas, quâcumque via comparari possit : atqui hoc posito
licitum est quidquid est utile et jucundum. " Une société
*' sans connaissance de Dieu, inquit D. de Bonald, si elle
'' était possible, serait un rapprochement sans réunion, un
*' ordre sans règle indépendante ; il y aurait des forces, et
** point d'autorité ; des volontés, et point de raison. ... La
" question de Bayle sur la possibilité d'une société d'a-
*' thées, est plus inepte encore en philosophie, qu'elle n'est
k2
148 metaphysica.
'' scandaleuse en morale." Législ. prim. Tom. 1. pag. 53.
Ergo 5o. . . . &c. Aliundè. . . . &c. Ergo. . . . &c.
Soîvuntur ohjectiones.
Obj. Sub atheismo stare potest societas : ergo atheismus
societati non nocet.
Resp. neg. consqam. Quamvis enim absolutè stare possit
societas sub atheismo, quod negari posset, non indè seque-
retur atheismum non esse noxium societati. Si enim ad
plurima officia tlieismus suppeditet fortissima motiva,
atheismus autem illa debilitet et omnino tollat, ut debiliora
solummodo relinquat, sanè atheismus noxius est societati ;
atqui res ità sunt, ut patet ex dictis. Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Sub atheismo adest raetus pœnarum civilium,
bonse famse desiderium, ratio proprii commodi, &c : atqui
hœc omnia movere possunt ad observationem recti legum-
que societatis. Ergo. . . . &c.
71. Resp. lo. Neg maj. NuUus enim erit metus pœna-
rum civilium, ubi qui societatem subvertere volet legesque
violare, in manu prasstô habebil média immunitatis, quod
saepivis contingit. Idem dici potest quando agitur de crinu-
nibus secretis. 2o. Nullum est ferè desiderium bonae fan .te
apud iniimam plebeculam (la canaille). 3o. Proprium co a-
modum sœpiùs adversatur communi societatis commodo.
Ergo. . . . &c.
Resp. 2o Neg. min. Quis enim non videt heec omnia
motiva debilia esse ad infringendam vim libidinum? Si
enim apud theistas hœc omnia motiva gravissimo inferni
metu corrobata, non valeant libidinum torrenti obsistere,
quid si tollatur hic inferni timor ?
Inst. 2o. Perdiù stetit romana respublica, aliaque impe-
ria floruerunt vigente paganismo. Atqui tam facile subsis-
tere potest societas sub atheismo quàm sub paganismo.
Ergo. . . . &c.
Resp. Neg. min. Prœter enim hœc omnia motiva quse
suppeditat atheismus, addit paganismus expectationem
alterius vitae, metum suppliciorum et spem praemiorum.
Inst. 3o. In vitium trahebat paganismus exemple Deo-
rum, quod non reperitur in atheismo. Ergo paganismus
societati noxior est quàm atheismus.
72. Resp. Animus hic non est paganos secum concihandi
et contradictionibus eximendi ; certum est tamen eos, quam-
METAPHYSICA. 149
vis allectos ad vitium exemple Deorum, arbitrâtes fuisse se
religione virtuti devinctos esse, si campis elysiis adscribi
cuperent, et sibi esse vitia fugienda, si terribilia vitare
velient tartara.
Cœterùrn, istud probat polytheismum noxium fuisse
societati, quod facile credimus et confitemur. At vero
atheismus societati multo noxior est quàm polytheismus ;
nullum eniin frenum voluptatibus injicit, nullumque sup-
peditat motivum leges observandi.
Jnst, 4o. Innumeris bellis et dissidiis ortum dédit religio,
hune autera perpetuum belli fomitem exstinguit atheismus.
Ergo. . . . &c.
73. Resp. Neg. consqam. Hœc enim omnia mala à prin-
cipiis verœ rehgionis non oriuntur, sed à pravitate homi-
num ; mala autem, qu?e ex atheismo fluunt ab ipsius
principiorum visceribus oriuntur. In eum igitur sunt
refundenda. " C'est mal raisonner contre la rehgion, inquit
*' D, de Montesquieu^ que de rassembler dans un grand
*' ouvrage une longue énumération de tous les maux qu'elle
" a produits, si l'on ne fait en même tems celle des biens
'' qu'elle a faits. Si je voulais raconter tous les maux
*' qu'ont produits dans le monde les lois civiles, la monar-
*' chie, le gouvernement républicain, je dirais des choses
" effroyables. " Esprit des lois, liv. 24. chap. 2.
III. DE PR^ECIPUIS ATHEORUM SYSTEMATÎBUS.
Quatuor sunt prœcipua atheorum systemata, nempè,
Academicorum, Epicuri, Spinosee et Immaterialistarum.
1. De systemate Academicorum.
74. Hœc erat academicorum doctrina, scihcet, mundum
esse œternuiTî, ideoque nullara esse vim creatricem aut gu-
bernatricem, nuUamque esse providentiam.
Propositio prima,
75. Mundus non est œternus.
Prob. lo. Ut mundus esset seternus, oporteret ut mate-
ria esset seterna, utque motus esset essentialis materise.
Atqui hoc utrumque factum est falsum (39, 44). Ergo
.... &c.
Prob. 2o. Ex gentium annalibus. Si mundus esset seter-
îius existeret aliqua natio seterna, aut saltem cujusoriginem
cleterminare non possemus : atqui evolventi cuique genti.
150 METAPHYSICA,
um annales patet nullam esse gentem cujusorigo ultra sep-
tem annorum millia excurrat. Ergo. . . . &c. Imô antiquis-
simarum quas noverimus gentiura annales et traditiones
referunt mundum fuisse recèns conditum. Ea est traditio
Judseorum consignata in libris Moysis. Ea fuit traditio
Phaenicum ex Sanchoniatone (a); iEgyptiorum ex Diodoro
Siculo et Diogene Laertio ; Chaldeeorum ex Beroso ; Grse-
corum omnium ex Homero, Hesiodo, Orphœo ; Latino-
rum ex Ovidio, &c., qui mundi exordium cecinerunt ; at-
qui hœe concordia antiquissimarum gentium non nisi à solâ
veritate ortum ducere potuit. Ergo. . . .&c.
Prob. 3o. Ex recenti scientiarum et artium inventione.
Nam ità recens est scientiarum et artium inventio ut histo-
ria commemoret earum inventores, incunabula et progres-
sus. Sic Thaïes et Pythagoras philosophise naturalis, Aris-
toteles dialecticcc, Socrates ethicee, Euclides matheseos,
Hypocrates medicinse, &c., parentes fuerunt. Sculpturam
adhuc rudem et incultam Phydias et Praxiteles, picturam
adhuc informem Apelles et Zeuxis, aliique in historiâ me-
morati alias artes invenerunt, emendârunt, aut illustrârunt.
Testatur Varro inter Romanos doctissimus, vix uUam ar-
tem superare mille annos antiquitalis. Atqui si mundus ab
ceterno exstitisset, esedem causse quse nuper scientiarum et
artium invention! locum dederunt, dédissent et ab infinitis
retrô sseculis. Ergo.. . .&c. ; ,..^ ..(^''/f/'/i^^^^^, .-V,
^o) Sanchoniaton, phénicien de naissance, vivait selon quelques-uns vers le tems de la
guerre de Troie, environ 1209 ans avant J. C, ce qui a fait supposer à quelques savana
qu'il était contemporain de Gédéon. Mais cet historien est certainement beaucoup plus mo-
derne ; et s'il est vrai qu'il dédia son livre à Abibal roi de Tyr, père de Hiram, allié de Sa-
loraon,' il doit avoir vécu du tems de David, qui ne parvint au trône que l'ati 1055 avant
notre ère. Quelques savans pensent qu'il connaissait les livres de Moyse. Selon Sancho-
niaton laho forme l'homme de son souffle, lui fait habiter le jardin d'Aden ou d'Eden, le
défend contre le grand serpent Ophionnée, &c. Dans la traduction grecque de Philon, le
premier homme se nomme Protogone, et la première femme yEon. " Or Protog07ie al-
" gnifie en grec le pr éviter né, JEon a un rapport même de son avec le mot Eve et un plus
" grand encore de signification. A" on en grec signifie \ûge, la vie ; et Eve en hébreu si-
" gnifie aussi la vie. iEon, dans Sanchoniaion, conseille de manger du fruit des arbres ;
" Eve, dans Moïse, donne le même conseil."
Sanchoniaton, en parlant du déluge, dit " que du temsd'une race de géans, race extrcme-
" ment corrompue, Usons au milieu des pluies violentes, ayant pris un arbre, osa le
" premier s'exposer sur la mer, et consacra ensuite des colones au feu et aux vents, qu'il
" les adora et leur snciifia des animaux qu'il avait pris.
«' Uui ne voit que les pluies violentes, du tems d'une race de géans, race extrêmement
" corrompue, sont une altération du déluçe envoyé pour punir les crimes d'une race appelée
" aussi race de géans dans l'écriture ? IJ arbre ou bois, car en hébreu c'eit lainême chose,
" est l'arche construite par Noé. Le nom d'Usoûs vient d'un mot hébreu qui signifie sauver,
" et convient parfaitement h Noé qui a été sauvé et qui a sauvé les autres. Noé fut le pre-
" mier qui eut la permission de se nourrir de la chair des animaux ; il éleva un autel pour
" ensaci-itier au Seigneur." Bible vengée, par Mr. l'Abbé Du Clôt, tom. 1. pag. 1S2, &c.
En parcourant cet ouvrage, il sera facile de se convaincre que les lambeaux historiques
nui nous restent de Sanchoniaton confirment plutôt l'histoire de Moïse qu'ils ne la contredi-
sent. De Ui on peut juger quelle confiance mérite Mr. de Voltaire, lorsqu'il oppose si sou-
vent, dans ses écrits, Sanchoniaton îi Moïse.
METAPHYSICA. Î5l
Prob. 4o. Ex novissimo tempore quo singulœ regiones
habitari cœperunt. Historiâ enim compertum est quo tem-
pore regiones primitùs habitari cœperunt, et etiam nunc
non desunt regiones quae nullatenùs aut parùm habitantur.
Atqui si mundus esset aeternus, omnes terrœ regiones
habitatse fuissent, et assignari non posset tempus quo
incoli cœperunt. Ergo .... &c. Â /.■- / /^ /^-^X^ /jU^rJtTi^
Solvuntur objectiones/'^ '^'"' "^^ ^^'
Obj. Supponi potest in universo orbe identidem conti-
gisse diluvia et conflagrationes quibus primorum temporum
annales perierunt et omnes artium et scientiarum periti in-
terierunt. Ergo nulla tua probatio.
1^. Resp. lo. Athei gratis fingunt diluvia et conflagra-
tiones : sed undè nôrunt, si diluvium universale excipiatur,
ea unquàm exstitisse ?
Resp. 2o. Vel illa diluvia universalia fuerunt, vel non.
Si prius ; quâ via reinTègrata fuit generis humani propa-
gatio ? Si posterius ; qui talibus calamitatibus superstites
fuerunt, tantos eventus posteris transmittere debuerunt.
" Malgré l'ambition qu'ont eue la plupart des nations de
'* se donner une antiquité prodigieuse, inquit D. Bergier,
" toutes conviennent néanmoins que le monde a commencé ;
" Chinois, Indiens, Chaldéens, Phéniciens, Egyptiens,
** tous ont beau prolonger leurs annales ; elles ont un com-
*■' mencement ; elles supposent toujours le genre humain
" réduit d'abord à quelques individus, et ordinairement à
" une seule famille de laquelle tous les hommes sont
*' issus." (Bailly, Histoire de l'Astronomie ancienne,
Eclairciss. liv. 1. § 13.
" L'origine des lois, des sciences et des arts, que Mr.
" Goguet a très-bien développée, nous montre toutes les
" anciennes peuplades au berceau dans un état sauvage,
" d'où elles ont passé les unes plus tôt, les autres plus tard,
" à la civilisation.
" Vainement pour expliquer ce phénomène, on imagine
** des révolutions générales qui ont changé toute la face du
** globe ; des inondations, des embrasemens, la chute d'une
** comète, le déplacement de la mer, &c. Brillantes vi-
** sions que rien ne prouve, et que l'on forge pour la com-
*' modité d'un système. Nous ne connaissons qu'une
" seule de ces révolutions, savoir le déluge universel, et
152 METAPHYSICA.
" cet événement ne fut naturel ni dans sa cause, ni dans
'' ses circonstances : les preuves en sont répandues sur la
*' face de la terre; la tradition la confirme {ibid). La
*' même histoire, qui en fait le récit, nous apprend aussi la
*' manière dont une seule famille fut sauvée de la mort, et
*' nous montre le canal de tradition, par lequel le souvenir
** de la création fut conservé. Ce n'est pas par des conjec-
** tures et des, jJeiit-étre, que l'on peut renverser un pareil
** monument." Traité de la Religmi, tom. 2. pag. 3G9.
Propositio secunda.
77. Veram mundi antiquitatem, veramque diluvii univer-
salis epocham assignavit Moj^ses {a).
Prob. Moyses enim in libro Geneseos narrât munduni
fuisse recèns conditum,nec tribus annorum circiter millibus
eum esse antiquiorem, et terram diluvio universali fuisse
aquis obductam paucis abhinc sœculis. Atqui sola rei Ve-
ritas illum impellere potuit ad hujusmodi epochas assignan-
das. Si enim heec utraque vel alterutraque epocha falsa
fuisset, unum solummodo monumentum satis fuisset ad
patefaciendam narrationis suse falsitatem ; nec Moyses sus-
picari potuisset fore ut nullum, in tolo orbe terrarum, hu-
jusmodi monumentum unquàm detegeretur. Atqui nun-
quàm taie monumentum detectum fuit. Ergo. , . .&c.
Et vero, si tantae audacise fuisset Moyses, ut fraudem
suam orbi universo proponeret, curillam tenebrosâ seeculo-
rum caligine non occultavit ? Cur eam in apertum ponit,
facilemque detegendi mendacii viam aperit, variarum gen-
tium et imperiorum exordia describens, eaque suis tempo-
ribus proxima referens ? Non ità se gerunt qui fabulas fa-
bricant. Ergo. . . . &c.
78. Hâc de re audiatur Comes de Las Cases in eximio
opère cui titulus Atlas historique^ généalogique , chronologique
et géographique y sub fictitio nomine A. Lesage : "Le Pen-
** tateuque forme le monument le plus antique que l'on
*' connaisse, et renferme un corps de loi qui, par une
(a) Né, selon la Vulgate, l'an du monde 2433 (1571 ans avant J. C.) et mort l'an du
inonde 2553 (1451 ans avant J. C.)-
" Elevé dans toute la science dea Egyptiens, dit le célî^bre Mr. Cuvier (b), mais supéri-
" eur à son siècle. Moïse nous a laissé une cosmogonie dont l'exactitude se vérifie chaque
"jour d'une manière admirable. Les observations géologiques récentes s'accordent par-
" (alternent avec la genèse sur l'ordre dans lequel ont été successivement créés tous les êtres
" organisés." Ce sont les paroles de Uhomme qui tenait naguère parmi nous le sceptre des
" scierices naturelles." uinnales de Philosophie Chrétienne, tom. 7. pag. 52.
(h) Le Baron Charles Léopold Chrétien Frédéric Daçoubert Cuvier, né à Montbéliard,
département de Doubs, le 23 Août 1769, estaiori à Paria le 13 Mai 1832.
METAPHYSICA. 153
durée toute merveilleuse, régit encore aujourd'hui un
peuple existant.
•' Le monde, suivant nos livres saints, n'a pas au-delà de
7000 ans d antiquité, et chaque jour nos lumières acquises
viennent à l'appui de ce texte précis de la révélation.
C'est une chose bien remarquable, que l'aurore de chaque
science exacte semble devoir heurter d'abord ce principe
essentiel de notre foi religieuse, mais que leurs progrès
finissent toujours par lui donner une autorité nouvelle.
Ainsi l'histoire, l'astronomie, la phj^sique, la géologie,
ont d'abord donné aux peuples et à la terre des millions
d'années. La science perfectionnée a bientôt prouvé que
ces exagérations premières venaient du vice des expres-
sions chronologiques des peuples anciens, ou du défaut
de ceux qui, plus tard, les ont mal interprétés. Ainsi
les myriades (nombre de 10000) d'années voulues par les
nombreuses dynasties qui ont gouverné l'Egypte ont
disparu dès qu'il a été prouvé que ces dynasties étaient
contemporaines et non successives. On s'est assuré de
même que l'antiquité chinoise ne s'élevait pas au-delà de
huit cents ans avant Jésus-Christ, et que celle des Hin-
dous demeurait fort au-dessous. On a vérifié que lest)bser-
vations astronomiques chaldéennes et celle des Indiens
ne vont, les unes qu'à 750 ans avant, et les autres 750
ans après l'ère chrétienDe.
" Même hommage de la part de la physique et de la
géologie. Les premières notions de ces sciences deman-
daient des raillions d'années pour amener la formation
matérielle que nous présentent les entrailles du globe. . . .
Mais depuis que l'on a reconnu que tout proclame à
chaque pas la catastrophe diluvienne que nous apprend
Moïse,. . . . un grand nombre de faits sont venus certifier
et garantir que les premiers travaux physiques de la
couche que nous habitons sont très-certainement en
dedans des époques indiquées par nos livres saints.
Enfin il n'est pas jusqu'aux progrès de notre civilisation
et à la nomenclature de nos découvertes même, dont on
ne puisse faire une échelle approximative pour mesurer
avec quelque exactitude les tems qui nous ont précédés.
Tout ce que nous avons fait dans l'espace de trois ou
quatre cents ans nous fait juger de ce qu'on a dû faire avant
154 METAPHYSICA.
" nous et nous affirme la jeunesse des nations attestée par
*' Moïse. Mais du reste, comment ne pas apercevoir dans
" ce patriarche de la révélation, les signes éclatans de sa
*' mission divine ? Ses écrits, les plus anciens de la terre,
*' sont arrivés jusqu'à nous, en dépit des siècles et de leurs
*' nombreux accidens ; et les lois dont il fut l'interprète,
*' régissent encore aujourd'hui un peuple, qui, vaincu,
" proscrit et dispersé parmi toutes les nations, n'a pu
" cesser d'être une nation.
*' Oui, reconnaissons-le. Moïse domine au-dessus des
" générations et des siècles comme une colonne impérissa-
•' ble de vérité. Hérodote, Manéthon, les marbres de
" Paros, les historiens chinois, le sanscrit, toutes ces
*' sources, les plus anciennes du monde, demeurent de 500
*• ans, de 1000 ans, au-dessous de lui. Aucun de ces
" témoignages antiques ne peut l'atteindre, le contredire
" ni l'affaiblir ; au contraire, la nature et les hommes se
" trouvent de toutes parts en harmonie parfaite avec ce
** qu'il a dit. Aussi, touchée de cet accord merveilleux, la
" foi religieuse triomphe, et, frappée d'un tel résultat,
" l'incrédulité philosophique chancelle : vaincue par ses
" propres lumières, elle se voit contrainte d'avouer qu'il y
*' a dans tout cela quelque chose de surnaturel qu'elle ne
" comprend pas, mais qu'elle ne saurait nier."
79. D. Frayssinous de diluvio universaii disserens sic
loquitur ; '' seize siècles s'étaient écoulés depuis la nais-
"■ sance du genre humain, lorsque, irrité contre les iniqui-
*' tés de la terre montées à leur comble. Dieu résolut de la
*' punir et de laisser aux âges futurs un monument éternel
*' de sa justice. Dans ce dessein, il donne le signal à toute
*' la nature, pour qu'elle serve d'instrument à ses vengean-
" ces, et tout à coup les eaux du ciel, s'unissant à celles
•* que renferment les vastes bassins des mers et les cavernes
" profondes de la terre, inondent les continens. Cette ef-
** froyable chute des eaux qui tombent du sein de l'atmos-
" phère, ce débordement des eaux de la mer, voilà ce que
" l'écrivain sacré nous désigne dans son style oriental,
*' lorsqu'il nous dit que les cataractes du ciel furent ouvertes
*' et que les fontaines du grand abîme furent rompues.
" L'espèce humaine est engloutie sous les eaux ; une seule
" famille est sauvée du naufrage universel ; c'est celle de
METAPHYSICA. 155
** Noé qui, par ses vertus^ a trouvé grâce devant le ciel en
" courroux. Soutenu par une main divine, le vaisseau où
** elle est renfermée vogue en sûreté. Cependant cent-
*' cinquante jours après celui qui a vu commencer cette ter-
" rible révolution, les eaux baissent, la cime des montagnes
" paraît, la terre se découvre, le juste et sa famille sortent
" de l'Arche, portant avec eux Tespérance du genre humain.
" Leur premier soin est de dresser un autel et d'offrir de so-
** lennelles actions de grâce au Dieu libérateur. Un nouvel
" ordre de choses va commencer; les trois fils de Noé,
** Sem, Cham, Japhet deviennent la tige de nouvelles fa-
*' milles, de nouveaux peuples, et le monde semble naître
" une seconde fois. Tel est en substance le récit que
" Moïse nous a laissé de cette universelle inondation qui
'' noya, bouleversa le globe et que nous appelons le déluge
** {ou cataclysme).
" Quand nous n'aurions pour garant de la véracité de
** l'historien que la nature même de la catastrophe et la
'' sécurité avec laquelle il la raconte, pourrions-nous y re-
** fuser notre assentiment ? Quel intérêt avait Moïse
" à l'inventer ? D'où lui seraient venus la pensée de ré-
*' pandre et l'espoir d'accréditer une fable sans fondement ?
*■* A l'époque où il vivait, cet événement prodigieux, s'il
*' était véritablement arrivé, devait être profondément
" gravé dans la mémoire des hommes ; il devait en exister
*' sous leurs yeux des monumens irréfragables. Telle était
'' alors la durée de la vie humaine que peu de générations
" s'étaient écoulées depuis Noé jusqu'à Moïse ; dès-lors si
" celui-ci avait osé débiter un mensonge sur un fait si mé-
" morable par lui-même, et dont pourtant il ne se serait
" pas trouvé de vestiges, il aurait excité contre lui une
" réclamation universelle, et serait devenu la risée de ses
" contemporains. Mais qui ne sait pas d'ailleurs que, de
" tous les événemens anciens, il n'en est pas un seul qui
" ait laissé des traces plus profondes dans le souvenir de
*' tous les peuples de la terre ? Egyptiens, Babyloniens,
" Grecs, Indiens, tout ici est d'accord (a) ; toutes les tra-
(a) L'histoire nou3 apprend que la plupart ùes peuples avaient conserviS le souvenir du
déluge universel. Cette antique tradition s'était insensiblement modifiée et diversifiée selon
les lieux. Chaque colonie avait apporté ce souvenir avec elle. Mais dans ces tems où les faits
historiques étaient peu fixés par l'écriture, où la plupart des noms é;aient significutifa, et où
l'on n'avait point un moyen général de préciser les dates, chaque peuplade était naturellement
portée à croire que les grands événemens dont elle n'avait conservé qu'une réminiscence
confuse, étaient arrivés dans sa nouvelle patrie et sous le chef qu'elle reconnaissait pour son
Î56 METAPHYSICA.
*' ditions des tems antiques supposent que le genre humain,
" en punition de ses crimes, fut noyé dans les eaux, àl'ex-
** ception d'un petit nombre de personnes. Bérose, qui
*' avait recueilli les annales des Babyloniens, Lucien qui
*' rapelle les traditions grecques, ont laissé à ce sujet des ré-
" cits qui sont parvenus jusqu'à nous et qui présentent un
*' accord frappant avec celui de la Genèse. Cette universa-
" lité, cette uniformité de traditions sur le déluge, est
iondateur. C'est ainsi que les Hellènes et les lialiitans de la Béoiie confondaient avec le dé-
luge Universel, les premiers, le déluge de Deuciilion, et les seconds, celui d'O^ygéa.
Ce qui doit étonner davantage, c'est (jue la plupart des |)euples connus fixent leur déluge
vers quelques unes des époques que les differens Clironologisies assignent au déluge de Niié.
Ces époques, comme on lésait, varient considérablement, sans altérer cependant la vérité
des faits, comtne on le démontre de la manière la plus évidente.
D'ajjrès la version des septante, on doit fixer le déluge à l'année 3617 avant Jésus-Chrisf,
selon quelques-uns, et h l'annép. 3520 selon d'autres, et d'après le texte Samaritain il ne s'est
écoulé qu'environ 3044 ans entre ces deux éfioques. Ce nond)re d'années est beaucoup
moins considérable d'après la texte hébreu, puisqu'il n'est que de 2573, si l'on s'en tient au
calcul de Mr. Fréret, et seulement de 234u, en s'en tenant au calcul d'Ussériiis.
Varron, qui a passé dans son lems pour l'Iiomme qui avait le plus d'érudition etdc jupe-
ment dans la chronologie, fixe le déluge d'Ogygès, qu'il appelle le premier déluge, k ICOO
ans avant la pretnière olympiade, ce qui répond h l'anuéii 2376 avant Jésus-Christ, c'esl-h-
dire, 28 ans avant l'époque assignée au déluge de Noé, par le texte hébreu, selon le cal-
cul d'Ussérius. Ces deux dates diflèrenl si peu l'une de l'autre, qu'il est presque impossible
<ju'elles ne dérivent pas de la même source.
La Chou-king, un des plus anciens livies des Chinois, rédigé, dit-on, par Confuciiis,
cotTimence l'histoire de ce peuple par un déluge arrivé peu avant la naissance d'Yao, vers
l'année 2324 avant Jésus-Christ, c'est-à-dire, 24 ans après le déluge de Noé, en suivant le
calcul d'Ussérius. Selon les Chinois, l'homme échappé au déluge universel avec sa famille
s'appelait Niu-Wa (90).
Le déluge des Hindous est fixé à l'année 3101 avant Jésus-Christ ; c'est 57 ans avant l'é-
poque assignée au déluge de Noé d'ajirès la texte Samaritain.
" Les mêmes idées, dit Mr. Cuvier, paraissent avoir régné en Chaldée, puisque Béro.'îe.
" qui écrivait à Babylone au tems d'Alexandre, parlait du déluge ;i-peu-piès comme Moïse,
" et qu'il le plaçait immédiatement avant liélus, père de Niims," (o)...." La mythologie
" égyptienne, au défaut de l'histoire, semble encore rappeler ces grands événemens, dans
*' les aventures de Tjplion et d'Osiris. Les prêtres de Sais même, s'il faut en croire Cri-
" tias, avaient conserve des notions plus précises d'une grande révolution, quoiqu'ils eu
" fissent remonter l'époque plus haut que Moïse." Recherches sur les ossemens fossiles,
discours préliminaire, pag. 94 à 106.
Le célèbre Baron Alexandre de Huniboldt, après avoir examiné et étudié, avec cette sa-
gacité qui lui est propre, la cosmogonie, les nionumens, l'histoire, les hiéroglyphes et les in- .
stitutions des anciens peuples des régions équinoxiales de l'Amérique, dans le cours d'un
voyage vraiment scientifique qu'il entreprit, de concert avec Mr. Aymé Bonpland, en 1799,
et qui dura près de six ans, a démontré, de la manière la plus évidente (6), que les Mexi-
cains avaient conservé quelque souvenir d'un premier homme et d'une première feiiime^c^,
de Cain etd'Abel, de la longue vie des premiers homtnes, des combats desgéans, du dé-
luge universel, de la tour de Babel, de la confusion des langues, de la dispersion des peu-
ples, &,c.
Le nom du Noé des Mexicains n'est pas le même chez les différentes peuplades : les cir-
constances qui accoiTipagnent le déluge universel varient pareillement ; mais le fait principal
est à-peu-près le même. Dans quelques peuplades on ne fait remonter ce déluge qu'à 1417
ans après le commencement de l'âge de la terre, tandis que dans d'autres, on le fait remonter .
à 18028 ans après la même époque. 11 a été imijossible à Mr. de Huraboldt de déterminer
ces dates.
11 résulte de tout ce que l'on vient de dire que les traditions des plus anciens peuples du
nT.onde confirment le récit de la Genèse, non seulement sur l'existence du déluge universel,
mais même sur l'époque de cette catastrophe fixée par Moïse. .. .Voir à ce sujet les Anna-
les de Philosophie Chréliejine, tom. 1. pag. 377, tom. 2. pag. 210, tom. 4. pag. 19, toin.
5. pag. 40, &c.
(a) Cette époque remonte au tems de CJiam, fils de Noé.
(i) Voyage aux régions équinoxiales du nouveau continent, édition de 181G, 2 vol.
in 8o.
(c) Quelques peuplades désignent la première femme sous le nom de femme au serpent,
d'autres I& désignent sous celui àeftmme de notre chair.
METAPIIYSÎCA. 157
avouée de l'incrédulité elle-même ; l'auteur incrédule,
du moins pour un tems, de l'antiquité dévoilée (Nicolas
Antoine Boulanger) a dit : il faut prendre un fait dans
la tradition des hommes dont la vérité soit universellement
reconnue ; quel est-il ? Je 7i'en vois pas dont les monu-
mens soient plus généralement attestés que ceux qui nous
ont transmis cette révolution physique qui a, dit-on, changé
autrefois la face de notre glohe^ et qui a donné lieu à un
renouvellement total de la société hum.aine : en un mot, le
déluge me 'paraît être la véritable époque de l histoire des
nations. Or d'où a pu venir cette croyance universelle
du genre humain sur le déluge? Il ne s'agit pas d'une
de ces erreurs qui ont leur source dans l'orgueuil ou dans
la corruption humaine : quel intérêt ont les passions à
ce que le genre humain ait été détruit par le déluge ?
Ici l'accord unanime de peuples, dont la langue, la reli-
gion, les lois, n'ont rien de commun, ne peut avoir pour
base que la vérité du fait. Aussi tous les efforts de la
science la plus ennemie des livres saints n'ont pu décou-
vrir un seul monument qui remonte d'une manière cer-
taine à une époque plus reculée que le déluge. Et l'his-
toire de l'esprit humain, des sciences, des lettres et des
arts, ne vient-elle pas à l'appui de Moïse, sur la renais-
sance de ce monde nouveau ?" Conférence sur les tems
primitifs, tom. 2. pag. 209, &c.
Solvuntur ohjectiones,
Obj. lo. Narrât Moyses omnes homines ab une exortos
esse ; atqui haec assertio estfalsa,ciim alii homines sint albi,
et alii sint nigri coloris, et cùm non concipiatur quâ via, post
diluvium, American?e regiones incoli potuerint. Ergo falsa
est Moysis narratio.
80. Resp. Neg. min. Nedùm enim hâc in parte, rationi-
bus suprà objectis, impugnetur Moysis narratio, è contra-
rio anatomiâ, physiologiâ, comparatione variorum idioma-
tum, traditionibus antiquissimorum populorum, innumeris
investigationibus, quœ hodierno tempore undequaquè colli-
guntur, &c., ità confirmatur, ut nunc neminera lateat
unicam et earadem esse communem omnibus hominibus
originem.
81. De tous les tems, inquiunt auctores Annalium philo-
" sophiœ Chrisdanœ, tom. 3. pag. 93, on a fait des efforts
158 METAPIIYSICA.
" pour détruire le témoignage de nos livres saints sur la
" création, sur les devoirs et les destinées de l'homme.
" Parmi les vérités que nous enseigne la Genèse, il en est
*• peu qui aient été plus vivement et plus longuement con-
'* testées que l'unité de l'espèce humaine. Tantôt on a
*' opposé au récit de Moïse l'impossibilité où avaient dû
" être dans l'origine, à une époque où les moyens de navi-
" gation étaient inconnus, les hommes de l'ancien conti-
" nent de peupler le nouveau : tantôt on se servait des
** grands traits de dilEFérence que présentent les races hu-
" maines dans leur conformation extérieure et leurs cou-
'' leurs, pour en conclure que tous les hommes ne pou-
" vaient point dériver d'une souche commune. Plusieurs
" philosophes du dernier siècle, à la tête desquels nous
** devons placer Voltaire, et quelques naturalistes anciens
" et modernes, animés d'un esprit de haine contre la reli-
" gion, se sont surtout appliqués à prouver que la race
" nègre ne pouvait point tirer son origine de la race blanche,
" et dès-lors qu'il devait y avoir eu, dès l'origine, création
*' de deux espèces particulières d'hommes. Des motifs
" spécieux paraissaient donner quelque poids à cette opi-
" nion. On alléguait surtout qu'on avait beau transporter
" des nègres dans les climats tempérés, qu'ils conservaient,
" quelque jeunes qu'ils fussent, la couleur noire de leur
" peau. Ils se fondaient encore sur ce que les enfans qui
*' naissent d'individus blancs, conservent sous la zone tor-
" ride la couleur de la peau de leurs parens.
" Des naturalistes superficiels et passionnés ont encore
" cherché dans notre siècle à soutenir cette doctrine. Mais
" la science, étudiée sans prévention, réfute victorieusement
" toutes ces idées suscitées par l'incrédulité.
82. 11 nous suffira pour combattre ces vains systèmes,
d'invoquer le témoignage des plus célèbres naturalistes, et
d'établir ensuite l'identité d'origine entre les peuples de
l'ancien continent et ceux du nouveau.
'' Tout s'accorde à prouver, dit Mr. de BufFon, que le
" genre humain, n'est pas composé d'espèces essentielle-
** ment différentes entre elles : qu'au contraire, il n'y a eu
*' originairement qu'une seule espèce d'hommes, qui,
" s'étant multipliée et répandue sur toute la surface de la
" terre, a subi différens changemens par l'influence du
METAPHYSICA. 159
climat, par la différence de la nourriture, par celle de la
manière de vivre, par les maladies épidémiques, et aussi
par le mélange varié à l'infini des individus plus ou
moins ressemblans ; que d'abord, ces altérations n'étaient
pas si marquées, et ne produisaient que des variétés
individuelles ; qu'elles sont ensuite devenues variétés de
l'espèce, parce qu'elles sont devenues plus générales,
plus constantes par l'action continue de ces mêmes
causes ; qu'elles se sont perpétuées et qu'elles se perpé-
tuent de génération en génération comme les difformités
ou maladies des pères et mères passent à leurs enfans.**
Discours sur les variétés de Vespèce humaine.
" Il est incontestable, dit Mr. Valmont de Bomare, que
la race des hommes blancs et la race des hommes noirs ne
sont pas deux espèces différentes, puisque le fruit de leurs
alliances conserve la vertu reproductrice, à la couleur
près." Dictionnaire d'Histoire naturelle^ article Nègre.
" On peut croire, dit Mr. Cuvier, que les grandes diffé-
rences qui se trouvent parmi les hommes, les chiens et
les autres êtres répandus par tout le monde, ne sont
que les effets de causes accidentelles, en un mot, des
variétés. . . . Rien n'empêche d'admettre que, de l'espèce
primitive, se soient formées, par des causes accidentelles,
des espèces caractérisées, dont les traits ne se perdent
plus." Tableau élémentaire de l'histoire naturelle^ des
animaux, pag. 14, &c.
Le même savant, après avoir démontré que l'harmonie et
la perfectibilité de tous les sens de l'homme lui assignent le
premier rang parmi tous les êtres vivans, et lui assurent
l'empire de la terre, ajoute ; " l'anatomie et la physiologie
" ont mis ces vérités hors d'atteinte. Les naturalistes qui
" ont prétendu confondre l'espèce humaine avec celle des
'' singes, malgré la différence essentielle des pieds, du bassin
'' et des organes de la voix, paraissent n'admettre aucun
" principe constant pour la classification des espèces.'*
Leçons d'anatomie comparée.
Mr. de Montbrion fait une réflexion bien sage à ce sujet.
" Les variétés du chien, dit-il, beaucoup plus nombreuses
** que les variétés de l'espèce humaine, diffèrent cent fois
" davantage; et cependant les mêmes naturalistes, qui
" soutiennent que tous les hoamies ne sortent pas de la
160 METAPIIYSICA.
même souche, non seulement Jes font tous descendre
d'une espèce unique et primitive, mais encore considèrent
le loup comme le type et la souche de tous ces animaux.
Le lévrier, le barbet, le doguin et le chien turc offrent
pourtant bien moins de ressemblance entre eux que
l'européen et le nègre. Quand on voit les hommes
blancs au nord, devenir basanés vers le midi, puis tout à
coup noirs sous la ligne, quand on les voit arriver à
cette couleur par des dégradations insensibles, on peut,
en toute sûreté de cause, admettre l'influence des climats,
surtout, lorsqu'elle n'est contestée par qui que ce soit à
l'égard des animaux." De \zi Religion des Hébreux et de
leur cosmogonie.
'' L'espèce humaine, dit Ivîr. Lacépède, est seule de son
genre ; mais on remarque dans les individus qui la com-
posent des conformations particulières et héréditaires,
produit de causes générales et constantes, et qui consti-
tuent des races distinctes et permanentes. La nature de
l'air, de la terre et des eaux ; celle du sol et des produc-
tions qu'il fait naître ; l'élévation du territoire au-dessus
du niveau des mers ; le nombre, la hauteur et la dispo-
sition des montagnes ; la régularité ou les variations de
la température ; l'intensité et la durée du froid ou de la
chaleur, sont des causes puissantes et durables qui ont
créé, pour ainsi dire, les grandes races dont se compose
l'espèce humaine. On en compte plusieurs. Mais trois
se distinguent par des caractères beaucoup plus faciles à
saisir ; ces trois sont l'arabe européenne ou la caucasique,
la mongole, et la nègre ou l'éthiopique. . . . Selon qu'el-
les habitent sur des montagnes ou dans des plaines, près
de vastes forêts^ ou sur le bord des mers, dans la zone
torride ou dans le voisinage des zones glaciales; qu'elles
sont soumises à une chaleur excessive, ou à une douce
température, à la sécheresse ou à l'humidité, aux vents
violens ou aux pluies abondantes, et qu'elles reçoivent
l'action de ces différentes forces plus ou moins combi-
nées, elles peuvent offrir, et présentent en effet, de
grandes différences dans leur extérieur, et forment, par
la nature et la couleur de leurs tégumens,des sous-variétés
très-remarquables. Le tissu muqueux ou réticulaire qui
règne entre l'épiderme et la peau proprement dite,
METAPIIYSICA. 161
" s'organise ou s'altère de manière à changer la couleur
" générale des individus, la nature, la longueur et la
" nuance des cheveux et des poils. Cette couleur générale
" est le plus souvent blanche dans les pays tempérés et
** presque froids ; les cheveux y sont blonds, très-longs et
" très-tins. Le blanc se change en basané, en brun, en
" jaunâtre, en ohvâtre, en rouge brun assez semblable à la
" couleur du cuivre, et même en noir très-foncé, à mesure
" que la chaleur, la sécheresse ou d'autres causes analogues
'* augmentent. La longueur des cheveux diminue en
" même tems : leur finesse disparaît, leur nature change ;
" ils deviennent laineux et cotonneux." Histoire naturelle
de lliomme, Paris 1827, pag. 247.
Le célèbre Linnée, le docteur Mitchill de New- York,
Messieurs Blumenbach, Wilham Hunter, Stanhope Smith,
Zimmermann, Robertson, de Paw, &c., ne reconnaissent
avec les naturalistes que l'on vient de citer, qu'une seule
espèce dans le genre humain ; ils ne diffèrent principale-
ment les uns des autres que sur le nombre des variétés issues
de la souche commune ; les uns en admettent plus et les
autres moins.
83. Quoique Mr. Virey, que l'on ne soupçonnera pas
d'être trop favorable à la révélation, soutienne contre l'opi-
nion presque générale des plus célèbres naturalistes, qu'il
serait très-difficile de décider par les lumières de l'histoire
naturelle si tout le genre humain est issu d'une seule ou de
plusieurs souches fondamentales et originelles, il est cepen-
dant forcé, par l'évidence des faits historiques, d'admettre
avec Moïse trois variétés principales de l'espèce humaine et
de les faire dériver d'une même souche commune.
" En admettant, dit-il, le récit de la Genèse et la dis-
" persion des trois fils de Noé, on peut regarder Japhet
*' comme le tronc originaire de la race blanche ou arabe-
" indienne, celtique et caucasienne. Son nom a même
" été connu des anciens Grecs et Romains. Audax Japeti
" genus (Horac. od). Sem sera la tige de la très-nom-
" breuse race basanée et olivâtre, ou chinoise, kalmouke-
** mongole et lapone. Comme les Américains paraissent
*' être une branche de ces grandes familles, on peut les
" regarder aussi comme de la génération de Sem. Cham,
Î62 METAPHYSICA.
** maudit par son père (a), qui lui prédit qu'il serait
*' l'esclave des descendans de ses frères, peut se reconnaître
" dans les races nègre et hottentote. Les Malais, qui
'• composent notre quatrième race, paraissent être un mé-
"■ lange des générations de Sem et deCham. Cet ensemble
" comprend donc tout le genre humain sous trois tiges
*' originelles principales." Histoire du genre humain, par
M. Virey, tom. 1er. et Nouveau Dictionnaire d'histoire natu-
relle, édition de 1818, art. Homme, par M. Virey.
si. Les traditions les plus anciennes, d'accord avec
Moïse nous font voir, qu'à la dispersion des peuples, les
hommes se trouvaient partagés en trois grandes familles
issues des trois fils de Noé. Les descendans de Japhet
peuplèrent successivement l'Europe entière, les îles qui en
dépendent et les régions septentrionale et occidentale de
l'Asie jusqu'à l'Euphrate : par la suite des siècles, ils fon-
dèrent plusieurs colonies dans la partie septentrionale de
l'Afrique. Les fils et les petits fils de Sem se fixèrent
d'abord vers le confluent du Tigre et de l'Euphrate, d'où ils
s'étendirent dans presque tout le reste de l'Asie. Cham
eut en partage, pour lui et pour ses descendans, une partie
de 1^ Phénicie, la Palestine, une portion de l'Arabie et toute
l'Afrique. Nemrod, son petit fils, enleva à la famille
sémitique la Babylonie, et une partie de la Susiane et de
l'Assyrie. On sait que les Israélites^ issus de Sem, s'éta-
blirent dans la Palestine, après l'avoir conquise sous la
conduite de Josué.
Presque tous les habitans indigènes de l'Océanie tirent
leur origine de Sem ; quelques-uns descendent de Cham ; les
autres paraissent être un mélange de ces deux générations.
85. Grâce aux laborieuses recherches et aux importantes
et savantes découvertes de Mr. de Humboldt dans les
régions équinoxiales du nouveau continent, de Mr. Mitchill
et de plusieurs savans du premier mérite dans les Etats-
Unis, de Sir Alexander Mackenzie et des capitaines W. E.
Parry et John Frankhn dans les régions circonpolaires de
l'Amérique, de Messieurs Klaproth, de Paravey, Abel Ré-
musat (6), de Siéboldt, &c., des sociétés asiatiques de
(a) La malédiction propliéilque de Noé ne retombe point sur Cham, qui avait été béni de
Dieu au sortir de l'arche, mais sur sa postcriié dans la personne de Chanaan son fils, qui
était un très-méchant homme; " maledictus Chanaan, servus servorum erit fratribus suis."
Gen. chap, 9. ver. 25.
(b) Jean Pierre Abel de Kémusat, célèbre orientaliste, né à Paris le 5 Septembre 1778,
est mort dans la mCme ville le 3 Juiu 1832.
METAPIIYSICA. 1G3
Londres, de Paris, &c., surtout de Calcutta, &c., l'origine
des habitans indigènes de l'Amérique n'est pas un problème.
Quelques incrédules du dernier siècle, animés du désir impie
de donner un démenti à Mo'ise, avaient fait des efforts
extraordinaires pour prouver que les Américains forment un
peuple sui generis qui ne descend point d'Adam. Mais
depuis quelques années les sciences ont fait de nouveaux
progrès, l'Amérique et l'Asie ont été mieux observées et
mieux connues, et il est devenu évident que l'opinion que
l'on avait émise sur' la diversité d'origine des peuples des
deux hémisphères, est dénuée de toute vraisemblance.
Comme il n'entre point dans notre plan de consigner ici les
honorables travaux que la science a entrepris pour parvenir
à ce résultat, il nous suffira de conclure, daprès l'opinion
générale des savans les plus versés dans cette matière ;
lo. Qu'il y a eu, dès la plus haute antiquité, des commu-
nications nombreuses entre les peuples des deux continens;
2o. Que les nations de l'Amérique [a), à l'exception de
celles qui avoisinent le cercle polaire (b), forment une seule
race, caractérisée par la conformation du crâne, par la couleur
de la peau, par l'extrême rareté de la barbe et par des che-
veux plats et lisses, &c.;
3o. Que les Américains, à l'exception des Esquimaux,
tirent, pour la plupart, leur origine et leur civiUsation des
peuples qui habitent le plateau central de l'Asie, et spécia-
lement de ceux qui occupent le Thibet et la Mongolie.
Pour démontrer la vérité de cette assertion, il suffit de
de comparer les mœurs, les coutumes, les usages, les lois,
les traditions relatives à la cosmogonie, à la dispersion des
peuples, à la confusion des langues, &c., les croyances reli-
gieuses et les symboles qui servaient à les rendre sensibles,
les institutions monastiques et sacerdotales, les arts, l'ar-
chitecture et les anciens monumens historiques et scientifi-
ques, les hiéroglyphes, les notions et les périodes astrono-
miques, les calendriers et les zodiaques, le génie des
langues, la couleur de la peau, la physionomie, la confor-
mation du crâne, l'ouverture de l'angle facial, la stature,
&c., en un mot, tous les caractères moraux et physiques de
(aj Monuviens historiques de V Amérique, 2 vol. \n 80. par Mr. île Humboldt.
(h) Lej numbreunea peupladea d'Esquimaux qui habitent le Grocnlaïul, le Labrador et les
va3teâ régioiiB arctiques comprises entre la Baie de Batlin et le Grocnluiid, du cOté de l'est,
et le détroi ide Bhéring du cOié de l'ouest.
L 2
Î64 METAPHYSICA.
ces difFérens peuples. Ces sortes de comparaisons sont
devenues faciles à faire depuis la publication des immortels
ouvrages de Mr. le baron de Humboldt.
Il est bon d'observer cependant que plusieurs peuplades
de la Nouvelle Grenade, du Pérou, du Brésil, du Chili, de
la Patagonie, &c., paraissent tirer leur origine et leur
civilisation du Japon, ou de la Chine, ou de THindoustan,
ou de quelques unes des îles de l'océanie. C'est ainsi que,
selon le savant que l'on vient de citer et selon Messieurs de
Paravey et de Siéboldt, tout porterait à croire que les
Muyscas qui habitent le riche plateau de Bogota dans la
Nouvelle Grenade, descendent des Japonais ou des Chinois.
4o. Que les différentes peuplades d'Esquimaux qui habi-
tent les bords de la mer et du détroit de Bhéring et les
régions septentrionales de l'Amérique Russe descendent des
Kamtchadals et des Tchouktchis (a).
Il serait difficile, dans l'état actuel de nos connaissances,
de déterminer d'une manière passablement précise d'où les
Esquimaux qui habitent le Groenland, le Labrador et les
régions septentrionales de la Nouvelle Bretagne tirent leur
origine. Quelques savans les font descendre de Samoïèdes,
et d'autres des anciens habitans de la Scandinavie, tandis
que leurs mœurs et leur physique sembleraient les rappro-
cher des Lapons. De nouvelles observations feront peut-
être remonter un jour à l'origine de ces peuples d'une
manière plus certaine.
On peut consulter, au sujet de l'unité de l'espèce
humaine, les annales de Philosophie Chrétienne, tom. l.pag.
153, 233, 305, &c. ; tom. 2. pag. 338, &c. ; tom. 3. pae^.
93, 179, 302, 311, 407, &c. ; tom. 4. pag. 19, 39, 263, &c.
Obj. 2o. Zodiaci nuper in -^gypto Tentyri (Denderah) et
Latopoli (Esnèh) detecti multô antiquiores sunt epochâ à
Moyse assignatâ. Ergo falsa est Moysis narratio.
86, Resp. Neg. ant. Demonstravit enim celeberrimus
ChampoUion junior hos zodiacos sub romanis imperatoribus
confectos fuisse.
A la fin du dernier siècle, les savans qui accompagnaient
l'expédition française en Egypte, ayant pénétré dans l'in-
(a) Les Kamichadala et les Tcbouktchia peuvent se transporter en Amérique avec la plus
grande facilité. Pour cela, il suffit aux premiers de longer la suite des îles Aléoutiennea
lusnu'au cap Alaska, et aux seconds, de traverser le détroit de Bhéring, qui n'oppose au
oyageur qu'un trajet de 15 à, 16 lieues du Canada, dans sa partie la plus étroite.
METAPHYSICA. 165
térieur de l'ancienne Thébaïde, actuellement la haute
Egypte, découvrirent au milieu des ruines de Denderah
un ancien temple qui leur parut un véritable chef-d'œuvre
d'architecture égyptienne. Deux zodiaques, qu'ils aper-
çurent dans l'intérieur de ce temple, attirèrent particulière-
ment leur attention. L'un était placé sous le portique dont
il ornait le plafond, et l'autre décorait la partie supérieure
de l'une des salles qui étaient sur la terrasse de l'édifice.
C'est ce dernier zodiaque qui a été transporté en France
en 1821. Les mêmes savans découvrirent deux autres zo-
diaques dans un ancien temple d'Esnèh. De semblables mo-
numens s'offrirent bientôt aux regards curieux des connais-
seurs dans les autres anciennes villes de la haute Egypte.
Tous ces restes précieux de l'antiquité, ainsi que les car-
touches et les inscriptions hiéroglyphiques qui les accom-
pagnaient, furent dessinés avec la plus scrupuleuse exacti-
tude, et ne tardèrent pas à être reproduits par la gravure
dans le magnifique atlas de la Description de l'Egypte.
Cette découverte fut momentanément un véritable triom-
î)he pour les incrédules. Ils supposèrent, sans cependant
le prouver, que ces monumens constataient l'état du ciel
dans des tems fort reculés ; et, partant de ce principe, ils
prétendirent démontrer que l'aspect céleste, qu'ils croyaient
consigné dans ces monumens, remontait à cinq ou six
mille ans ; d'oii ils concluaient que le monde n'avait
pas moins de quinze mille ans d'antiquité. Parmi les
savans qui, dans cette question, se montrèrent les plus
opposés au récit de Moïse, on remarqua principalement
Mrs. Dupuis {a), de Volney, et, pendant quelque tems,
le baron Fourier, &c., et leurs nombreux partisans.
87. La révélation, ainsi attaquée dans ses titres primi-
tifs, ne vit pas sa cause abandonnée. Elle trouva de zélés
défenseurs à la tête desquels on peut placer des hommes du
premier mérite et par leurs talens et par leurs connaissances
acquises dans les arts, dans les sciences exactes et dans
l'histoire de l'antiquité, telles que Messieurs Visconti, de
Paravey, Cuvier, Delambre, Ampère, Biot, Huyot, Gau,
Letronne, &c. Tous ces savans s'accordèrent généralement
à donner pour âge à ces difFérens zodiaques l'époque de la
domination romaine en Egypte. Mais comme les motifs
fa) Auteur de /' Origine de tous les CuUts.
16G METAPIIYSICA.
sur lesquels ils s'appuyaient pour fixer cette époque, étaient
d'une nature trop délicate pour qu'il fût facile de les faire
sentir et apprécier à des adversaires passionnés, la vérité ne
put triompher alors que d'une manière assez peu éclatante :
de sorte que les attaques contre la révélation recommencèrent
avec une nouvelle violence au commencement de 1822,
lorsque l'on plaça le zodiaque de Denderah dans la salle des
antiques à Paris. Ce fut alors que les incrédules se van-
tèrent hautement d'avoir enfin sous les yeux un monument
astronomique qui remontait à cinq ou six mille ans^ et
qui semblait n'avoir été arraché de sa place millénaire
et n'avoir été comme évoqué d'un autre monde que pour
convaincre Moïse d'ignorance ou de mensonge ! 1 ! On
peut dire qu'à cette époque malheureuse, la voix de la
science et de la raison n'était plus entendue; elle était étouf-
fée par les clameurs du parti qui, dans l'excès de sa joie
éphémère, ne daignait plus répondre aux plus graves argu-
mens que par de fades plaisanteries, ou par des signes de
compassion et de pitié.
88. Ce fut au milieu de ces scandales que l'on vit pa-
raître un de ces hommes dont le nom seul fait l'éloge. . . .
Champollion le jeune (a).
Formé aux écoles qui dominaient alors, Mr. Champollion
n'avait pas toujours été exempt de préoccupation contre
l'histoire révélée. Aussi en 1818, dans ses leçons d his-
toire au collège royal de Grenoble, enseignait-il que les dé-
couvertes récentes prouvaient l'antiquité de notre globe
bien au-delà des époques assignées par Moïse. Mais son
esprit naturellement droit et porté aux plus graves médita-
tions, ne lui permit pas long-tems de demeurer attaché d
une opinion qu'il n'avait point encore approfondie. Voilà
pourquoi il se détermina à parcourir l'Egypte, afin de faire
revivre l'écriture de la langue des peuples qui habitaient au-
trefois cette antique patrie des beaux arts. C'était là, selon
lui, le seul moyen de décider, en toute sûreté de cause, la
question qui agitait les esprits depuis tant d'années.
Personne n'ignore de quels brillans succès furent couron-
nées ses ingénieuses et pénibles recherches. Armé des im-
portantes découvertes qu'il venait de faire, et tenant en
main son alphabet phonétique (Logique, No. 83, note), il
(a) Jean François CliampoUion, le jeune, né à, Figeac en Quercy à la fin de 1790, mort à
KParis h la fin de Février 1832.
METAPHYSICA. 1G7
put alors examiner et étudier avec la plus grande facilité
les anciens monutnens de la haute Egypte ainsi que les car-
touches et les inscriptions qui les accompagnaient. Il lut
d'abord en toutes lettres sur le planisphère de Dendcrah,
tel qu'il était dans son intégrité avant qu'il eut été détaché,
le mot aiitocrator, empereur, titre qui ne pouvait convenir
qu'aux empereurs Claude et Néron, puisque ces princes
sont les seuls qui, dans leurs médailles frappées en Egypte,
soient désignés par cette seule dénomination. Poussant
plus loin ses recherches, il lut sur les difïérens murs du
temple les titres, les noms, surnoms des empereurs Tibère,
Claude, Néron et Domitien.
11 visita ensuite le temple d'Esnèh que quelques savans
avaient regardé comme le plus ancien monument de
l'Egypte. 11 prouva que cet édifice avait été construit sous
le règne de Ptolomée-Epiphanes, mort l'an 180 avant l'ère
chrétienne, et qu'il avait été successivement agrandi, ré-
paré et embelli sous les empereurs Claude, Vespasien, Titus,
Domitien, Trajan, Adrien, Antonin, Marc-Aurèle, Commo-
de, Septime-Sévère, &c., dont il lut les titres, les noms et
les surnoms en caractères hiéroglyphiques.
83. Messieurs Champollion et Letronne ont prouvé, de
la manière la plus évidente, que toutes les autres représen-
tations zodiacales qu'ils ont découvertes sur les divers
monumens de l'Egypte, ne datent que de la domination
romaine ; qu'elles appartiennent, non pas à l'astronomie,
mais aux rêveries de l'astrologie judiciaire, et, par consé-
quent, qu'il est ridicule de vouloir les soumettre à des
calculs rigoureux et scientifiques pour prouver la haute
antiquité du monde.
C'est ainsi que les zodiaques égyptiens qui avaient fait
tant de bruit et causé tant de scandales, sont devenus de
simples objets de curiosité, capables tout au plus de fournir
des rapprochemens à l'artiste et à l'antiquaire. A tous ces
résultats, fruits du savoir et du génie, et à un grand nombre
d'autres aussi utiles à la religion qu'à la science, les incré-
dules ne répondirent rien, parce qu'en effet ils n'avaient rien
à répondre: ils ne purent opposer que de sourdes rumeurs
pour cacher la honte de leur défaite. On peut consulter à
ce sujet les ^nn. de Phil. Chrét. tom. 1. pag.36, torn. .5.
pag. 87, 181, 264, tom. 7. pag. 78, 150. tom. 8. pag. 120.
168 METArHYSICA.
Obj. 3o. Physicisetgeologicisobservationibusdemonstra-
tur orbem multô antiquiorem esse epochâ à Moyse assig-
nata : ergo falsa est héec epocha.
90. Resp. Neg. ant. Omnes enim qui in hâc scientiarum
parte versatissimi sunt, quique prœoccupationibus et prœ-
judiciis non abripiuntur, acriter propugnant constitutionem
orbis physicam Mosaïcae narrationi nuUo modo repugnare.
** La science géologique, inquiunt auctores Annalium
'* Philosophiœ Christianœ, tom. 7. pag. 53, qui à sa nais-
" sance, ne cherchait dans les entrailles de la terre que des
" armes pour combattre la révélation, après avoir parcouru
'' un cercle immense, n'a trouvé que ce qui était écrit à la
'' première page du premier volume du premier des livres,
" selon l'expression de Mr. Nodier."
" La Géognosie (a) est trop peu avancée, dit Mr. Virey,
" Dictionnaire d'histoire naturelle, article Géologie, les faits
" connus, dont elle offre le tableau et l'enchaînement, sont
*' trop peu nombreux, pour qu'il soit possible d'en tirer
"' aujourd'hui des conséquences raisonnables sur les causes
" générales et premières de la formation ou de l'état actuel
" du globe: et cependant aucune science n'a donné lieu à
*' plus de systèmes que la Géologie. Dédaignant de
" chercher à connaître les faits, ou s'appuyant seulement
*' sur quelques faits isolés, souvent peu constans, et appe-
" lant à leurs secours quelques lois de la physique générale
" ou de l'astronomie, les géologues ont donné un libre essor
'* à leur imagination, et chacun a formé un monde au gré
" de son caprice. Dans l'exposition de chacun de ces
" systèmes, on eombat les opinions émises dans les systè-
^' mes précédemment exposés : on saisit et on démontre
" bien facilement les côtés faibles ou insoutenables des
" théories de ses devanciers, et l'on ne s'aperçoit pas que
" la théorie nouvelle que l'on expose doit être aussi facile-
" ment renversée que toutes celles contre lesquelles on
" argumente."
91. Mr. Cuvier chargé par la classe des sciences physi-
ques et mathématiques de l'Institut de faire un rapport sur
(a) La Géognosie est une science qui a pour objet la connaissance de toute la partie du
globe terrestre qui peut être soumise h. nos observations relativement à la nature et à la dis-
position des masses minérales.
On a souvent donné à la géognosie le nom de géologie, qui a cependant une acception
beaucoup plus étendue, puisque cette science comprend non seulement la géognosie, mais
encore la géogénie, la géographie physique et mathématique, &c.
METAPHYSICA. 169
un ouvrage intitulé, T/teone de la surface actuelle de la terre
par Mr. André de Gy {a), se plaint de ce qu'au lieu de
recueillir des faits, base de tout vrai système, on s'est élevé
précipitamment à la connaissance des causes, de ce que l'on
a fait prendre ainsi à la géologie une marche trop rapide,
d'où il est arrivé que " Une science de fait et d'observa-
'' tion a été changée en un tissu d'hypothèses tellement
" vaines, et qui sont tellement combattues, qu'il est devenu
" presque impossible de prononcer son nom sans exciter le
" rire. ... Le nombre des systèmes de géologie s'est telle-
" ment augmenté, qu'il y en a aujourd'hui plus de quatre-
'' vingts" (6).
Mr. Cuvier énumère tous les points qu'il faudrait éclaircir
avant de s'occuper de la recherche des causes physiques et
chimiques de la structure soit intérieure soit extérieure du
globe, et il ajoute ; " nous osons affirmer qu'il n'en est pas
" un sur lequel on ait rien d'absolument certain ; presque
" tout ce qu'on en a dit est plus ou moins vague. La
" plupart de ceux qui en ont parlé l'ont fait selon ce qui
" convenait à leurs systèmes, beaucoup plus que selon des
" observations impartiales."
*' Les opinions, dit Mr. Virey, ihid, ne sont pas moins
" variées sur les causes qui ont pu produire les dernières
" catastrophes que la surface du globe a éprouvées. Le
" changement de figure du Globe terrestre, l'augmentation
'* de son volume^ la transposition de son centre de gravité,
" le changement de position de son axe, la diminution de
" l'obliquité de l'écliptique, le changement de place du
" globe dans l'espace, l'effet d'une comète passant très-
•' près de la terre, le choc même d'une comète, la diminu-
*' tion de volume ou de chaleur du soleil, &c., ont été
'• invoqués ou supposés, par difFérens naturalistes, pour
" rendre raison des changemens dont les traces sont encore
^' visibles ; et quant à l'époque de ces changemens, les uns
•* n'ont pas craint les milliers de siècles que nécessitait
" l'exposition de tel ou tel système, les autres se sont ren-
** fermés dans les bornes fixées par la Genèse à l'antiquité
*' du monde actuel. L'observation attentive des dégrada-
'' tions des montagnes, et celle de la marche des atterrisse-
(a) Noël André, plus connu aussi sous le nom du Pire Chrysologue capucin, est né à
Gy en Franclie-Comic, en 17^3, et y est mon le 8 Septembre 1808.
(b) Ce rapport, rjui est imprimé i la suite de l'ouvrage de Mr. André de Gy, est daté
du 11 Août 130G.
170 METAPHYSICA.
" mens, ont conduit plusieurs célèbres géologues moder-
*' nés, et particulièrement MM. Deluc, Saussure, Pallas,
" André de Gy, Dolomieu, à conclure que Je commencement
" de l'état actuel du globe ne pouvait pas remonter au-delà
** des époques assignées par Moïse à la création et au
*' déluge, époques auxquelles remonte seulement aussi tout
" ce que la tradition des autres peuples présente de prouvé
" ou de probable. Mr. Cuvier, dans le beau discours qui
*' sert d'introduction à ses recherches sur les ossemens fos-
" siles, a développé tous les. motifs qui militent en faveur
" de cette opinion, et fait sentir l'importance de ce résultat,
*' Vun des mieux prouvés et des moins attendus de la géologie,
*' résultat d'autant plus précieux qu'il lie, d'une chaîne non
" interrompue , l'histoire naturelle et l'histoire civile."
92. Que penser après cela de ces géologues téméraires
qui prétendent fixer l'âge du monde par les nombreuses
successions de siècles qu'il a fallu aux montagnes primitives
pour se former suivant les lois de la cristallisation, comme
si Dieu, en créant l'univers par un acte de sa toute-
puissance, avait été obligé d'assujettir son opération
divine aux règles que nous offre le cours ordinaire de la
nature dans les différens changemens que subissent les
corps? "Qui nous dira, observe judicieusement Mr.
" Frayssinous, Conférence sur les tems primitifs, tom. 2.
'* pag.194, &c., si, dans cette première formation des choses,
" Dieu n'a pas hâté l'action des agens naturels, et rendu
" plus rapide le développement des êtres? Pourquoi
" n'aurait-il pas pu former en un instant, d'un seul jet,
" ces masses de granit qui sont comme la charpente du
" globe terrestre, de même que plus tard nous voyons qu'il
**■ créa les animaux et l'homme dans l'état adulte, dans
" l'âge de la maturité .? De quel droit voudrait-on juger
" cette action créatrice de la cause première, dans l'origine
" du monde, d'après l'action lente et progressive des
" causes secondes qui perpétuent le monde une fois établi?"
On sait que la lumière, quoiqu'elle parcourt 70128
lieues communes de France par chaque seconde de tems,
emploie au moins trois ans et trois mois à venir à nous des
étoiles les plus rapprochées de notre système planétaire, et
que, parmi ces astres, il y en a qui sont si éloignés de
nous, qu'il leur faut, selon les meilleurs astronomes, plu-
\
METAPIIYSICA. 171
sieurs milliers d'années pour nous transnricttre leur lumière:
refuse-t-on cependant d'admettre que l'homme, s'il eut été
créé avant les étoiles, aurait pu les appercevoir dès le
premier instant de leur crôation ? Non srais doute, parce
que l'on suppose avec raison que le monde a été créé d'un
seul jet, de manière à paraître aux yeux de l'homme aussi
ancien qu'il aurait paru, s'il avait été formé par l'action des
causes secondes selon les lois physiques et chimiques
établies par le créateur. ''
On peut consulter à ce sujet les Annales de Phil. Chrét.
lom. 2. pag. 190, 275, tom. 3. pag. 195, 233, 253, 3C9.
Obj. 4o. Chaidœi, juxta Berosura,cu)us multa fragmenta
apud Josephum leguntur, suam originem ad quingenta aa-
norum millia (500,000) extendunt, et idem scriptor retert
eorum observationes astronomicas ad quadringenta et octo-
ginta aunorum millia (480,000) protendi. Ergo iMoyscs
falsam assignavit mundi antiquitatem.
93. l?esp. lo. Vel ars scribendi apud veteres ChaldaL'os
in usu fuit, vel non. Si prius, cur ergo omnes eorum
niaximi eventus omnino ignoti sunt? Si posterius, quâ via
scire potuerunt Chaldœi suam originem tam rétro protendi?
Resp. 2o. Multi eruditi conlendunt annos Chaldeeorum
fuisse nostris multo breviores ; v. g., unius mensis lunaris,
teste Plutarcho in vitâ Numa3.
Resp. 3o. Chaldœi, sicut ^gyptii, suam antiquitatem di-
videbant m fahulosa et in /izs/oî^/ca tempora. Tempora his-
torica, juxta D, Fréret, in opère cui titulus Défense de la
Chronologie contre le système de Newton^ et plures in chro-
nologiâ versatissimos, incipiebant à regno Alori, qui erat,
juxta Chaldœos, primushomo et Chaldccse princeps primus,
Hsec tempora dividebantur primitùs in diversas périodes,
quas Chaldaîi vocabant sares seu saros (a). Deindè, id est,
(a) Le S are ou Saros eslunp cerlnine période de tems dont les anricns Chaldéens se
pervaienr (>our compter le terris. LfS savans \te sont point d'accord sur la duiéede cette pé-
riode. J}érf)se, prêlie du temple de Béids à Bubvlone, né quelques années api^s Alexandre
le Grand, Ih su;. pose de SiSOi) ans, afin de ilonner plus de lustre à sa patrie par une antiquité
«•xtraordinaire. Plusieurs savans prétendent au contraire que la durée de cette période n'est
que de 3600 jours ou de 10 années clialdéennes de 3G0 jours cliacune. Les auteurs de l'His-
toire universelle par une .= i>ciélé de gens de leilres, sont portes h. admettre cette opinion, ils
pensent, tom. L pag. XU et 150 de lu traduction française, lo. que les di.x rois dont parle
Bérose ne sont autre chose que les dix eéncrations qu'il y a eu depuis la création jusqu'au
déluge ; 2o qu' Alurus le premier roi de U Clinldée est Ad im, et que Xi.xullirua ou Xisu-
llirus, le dernier, est Noé. Et comme le rî'giie de ces dix rois n été de l'JO sares, ils con-
cluent que, sulon Jîérose, il ne s'est écoulé que 1200 ans depuis la création jusqu'iiu dé-
luge," ce qui, njoutent-ils, " ne s'éloigne guères de la chronologie de Moïse.
De célèbres clironolugisies coiisidt'rent le Sare cornine une période nstronoinique de 2123
lunaisons, ou de lo ans et environ 11 jours. <J'eet cette période que les astronomes appel
lent le cycle Cltaldéen.
172 METAPIIYSICA.
à regno Evochoi, qui immédiate post diluvium Xixuthro
successit, Chaldsei tempora dividebant in annos solares.
D. Fréretj reducendo hsec tempora, prout referuntur à Be-
roso, ad majorera quam habere possunt extensionem, de-
monstrat Chaldaeorum historiam protendi non posse ultra
quatuor millia et octingenta novem (4809) annos ab Aloro
ad Christum ; quod concordari potest cum libris Moysis, si
admittatur versio septuaginta Bibliorum interpretum. Plu-
ies alii in chronologie versatissimi, gravioribus ducti ratio-
nibus, non admittunt intégras Clialdseorum periodos ut eas
refert Berosus ; illas breviores esse supponunt, ut jàm vidi-
mus, sicque tempus elapsum ab Aloro ad Christum multo
brevius esse probant. Hoc modo Chaldïeorum antiquitas
facillimè cum vulgatâ versione concordari potest.
94. Resp. 4o. Berosus procul dubio aberravit cùm obser»
vationes astronomicas tantae antiquitatis Chaldœis assigna-
vit. Callisthenes, qui sub Alexandre observationes à
Chaldseis factas magnis curis inquisivit, turre Babylonicâ
antiquiores non invenit (a). ImoD. Larcher, supplément à la
Philosophie de l'histoire contra D. de Voltaire, probat obser-
vationes astronomicas Chaldœorum non protendi ultra an-
num septingentesimum quadragesimura octavum (748)
ante œram vulgarem. Vide Annales de Philosophie Chré-
tienne, tom. 3. pag. 173.
Obj. 5o. Manethon in suâ ^Egyptiorum historiâ, cujus
fragmenta apud Eusebium supersunt, varias hujus populi
dynastias enumerat, quse ad tria et quinquaginta annorum
millia (5300) protenduntur, plurimique contendunt scripto-
res hujusce populi annales sex et triginta annorum millia
(3600) longé superare. Ergo falsa est epocha à Moyse
assignata.
(a) " Aristote, dit Mv. Du Clot, curieux de savoir la vérité art sujet des observaliort.t
" astronomiques des Chaldvens, manda à Callistlit''nes, qui était alors h lîabylone à la suite
" d'Alexandre, de lui envoyer ce qu'il trouverait lïassurc sur ce sujet. Callisthenes lui
" envoya des observations célestes de 1903 ans, depuis le commencement de leur monar-
" chie, jusqu'au rt'-gne d'Alexandre le Grand. Or, si depuis la prise de Babylou(î par
" Alexandre, l'an 330 avant l'ère chrélienne vulgaire, on remonte jusqu'à 1903 ans, on
" arrivera à 2233 ans avant l'ère chrétienne vulgaire, c'est-à-dire, vers le tems de Neinrod,
" peu après l'entreprise de la tour de Babel (d).
" L'ère de Nabonassar, si célèbre parmi les chronologistes, ne va pas au-del^ de l'an
" 3967 de la période Julienne. Elle commence l'an 747 avant l'ère chréiienne vulgaire. . . .
" Ptolomée, qui rechercha avec soin les écrits et les observations des anciens astronomes,
" n'a trouvé aucune observation céleste faite par les Babyloniens avant l'époque de Nabo^
" nassar.'' Bible vengée, tom. 1. pag. 201, &.C.
(d) Ce fait n'est rapporté que par Siraplicius, d'après Porphyre qui vivait près de 600 ans
«près la prise de Babylone. Aristote lui même n'en dit rien, et il n'en est fait aucune men-
tion dans les écrits des plus anciens astronomes.
METAPIIYSICA. 173
95. Resp. Manethonem concordari posse cum Moyse,
juxta plures eruditos sisupponatur ^gyptiorum annos nos-
tris fuisse multo breviores (a) vel plures reges simul in
jîEgypto regnavisse ; ^gyptios deindè vanitate ductos,
summaeque antiquitatis gloriâ allectos, successive hos reges
aniiumeravisse (b), quod clarè demonstratD. Dorigny, libro
oui titulus, la Chronologie du Grand empire des Egyptiens ;
variis enim observationibus, plurimorum comparatione
factorum et veterum scriptorum testimonio probavit
segyptiacam chronologiam concordari etiara cum vulgatâ
versione.
96. Mr. Champollion le jeune, qui est parvenu par ses
belles découvertes à établir une sorte de concordance entre
les monumens antiques de l'Egypte et l'histoire de Mané-
thon, s'est convaincu que la liste des rois que cet auteur
nous a laissée, n'est historique que depuis la 17me. dynas-
tie. Le reste est entièrement fabuleux, ou du moins paraît
enveloppé des plus épaisses ténèbres. C'est ce que démontre
parfaitement Mr. l'Abbé Greppo, dans son Essai sur le système
hiéroglyphique de Mr. Champollion le jeune, et sur les avan-
tages quil offre à la critique sacrée, en distinguant dans la
chronique de Manéthon les tems proprement historiques et
les tems couverts de nuages. Ce que nous connaissons
d'historique, dit-il, par rapport à l'Egypte, ne remonte
guère au-delà du tems d'Abraham et finit même à l'époque de
ce patriarche. Or dans les tems qui restent depuis le déluge
jusqu'à la vocation d'Abraham, on pourrait trouver encore
la place d'un grand nombre de dynasties. Le texte hébreu,
suivi en cela par la Vulgate, ne donne, il est vrai, à cette
époque, qu'une durée de 427 ans selon le calcul d'Ussérius,
et de 652 ans selon Mr. Fréret ; mais le texte samaritain,
et, surtout, la version grecque des septante lui en donnent
une beaucoup plus considérable (79 note). On sait qu'au-
cune de ces chronologies ne peut être considérée comme
tenant à la foi, et que l'église a laissé à chacun une entière
liberté de choisir entre elles celle qui peut lui paraître pré-
(a) " Chez les Egyptiens, l'année civile, selon Pline, Plutarque, Hérodote, Diodore de
" Sicile et plusieurs autres auteurs, fut d'abord composée d'une seule lunaison, ensuite de
" trois, de quatre, de six, de douze lunaisons." Philosophie de la religion, par Mr.
l'Abbé Para du Phanjas.
(b) " Les Prêtres Egyptiens, dit Mr. Fréret dans sa défense de la chronologie, mettaient
" au nombre de leurs rois tous les princes qui avaient régné en Egypte, et dont le nom se
" trouvait dans les annales sacrées. C'est par là qu' Hérodote compte en Egypte 311 rois,
" et que Manctbon, quelques siècles après, eu compte 'ib'-l. Mais ces'princes, que Mané>
" tliuu divine eu 'i\ dynasties, ne coinposaieut pas une suite de rois sueceâsifs."
174 METAPHYSICA.
férable. Selon Mr. Greppo, en admettant la chronologie
des septante, on verrait s'évanouir toutes les difficultés que
peuvent présenter les dynasties égyptiennes que nous a lais-
sées iVJanéthon, puisque toutes les premières, dépourvues de
tout appui historique, se rangent fort naturellement dans la
classe des faits fabuleux, comme les règnes des Dieux, des
demi-Dieux, &c. Mais que l'on adopte ou non cette chro-
nologie, il n'en est pas moins vrai, dit Mr. Gre])po, que la
chronologie de Manéthon ne remonte pas au-delà des li-
mites admissibles de nos livres sacrés. Annales de Philoso-
phie Chrétienne, tom. 3. pag. 148, &c.
97. Selon Mr. ChampoUion Figeac, frère de Mr. Cham-
pollion le jeune. '* les recherches les plus certaines sur les
"■ monumens astronomiques trouvés en Egypte démontrent
" avec toute évidence qu'ils ont été exécutés pendant la
" domination romaine sur les rives du Nil, et qu'ils sont
'' contemporains du premier siècle de l'ère chrétienne.
" Quant aux chroniques écrites des anciens peuples, on
" sait que la plupart de leurs nombres chronologiques s*ex-
" pliquent par les élémens de certaines périodes purement
" proleptiques {a), et à l'égard de la vieille chronique égyp-
*' tienne, par exemple, dont on connaît d'ailleurs les élé-
" mens purement arbitraires, et qui donne à l'histoire
'^ égyptienne une durée de 36525 ans, si l'on défalque lo.
" 30000 ans pour le règne du soleil, selon le texte ; 2o. plus
" de 4000 ans pour le règne des Dieux et des demi- Dieux
** qui succédèrent au soleil, ce qui en reste pour les tems
" historiques jusqu'à la conquête d'Alexandre (6) n'a rien
'* d'embarrassant pour la chronologie des faits historiques.
" D'autre part, mes recherches (c'est Mr. Champollion-
"^ Figeac qui parle), d'après les dates très- authentiques des
*• inscriptions royales de l'Egypte, ont constaté ce résultat
" capital : qu'aucun monument connu de cette contrée ne
" remonte au-delà de la 16me. dynastie égyptienne de
" Manéthon, dont tous les écrivains ecclésiastiques font
" unanimement le premier roi contemporain d'Abraham.
** Ainsi l'histoire de l'Egypte, par ses monumens, ne s'étend
" pas au-delà du 23me. siècle antérieur à l'ère vulgaire.
*' Elle reste donc dans les termes de la chronologie de
(a) On appelle période proleptigue celle qui esi supposée au-delà des limite» ordinaires
de la chronologie.
fb) 332 ans avant l'èro vulgaire d'après le calcul d'Ussérius.
METAPHYsICA. 175
*' Moïse selon le texte des septante. .. .puisqu'elle laisse
" sept siècles entre l'époque qu'elle assigne au déluge et la
" 16rne. dynastie égyptienne reconnue par les monumens.''
Annales de Philosophie Chrétienne, tom. l. pag. 373. On
peut voir à ce sujet le même ouvrage, tom. 6. pag. 321, et
le Comte de Valmont, par Mr. P. L. Gérard, tom. 2.
Obj. Oo. Sinarum imperium multis ante diluviuni
seeculis jàm fiorens erat, uti certissimis hujus populi anna-
libus et série non interruptâ observationum astronomicarum
invictè probatur. Ergo falsa est epocha à Moyse assignata.
98. Resp. Nego antecedens et ejus probationem quoad
utramque partem.
Les Chinois regardent le Chou-King comme leur plus
ancien livre, et le considèrent comme la base inébranlable
de leur histoire. On assure que cet ouvrage fut rédigé par
Confucius (a) d'après les lambeaux d'écrits antérieurs qui
ont disparu. Personne n'ignore qu'environ deux siècles
avant l'ère vulgaire, l'empereur Chi-Hoangti^ voulant faire
perdre le souvenir de tous les faits glorieux qui s'étaient
passés sous les règnes précédens, fit détruire tous les monu-
mens historiques et tous les livres qui pouvaient se trouver
dans l'empire, à l'exception de ceux qui traitaient de la
jurisprudence, de la médecine et de l'agriculture. Ce ne
fut que quarante ans plus tard, sous la dynastie qui avait
renversé celle à laquelle appartenait Chi-Hoangti, qu'une
partie du Chou-King fut restituée de mémoire par un vieux
lettré, et qu'une autre fut retrouvée dans un tombeau : le
reste, qui formait dans le moins la moitié, fut perdu pour
toujours. Or ce livre, tel qu'il existe actuellement, et tous
les autres Kings qui lui servent de commentaires et que les
Chinois regardent comme très-authentiques, nous repré-
sentent l'univers tiré du néant par un être éternel appelé
Jehovah, la terre créée, toute la race humaine issue d'un
seul homme et d'une seule femme. On y parle de l'état
d'innocence, du paradis terrestre, de l'arbre de vie, du
fruit défendu, de la chute de la femme, de la longue vie des
patriarches, et même de la promesse d'un rédempteur. Dans
le récit que l'on y fait du déluge qui submergea tout le
genre humain à l'exception d'une seule famille, on n'oublie
pas la pierre aux sept couleurs ou Varc-en-ciel. On lit que
(a) Confucius, ctlebre pliiluBophe clÉiuoia, né vers l'an Ô50 avant J.C, tems où la China
cuit encore (lèâ-peu du chosi-, est inurt & i'àge de 7;j ana-
176 METAPHYSICA.
Niu-Wa, ou Noc, vainquit l'eau par le bois, et se sauva
dans un bateau ; qu'une colonie des descendans de Niu-Wa
vint s'établir dans le Chen-si ; qu'elle avait pour chef le
sage Yao, dont les premiers soins furent de procurer l'écou-
lement des eaux qui, s'etant élevées jusqu\iu ciel, baignaient
encore le pied des plus hautes montagnes, couvraient les
collines moins élevées, et rendaient les plaines impraticables
CaJ. De là il est facile de conclure que l'histoire de la
Chine, même en la faisant remonter jusqu'à Yao, ne
dépasse point l'époque assignée par Moïse, puisque les chro-
nologistes ont démontré de la manière la plus évidente que
le déluge de Niu-Wa est arrivé vers l'an 2324 avant l'ère
vulgaire, c'est-à-dire, 24 ans après le déluge de Noé, en
suivant le calcul d'Ussérius (79. note).
99. "' A l'égard des observations astronomiques, dit Mr.
" Goguet, dont on a cherché à étayer les prétendues an-
" tiquités chinoises, la supposition est si sensible, qu'elle
** a été aperçue par quelques Lettrés Chinois, malgré le
" peu d'idée qu'en général, les Chinois ont de la critique.
" On peut assurer hardiment que, jusqu'à l'an 206 avant
" Jésus-Christ, leur histoire ne mérite aucune croyance.
" C'est un tissu perpétuel de fables et de contradictions ;
" c'est un cahos monstrueux dont on ne saurait extraire
** rien de bon." Origine des Lois, tom. 3. dissertation
3. MM. de Lalande et Delambre avouent la même chose.
Quoique l'on attribue à Yao l'introduction de l'astrono-
mie à la Chine, la première éclipse de soleil dont il soit fait
mention dans le Chou-King, n'est cependant arrivée
qu'environ deux siècles après la mort de ce sage, et encore le
récit de ce phénomène est-il accompagné de circonstances
très-ridicules : on y raconte, par exemple, que l'on fit mar-
cher un général et toute l'armée chinoise contre les deux
astronomes qui avaient prédit cette éclipse, parce qu'ils
s'étaient trompés dans leurs calculs, &c. Les véritables
éclipses rapportées par Confucius dans sa chronique du
royaume de Lou, ne remontent pas au-delà de la 776me.
année avant Jésus-Christ. Nous avons déjà remarqué (94)
que les observations astronomiques des Chaldéens ne vont
pas au-delà de 748 ans avant la même époque. Au reste,
si l'on juge du passé par le présent, on peut croire que les
(a) Annales de Philosophie Chrétienne, tom. 2, pag. 43 et 60, tom. 4. pag. iC9, ifcc.
METAPHYSICA. 177
Chinois n'ont jamais dû faire de grands progrès dans l'as-
tronomie, puisqu'ils sont encore obligés de recourir aux
étrangers pour la composition de leurs calendriers. Annales
de Philosophie Chrétienne, tom. 3. pag. 176. Voyez Mr.
Larcher, Supplément à la philosophie de Vhistoire ; Mr. Do-
rigny, Chronologie du Grand empire des Egyptiens ; Mr.
Gérard, le Comte de Valmont, tom- 2. ; Mr. Feller, Catec.
philos. Mr. Para du Phanjas, Philos, de la religion; &c.
1 00. Les incrédules ont encore opposé à Moïse la haute
antiquité des Hindous ; mais il en a été de cette objection
comme de toutes les autres que l'on a faites dans le même
genre : elle a disparu devant la véritable science^ et per-
sonne n'oserait la renouveler depuis que, par leurs savantes et
laborieuses recherches, les plus célèbres orientalistes mo-
dernes, et surtout les men^bres de la société asiatique de
Calcutta, ont démontré de la manière la plus évidente que
les annales sacrées et les observations astronomiques des
Hindous s'accordent parfaitement avec la chronologie de la
bible. Voyez les Annales de Philosophie Chrétienne, tom. 1.
pag. 386, &c. ; tom. 2. pag. 50, &c. ; tom. 3. pag. 174, &c.
2. De Systemate Epiçurî.
loi. Epicurus Gargetii in Atticà anno 342 ante Chris-
tum natus, non omninô negabat esse Deos, sed contendebat
eos huic mundo esse prorsùs extraneos, ideôque nec orbi
efFormando prsefuisse, nec illius conservationi invigilare, ne
scihcèt in otio perturbarentur.
Duo statuit rerum omnium principia ; primum est inane
seu vacuum seternum et iniinitum, seu spatium circumqua-
què expansum ; secundum est materia, non in unum cor-
pus compacta, sed in primas suî particulas minutatira
secta et divisa. Has particulas Epicurus vocat atomos.
Atomorum hse sunt proprietates ; lo. varias et infinitas
habent formas et figuras ; alise sunt oblongee, aliœ sphœ-
ricî3e, aliee triangulares, alise instar hamorum aduncte, &c. ;
2o. necessariae sunt et œternse ; 3o. sunt indivisibiles licèt
extensœ ; 4o. illis necessarius est et essentialis motus.
Quadruplex est iste motus ; lo. motus gravitatîs, quo innato
pondère ab alto deorsùm decidunt ; 2o. perpendicularis, quo
in altum ascendunt ; 3o. obliquus seu ctinaminis que à
lineâ perpendiculari sensim et perpétua déclinant ; 4o. mo-
M
178 METAPHYSICA.
tus rejlexionîs quo atomi in vicinas impactse repercutuntur
et resiliunt.
102. His positis, mundi exordiurn sic explicat Epicurus:
ab seterno ferebantur atomi deorsùm in vacuo inani et im-
menso ; forte autem contigit ut, ob motum clinaminis à
lineâ rectâ deflectentes in sese invicem impegerint, sibique
propter diversas quas liabent figuras adhseserint, variaque
corpora formaverint ex quibus conflatur orbis universus.
Nihil in mundo pr?eter corpora admittit Epicurus. Mentes
sunt atomi tenuiores ; cogitationes verô ex motibus parti-
cularum exiguarum quodara modo inclinatarum ac reflexa-
rum nascuntur.
Propositio.
103. Absurdum est Epicuri systema.
Prob. TUud enim systema est absurdum cujus principia
sunt falsa et contradictoria, et cujus falsse sunt consecutio-
nes ; atqui taie est systema Epicuri.
I. Falsa sunt et contradictoria principia Epicuri. Su];po-
nit enim Epicurus materiam esse aeternam motumque esse
materise essentialem ; atqui hœc duo falsa sunt (39, 44.)
et contradictoria. Si enim atomorum motus perpendicu-
lariSj V. g., ipsis est essentialis, tune répugnant alii motus;
contrarii enim essent motui essentiali. Idem dicendum est
de cseteris motibus. Ergo I. . . . &c.
IL Falsœ sunt consecutiones quas Epicurus ex suis prin-
cipiis deducit. Ex suis enim atomis et ex illarum motu
fortuito et necessario deducit Epicurus lo. corporum origi-
nem ; 2o. plantarum et animalium conformationem ; 3o.
mundi structuram ; 4o. ejusdem conservationem ; .5o.
demùm mentium nostrarum existentiam ; atqui hsec oii.nia
falsô deducit Epicurus.
lo. Nulla nasci possunt ex atomis corpora. Nam juxta
Epicurum corpus nihil aliud est quàm atomorum agglome-
ratio : atqui hesc agglomeratio est impossibilis. Ex ipso
enim Epicuro, motus essentialis est atomis. Ergo motus
in atomis nunquàm destrui potest, quicunque sit iste
motus. Ergo atomi nunquàm quiescere possunt. Ergo
lo. . . . &c.
2o. Plantarum et animalimn conformatio ex atomis de-
duci non potest. Plantas enim omnes, omniaque animalia,
seu corpora quœlibet organis instructa, partibus constant
METAPHYSICA. 179
ità secum invicem ordinatis, et aliis ab aliis dependentibus,
ut omnes ad unutn et enmdem finem concurrant, nimirùm
ad nutritionem, incrementum, conservationem et propaga-
tionem : atqui haec mutua partium coordinatio omnium non
potest oriri ab atomis ceecis et intelligentiâ destitutis. Ergo
2o &c.
3o. Orbis universus oriri non potuit ex atomis caeco im-
petu motis. Quod enitii nimiam arg-uit sapientiam et intel-
ligeatiam non potuit oriri ex cseco atomorum impetu : at-
qui orbis universus nimiam arguit sapientiam et intelligen-
tiam(47, 48). Ergo 3o &c.
4o. Orbis conservatio pariter expiicari nequit in syste-
mate Epicuri. Quod enim est fortuitum, eo ipso est cadu-
cum, et firmum esse non potest ; si in uno instanti aliquis
videatur ordo, in posteriori raomento nova commotione
destruitur : ergo si atomi concurrendo mundum nostrum
produxissent (quee suppositio est absurdissima), ecedem
atomi alio mota fortuico concurrentes primum destruxis-
sent opus : atqui pressens mundi ordinatio jàm à pluribus
annorum milUbus existit. Ergo 4o. . . . &c.
5o. Mentium nostrarum origo expiicari nequit in syste-
mate Epicuri. Mentes enim nostrse simpUces sunt, intel-
ligentes, cognitionis, memoriae, libertatis, &c., capaces:
atqui ex atomis casu fortuito motis nihil oriri potest praeter
aggregationes partium, quae sanè simplices non sunt.
Ergo 00. . . . &c.
" Des combinaisons, des chances, inquit civis Genevensis,
" ne donneront jamais que des produits de même nature.
*' Un chimiste combinant des mixtes, ne les fera pas sentir
" et penser dans son creuset." Emile, tom. 3. pag. 56.
Ergo 5o. . . . &c. Aliundè. . . . &c. Ergo. . . . &c. •
Solvuntur objectiones.
Obj. Datis materiâ et motu evenire potuit quœlibet
combinatio possibilis : atqui pressens mundus est combinalio
possibilis. Ergo datis materiâ et motu evenire potuit
prsesens mundi combinatio.
104. Resp. lo. Dist. Maj. Datis materiâ. . . . &c., si ea
supponantur quae non postulat Epicurus, nec postulare
potest quin causa cadat ; conc. maj. Datis materiâ et
motu prout ea prsecisè postulat Epicurus ; neg. maj.
Reverà, quselibet mundi physici ordinatio nihil aliud est
M 2
180 METAPHYSICA.
quàm qusedam determinata materiae quantitas determinatâ
motûs quantitate donata. Mirum non est igitur quod,
determinatis motûs et materiae quantitatibus cuilibet mimdo
ordinato propriis, illa mundi combinatio obtineri possit et
debeat : atqui hanc ipsam deterrainationem nec postulat
Epicurus nec postulare potest quin causa cadat. Haec
enim ipsa determinatio supponit causam determinantem et
intelligentem : atqui ut hanc causam intelligentem tolleret,
systema suum excogitavit Epicurus. Ergo. . . . &c.
Resp. 2o. Dist. Maj. Datis materiâ et motu evenire
potuit quselibet mundi combinatio merè materialis, in quâ
nullus sit sensus, nulla cogitatio; transeat. Combinatio
mixta in quâ sensus et cogitationes materiali combinationi
admisceantur ; neg. maj. Solutio patet ex dictis (103).
Inst. lo. Atqui admissis tantummodô Epicuri principiis
prassens mundi dispositio evenire potuit et debuit. In totâ
enim rétro œternitate fortuitus atomorum concursus infi-
nitum combinationum numerum potuit et debuit exhaurire ;
atqui infinitus combinationum numerus complectitur prae-
sentem mundi dispositionem. Ergo. . . . &c.
105. Resp. lo. Neg. supp. maj. Supponit enim major
dari posse numerum infinitum. Atqui nullus potest esse
numerus infinitus. Talis enim numerus foret ille qui tantus
esset, ut major vel minor concipi non posset : atqui nullus
numerus tantus est ut major vel minor concipi non possit.
Huic enim numéro possum addere unicam vel plures
unitates. Pariter ex illo possum demere unicam vel plures
unitates. Ergo quilibet numerus potest augeri vel minui.
Ergo nullus numerus potest esse infinitus.
Sesp. 2o. Dist. Maj. Fortuitus atomorum concursus
exhaurire potuit infinitum numerum combinationum, quales
fortuito casu oriri possunt ; transeat : combinationum in
quibus maximus elucet ordo ; neg. maj. Nam adesse débet
proportio inter causam et efFectum, inter combinationes et
earum originem; atqui inter fortuitum casum et combina-
tiones rectè ordinatas, quarum omnes partes ità sunt inter
se connexœ, ut singulae habeant finem proprium et insuper
concurrant ad finem omnibus generalem, nuUa potest esse
proportio ; siquidem apud Epicurum, aut casus fortuitus
nihil est, aut est causa qusedam cseca sensu et ratione
destituta, omnia omnino confuse miscens : atqui inter con-
METAPHYSICA. 181
fusionem et ordinem nuUa potest esse proportio. Ergo
.... &c.
Inst. 2o. Atqui prsesens raundi dispositio fortuite exoriri
potuit. Omnes enim litterœ JEneïdos poëma ingredientes
includantur in capsula deindèque agitentur. Tune per
foramen ità exiguum ut unicee tantùm litterae per vices
transitum permittat, exire cogantur. In hâc hypothesi,
quœlibet litterarum combinatio exire poterit, et sanè exi-
bit, si per totam œternitatem iterentur projectiones ; atqui
-^neïdos poëma est litterarum combinatio possibilis. Ergo
^neïdos poëma efFormari potuit fortuito litterarum con-
cursu. Ergo à pari et ipsa mundi dispositio ex fortuito
atomorum concursu deduci potuit et debuit. Haec invin-
cibiliter demonstrârunt duo celeberrimi philosophi, D.
Prémontval, Vues philosophiques, tom. 2. et D. Diderot,
Pensées philosophiques, No. 21,
106. Resp. lo. Neg. consqam. Quamvis enim concede-
retur ^neidos poëma ex fortuito litterarum concursu
oriri potuisse (a), non indè sequeretur prsesentem mundum
oriri potuisse ex fortuito atomorum concursu. In iEneïdos
enim poëmate solummodo adesset mera litterarum disposi-
tio, vitâ, sensu, cogitatione, &c., destituta: in mundi verô
dis*positione sunt corpora organis instructa et entia viven-
tia ; sunt substantise sentientes et cogitantes ; sunt qusedam
partes ità inter se connexae, ut una plures alias necessariô
supponat, &c. Atqui talis ordinatio oriri non potuit ex
fortuito atomorum concursu. Ergo nulla est paritas.
Resp. 2o. Quando agitur de iEneïdos poëmate, suppo-
nuntur efFormatse litterse ex certâ materiâ, determinatae
magnitudinis, et ejusdem generis, v. g , latinse. Earum
numerus determinatur ; supponuntur omnes in capsula
inclusse et egredientes alise post alias. Post inutilem
jactum, iterùm supponuntur inclusse, ut iterùm fluant.
Atqui haec omnia causam intelligentem supponunt. Ut
igitur quaedam adesset paritas, supponendum foret per
immensum vacuum volitantes atomos, infinitis exhaustis
combinationibus, produxisse tandem ^neïdos poëma. Hâc
de re consuli possunt D. NonotteDic^. Philos, article ^^/lee;
D. Feller, Catéchisme philos. No. 35 ; D. de Fénélon,
Traité de l'existence de Dieu; D. Aymé, Fondemens de la foi.
{■a) TuUius nesch " an in uno quiclem versu possit taniùm valere fortune.'' De na'iirà
Deorum. .. .11, 37.
182 METAPHYSICA.
3. De Systemate Spinosœ.
107. Benedictus Spinosa Amstelodami Batavorum
(Amsterdam capitale de la Hollande) natus anno 1633,
judaïcam primo, deindè christianam, nuliam tandem reli-
gionera professus, totus in eo fuit, ut Divinitatis notionem
penitiis deleret. In sua Ethicâ, in quâ methodum geome-
tricam affectât^ impium suum systema evolvit.
108. In hoc opère lo. Statuit unicam in mundo exis-
tere substantiam, quam infinitam, immensam et œternam
contendit. 2o. Duo sunt primaria illius attributa, ex quibus
caitera fluere concipiuntur, extensio nimirùm et cogitatio.
3o. Omnia corpora quibus mundus coalescit sunt totidem
unicse hujus substantiaî modi, quateniis est extensa ; ejus-
dera vero,quatenùs est cogitans, modi sunt mentes humanœ.
4o. Unicam hanc substantiam Deum appellat, quem ab
ipsâ rerum universitate et omnium in hoc mundo existen-
tium congerie non esse distinctum contendit. Undè fit ut,
juxta Spinosam, Deus sit spiritus et raateria, homo et
brutum, bonus et malus, &c. Quid absurdius ?
Propositio.
109. Rejiciendum est Spinosse systema.
Prob. Illud enim systema est rejiciendum, cujus falsa
sunt principia. Atqui principia systematis Spinosœ sunt
falsa. Supponit enim Spinosa lo. unicam esse substantiam ;
2o. hanc substantiam esse Deum. Atqui hoc utrumque
est falsum.
I. Falsum est unicam esse substantiam. Ex omnium
enim philosophorum professe, substantia est ens in se sub-
sistenSjSeu ens existens independenter à subjecto inhœsionis:
atqui plurima sunt entia in mundo existentia independenter
à subjecto inhœsionis. Sic, v. g., homines, corpora, sol, lu-
na, arbores, &c., existunt independenter à subjecto inheesio-
nis. Ergo I. . . . &c.
II. Falsum est unicam Spinosœ substantiam esse Deum.
Nam ex probandis, Deus est summè perfectus et summè
felix. Atqui unica Spinosœ substantia neque est summè
perfecta, neque summè felix. lo. Non est summè perfecta;
innumeris enim scatet imperfectionibus, illis scilicet omni-
bus quœ sive in spiritibus, sive in corporibus observantur,
siquidem omnia complectitur. 2o. Non est summè felix.
METAPHYSICA. 183
Omnes enim hominum curas, soUicitudines et miserias in
se recipit. Ergo tam misera est hsec unica Spinosae sub-
stantia, quàm si ab alio cruciaretur. Ergo II. . . &c. Ali-
undè. .. . &c. Ergo. . . . &c.
Prœtereà asserit Spinosa hanc unicam substantiam esse
aeternam, iiicreatam et infinitara : atqui istud dici nequit.
Ad id enim oporteret ut raateria esset œterna, increata
et infinita : atqui istud omne est falsum (39). Ergo. . &c.
Solvuntui' ohjectiones.
Obj. Existit in mundo aliqua substantia infinita ; atqui
preeter substantiam infinitam, niïlla potest esse alia substan-
tia. Ergo unica est in mundo substantia.
110. Resp. lo. Neg. min. Ut enim praeter substantiam
infinitam plures esse possint substantif, sufficitsi plura ad-
sint entia quse ità existant, ut non indigeant subjecto inhse-
sionis ; atqui res ità est (109) ; ergo. . . . &c.
Resp. 2o. Neg. consqam. Infinita enim substantia infini-
tas omnes perfectiones complectitur ; atqui Spinosae unica
substantia non complectitur infinitas perfectiones, siquidem
imperfectiones singularum partium complectitur. Ergo...&c.
Inst. lo. Substantia infinita omnem entis gradum conti-
net. Ergo praeter illam nulla potest esse substantia.
Resp. Dist. Ant. Continet ^utformaîiter, £LUtvirtuaUter,
aut eminenter ; conc. ant. Continet formaîiter ; neg. ant,
Solutio patet (31,34).
Inst. 2o. Quilibet éntis gradus est perfectio : ergo sub-
stantia infinita quemlibet entis gradum /orma/zïer continet.
111. Resp. Dist. Ant. Est perfectio impropriè dicta:
conc. ant. Est perfectio verè et propriè dicta : neg. ant.
Itaque substantia infinita continet omnem et absolutam per-
fectionem omni admixtione imperfectionis omnino carentem,
Sed omnes entis gradus non carent omnino imperfectionis
admixtione. Ergo substantia infinita non continet forma-
liter omnem entis gradum.
4. De Systemate Immater ialîstarum.
112. Docent Athei Immaterialistae lo. nihil existera
prseter spiritus ; undè sequitur homines perpétué vanis
corporum speciebus illudi ; 2o. singulos spiritus esse neces-
sarios et œternos ; 3o. cogitationes et affectiones quibus
mens subjacet, ex fataîi quâdam necessitate contingere.
184 METAPHYSICA.
Propositio.
113. Rejiciendum est systema Immaterialistarum.
Prob. Illud enim systema est rejiciendum, quod falsis
nititur principiis, et, quibus etiam concessis, scopum suum
non attingerent athei immaterialistse : atqui taie est eorum
systema.
I. Hujus systematis falsa sunt principia. lo. Falsum est
nullum existere corpus (Log. 194). 2o. Mens humana, ne-
dùm sit necessaria, è contra est ens contingens ; concipi
enim potest non existens sequè ac existens quin destraatur
ejus essentia. 3o. Non est eeterna, siquidem non est neces-
saria. 4o. Cogitationes et afFectiones mentis non oriuntur
à quâdam fatali necessitate, Vel enim illa nécessitas orire-
tur à principio mentibus externo, vel ab interno : atqui
neutrum dici potest. Non prius ; tune enim aliquod ens
existeret distinctum à mentibus humanis, quod nolunt athei
immaterialistcE. Non posterius ; cùm enim eadem sit men-
tium humanarum natura, esedem essent in omnibus affectio-
nes et cogitationes, quod experientise adveYsatur. Ergo I.
• . . .&c.
II. Etiamsi concederentur ista principia. scopum suum
non attingerent immaterialistae. Ideô enim negant esse
corpora, ne Deum esse probari possit : atqui, etiam subla-
tis corporibus, Deum esse efficaciter probatur, nempè,
argumentis metaphysicis et moralibus. Pariter vitare non
possent argumentum desumptum ex rairabili ordine et arti-
ficiosâ mundi dispositione. Nam quamvis materia non ex-
isteret, nibilominùs taraen constat lo. nobis occurrere
saltem simulacra rerum omnium quas in orbe existere cre-
dimus : 2o. in illis simulacris summam elucere sapientiam :
3o. hsec simulacra non pendere à nobis. Ergo agnoscenda
est aliqua causa à mentibus nostris distincta et ipsis supe-
rior, quœ stupendas illas rerum imagines, tamque raagni-
fici mundi reprcesentationem in nobis excitet : quae causa
alia esse non potest quàm ens supremum suramè sapiens, et
ideô Deus. Ergo II. . . .&c. Aliundè. . . .&c. Ergo, . . .&c.
METAPHYSICA. 18i
CAPUT SECUNDUM.
DE ATTRIBUTIS DIVINIS.
ATTRIBUTA divina duplicis sunt generis ; alia
dicuntur absoluta, quia solura Deum respiciunt
et nullam exprimunt relationem creatoris ad creaturas ; alia
vocantur relativa, quia hanc relationem exprimunt.
I. DE ATTRIBUTIS DEI ABSOLUTIS.
Prœcipua Dei attributa absoluta ad quai caetera revocari
possunt, sunt Aseitas, Infinitas, Independentia, ^ter-
nitas, Unitas, Simplicitas, Immensitas, Libertas et Immu-
tabilitas.
1 . De Aseitaie.
115. Aseitas seu proprietas existendi à se et essentialiter,
juxta plurimos, est attributum Dei primarium, seu gradus
Dei constitutivus, quia ex hoc attributo, tanquàm ex fonte,
fluunt alia Dei attributa, quae ideô, juxta eosdem, secundaria
vocantur.
Propositio.
116. Deus à se, essentialiter et necessariô existit.
Prob. Deus enim est ens necessarium (GO). Atqui ens
necessarium à se, essentialiter et vi naturae suse existit ; si
enim ità non existeret, nullo modo existere posset (59).
Ergo. . . . &c.
2. De Injinitate seu omni-perfectione Dei.
Propositio.
117. Deus est in omni perfectionum génère infinitus.
Prob. Ens enim illud est in omni perfectionum génère
infinitum, quod possidet omnes perfectiones : atqui Deus
possidet omnes perfectiones (60). Ergo. , . . &c.
3. De Independentiâ Dei,
Propositio.
118. Deus est summè independens.
Prob. Deus enim est ens necessarium ; atqui ens neces-
sarium est summè independens, cùm à nullo pendeat, sive
quoad existentiam, sive quoad exislendi modum. lo. Ens
necessarium non pendet ab alio quoad existentiam ; ità
enim vi naturae suae existit, ut nec possit non existere, nec
186 METAPHYSICA,
concipi possit non existens. 2o. Non pendet ab alio quoad
existendi modum. Nam ens necessarium à nullo pendet
quoad existentiam. Ergo pariîer ab alio non pendet quoad
existendi modum, siquidem nuUura ens potest esse sine
aliquo existendi modo. Ergo ens necessarium habet vi
naturee suée aliquem existendi modum necessarium. Ergo
* . . .&c.
4. De JEternitate Dei.
119. Cùm Deus sit ens necessarium, eo ipso est œternus,
id est, nec initium habuit nec finem habere potest. Hoc,
uno consensu, docent omnes Theistss. Sed circa œternitatis
naturam dissentiunt. ^ternitas estne successiva, ut qui-
dam volunt cum Scotistis, vel tota simul, ut docent 1ère
omnes cum Thomistis ? Haec qusestio est obscurissima et
sat inutilis, nulliusque est momenti ad ipsam aeternitatem.
Propositio.
120. Deus est eeternus.
Prob. Illud enim ens est œternum, quod nec initium ha-
buit nec finem habere potest : atqui Deus nec initium, . . .
&c., siquidem existentiaipsi essentialis est (116). Ergo nec
illâ unquàm privatus fuit, nec privari potest. Ergo semper
exstitit, semperque exstiturus est. Ergo. . . . &c.
5. De Unitate Dei.
121. Circa unitatem Dei erraverunt prœcipuè lo. Genti-
les et pagani qui plures admiserunt Deos ; 2o. Manichsei,
qui ad explicandam boni et mali originem, duo principia
necessaria admiserunt, unum summè et ex naturâ suâ bo-
num, auctorem rerum invisibilium, lucis et cujuslibet boni,
et alterum summè et ex naturâ suâ malum, à quo sunt te-
nebrse et omnia mala.
Propositio prima.
122. Deus est unicus.
Prob. lo. Deus enim est ens summè perfectum (117),
quo nihil melius esse aut excogitari potest ; atqui si non
esset unicus, si socios haberet, tune ens perfectius et melius
ipso excogitari posset, illud videlicet quod nec socium nec
par haberet. Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Deus est summè independens ( 118) ; atqui
unicum est ens summè independens, seu quod idem est,
METAPHYSICA. 187
non possunt esse duo Dii summè independentes. Si enim
essent plures, unus posset velle quod alter nollet, cùm sint
liberi ; unus posset alterum in suis actibus impedire, cùm
sint omnipotentes. Ergo iinus ab altero penderet. Ergo
non forent independentes.
Prob, 3o. Pariter duo illi Bii non forent omnipotentes,
cùm unius potestas per cequaîem alterius potestatem re-
stringi posset. Nec dicatur eos inter se consentire : si enim
alter alterius consensu ad agendum indigeat, eo ipso nec
sunt independentes, nec omnipotentes. Ergo. . . . &c.
Solvuntur objectiones. •
Obj. lo. Deorum pluralitas non répugnât cum necessitate
existendi. Ergo unitas non probatur ab existentiâ entis
necessarii.
Resp. Neg. ant. Nam pluralitas est imperfectio (122).
Ergo répugnât enti necessario.
Inst. Pluralitas répugnât enti necessario, vel prout est ens,
vel prout est ens necessarium ; atqui neutrum. Non prout
est ens praecisè, tune enim unicum esset ens ; non prout est
ens necessarium ; quod enim non destruit necessitatem
existendi non répugnât enti prout est ens necessarium ;
atqui pluralitas non. . . . &c. Ergo. . . . &c, .
Resp. Neg. min. quoad secundam partem : ad probatio-
nem, neg. min. Quod enim summam destruit perfectio-
nem, destruit pariter necessitatem existendi ; atqui pluralitas
destruit summam perfectionem. Ergo. . . . &c.
Obj. 2o. Deus est ens quo melius excogitari non potest ;
atqui melius est plures esse Deos, quàm unicum. Ergo
&c.
Resp. Neg. min. Illud melius dici non potest quod
répugnât : atqui pluralitas in ente necessario répugnât.
Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Plura bona sunt paucioribus meliora : atqui
plures Dii sunt plura bona. Ergo. . . , &c.
Resp. Neg. min. Deus enim est infinitum bonum : ergo
ejus bonitas non potest augeri per alterius boni additionem.
Inst. 2o. Plures personse divinœ habent infinitas perfec-
tiones. Ergo à pari plura entia possunt habere omnes
infinitas perfectiones.
123. Resp. Neg. consqam. et paritatem Cùm singulae
très personœ divinse unam, unicam et eamdem praecisè
188 METAPHYSICA.
habeant naturam divinam, eamdem voluntatem, potentiam,
&c., singula3 possunt habere omnes infinitas perfectiones,
quin plures sint Dii distincti, seu quod idem est, quin
plura sint entia infinita distincta, et consequenter, quin
destruatur existendi nécessitas ; è contra verô, plura entia
non possent habere omnes infinitas perfectiones quin plura
forent entia infinita distincta, et consequenter quin destrue-
retur existendi nécessitas. Ergo nuUa est paritas. Ergo
4- &c.
Propositio secunda,
124. Duo ManichîEorum principia répugnant.
Prob. lo. Duo Manichseorum principia sunt necessaria ;
ergo debent esse infinité perfecta : atqui tamen principium
summè malum quod admittunt Manicheei, nedùm sit sum-
mè perfectum, foret è contra summè imperfectum. Ergo
répugnât hujusmodi principium.
Prob. 2o. Ens necessarium est summè potens et summè
beatum (117): atqui duo Manichseorum principia nec sunt
summè potentia nec summè beata, Principium enim
honum totis viribus nitetur producere bonum et impedire
malum ; principium malum ex adverse mihtabit ; seternae
ab ipsis exercebuntur inimicitiœ. Jugis erit pugna ;
sequalibus utrumque viribus dimicabit ; utriusque vota
frustrabuntur efFectu, utriusque turbabitur félicitas. Ergo
répugnant duo Manichseorum principia.
Prob. 3o. Illa principia non sunt adraittenda quse stare
non possunt cum mundi phasnomenis : atqui duo Mani-
chœorura principia. . . . &c. Nam in raundo sunt bona
mixta malis : atqui bonorum et malorum mixtio obtineri
non potest sub duobus Manicheeorum principiis ; vel enim
haec duo principia sunt sequè potentia, tuncque nec bonum
nec malum aderit, vires quippè œquales et oppositae sese
elidunt ; vel principium bonum superius est, et tune unicè
bonum aderit : vel principium malum est potentius, tunc-
que non nisi malum erit in rerum naturâ, Ergo. . . . &c.
125. Nec dicant Manichaei haec duo principia mutuô
inter se consentire et de suo jure cédera : si enim princi-
pium bonum de suo jure cedere potest et malum permittere,
immérité igitur asserunt Manichaei sub unico Deo summè bo-
no mala adesse non posse, frustràque, ad expUcandam boni
et mali originem^ ad principium summè malum recurrunt.
METAPHYSICA. 189
Et vero, haec duo principia admittunt Manichsei ad
explicandam boni et mali originem : atqui origo boni et
mali explicari potest absque principio malo, uti ostendemus
ubi de Providentiâ ( 1 70) ; ibi enim probabiraus Deum summè
bonum posse permittere mala sive naturœ, sive i^œnœ, sive
culpœ (179, 180, 181).
6. De Simplicitate Dei.
126. Illud dicitur siraplex quod ità unum est ut in partes
dividi nequeat;. In prœsenti queestione erraverunt, lo.
veteres gentiles, qui Deorum pluralitatem admittentes, eos
esse corporeos existiraabant : 2o. plures hodierni philoso-
phi, ut D. D. Diderot, Robinet, le baron d'Holbac, &c.,
qui cum Spinosâ Deum esse ipsam rerum universitatem
affirmant ; 3o. Sadducœi qui nec resurrectionem, nec
spirituum existentiam adtnittebant ; 4o. Antropomorphitœ
qui docebant Deum instar hominis esse totum ex
corpore et anima constans.
127. Hic non agitur utriim Deus per accidens corpus
cum anima humanâ conjunctum in suî unionem assumere
potuerit, uti per Incarnationem factum est, sed utrùm
Deus sit materialis, vel utrùm corpus necessariô habeat.
Propositio.
128. Deus est substantia omninô simplex.
Prob. lo. Quod est compositum, dividi potest : quod
dividi potest, non est unicum : atqui Deus est unicus (122),
Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Deus est ens infinitum (117) : atqui enti infi-
nito répugnât omnis physica compositio. Si enim ex illo
composito desumeretur pars aliqua, jàm desineret esse infi-
nitum : ergo non erat infinitum antequàm pars illa desume-
retur, alioquin partes finitse simul junctse componere pos-
sent infinitum, quod répugnât (105). Ergo nullum compo-
situm est infinitum. Ergo. . . .&c.
Obj. Nobis reprcEsentare nonpossumus substantiam om-
ninô simplicem, Ergo affirmare non debemus Deum esse
omninô simplicem.
129. Resp. Dist. Ant. Non possumus. . . . &c., id est,
non possumus illara imaginari ; conc. ant.; id est, non pos-
sumus illam ideari ; neg. ant. et consqam. Cùm enim lias
voces suhatantia omninô simples proferinius, nosmetipsos
190 METAPIIYSICA.
intelligimus, et ab aliis inteliigimur : ergo tune verè habe-
mus ideam substantise omnino simplicià (Log. 9, 73, 74).
Praetereà, Dei existentiam demonstramus ; illum à quolibet
alio ente secernimus, et invictè probaraus illum corporeum
non esse : ergo concludendura est illum esse substantiam
omnino simplicera, licèt imperfectô sciamus quid sit sub-
stantia simplex.
7. De Immensitate Dci.
130. Illud dicitur immensum quod mensurari non potest,
vel quod nullis limitibus circumscribitur ; iramensitas igi-
tur Dei est ipsius ubiquè prœsentia. Triplici modo Deus
dici potest ubiquè prœsens, scientiâ, potentiâ et substantiâ.
Deum ubiq'iè pusesentem ratioae scientias et potentioe,
omnes confitentur ; omnia enim novit et ubiquè operari
potest. Sed prsesentiam Dei ubiquè ratione substantiee qui-
dam negant, contra quos sit
Propositio.
131. Deus ratione substantias suce est immensus, seu
ubiquè prsesens.
Prob. lo. Vel Deus ratione substantise suae est ubiquè
prœsens, vel quibusdam limitibus circumscribitur ; atqui
nullis limitibus circumscribitur Deus: ubienimsunt limites,
ibi est negatio entis ulterioris, et consequenter ibi est im-
perfectio. Ergo si Deus ratione substantise suœ non esset
ubiquè preesens, eo ipso imperfectus esset, quod répugnât.
Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Vel Deus substantialiter est ubiquè^ vel nulli-
bi, vel alicubi tantùm : atqui duo posteriora répugnant, lo.
Quidem non est nullibi ; nihil enim tune foret, quia nuliibi
esse et non existere sunt quid unum et idem. 2o. Non est
alicubi tantùm : vel enim locus iste esset determinatus, vel
non ; si prius, esset necessaria connexio inter Deum et lo-
cum, quod répugnât, alioquin duo essent entia necessaria,
quod fieri nequit. Si posterius, nulla est ratio cur Deus sit
potiùs in hoc loco quàm in alio quocunque, cùm ubicunquè
semper in Deo adsit eadem interior existendi nécessitas.
Ergo. . . . &e.
Et verô, Deus ubiquè omnia cognoscit et operatur vel
operari potest : atqui ipsius scientia et potentiâ à substan-
tiâ separari non possunt. Ergo ubiquè est praesens ratione
substantia3.
METAPHYSICA. 191
Solvuntur ohjectiones.
Obj. lo. Deus propriam habet sedem in cœlis ; ergo non
est ubiquè prœsens.
Resp. Dist. Ant. Deus propriam habet sedem in cœlis,
non exclusis aliis locis ; conc. ant. Exclusis aliis locis, neg.
ant. et consqam. Rêvera Deus speciali quodam modo dici-
tur esse in cœlo, quia ibi potentise su3e divitias magnificen-
tiùs evolvit ; sed non ideô dici potest illum non esse in
aliis locis.
Obj. 2o. Deus ubiquè prsesens esse non potest quin pari-
ter praesens sit in sordissimis locis et in flagitiosissimis pec-
catoribus : atqui istud répugnât. Ergo. . . . &c.
Resp. Neg. min. Si enim radii solis nihil suse munditiae
et nitoris amittant perlustrando loca etiam fœdissima ; si
anima, quamvis leproso et putrido corpori juncta sit, nullo
modo inficiatur ; cur Deus, qui est spiritus, in locis sordis-
simis et in flagitiosis hominibus cùm prsesens esset, aliquid
sordidum contraheret, prsesertim cùm ibi per contactum
non adest ?
8. De Libertate et Immutabiîitate Dei.
132. Libertas de quâ hic agitur est potentia agendi vel
non agendi ad nutum suum. Hinc actus ille est liber qui ità
fit ut posset non fieri ad nutum.
133. Immutabilitas est perfectio quâ Deus idem semper
permanet. Res aUqua mutari potest vel ratione existentiae,
vel ratione essentise et perfectionum, vel ratione cognitionis,
vel volitionis seu decretorum.
134. Certum est lo. Deum non esse liberum in actibus
suis internis, v. g., in cognitione et amore suî. Hic quœri-
tur an sit liber in actibus suis externis, v. g., in creatione
mundi.
135. Certum est 2o. Deum esse immutabilem lo. rati-
one existenticE ; existit enim necessario ; ergo existentiâ
privari non potest, nec in eâ parte mutari. 2o. ratione
essentise et perfectionum ; omnes enim suas perfectiouco
possidet vi naturee suœ, nec proindè potest illas perdere,
nec in iis mutationem pati. 3o. ratione cognitionis, alio-
quin omnia non cognosceret, et consequenter non esset
summè perfectus.
192 METAPHYSICA.
Propositio prima.
136. Deus est liber in operibus externis, v. g., in crea-
tione mundi.
Prob. Vel Deus libéré creavit mundum, vel aliquâ neces-
sitate determinatus fuit ad illum creandum : atqui posterius
répugnât. Hœc enim nécessitas foret vel extrinseca, vel in-
trinseca : atqui neutrâ necessitate determinatus fuit ad
creandum. Non extrinseca, ciim Deus sit summè inde-
pendens (118) ; non intrinsecâ, tune enim creatura quseli-
bet tam necessaria œternaque foret quàm ipse Deus, quod
répugnât. Ergo. . . . &c.
Propositio secunda.
137. Deus ab neterno sese libéré determinavit.
Prob. Deus enim est summè perfectus (117) : atqui ens
summè perfectum non potest esse indeterminatum ; omnis
enim indeterminatio oritur vel defectu potentise, vel defectu
cognitionis ; atqui ab ente summè perfecto exulat quilibet
potentise et cognitionis defectus. Ergo Deus nunquàm
fuit indeterminatus : ergo ab œterno sese determinavit :
atqui liber est in operibus externis (136). Ergo &c.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. lo. Deus est ens necessarium. Ergo non est liber.
Resp. Dist. Ant. Deus est ens necessarium quoad essen-
tiam et quoad existentiam ; conc. ant. Quoad operationes,
subd. ant. Quoad operationes internas, conc. ant. Quoad ope-
rationes externas, neg. ant. et consqam. Si enim Deus in
operationibus externis necessitaretur, sanè vel à seipso,
vel ab alio ente ; atqui neutrura dici potest (136). Ergo
• • • * 06C.
Inst. lo. Deus est principium necessariô fœcundum ;
ergo non est liber etiam m operationibus externis.
Resp. Dist. Ant. Deus est principium necessariô fœcun-
dum in operc.tionibus internis ; conc. ant. In operationibus
externis ; subdist. ant. Eo sensu quod habeat ex naturâ
suâ potentiam exteriùs operandi ; conc. ant. Eo sensu quod
ex naturâ suâ exteriùs necessariô operetur ; ncg. ant. et
consqam. Solutio patet ex dictis.
Inst. 2o. Perfectius est actu exteriùs operari, quàm
habere potentiam exteriùs operandi ; ergo ens necessariô
potentiâ fœcundum, est ens actu necessariô fœcundum.
METAPIIYSICA. 193
Ëesp. Dist. Ant. Quando actus perficit potentiam ; conc.
ant. Quando actus potentiam perficere non potest; neg.
ant. Porrô evidens est creationem actualem non esse
perfectiorem potentiâ creandi. Ens enim necessarium in
se et à se habet quidquid est perfectionis.
Obj. 2o. Deus necessario seipsum amat, ideôque neces-
sariô amat gloriam suam. Ergo necessario fuit determina-
tus ad creandum mundum per quem illa gloria amplificatur.
138. Resp. Neg. consqara. Duplex in Deo distinguenda
est gloria, essentialis una et interna, accidentalis altéra
et externa. Prior est ipsamet Dei perfectio et excellentia
quas Deus in se videt et amat : posterior sita est in divino-
rum attributorum manifestatione et laudibus quas ipsi
retribuunt rationales creaturae: atqui neque gloria interna
neque gloria externa necessario Deum determinare potuerunt
ad creandum. Non interna; non pendet enim à creaturis :
non externa, siquidem Deura née beatiorem nec perfectio-
rem reddere potest. Ergo. . . . &c.
Obj. 3o. Deus ab seterno fuit determinatus ad agendum
vel ad non agendum. Ergo non est liber.
139. Resp. Dist. Ant. Deus ab œterno. . . . determina-
tione libéra et consequenti, quae profluebat ab ipso libertatis
exercitio ; conc. ant. Determinatione necessariâ et antece-
denti libertatis exercitio ; neg. ant. et consqam. Haec enim
determinatio evenisset vel à causa interna, vel à causa
externa ; atqui neutrum dici potest (136). Ergo. . . , &c.
Proposîtio tertia.
140. Deus in suis determinationibus immutabilis est.
Prob. Qui enim ab seterno tulit omnia sua décréta, nec
ea revocare potest, immutabilis est ; atqui Deus ab seterno
tulit omnia sua décréta (137), neque jàm posita revocare
potest. Ea enim revocaret vel ob novam causam ea revo-
candi, vel sine causa. Prius esset impotentise vel ignorantiae
signum ; posterius verô levitatis et inconstantise. Ergo
.... &c.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. lo. Deum paenituit creavisse hominem, Gènes,
cap. 6. ver. 6. Ergo Deus non est immutabilis.
141. Resp. Dist. Ant. Deum creavisse hominem pœ-
nituit metaphoricè ; conc. ant. Propriè et stricte ; neg. ant.
N
194 / METAPHYSICA.
Legiiur quidem in scripturâ Deum pœnituisse creavisse
mundum : sed hœc aliaque similia scripturae verba sensu
metaphorico intelligenda sunt; ut enim captui nostro valdè
imperfecto sese accommodet scripturâ, figuratis utiturlocq-
tionibus ad exprimendas Dei perfectiones et externas ope-
rationes : sic oculos ei tribuit ad pingendam infinitam ejus
scientiam, brachia ad significandam illius fortitudininena
et omnipotentiam, loquitur de ipsius dexterâ, de sede, de
tabernaculo, quamvis dexteram non habeat, sedere aut in
tabernaculo habitare nequeat. Sic pariter per raeta-
phoram tribuit illi iram, dolorem, pœnitentiam, quia di-
vinse ejus operationes quamdam similitudinem habe-
re videntur cum actibus hominum his animas sensibus afFec-
torum. Ergo. . . . &c.
Obj. 2o. Deus mutavit decretum mortis Ezechiœ, IV,
Regum, cap. 20, et subversionis Ninivitarum, Jonse, cap. 3.
Ergo mutare potest sua décréta.
142. Resp. Neg. ant. Deus enim absolutè non decreve-
rat mortem Ezecliiae nec Ninivitarum subversionem, sed
duntaxat conditionatè, nisi Ezechias vitam ab eo enixè
postularet, et pœnitentiam egissent Ninivitse. Cùm autem
ab aeterno praevidisset deprecationem Ezechiœ et pœniten-
tiam Ninivitarum, absolutè ab œterno decreverat Ezechias
sanationem et Ninivitarum veniam. Ergo nedùm mutaverit
Deus décréta sua, absolutè executus est.
Obj. 3o. Deus eumdem hominem modo amat justum,
modo peccatorem odit. Ergo Deus mutatur.
Resp. Neg. consqam. Nam ab aeterno Deus amat ho-
minem quatenùs justum, et ab aeterno eum odit quatenùs
injustum : undè si idem homo sit modo justus et modo in-
justus,ab œterno Deus eum dilexit in ordine ad justitiam,et
odio habuit in ordine ad peccatum: tota igitur mutatio est
in homine et non in Deo. Ergo. . . . &c.
Obj. 4o. Deus de non créante factus est creans. Ergo
mutatur.
Resp. Dist. Ant. Deus de non créante factus est creans,
decreto quod ab œterno tulit, conc. ant. ; novo decreto,
neg. ant. Solutio patet ex dictis (137).
Inst. lo. Tune Deus factus est creans quandô creaturae
cœperunt existere. Ergo de non créante reipsâ factus est
preans.
METAPHYSICA. 105
Resp. Neg. ant. Tune enim Deus factus est creans,
quando tulit decretum ereandi ; atqui ab œterno tulit de-
cretum ereandi : ergo. . . . &c.
Inst. 2o. Ibi nullus est ereator, ubi nullse sunt creaturac :
ergo tune Deus factus est creans, quando creaturee cœpe-
runt existere.
143. Resp. Dist. Ant. Ibi nullus est ereator, ubi nullae
sunt ereaturœ aut existentes aut exstiturre, conc. ant ; ubi
nuUtfi sunt creaturaî existentes, neg. ant. Nam ibi est
ereator, ubi est actio per quam creaturte vel existunt vel sunt
exstiturse : atqui, quamvis actu nullee sint creaturcc existen-
tes, potest esse actio per quam exstituree sunt in tempore ;
et baec actio ab œterno est, siquidem nihil aliud est
quàm decretum efficax de creaturarum existentiâ, quod de-
cretum ab œterno est ( 137 ). Rêvera Deus, quando L,.
adsunt creatui^ existentes, accipit novam denominatio-
nem ; at hœc denominatio non est absoluta, qualis est
denominatio honi^ sancti, &c., sed duntaxat relativa et
Deo extrinseca : atqui denominatio extrinseca et relativa
nihil intrinsecum Deo conferre potest, quod anteà non ha-
buerit Deus, sed tantùra aliquid extrinsecum, relationem
scilicet ad creaturas, quam acquisivit in tempore.
Obj. 5o. Immutabilitas et libertas in Deo concordari ne-
queunt. Ergo vel Deus liber non est, vel non est immutabilis.
144. Resp, Neg. ant. Ut enim ens aliquod rêvera sit
liberum, sufficit ut possit agere vel non agere ad nutum
suum, in bis quae sunt possibilia ; sed non requiritur ut effi-
cere possit quid impossibile. Ergo si mutabilitas in Deo est
impossibilis, concludi non poterit Deum non esse liberum,
ex eo quod sit immutabilis. Atqui reverà mutabilitas de
quâ hic agitur in Deo est impossibilis. Hazc enim mutabi-
litas esset transitio ab unâ volilione ad aliam. Atqui talis
transitio in Deo est impossibilis. Omnis enim determinatio
in Deo est ab seterno (137). Ergo ut Deus transiret ab unâ
volitione ad aliam, oporteret ut ad banc volitionem ab œter-
no determinatus fuisset : atqui istud dici nequit, cùm alia
determinatio anterior exstitisset, ea scilicet à quâ discede-
ret. Et verô, Deus non posset transire ab unâ volitione ad
aliam, quin argueretur impotentiœ, vel levitatis, vel igno-
rantiee. Ergo omnis mutabilitas in Deo est impossibilis.
Ergo,. . ,&c.
N 2
196 METAPHYSICA.
Praetereà, libertas et immutabilitas sunt perfectiones Deo
essentiales. Ergo quamvis percipere non possemus quo-
modô concilientur istae perfectiones divinse, non minus
certum esset inter illas nullam esse repugnantiam.
Inst.lo. Ens immutabile non potest aliquid de novo velle :
atqui ens liberum potest aliquid de novo velle. Ergo ens
liberum non est immutabile.
145. Resp. Neg. min. De essentiâ libertatis perfectse
non est posse aliquid de novo velle : ratio enim cur aliquid
de novo volumus supponit aut impotentiam, aut levitatem,
aut ignorantiam, idque imperfectionem sonat. Ergo, cùm
Deus sit summè perfectus, non potest mutare quod ab
œterno voluit ; seu, quod idem est, non potest aliquid de
novo velle.
Inst. 2o. Tam potest Deus de novo aliquid velle, quàm
potuisset ab aeterno noluisse, quod ab aeterno voluit. Atqui
ab aeterno Deus noluisse potuisset, quod ab aeterno voluit.
Ergo .... &c.
146. Resp. Neg. maj. et parit. Potuisset enim ab aeterno
noluisse quod ab aeterno voluit, quin argueretur impotentise,
aut levitatis, aut ignorantiae, quia tune in eo nuUa esset
mutatio ; nunc verô determinationem ab aeterno sumptam
mutare non posset; quin alicujus imperfectionis argueretur :
ergo nulla est paritas.
Inst. 3o. Deus nunc non minus liber est circa creaturas,
quàm fuit ab aeterno. Ergo si ab aeterno potuit noluisse
quod ab aeterno voluit, et nunc potest.
147. Resp. Neg. consqam. Cùm enim Deus ab aeterno
suara exercuerit libertatem, si nunc nollet quod ab aeterno
voluit, in ipso foret aut impotentia, aut levitas, aut igno-
rantia.
Inst. 4o. Deus nunc necessitatur. Ergo non est liber.
148. Resp. Dist. Ant. Deus nunc necessitatur necessi-
tate consequenii, quse supponit libertatis exercitium ab
aeterno ; conc. ant. Necessitate antecedenti, quse non sup-
ponit libertatis exercitium ab aeterno ; neg. ant. Reverà
necessariô Deus ab aeterno determinari debuit ; at non
ideô concludi potest illum tali vel tali modo debuisse deter-
minari, ut patet ex dictis.
METAPHYSIGA. 197
II. DE ATTRIBUTIS DEI RELATIVIS.
149. Attributa Dei relativa sunt ea quse exprimunt rela-
tionem creatoris ad creaturas aut possibiles, aut existentes,
aut exstituras. Tria recenser! soient, Scientia, Omnipotentia,
et Providentia ; Deus enira suâ scientia creaturas omnes
videt, omnipotentiâ producit, providentia régit et con-
servât.
1 . De Scientia Dei.
150. Scientia Dei est actus quo Deus simul omnia per-
fectè intelligit, pénétrât et novit. Dividitur, pro diverse
respectu sub quo consideratur, in scientiam simplicis intelli-
gentiœ et in scientiam visionis.
151 . Scientia simplicis intelligentiœ ea est, quâ Deus cog-
noscit res omnes possibiles, quœ nec exstiterunt, nec exis-
tunt, nec exstiturae sunt. Scientia visionis ea est quâ Deus
novit res existentes, sive actu existant, sive exstiterint,
sive exstiturse sint.
152. Plurimi huicgemince scientiae tertiam addunt quam
mediam seu scientiam conditionatorum vocant. Hœc aulem
média scientia ea est quâ Deus cognoscit res quîe non eve-
nient, sed quse tamen evenirent, si queedam poneretur con-
ditio. Talis est scientia quâ Deus novit Tyriorum et Sido-
niorum conversionem, si vidissent opéra Christi, Matth.
cap. 11. ver. 21. Sed hsec scientia estne distincta à sci-
entia simplicis intelligentiœ, et à scientia visionis ? Haec
qusestio sat inutilis est.
153. Certum est lo. Deum infinitâ scientia donari, alio-
quin ens perfectius excogitari posset; hinc Deus cognoscit
quidquid est cognoscibile et intelligibile.
154. Certum est 2o. Deum perfectissimè et infinité seip-
sum cognoscere et omnia sua infinitâ attributa ; alioquin
infinitâ perfectione careret.
155. Certum est 3o. omnia entia possibilia à Deo
cognosci ; non enim sunt possibilia, nisi quia possunt à Deo
creari ; porro Deus cognoscere débet quidquid creare potest.
156. Certum est 4o. Deum cognoscere omnia praesentia
et prœterita et etiam cordium cogitationes ; scientia enim
perfectissimâ donatur et cognoscit quidquid est cognoscibile
et intelligibile (153). Atqui praesentia et prseterita, sive
sint bona, sive sint mala, et occultas etiam cordis cogitatio
nés, sunt cognoscibilia et intelligibilia. Ergo. . . . &c.
198 METAPHYSICA.
157. Certum est 5o. Deum cognoscere omnia futura*
Hsec auteni futura duplicis sunt generis. lo. Futura neces-
saria, quee pendent à causis necessariis et physicis ; v. g.,
siderum motus, tempestates, pluvia, tonitrua, &c. De iis
nulla est controversia ; evidens est enim Deum illa cognos-
cere, cùm habeant veritatem determinatam. 2o. Futura
libéra et contingentia, quse pendent à libéra hominum vo-
luntate. Futura hsec aliquando pendent à conditione,
tuncque vocantur futura conditionata. Si conditio sit po-
nenda, transeunt in absolutè futura. Si autem conditio
nunquàm sit ponenda, dicuntur simpliciter conditionata.
Propositio prima.
158. Deus novit omnia absolutè futura libéra et contin-
gentia.
Prob. lo. Deus enim est ens quo perfectius excogitari
non potest ; atqui si Deus non cognosceret omnia. . . . &c.,
aliud ens perfectius excogitari posset ; ens scilicet quod eu
cognosceret. Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Deus cognoscit quidquid est intelligibile et
cognoscibile (153). Atqui veritas futurorum liberorum et
contingentium est intelligibilis et cognoscibilis : circa ea
enim fieri possunt propositiones contradictorise ; atqui ex
duabus propositionibus contradictoriis una est neces.sariô
vera et altéra necessariô falsa. Ergo. . . . &c,
Prob. 3o. Deus est immutabilis (140) ; ergo nulla potest
ei accedere nova cognitio. Atqui si Deus non cognosceret
ab aeterno futuras hominum actiones, tune ei nova acce-
deret cognitio, quandô scilicet istse actiones essent prae-
sentes. Ergo. . . . &c.
Propositio secunda.
159. Deus infallibiliter cognoscit futura conditionata,
etiam ea quorum conditio nunquàm est ponenda.
Prob. Deus enim, cùm sit summè intelligens, debuit
cognoscere quid consecuturum sit ex tali, talive ordiiie ;
quid acturi sint homines tali, talive auxilio adjuti, alioquin
cseco modo egisset, hune praesentem mundum eligendo ;
atqui istud est preecisè cognoscere futura conditionata, et
ea quorum conditio nunquàm est ponenda. Ergo &c.
Et vero, homines per conjecturam aliquando praevidere
possunt futura conditionata et ea etiam quorum conditio
METAPHYSICA. 199
nunquàni est ponenda. Ergo à fortiori Deus, cujus scien-
tia et intelligentia sunt infinita, ea infallibiliter cognoscere
potest et débet, preesertim cùm omnia, sive prœterita, sive
futura, coram ipso sint prsesentia.
Praetereà si Deus non cognosceret haec conditionata, ali-
quod ens ipso perfectius excogitari posset, illud scilicet quod
ea cognosceret.
Solvuntur objectîones.
Obj. lo. Preescientia Dei perimit libertatem homihis.
Ergo Deo non est tribuenda.
160. Resp. Neg. ant. Deus enim presnoscit res futuras
eo modo quo futurse sunt ; id est, ut libéras, si futuree sint
liberae ; ut necessarias, si futuras sint necessariae. Ergo non
ideô futurse sunt, quia eas prsevidit Deus ; sed ideo eas
praevidit, quia futurse sunt. Ergo praescientia Dei suppo-
nit et non perimit libertatem hominis.
Et verô, omnia sunt Deo prsesentia. Ergo Deus videt
futura, ut nos videmus praesentia. Atqui ea quee à nobis '
videntur prsesentia, non minus libéré eveniunt quàm si non
viderentur ; quia visio nostra supponit res ut sunt, nec in
illas influit. Ergo à pari, quse à Deo preevidentur non
ideo eveniunt necessario. Quod sic evolvit D. Le Franc de
Pompignan, Archiepiscopus Viennensis, in opère cui titu-
lus : L'Incrédulité convaincue par les prophéties. " La
*' nécessité qui résulte de la prévision de Dieu n'est pas
'* ennemie du libre arbitre ; parce que, s'il est vrai que
*' l'homme fera infailliblement ce que Dieu a prévu, ce n'est
*' pas précisément à cause que Dieu l'a prévu ainsi ; mais
" au contraire, Dieu ne l'a prévu qu'à cause que l'homme
" devait agir ainsi de son propre mouvement et de sa pro-
** pre liberté. En sorte que la prescience divine, quoique
" antérieure dans l'ordre des tems, selon notre manière de
*' concevoir, à l'action de l'homme, n'en détermine pas
" néanmoins l'existence, mais plutôt la suppose future :
" semblable à la présence d'un homme qui, témoin oculaire
" d'une action, ne peut se tromper dans ce qu'il voit de
*' ses propres yeux, sans que sa présence soit cause de ce
" qui se fait devant lui : il n'est pas possible que ce qu'il
" voit ne se fasse réellement ; mais l'auteur de l'action agit
** avec une entière liberté, et il pouvait faire, en agissant
•* autrement, que le témoin qui le regarde vît une action
200 METAPHYSICA.
" toute différente. C'est absolument ainsi qu'il est impos-
" sible que Dieu se trompe dans sa prescience, et que ce
" qu'il a prévu, ou plutôt ce qu'il voit maintenant, car
" toute l'éternité lui est actuellement présente, n'arrive
" point ; mais cette prévision, ou plutôt cette vision actu-
" elle, n'influe en rien sur le choix volontaire et libre de la
*' créature ; et si celle-ci, comme il dépendait d'elle, avait
" fait un autre choix, la prévision de Dieu eût eu lieu
" également, mais n'aurait pas eu le même objet."
Inst. lo. Res prsevisa est necessaria. Ergo prœscientia
Dei perimit libertatem hominis.
Resp. lo. Retorq. arg. Res visa est necessaria. Ergo
Visio perimit libertatem.
Resp. 2o. Neg. ant. Non magis necessaria est actio
prsevisa, quàm actio visa ; prœvisio enira supponit rem fu-
turam, et non facit ; sicut visio supponit et non facit rem
prsesentem.
Inst. 2o. Illud est necessarium, quod est certô futurum ;
atqui actio prsevisa est certô futura. Ergo. . . . &c.
161. Resp. lo. Retorq. arg. Illud est necessarium,
quod est certô prsesens ; atqui actio visa est certô praesens.
Ergo &c.
Resp. 2o. Neg. maj. Actio prsevisa est infallibiliter
futura, sed non est necessarïb futura ; quemadmodùm actio
visa est infallibiliter prœsens, non autem necessarïb prsesens.
Illud est infallibiliter futurum aut prsesens ad quod libéré
sese determinatura est, aut sese déterminât mens humana ;
illud autem esset necessarïb futurum aut prsesens ad quod
ità sese determinatura esset, aut sese determinaret mens
humana, ut non posset abstinere ab hâc determinatione.
Atqui haec duo plané sunt di versa. Ergo quod est certô
futurum, non est ideô necessariô futurum.
Inst. 3o. Illud est necessarium quod non potest non
evenire : atqui res prsevisa non potest non evenire. Ergo
res prœvisa est necessaria.
162. Resp. lo. Retorq. arg. Illud est necessarium quod
non potest non esse : atqui res visa non potest non esse.
Ergo res visa est necessaria,
Resp. 2o. Neg. min. Res prsevisa non carebit eventu,
sed non ideô non potuisset carere eventu ; eveniet quidem,
sed ità eveniet, ut potuisset non evenire. Si qusedam
METAPHYSICA. 201
igitur est nécessitas, consequens est, non autem antecedens, et
consequenter non destruit libertatem hominis.
Inst. 4o. Si res prœvisa posset non evenire, posset falli
praescientia Dei. Falsum consequens ; ergo et antecedens.
Resp. lo. Retorq. arg. Si res visa posset non esse,
posset falli visio. Falsum consequens ; ergo et antecedens.
Resp. 2o. Neg. maj. Nam Deus ità praevidet rem libère
futuram, ut simul videat illam posse non evenire ; quem-
admodùm qui videt hominem libéré sedentem, simul
videt illum posse non sedere.
Inst. 00. Si res prsevisa non eveniret, falleretur praî-
scientia Dei. Ergo si res prsevisa posset non evenire,
posset falli prsescientia Dei.
163. Resp. lo. Retorq. arg. Si res visa non esset,
falleretur visio ; ergo si res visa posset non esse, posset
falli visio.
Resp. 2o. Neg. consqam. Ideô falleretur praescientia
Dei, si res prsevisa non eveniret, quia conformis non esset
objecto suo ; at quamvis res prsevisa possit non evenire,
non ideô prsescientia Dei non esset conformis objecto suo,
quod ità eventurum est, ut possit non evenire.
Inst. 6o. Si res praevisa possit non evenire, supponi
potest non eventura : atqui in hâc hypothesi falleretur
prsescientia Dei. Ergo. . . . &c.
164. Resp. lo. Retorq. arg. Si res visa possit non esse,
supponi potest non esse ; atqui in hâc hypothesi falleretur
visio : ergo. . . . &c.
Resp. 2o. Neg. raaj. Fieri non debent suppositiones
contradictoriae ; atqui si res prsevisa supponeretur non
eventura, duae fièrent suppositiones contradictoriœ : ideô
enim actio prsevidetur, quia eventura est ; ergo supponi
non potest non eventura, quin adsit contradictio.
Inst. 7o. Posito possibili in actu, nil sequitur absurdi.
Ergo si res prsevisa potuisset non evenire, supponi potest
non eventura.
165. Resp. lo. Retorq. arg. Posito possibili in actu,
nil sequitur absurdi. Ergo si res visa potuisset non esse,
supponi potest non esse.
Resp. 2o. Dist. Ant. Si non prœcesserit opposita hypo-
thesis ; conc. ant. Si prsecesserit ; neg. ant. Itaque, cùm
duae hypothèses contrariœ admitti nequeant, si jàm admis-
202 METAPHYSICA.
sum sit actum fuisse praevisum ut futurum, jàm supponi
non potest illum reverà non eventurum, seu futurum non
esse, quamvis reipsâ potuisset non evenire. Sic, v. g ,
possibile est Petrum non ambulare ; at supposito quôd
deambulaturus sit, jàm supponi non potest illum non esse
deambulaturum ; ergo. . . . &c.
Obj. 2o. Actus prœvisus jàm non est liber quandô fit.
Ergo Dei praevisio perimit libertatem.
166. Resp. Neg. ant. Actus enim praevisus idem est
ac si praevisus non fuisset, siquidem in illum nullateniis
influit Dei praevisio (160); atqui fuisset liber, si praevisus
non fuisset. Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Actus, quandô fit, necesssariam habet connexi-
onem cum antecedenti Dei praescientiâ. Ergo jàm non
est liber.
Resp. Dist. Ant. Sed Dei prœvisio supponit liberam
hominis deterrainationem ; conc. ant. Hanc liberam de-
terminationem non supponit ; neg. ant. et consqam. Ideô
enim Deus praevidit hune actum, quia homo ad illum sese
libéré determinaturus erat (160).
Inst. 2o. Praescientiâ antecedit liberam voluntatis deter-
minationem : ergo eam non supponit.
Resp. Dist. Ant- PrcEScientia prœsentem voluntatis de-
terminationem antecedit ; conc. ant. Futwam ; neg. ant.
Solutio patet ex dictis.
Obj. 3o. Si actio pra3visa sit infallibiliter futura, frustra-
neum est ut operemur salutem per curas, sollicitudines et
bona opéra. Faisum consequens ; ergo et antecedens.
167. Resp. Neg. sequelam majoris. Deus non tantùm
res futuras prœvidet, sed et earum causas et conditiones.
Atqui salutis causae et conditiones sunt curse, sollicitudines
et bona opéra. Ergo si Deus prasviderit aliquem salvandum
esse, pariter praevidit ejus curas, sollicitudines et bona
opéra. Ergo frustraneum non est. . . , &c.
Inst. Atqui frustraneum est ut. . . . &c. Sic enim quisque
ratiocinari potest et débet : vel Deus praevidit me salvan-
dum, vel damnandum fore: si prius quidquid egero sive
bonum, sive malum, salvus ero ; si posterius, quidquid
egero, damnabor. Ergo. . . . &c.
168. Resp. lo. Retorq. arg. Vel Deus praevidit me famé
moriturum, vel non ; si prius, sive manducem, sive non,
METAPHYSICA. 203
famé moriar : si posteiius, etiamsi non manducem, famé
non moriar. Porro quid absurdius ?
Resp. 2o. Dist. Ant. Deus pr^vidit me salvandum vel
damnandum fore, propter bona aut mala opéra mea libéra ;
conc. ant. Independenter à bonis vel malis meis operibus
liberis; neg. ant. Deus enim non nisi per bona opéra
obtinendam esse salutem aeternam prœordinavit : quœ si
fiant, Deus obtinendam salutem prsevidet ; si verô non
fiant, pariter prsevidet damnationem eeternam ; et hsec Dei
prsevisio supponit et non perimit libertatem hominis (160).
Standum est igitur huic B. Pétri monito: " satagite, ut per
** bona opéra certam vestram vocationem et electionem
** faciatis." II. Epist. cap. 1. ver. 10.
2. De Omnipotentiâ Dei.
Propositio.
169. Deus est omnipotens.
Prob. Ille est omnipotens qui potest efficere quidquid est
possibile. Atqui Deus potest. . . . &c. Si enim res aliqua
possibilis à Deo effici non posset, res ista possibilis esset
simul et impossibilis. lo. Esset possibilis, ex hypothesi;
2o. impossibilis, solâ enim Dei omnipotentiâ existere potest.
Ergo. . . . &c. Et vero Deus possidet omnes perfectiones
(117). Atqui omnipotentiâ est perfectio. Ergo. . . . &c.
3. De Providentiâ Dei.
170. Providentiâ est actus quo Deus res creatas régit,
moderatur et ad finem debitum dirigit. Providentiara
negaverunt lo. Epicurei qui, Deos otiosos admittentes,
omnia casu fortuito régi putant. 2o. Stoici qui, inducentes
ferream necessitatem ex siderum motu ortam, qudiTn. fatum
appellant, nuUum Providentiae locum relinquunt, ciim ipsi-
met Dii huic ineluctabili fato subjiciantur. 3o. Deistse
plurimi, Deum sublimiorem et prœstantiorem esse affir-
mantes, qui rébus humanis provideat. 4o. Nonnulli Pseudo-
Philosophi qui ideô providentiam negant, quia in hoc
mundo adsunt mala tùm naturœ, iùm pœnce, tùm culpœ.
171. Mala naturœ seu metaphjsica sunt creaturarum ira-
perfectiones, seu potiùs, sunt limitatae creaturarum perfec-
tiones. Istius generis mala non nisi abusive mala vocan-
tur ; sunt enim duntaxat bona minora relative ad alia
majora.
204 METAPHYSICA.
1 72. Mala pœnœ seu physica sunt deordinationes quœdam
quse in orbe physico vel spirituali deprehenduntur ; v. g.,
corporum corruptio, mors animalium, sensus molesti,
tegrotationes, dolores, errores hominum et cupiditates, &c.
1 73. Malum culpce, quod etiara malum morale seu pecca-
tum vocatur, est transgressio legum quas Deus prsescripsit
creaturis intelligentibus et liberis,
Nunc quaestio est lo. an Deus sit summè providus ;
2o. an Deus summè providus potuerit permittere mala
tùm nahirœ, tùm pœnœ, tùm culpœ.
Proposîtio prima.
1 74. Deus singulis et omnibus rébus etiam minutissimis
sunimoperè providet.
Prob. lo. Deus necessariô amat perfectiones suas : ergo
non potest mundum, qui impressum harum perfectionum
gerit characterem, à se alienum rejicere. Atqui si Deus
mundum semel creatura nullatenùs gubernaret, sed fortuite
casui, vel fatali necessitati relinqueret, jàm illum à se alie-
num rejiceret. Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Deus est summè bonus et summè sapiens, est
enim summè perfectus ; ergo in hypothesi quôd creaverit,
quœrere débet felicitatem creaturarum su arum, vel, si crea-
turse non sint felicitatis capaces, média idonea ut pervenire
possint ad fines ad quos illas destinavit ; aliter enim nedùm
esset bonus et sapiens, crudelis et insipiens foret sic dere-
linquendo et quasi contemnendo suum proprium opus.
Atqui si Deus omnibus et singulis rebus,et etiam minutissi-
mis non provideret, non quœreret felicitatem creaturarum
suarum, nec média idonea ut pervenire possint ad fines
proprios ad quos illas destinavit, siquidem eas vel casui
fortuito, vel fatali necessitati committeret. Ergo non esset
summè bonus nec summè sapiens. Ergo. . . . &c.
Prob. 3o. Si Deus omnibus et etiam minutissimis non
provideret, vel quia non posset, vel quia noUet : atqui neu-
trum dici potest. Non prius ; quia est omnipotens. Non
posterius ; si enim omnibus rébus providere nollet, maxi-
me quia tanta cura ipsi fastidiosa, gravis vel indecora esset,
ut quidam volunt Deistee : atqui istud admitti nequit ; ciim
enim Deus sit infinitus, unico simplicissimo actu suse vo-
luntatis omnibus simul providet, magnis et parvis, nec
METAPHYSICA. 205
magis divinam ipsius majestatem dedecet omnia sic regere,
quàm omnia creavisse. Ergo. . . . &c.
Et verô, Deus est summè perfectus ; atqui providentia
est perfectio. Ergo Deus est summè providus.
Preetereà.quis conspiciens naves super fluctus maris navi-
gantes et à portu ad portum tendentes, sibi persua-
dere poterit eas casu merè fortuito sic constanter im-
pelli ? Nonne ex earuni directione tam evidenter con-
cludet ibi adesse rectorem, quàm ex earumdem compa-
gine inferet adfuisse opificem qui eas construxerit ? Atqui
perfectus et mirabilis ordo, ubiquè relucens in mundo,
multô clariùs ostendit prœpotentem et sapientissimam ibi
adesse causam quœ omnia disponat, regat ac gubernet.
Ergo. . . . &c.
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Si Deus minutissima quseque curaret, suam
majestatem deprimeret, sicut et regum majestas viles-
ceret, si ad vilissima quaeque rex aliquis descenderet. Ergo
• • • • OcC*
175. Resp. Neg. ant. Si creando vilissima quœque non
viluit Dei majestas, cur vilesceret conservando et curando ?
Ideô regum majestas deprimitur, quia si mens finita liis
minutissimis curis distrahitur, jàm curarum majoris mo-
menti incapax est. Sed ità non est de Deo ; utpotè enim
infinitus, omnia unico intuitu comprehendit et curât. Ergo
nulla est paritas.
Obj. 2o. Si omnibus provideret Deus, nihil esset fortui-
tum in mundo. Atqui tamen multa sunt in mundo fortu-
ita. Ergo. . . .&c.
176. Resp. Dist. Min. Multa sunt fortuita in mundo,
respectu nostrî ; conc. min. In se, vel respectu Dei ; neg.
min. Illud dicitur fortuitum quod prœter expectationem
nostram accidit in mundo, quia causam illius ignoramus :
at nihil omnino praeter Dei expectationem contingit, cùm
ipsum nihil lateat': nihil fit sine causa ; ergo rêvera nihil
potest esse fortuitum in se aut respectu Dei.
Obj. 3o. Si omnes hominum actus providentiee subjace-
rent, jàm actum esset de humanâ voluntate.
177. Resp. Deus qui est infinité sapiens et potens at-
tingit omnes fines et gubernat omnia secundùm ciijiisque
naturam ; atqui hsec est hommum natura ut libcrè agant.
206 METAPHYSICA.
Ergo providentia nullam hominum actibus imponit neces-
sitatem.
Obj. 4o. Justa administratio postulat ut prsemia etpœnse
dividantur pro meritis ; atqui in hoc mundo boni ssepè
aerumnis conficiuntur, dùm impiis afflat fortuna. Ergo
. . . . &c.
178. Resp. Dist. Maj. Justa administratio postulat ut in
statu finali praemia et pœnee sequaliter tribuantur ; conc.
maj. Idem postulat in statu probationis et militiaî ; neg.
maj. Porrô heec vita est militia quae ad beatiorem vitam
ducere débet. Ideôque Deus improbos in hâc vitâ patien-
ter suffert, quia eos in altéra vitâ gravissimis pœnis afFec-
turus est. Probis autem et justis pollicetur et servat ampla
prsemia, quorum condignœ non sunt passiones hujus tem-
poris. Sed hsec prsemia mereri debemus per multas tri-
bulationes et labores. Teneturne Deus remunerationem
ante meritum dare ? Nùm palma ante victoriam conce-
ditur, prœmium ante certamen, merces ante laborem ?
Propositio secunda.
179. Sub Deo summè provido potest et débet esse ma-
lum naturse.
Prob. Ut enim sub Deo summè provido possit et debeat
. \^ esse malum naturœ, sufficit lo. si Deus non teneatur
'U creaturis suis omnem perfectionem dare; 2o. si singulis
y. creaturis non teneatur sequales dare perfectiones ; atqui hoc
y ; utrumque est certum.
^ lo. Quidem Deus non tenetur. . . . &c., cùm id repugnet.
\J Omnis enim creatura est finita. Ergo est imperfecta et
^ necessariô limitatur in suis perfectionibus. Ergo aut Deus
V^' creare non potuit, aut ab eo imperfectas creaturas produci
necesse fuit. Atqui si creaturas imperfectas producere
■^ Deo indignum non fuit, prorsùs ab eo pendet major vel
^ minor perfectionum gradus. Ergo lo. Deus non tenetur
:r &c.
. î 2o. Deus non tenetur œquales singulis creaturis dare
\ perfectiones. Ad id enim non tenetur Deus, quo posito de-
.^^ strueretur ejus omnipotentia. Atqui posito quôd Deus
\ teneatur. . . . &c., destrueretur ejus omnipotentia ; tune
enim Deus inferiores creaturas sive intelligentes, sive senti-
entes, sive merè physicas producere non posset ; atqui ta-
METAPHYSICA. 207
men essent possibiles. Ergo 2o. , . . &c. Aliundè. . . . &c.
Ergo. . . . &c. " L'on se fait une fausse notion de l'infini,
*' inquit D.Bergier, quand on suppose que Dieu, parce qu'il
*' est tout-puissant, doit faire tout le bien qu'il peut : cela
** est impossible, puisqu'il en peut faire à l'infini. Cette
" supposition renferme une contradiction, puisque c'en est
" une de vouloir que Dieu tout-puissant ne puisse pas
" faire mieux. Ici revient encore la comparaison fausse
** entre la puissance de Dieu et la puissance humaine.
" L'homme doit faire tout le bien, ou le mieux qu'il peut,
** parce que son pouvoir est borné ; il n'en est pas de
*' même à l'égard de Dieu, parce que son pouvoir est infini."
Dictionnaire de Théologie, article Providence.
Propositio tertia.
180. Sub Deo summè provido potest esse malum
j:iœnee.
Prob. Nam mala pœnse sunt mors, œgrotationes, dolo-
res et aliœ miseri[E ; atqui haec omnia stare possunt sub
Deo summè provido ; lo. quia sunt pœnse peccati ; 2o.
quia sunt appendices naturse humanse, quee essentialiter est
imperfecta (179) ; 3o. quia sunt admonitiones periculorum
imminentium vitse, cujus conservationi invigilaredebemus ;
4o. quia sunt média quibus à terrenis avocamur, et ad aeter-
na dirigimur ; .5o. quia utilia sunt ad probandam justorum
fidem et patientiam, ad excitandam in Deum fiduciam, ad
promovendam perversorum hominum conversionem, &c.
Ergo. . . . &c. " Les récompenses de ce monde, inquit D.
" Bergier, ne sont pas un prix suffisant pour une ame ver-
*' tueuse, immortelle de sa nature: il faut que la vertu soit
" éprouvée sur la terre pour mériter un bonheur éternel."
im.
Prœtereà, ssepè mala physica ex propriis culpis nostris
proveniunt : quot enim homines morbis affliguntur, dolori-
bus cruciantur, prsematurè fiunt paralytici, débiles, infirmi,
meditationis incapaces, multis deniquè replentur miseriis
propter intemperantiam, voluptates, aliosque hujusmodi
graves excessus ? Porro istius modi mala in Deum refundi
non debent. " Quand on a gâté sa constitution par une vie
*' déréglée, inquit civis Genevensis, on veut la rétablir par
" des remèdes. . . .On meurt de frayeur durant la vie, en
*' murmurant contre la nature des maux qu'on s'est faits
208 METAPHYSICA.
** à soi-même. Homme, ne cherche plus l'auteur du mal ;
" cet auteur, c'est toi-même." Emile, tom. 2. pag. 51.
Propositio quart a.
181. Deus summè providus permittere potest malum
culpae seu peccatum.
Prob. Peccatum enim est transgressio legum quas Deus
preescripsit creaturis intelUgentibus et liberis : atqui Deus
summè providus permittere potest hanc transgressionem ;
ad hoc enim satis est si Deus potuerit lo. creaturis intelU-
gentibus libertatem concedere ; 2o. illis intelligentiis liberis
leges prsescribere ; 3o. si Deus non teneatur istas in-
telligentias libéras impeccabiles reddere. Atqui hœc tria
certa sunt.
lo. Quidem Deus potuit creaturis intelligentibus conce-
dere libertatem. Libertas enim est facultas activa aliquid
agendi vel non agendi ad nutum suum, undè fluunt omnium
virtutum semina ; atqui hsec facultas est perfectio, siqui-
dem sine illâ nulla acquiri possunt mérita. Ergo lo. Deus
potuit eam concedere creaturis intelligentibus.
2o. Deus intelligentiis liberis quasdam leges praescribere
potuit. Deus enim est creaturarum suarum Dominus, et
principium bonorum omnium quse possident. Ergo ab eis
exigere potest obedientiam, reverentiam, amorem, gratitu-
dinem, &c. Ergo &c.
3o. Deus inteUigentias libéras non tenetur impeccabiles
reddere. Deus enim non tenetur eam suis creaturis conce-
dere facultatem, quse ex earum naturali conditione non
sequitur. Atqui impeccabilitas ex naturali intelligentia-
rum creatarum et liberarum conditione non sequitur ; imo
peccabilitas est sequela earum naturœ. Intel ligentice enim
libérée et creatse necessario sunt finitse et limitatae ; atqui
intelligentiœ libéras, finitge et limitatae eligere possunt inter
diversas bonorum species, inter licita et prohibita. Ergo
30....&C. Reverà Dei bonitatis est suis creaturis con-
ferre auxilia, rationes, motiva, média et gratias quibus po-
teuler à malo cohibeahtur et ad bonum invitentur : atqui
hœc omnia efficit Deus, et quidem abundanter. Ergo. . .
&;c. Aliundè. . . . &c. Ergo. . . . &c.
" Tel fut toujours, inquit D. Barruel, l'esprit de nos
" prétendus philosophes. Quelque évidentes que soient
'* leurs contradictions, ils ne les sentent pas. Quoi ! un
METAPHYSICA. 209
Dieu qui, mettant mon sort entre mes mains, me donne
tous les moyens nécessaires pour fuir le crime, et se con-
tente de ne pas me forcer, est un Dieu qui veut ce crime
et mon malheur ? Vous qui désirez, qui voulez la perte
de celui que vous haïssez, commencerez-vous donc par
lui donner la liberté de se sauver ou de se perdre ? Lui
laisserez-vous des secours dont il ne tient qu'à iui de pro-
fiter,qu'il ne tenait qu'à vous de lui ôter ? Si vous lui four-
nissez tous ces moyens, ne suis je pas plutôt autorisé à
croire que vous êtes bon à son égard ? La liberté que
Dieu vous a laissée serait plutôt une preuve de ses bontés
pour vous, que du désir que vous lui supposez, de vous
voir criminel et malheureux.
** Soyons exacts : la liberté par elle-même ne suppose
dans celui qui me la donne ni la volonté de me perdre,
ni la volonté de me sauver, mais uniquement celle de
laisser mon sort entre mes mains. S'il a quelque désir
plus positif en ma faveur ou contre moi, je ne puis en
juger que par la manière dont il secondera lui-même
cette faculté. S'il ne me porte ni au crime, ri à la
vertu ; s'il ne me presse ni pour mon bonheur, ni pour
mon malheur, je Je supposerai dans une vraie indiffé-
rence ; mais si, content de ne pas forcer ma liberté, il
me presse, il m'excite, il m'exhorte sans cesse à éviter le
crime ; s'il me donne des secours surabondans pour
faire mon bonheur, je ne douterai plus de son amour pour
moi et de ses bontés. Jugez sur cette règle, du Dieu
que vous avez blasphémé. S'est-il donc contenté de
vous abandonner dans le plus parfait équilibre pour le
bien et pour le mal ? Cette connaissance, antérieure à
votre crime et à votre malheur, l'a-t-elle empêché de
vous presser, de vous exhorter à éviter l'un et l'autre ?
Ne l'avez-vous pas entendu vous menacer de toute sa
colère, si vous ne répondiez pas à ses invitations ?
Après ce crime même, n'a-t-il pas éveillé dans votre cœur
la crainte, les remords et la frayeur, pour vous rappeler
à la vertu ? Dans ce Dieu irrité, n'avez-vous pas vu un
tendre père qui vous tendait la main pour vous relever ;
qui vous invitait au repentir ; qui ajoutait à ses bienfaits
passés, mille grâces nouvelles, dont la moindre aurait dû
vous suffire pour revenir à lui, et pour faire votre
o
210 METAPHYSICA.
*' bonheur par la vertu? Une connaissance qui ne mit
*' point d'obstacles de sa part à tant de bienfaits, ne
*' l'empêche donc pas de vous aimer. En vous donnant
'' la liberté, il n'a point cessé de vous appeler à la vertu et
" au bonheur, il n'a donc voulu ni votre crime, ni votre
" perte. Il n'a pas cessé d'être un Dieu bienfaisant ; il n'a
** donc pas cessé d'être un Dieu bon." Helviennes, tom.
3, pag. 32, &c. Hâc de re vide D. Frayssinous, Confé-
rence sur la Providence dans l'ordre moral, tom. 1. pag. 215,
238, &c.
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Deus ab œterno prœvidit libertatis abusum ;
ergo non potuit hominibus concedere libertatem, si est
summè bonus.
182. Resp. Neg. consqam. Deus enim summè bonus
non tenetur agere secundùm totam suam infinitam bonita-
tem, nec tenetur illam manifestare modo infinito (56, 179).
Non tenetur ergo creaturas suis omnibus donis possibilibus
cumulare, nec eas impeccabiles reddere, ut jàm vidimus.
Potuit ergo eis concedere libertatem quâ possent abuti, ac
etiam abuterentur. Nec id impedire debuit prsevisio illius
abusûs : non enim libertatem homini concessit Deus, quia
prsevidit illius abusum ; nec illâ abutitur homo quia abusus
ille à Deo praevidetur ( 1 60) . In hominis ergo facultate est
ut benè utatur libertate.
Libertas igitur bona est in se, bonâ intentione à Deo
concessa est ; per illam bona innumerabilia homo consequi
potest. Seipsum igitur solum accuset homo, si illâ abu-
tatur, non Deum qui hune abusum non intendit, sed è
contra prohibet, et à peccatis deterret adhortationibus,
prœceptis, minis, motibus internis, suppliciorum metu et
prsemiorum promissione. Deus igitur non tenetur mutare
prsesentem rerum ordinem, suis consiliis tam congruum, et
perfectum in se et relative ad totum, ob créatures malitiam,
et peccatum quod illa devitare potest, et certô devitaret, si
meliiis sibi consuleret.
Inst. lo. Vel Deus avertere potuit omne malum à
creaturâ, et noluit ; vel voluit, et non potuit : si prius, non.
est summè bonus ; si posterius, non est omnipotens.
183. Resp. lo. Deus non potuit avertere à creaturiss
METIPHYSICA. 211
mala naturse, quae nihil aliud sunt quàm Iimitata3 perfec-
tiones (171, 179), nec istud impedît quominùs sit omnipo-
tens : 2o. Deus potuisset, in alio rerum ordine, avertere
mala tùm pœnee, tùm culpae, et noluit in. praesenti rerum
ordine^etnon ideo desinit esse summè bonus (180,181,184).
Inst. 2o. Ente summè bono nihil melius concipi potest.
Atqui Creator impediens omne malum meiior concipi-
tur quàm creator permittens etiam minimum malum :
ergo, si creator est summè bonus, nuUum permittere
potest malum.
184. Resp. Dist. Maj. Ente summè bono nihil melius
concipi potest in se, conc. maj. ; in manifestatione externâ
suse bonitatis, neg. maj. Dist. pariter min. Creator
impediens. . . . &c., meiior est in manifestatione externâ suse
bonitatis quàm creator. . .&c., conc. min.; meiior est in se,
neg.min. Reverà creator benevolentior fuisset in manifesta-
tione externâ bonitatis suse, si concessisset creaturis majora
dona : sed non ideô secundùm totam potentiam et bonitatem
suam agere tenetur, nec etiam potest : tune enim creaturas
infinité perfectas efficeret, quod répugnât. Si autem secun-
dùm totam bonitatem suam agere non teneatur, in aliquo
gradu bonitatis sistere debuit : hune gradum ex solo
beneplacito suo déterminât, et, sive majorem, sive minorem
eligat, non minus bonus est et summè perfectus in se.
Ergo. . . . &c.
Inst. 3o. Inter creaturas alias sunt ità imperfectœ, ut
quasi neglectae videantur, dùm è contra ahae ejusdem
speciei videntur quodam modo perfectae : atqui tanta
discrepantia enti summè justo répugnât. Ergo. . . . &:c.
185. Resp. lo. Dist. lam. partem majoris. Istse crea-
turae nobis videntur quasi neglectae, quia earum finem
particularem ignoramus ; conc. Sunt realiter neglectée
in se, et nuUum habent finem particularem ; nesr. ob ratio-
nes allatas (53, 54, 55, 58).
Resp. 2o. Neg. min. Istse enim imperfectiones nihil
aliud sunt quàm finitse et limitatae perfectiones, quas Deus
creaturis suis impertiri potest pro beneplacito (179), quin
justitiam laedat.
Inst. 4o. Deus sequaliter diligere débet creaturas suas.
Ergo sequalia dona eis conferre débet.
J86. Resp. Nég. ant. Creaturas nihil omninè habent ex
o 2
212 METAPHYSICA.
seipsis. Deus igitur propria dona diligit in eis ; atqui pro
beneplacito dona sua creaturis impertitur. Ergo nihil
obstat quominùs Deus inaequaliter creaturas suas diligere
possit.
Inst, 5o. Quotidiè videmus cœcos, claudos, surdos,
gibbosos, insanos, fatuos, amentes: atqui omnes isti defectus
in creaturis intelligentibus, sub Deo summè bono, consistere
nequeunt. Ergo. . . . &c.
187. Resp. Neg. min. Deus enim nihil débet creaturis
intelligentibus prseter attributa essentialia, ipsisque pro
beneplacito favores suos distribuere potest, ut jàm pluries
probavimus. Insuper isti defectus non sunt mala in se,
sed relative tantùm ad perfectiores creaturas, et ex illis
multiplex bonum nasci potest.
Inst. 60. Non est apud Deum personarum acceptio ;
non est ergo cur huic homini potiùs quàm isti excrescat
gibbus, obsurdescant aures, obtenebrentur oculi, incrassetur
ratio.
188. Resp. Dist. Ant. Apud Deum non est personarum
acceptio, id est, Deus aliquem ob id non considérât, quia
majori vel minori apud homines favore potitur ; conc. ant.
Id est, Deus non potest quasdam creaturas largiùs quàm
alias beneficiis cumulare pro beneplacito ; neg. ant. (179).
'* La bonté de Dieu, inquit D.Duclot, ne consiste pointa
*' faire du bien à toutes ses créatures également et au même
*' degré, mais à leur en faire à toutes plus ou moins, selon
** la mesure qu'il juge à propos. Il n'est point de la
" sagesse divine de les conduire toutes par la même voie,
" par les mêmes moyens et de la même manière, mais de
" diversifier à l'infini les routes par lesquelles il les fait
** marcher vers le terme; sa justice n'est point restreinte à
*' leur départir à toutes des secours également abondans,
" mais à ne demander compte à chacune que de ce qu'il
" lui a donné.
** Dans tout cela, il n'y a point d'aveugle prédilection,
*' puisque Dieu sait ce qu'il fait et pourquoi il le fait, sans
*' être obligé de nous en rendre compte. Les incrédules
** voudraient cependant que Dieu leur rendît compte de sa
** conduite, en même tems qu'ils prétendent que pour eux
" ils ne lui doivent aucun compte de la leur. Il n'y a
*' point non plus de partialité, puisque Dieu ne doit rien à
METAPHYSICA. 213
** personne, et que ses dons, soit naturels, soit surnaturels,
•* sont également gratuits : point de haine ni de malice,
** puisque Dieu fait du bien à tous, n'abandonne, n'oublie,
"■ ne délaisse personne. En effet l'Ecriture sainte elle-
*' même, sans parler des Pères, ni de la Tradition, nous
*' enseigne clairement que Dieu fait du bien et accorde des
*' grâces à tous les hommes sans exception, quoiqu'avec
" inégalité," Bible vengée, tom. 2, pag, 137.
Obj. 2o. Peccatum existere non potest quin à Deo per-
mittatur ; atqui répugnât Deura permittere peccatum.
Ergo nullum existit peccatum.
Resp. Dist. Min. Répugnât Deum permittere peccatum,
eo sensu quod Deus efficere posait ut peccatum sit licitum ;
conc. min. Eo sensu quùd Deus teneatur efficaciter impe-
dire peccatum ; neg. min., propter rationes allatas.
Inst. lo. Lex naturalis jubet ut peccatum impediatur,
quando id fieri potest : atqui Deus impedire potest pecca-
tum : ergo. . . . &c.
189. Resp. Dist. Maj. Lexnaturalis jubet homini ut impe-
diatur. . . . &c.: conc. maj. Jubet Deo ; neg. maj. Lex natu-
ralis relativa est ; eadem enim non sunt officia régis et sub-
diti. Lege naturali igitur aliquid homini praescribi potest
quod Deo prcescribi non possit. Atqui sic res se habet in
prsesenti rerum ordine. Ideù enim homo tenetur impedire
quae potest peccata, lo. qu,ia Cceteros hominessicut seipsum
amare débet ; 2o. quia sibi cavere tenetur à peccati conta-
gione ; 3o. quia promovere débet societatis bonum ; 4o.
deniquè quia gloriam Dei, quantum potest, procurare dé-
bet. Atqui nullo ex istis motivis tenetur Deus, qui sibi
perfectè sufficit, qui nihii débet hominibus, qui nihil à pec-
cati contagione timet, qui b^oualis noster non est, qui de-
niquè non tenetur gloriam suam exteriiis, quantum potest,
promovere. Ergo, . . .&c.
Inst. 2o. Deus odio infinito prosequitur peccatum. Ergo
tenetur.illud impedire.
190. Resp. Dist. Ant. Deus odio infinito prosequitur
peccatum, in se ; conc. ant. In homine ; neg. ant. Infini-
tum enim illud est quod est tantum, utnec majus nec mi-
nus dici possit (36) : atqui odium quo Deus prosequitur
peccatum in homine non est tantum ut majus aut minus
dici non possit. Deus enim in homine peccata alia raajori,
214 METAPHYSICA.
alia minori odio prosequitur ; aliter omnia peccata essent
aequalia. Ergo odium quo Deus prosequitur peccatum non
est infinitum. Porrô illud odium id unum exigit, scilicet^
ut hominibus illius odii signa sufficientia dentur, ut minis
homines retrahantur àpeccato, et prœmiis ad virtutem alli-
ciantur ; quse omnia et etiam abundantissimè efficit Deus.
Inst. 3o. Enti sanctissimo nulla potest esse causa per-
mittendi peccati. Ergo. &c.
191. Resp. Neg. ant. Nam Deum permisisse peccatum
nihil aliud est quàm concessisse libertatem : atqui Deus
potuit hominibus concedere libertatem (181). Ergo. . .&c.
Insuper, etiamsi ignoraremus quâ de causa Deus permiserit
peccatum, nihil indè sequeretur. Si enim ssepè seepiùs ho-
mines agunt sapientissimè ob rationes nobis prorsùs incog-
nitas, à fortiori Deus, qui est infinitus, sapientissimè agere
potest, licèt non cognoscamus ejus motiva.
Obj. 3o. Illud Deus hominibus concedere non potest,
quod libentissimè concederet ens summè malum. Atqui
ens summè malum hominibus libentissimè libertatem con-
cederet. Ergo Deus hominibus libertatem concedere non
potest.
192. Resp. Dist. Maj. Concedere non potest Deus quod
concederet ens summè malum, eodem animo eâdemque
intentione ; conc. maj. Diverso animo diversâque inten-
tione ; neg, maj. Porrô ens summè malum concederet li-
bertatem, prsecisè quia ejus abusum prœvideret, nuUumque
suppeditaret médium ut eam homo in suam utilitatem ver-
teret : contra vero, Deus libertatem concedit ut eâ benè
utatur homo, sicque seternam felicitatem assequatur : idcir-
co peccatores ad meliorem frugem amicâ soUicitatione
invitât, patienter expectat, eos pœnitentes bénigne excipit,
prseterita delicta condonat, à futuris avertit, dimicantes
adjuvat et persévérantes prsemio rémunérât.
Inst. lo. Melius fuisset quibusdam hominibus si nati
non fuissent, quàm habuisse libertatem. Ergo Deus non
potuit. . . . &c.
Resp. Dist. Ant. Sed istud evenit ex eorum culpâ : conc.
ant. Ex culpâ Dei ; neg. ant.
Inst. 2o. Si daretur optio homini, non acciperet liberta-
tem cujus abusum prsenosceret ; ergo nec eam concedere
potest Deus, si ejus abusum prœvideat.
METAPHYSICA. 215
193. Resp. Neg. consqara. Licèt homo libertatem, cujus
abusum prsenosceret, accepturus non esset, tamen à Deo
concedi potuit, cùm habeat rationem beneficii. Duo enim
beneficium constituunt, scilicet, quôd res data prodesse
possit, et quod detur bonâ intentione. Atqui libertas sic à
Deo concessa est. Ergo. . .,. &c.
*' Murmurer de ce que Dieu ne l'empêche pas (l'espèce
humaine) de faire le mal, inquit J.J. Rousseau, c'est mur-
murer de ce qu'il la fit d'une nature excellente, de ce
qu'il mit à ses actions la moralité qui les anoblit, de ce
qu'il lui donna droit à la vertu. La suprême jouissance
est dans le contentement de soi ; c'est pour mériter et
obtenir ce contentement que nous sommes placés sur la
terre et doués de la liberté, que nous sommes tentés par
les passions et retenus par la conscience. Que pouvait
de plus en notre faveur la puissance divine elle-même ?
Pouvait-elle mettre de la contradiction dans notre nature
et donner le prix d'avoir bien fait à qui n'avait pas le
pouvoir de mai faire ? Quoi pour empêcher l'homme
d'être méchant, fallait-il le borner à l'instinct et le faire
bête? Non, Dieu de mon ame, je ne te reprocherai ja-
mais de l'avoir faite à ton image, afin que je puisse
être libre, bon et heureux comme toi." Emile, tom. 2.
pag. 50.
Inst, 3o. Medicus qui daret raedicamen segroto, praevi-
dens illum indè moriturum esse, pater qui prœberei gladi-
um filio, sciens illum se occisurum esse, non bonos, sed
crudeles sese exhibèrent : ergo à pari Deus constituens ho-
minem in statu in quo certissimè peccaturus est, non bonum,
sed crudelem se exîiibet.
194. Resp. Neg. consqam. et paritatem. Plures sunt
disparitatis rationes, lo. Deus cuncta bona possibilia crea-
turis suis conferre non tenetur(184) : quera igitur voluerit
gradum perfectionis concedere potest : contra vero lex na-
turalis preescribit medico ut ab œgroto ea diligenter amoveat
quse ipsi noxia sunt ; similiter prrescribit patri ut filiorum
saluti invigilet quantum potest. 2o. Facultas peccandi ad
ipsam hominis naturam pertinet : undè si omne peccatum
impedire teneretur Deus, hominem, qualis nunc est, con-
stituere non potuisset ; nihil simiie est in exemplis medici
aut patris. 3o. Ex libertate homini ù Deo concessa
216 METAPHYSICA.
praestantissima ortum ducunt bona, nempè, virtutes, et
œterna prtemia ; in allatis verô exemplis, ex facultate
concessâ nuUum deduci potest bonum.
" La permission du péché, inquit Bayle, et les suites du
" péché sont des mystères au-dessus de la raison, et par
*' conséquent incompréhensibles à la raison : de sorte que
'* nos idées naturelles ne peuvent point être la mesure com-
** mune de la bonté et de la sainteté divine, de la bonté et
*' de la sainteté humaine ; n'y ayant point de proportion
•* entre le fini et l'infini, il ne faut point se permettre de
** mesurer à la même aune la conduite de Dieu et la con-
" duite des hommes, et ainsi ce qui serait incompatible
** avec la bonté et la sainteté de l'homme, est compatible
" avec la bonté et la sainteté de Dieu, quoique nos faibles
" lumières ne puissent pas apercevoir cette compati-
** bilité." ŒuvreSy tom. 3. pag. 997. Voyez les Helvien-
nes, tom. 3. pag. 34, &c.
Obj . 4o. Tdeô libertas bona dicitur, quia ejus ope immensa
mérita homo potest sibi comparare. Ergo à pari est raala,
quia ejus ope immensa démérita sibi comparare potest homo.
195. Resp. Dist. Consequens. Ergo à pari libertas quâ
hic et nunc abutitur homo est mala ; conc. consqam. Li-
bertas quâ abuti potest homo, est mala ; subdist. Est mala,
id est, est minus bonum ; conc. Est mala in se et abso-
lutè ; neg. Libertas itaque considerari potest vel qiiatenùs
est potentia benè aut malè agendi ; vel quatenùs eâ hic et
nunc abutitur homo. Jàm pluries observavimus potentiam
benè aut malè agendi non esse malam in se, sed minus bo-
num. Potest ergo Deus libertatem hominibus concedere,
licèt praevideat homines eâ abusuros esse (160, 182).
Obj. 5o. Deus est summè independens et summè beatus.
Homo coram ipso est quasi nihilum. Ergo homo Deum
ofFendere non potest, nec ei molestiam inferre.
196. Resp. Deus ab homine non ofFenditur eo sensu,
quod homo ejus beatitudinem turbet, eique molestiam
inférât. Status igitur quœstionis est utrùm Deus potuerit
leges creaturis suis prsescribere, sancireque pœnas infrac-
toribus et prsemia observatoribus. Cùm autem Deus se-
ipsum denegare non possit, débet improbare actiones suis
legibus contrarias, approbare autem actiones eis confor-
mes ; hoc unico sensu Deus dicitur ab homine offendi.
METAPHYSICA. 217
PARS SECUNDA PNEUMATOLOGIiE SEU METAPHYSICiE
PARTICULARIS.
DE PSYCHOLOGIA.
PSYCHOLOGIA est ea pars Metaphysicae parti-
cuîaris quse tractât démente humanâ. Mens
humana est principium quod in nobis vult, sentit, cogitât,
judicatjdiscurrit et ordinat. In hâc Metaphysicce particula-
ris parte tractabimus, lo. de Activitate, 2o. de Libertate,
3o. de Spiritualitate, 4o. de Immortalitate mentis huraa-
nœ. Quasdam notiones subjungemus de Belluis.
C A P U T P R 1 M U M.
DE MENTIS ACTIVITATE.
198. Activitas est facultas suas operationes producendi.
Principium igitur activum est illud quod producit suas
operationes. Principium passivum est illud quod non elicit
suas actiones, sed omnes aliundè recipit ac patitur.
199. Certum est mentem humanam, ut agat, indigere
auxilio Dei. Status igitur quaestionis est utrùm mens hu-
mana, concursu divino adjuta, suas ipsa producat volitio-
nes, quod negaverunt Bayle, Spinosa, Collins, et plures
hodierni Philosophi, qui contendunt Deum ipsum in anima
producere volitiones : contra quos sit
Propositio.
200. Mens humana est activa, seu suas ipsa producit
volitiones.
Prob. lo. Intimé sentimus mentem nostram suosamores
et odia producere ; illam posse, quando vult, sibi reprae-
sentare, desiderare, vel odio habere res actu non existentes
et tantiim possibiles. Atqui hic amor, hoc odium, hsec
alicujus rei reprsesentatio sunt totidem vohtiones. Ergo
&c.
Prob. 2o. Si mens non producit suas volitiones, Deus
illas producit. Atqui posterius répugnât. Plurima enim
mentis volitiones sunt peccata. Ergo si Deus mentis voli-
tiones produceret, esset auctor peccati, quod dictu impium
est. Pariter crudelis esset, cùm creaturas suas suppliciis
devoveret, ob scelestas volitiones quas ipse solus produ-
xisset. Ergo. . . . &c.
218 METAPHYSICA.
Prob. 3o. Mereri aut demereri non possumus propter
virtutes aut vitia, quse nec elicuimus, necelicere potuimus:
atqui si mentes nostrse non producerent ipsse suas voli-
tiones, nec virtutes nec vitia elicere possemus. Ergo tune
non possemus mereri aut demereri. Ergo — . &c.
Solvuntur objectîones.
Obj. lo. Mens non potest creare ; atqui si mens produ-
ceret suas volitiones, crearet. Ergo. . . . &c.
201. Resp. Neg. min. Creare enim est dare existentiam
substantiœ anteà non existenti ; atqui quamvis mens hu-
mana suas producat volitiones, non ideô dat existentiam
substantiae non existenti. Volitiones enim non sunt sub-
stantise, sed modifie ationes animée. Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Creari non potest quin detur existentia novœ
realitati anteà non existenti ; atqui si mens produceret. . . .
&c., daret existentiam novis realitatibus anteà non existen-
tibus. Ergo. . . . &c.
202. Resp. Dist. Maj. Creari non potest quin detur
existentia novse realitati quse sit substantia, conc. maj.;
quse sit modus, neg. maj. Reverà, cùm substantiae
non existentes fieri non possint existentes quin creen-
tur, sequitur creari non posse quin detur existentia novae
realitati quEe sit substantia. At dare existentiam novo
modo, novse modificationi, non est creare. Nam creare est
educere aliquid è nihilo tùm suî, tùm subjecti. Atqui dare
existentiam novae modificationi non est educere aliquid è
nihilo tùm suî, tùm subjecti ; sic quandô frustum cerœ ex
quadrato fit rotundum, tune ei datur novus modus, nova
realitas, sed tamen nulla adest creatio.
Inst. 2o. Producere novam realitatem quœ sit modus,
est augere suum esse, et sibi dare novum entis gradum.
Atqui mens non potest. . . . &c ; ergo mens non potest pro-
ducere novam realitatem quse sit modus.
203. Resp. Dist. Maj. Est augere suum esse ratione
modorum contingentium, conc. maj. ; ratione substantiœ,
aut modorum essentialium, neg. maj. Porro mens, medi-
ante Dei auxilio, potest augeri ratione modorum contingen-
tium, potest sibi dare novas perfectiones morales, potest
acquirere novas cognitiones, ut experientiâ constat.
Obj. 2o. Modificatio mentis non habet existentiam ab
METAPHYSICA. 219
ipsâ mente distinctam. Ergo si mens suas producit modifi-
cation es, seipsara producit.
204. Resp. Dist. Ant. Modificatio mentis non habetex-
istentiam distinctam ab ipsâ mente jàm existente ; conc.
ant. Ab ipsâ mente quam existere faciat ; neg. ant. et cons-
qam. Itaque modificatio nihil aliud est quàm existendi
modus ; nova igitur modificatio est novus existendi modus ;
atqui novus existendi modus, supponit substantiam jàm
existentem. Ergo mens producere potest novas modificatio-
nes, quin seipsam producat.
Inst. Qui dat existentiam substantice modificatse, dat
existentiam modificationi : ergo à pari, qui dat existentiam
modificationi, dat existentiam substantise modificatse.
205. Resp. Neg. consqam. et paritatem. Ciim enîm
nulla substantia possit esse sine aliquâ modificatione, rectè
concluditur dari non posse existentiam substantiae, quin
simul detur existentia modificationi ; contra verô, cùm
variae sint ejusdem substantiee modificationes, mutari pos-
sunt istas modificationes quin simul mutetur substantia
quoad existentiam, seu, quod idem est, quin de novo pro-
ducatur substantia. Ergo nuUa est pari tas. Ergo ex eo
quôd dari non possit existentia substantise quin detur exis-
tentia modificationi, concludi non potest dari non posse
existentiam modificationi quin simul detur existentia sub-
stantise.
Obj. 3o. lllud non débet admitti cujus non datur idea.
Atqui activitatis animse non datur idea. Ergo. . . . &c.
206. Resp. lo. Neg. maj. Ut enim aliquid admittatur,
satis est si illud existere certissimum sit : atqui potest esse
certissimum aliquid existere, licèt illius non detur idea :
sic, v. g., certus sum me experiri quasdam impressiones,
licèt nullam illarum ideam habere possim (a).
Resp. 2o. Neg. min. Haberi enim potest idea activitatis
animse, si clarè et distincte concipiatur quid sit ea vis in
mente suos amores et odia producendi, res actu non exis-
tentes, sed tantùm possibiles,sibi reprsesentandi, &c. Atqui
concipi potest. . . . &c. Ergo. . . . &c.
Inst. lo. Anima afiici posset eodem modo, etiamsi suas
volitiones ipsa non produceret, sed reciperet à principio
(a) Has impressiones non prr ideam novimua, sed per Ben.=um iniimi'.m, ut experieniiâ
constat.
220 METAPHYSICA.
externe. Ergo non possumus affirmare eam esse activam.
207. Resp. Neg. ant. Ut eodem modo afficeretur, sen-
tire deberet suas volitiones à seipsâ proficisci : atqui istud
foret impossibile, si suas volitiones reciperet à principio
externo ; in hâc enira hypotbesi sensum suarum volitionurn
et operationum, tanquàm suarum, in seipsâ habere non
posset, quem tamen habet, ut quotidianâ constat expe-
rientiâ. Ergo. . . . &c.
Inst. 2o. Deus efficere posset ut mens humana eodem
modo afficeretur, ac si suas operationes et volitiones produ-
ceret, etiam cùm illas à principio externo recipit. Ergo
&c.
208. Resp. Neg. ant. Tune enim Deus homines in-
eluctabiliter dejiceret in errorem invincibilem, nullumque
suppeditaret médium detegendi erroris, quod efficere non
potest, cùm sit summè verax. Prsetereà, rectè distingui-
mus statum nostrum merè passivum, v. g., famis, sitis,
doloris, &c., à statu activo, v. g , cogitationis, delibera-
tioniSj &c.
CAPUT SECUNDUM.
DE MENTIS LIBKRTATE.
209. Liber tas in génère est immunitas à vinculo seu
subjectione. Hinc, ciim duplex sit vinculum quo ligari
potest homo, coactio et nécessitas, duplex est in homine
îibertas, videlicet, libertas à coactione, et libertas à necessi-
tate simplici.
210. Coacfio est vis illata homini à principio extrinseco
contra propriam voiuntatis inclinationem. Nécessitas est
determinatio ineluctabilis ad unum juxta voiuntatis incli-
nationem.
211. Libertas igitur à coactione nihil aliud est quàm
immunitas ab omni violentiâ contra voiuntatis inclinatio-
nem. Sic Deus sese libéré amat, sic sancti Deum in cœlis
diligunt.
212. Libertas à necessitate simplici, quse dicitur etiam
eîectionis, indifferentiœ, arbitrii, est immunitas ab invincibili
ad unum determinatione. De hâc libertate hic agitur.
213. Hœc libertas consistit in potentiâ quam habemus
agendi vel non agendi, hujus vel iUius agendi, boni vel
raali faciendi.
METAPHYSICA. 221
Status queestionis est utrùm sit in homine vera et propriè
dicta libertas sese ad nutum determinandi ad hoc vel ad
illud agendum ; an mens in omnibus suis determinationibus
ità sit necessitata ut aliter agere non possit.
214. Circa hanc qusestionem erraverunt lo. Stoici, qui
docebant omnia, et etiam ipsam divinitatem, ineluctabili
fato subjici. Eamdem fatalitatem admiserunt Spinosa,
Hobbes et quidam alii inter récentes.
2o. Manichtei qui docent hominem bonum aut malum
necessariô agere prout principium bonum aut principiun\
malum prsevalet (121).
3o. Astrologi judiciarii qui contendunt homines in-
fluxu siderum necessariô determinari
4o. Quidam liEeretici qui volunt homines ad bonum per
gratiam, vel ad malum per concupiscentiam semper prse-
determinari.
5o. Omnes hodierni materialistse communiter Hbertatem
toUunt ; materia enim semper concipitur ut passiva, nun-
quàm verô ut activa, deliberans et propriè eligens. Contra
quos omnes sit
Propositio.
215. Est in homine vera et propriè dicta libertas.
Prob. lo. Unusquisque intimé sentit se ità quaedam
agere, ut possit ea non agere ; sic, v. g., mihi intimé con-
scius sum me deambulationem ità velle, ut eam nolle
possim ; quod adeô verum est, ut deambulationem in ante-
cessum disponam et praedicere valeam. . Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Ex conscientise stimulis. Nemo est qui ad-
misso scelere, stimulis conscientiae non agitetur ; atqui illi
conscientiai stimuli ab ipsàmet libertate veniunt ; nemo
enim seipsum condemnat in eo quod vitare non potuit.
Ergo. . . . &c.
Prob. 3o. Ex unanimi populorum consensu. Apud
omnes populos virtus à vitio distinguitur ; sua sunt virtuti
praemia, suaque vitio supplicia ; apud omnes vigent leges,
contractus, fœdera ; apud omnes in usu sunt adhortationes,
minse, &c.: atqui hœc omnia probant omnibus populis
persuasum esse homines verè esse liberos ; nulla est enim
virtus, nullumque vitium in his quœ non potuimus agere,
aut non agere. Et quorsùm forent fœdera, pacta, con-
tractus,coaventiones inter homines, si eorum fides necessa-
222 METAPHYSICA.
riô servaretur aut violaretur ? Quorsùm leges imponerentur
illis quos ineluctabile fatum regeret ? Quid inutilius quàm
preces, adhortationes, minas, praemia, supplicia adhibere
erga eos, qui ad virtutem aut ad vitium, ad bonum aut
malum vi quâdam insuperabili ferrentur ? Ergo . &c.
Prob. 4o. Ex consideratione naturae divinse. Crudelis
simul et injustus esset, qui mandata impossibilia presscri-
beret et eorum infractores gravissimis afficeret suppliciis ;
atqui talis esset Deus, si homines verâ et propriè dicta
libertate non gauderent. Leges enim ipsis iraposuisset
quarum observatio in eorum facultate non esset et tamen gra-
vissimis earum infractores suppliciis afficeret. Ergo. . .&c.
Prob. 5o. Ex absurdis qu^e sequerentur, si homines non
essent liberi. Sublatâ enim libertate, sequitur lo. homines
esse automata ratione prsedita, quse hùc et illùc necessariô
impelluntur ; 2o. nullam esse virtuti laudem, nullamque
vitio infamiam, et ideô probos et vitiosos eodem modo esse
habendos ; 3o. nullum esse locum gratitudini pro coUatis
donis ; 4o. nullam deniquè fore prudentiam nullamque
deliberationem. Porrô quid absurdius ? Ergo. . . . &c.
Undè Encyclopedise auctores, qui sanè incredulis sus-
pecti non sunt, sic habent articulo Liberté ; *' ôtez la
** liberté, toute la nature humaine est renversée, et il n'y a
" plus aucune trace d'ordre dans la société. Si les hom-
" mes ne sont plus libres dans ce qu'ils font de bien ou de
*' mal, le bien n'est plus bien, et le mal n'est plus mal. . . .
" Les récompenses sont ridicules, les châtimens injustes. .
" . . La ruine de la liberté renverse avec elle tout ordre,
" toute police ; autorise toute infamie monstrueuse; éteint
" toute pudeur, tous remords; dégrade et défigure sans
" ressource tout le genre humain. Une doctrine aussi
*' monstrueuse ne doit point être examinée dans l'école, mais
" punie par les magistrats." Hâc de re vide D- Frayssi-
nous. Conférence sut le libre arbitre, tom. l. pag. 342, &c.;
D. Barruel, les Helviennes^ tom. 3. pag. 19, &c.
Solvuntiir objectiones.
Obj. lo. Ille non est liber qui eligere non potest inter
bona œqualia, et qui ex duobus bonis inaequalibus, majus
necessariô assumit ; atqui homo non potest * * . « &c. Ergo
METAPHYSICA. 223
216. Resp. Neg. min. quoad utraraque partem. Mens
enim eligere potest inter duo bona sequalia et ex duobus bo-
nis inaequalibus non necessario assumit majus, si in hâc
vitâ nullum objectum necessariam habeat connexionem cum
voluntatis determinatione. Atqui res ità se habet : solum
enim supremum bonum intuitive cognitum necessariam ha-
bet cum voluntatis determinatione connexionem, siquidem
est solum objectum quod totam mentis capacitatem replere
possit. Atqui in hâc vitâ nullum est supremum bonum
intuitive cognitum (Ethi. 47). Ergo in hâc vitâ nullum
est objectum quod necessariam habere possit connexionem
cum voluntatis determinatione. Ergo, . . .&c.
Inst. lo. Nulla potest esse electio sine ratione ; atqui
nulla est ratio eligendi inter duo eequalia. Ergo. . . .&c.
217. Resp. Dist. Maj. Nulla potest esse electio sine
ratione ex parte voluntatis, aut ex parte objecti ; conc. maj.
Ex parte objecti ; neg. maj. Atqui nulla est ratio eligendi
inter duo eequalia, ex parte objecti ; conc. min. Ex parte
voluntatis ; neg. min. Ubi agitur de facultate activa, tota
ratio determinationis est ipsamet agentis voluntas. In his
casibus agit voluntas, quia vult agere ; stat pro ratione
voluntas.
Inst. 2o. Mens necessario assumit quod eam magis beat;
atqui majus bonum magis mentem beat ; ergo. .. . &c.
218. Resp. Dist. Maj. Mens necessario assumit quod
eam magis beat sub omni respectu, conc. maj. ; sub ali-
quo tantùm respectu, neg. maj. Atqui majus bonum ma-
gis mentem beat sub aliquo respectu, conc. min. ; sub
omni respectu, neg. min. Rêvera, mens necessario assu-
mit quod eam magis beat sub omni respectu ; necessario
enim quœrit suam felicitatem : at nonideô mens necessario
assumit bonum quod melius est sub aliquo tantùm respectu.
Bonum enim istud, quamvis aliquem melioritatis respec-
tum habeat, totam mentis capacitatem non replet : eam
igitur perfectè satiare nequit, sicque permittit ut voluntas
alia bona desiderare possit. Ergo mens non necessario assu-
mit majus bonum.
Inst. 3o. Supponamus avarum qui suam felicitatem in
divitiis posuerit. Supponamus iterùm duas sese offerre vias,
quibus divitiae acquiri possint, œquè licitas, œquè tutas et
infalUbiles. Priori via immeusae acquirantur opes, posteriori
224 METAPHYSICA.
verô non nisi médiocres. Hoc posito, sic argumenter : in
casu prsesenti avarus necessariô assurait priorem viam,quia
est majus bonum antecedenter ad suam electionem. Ergo
mens humana majus bonum eligit antecedenter ad suam
electionem.
219. Resp.Dist. Ant. In casu praesenti avarus necessariô
assurait priorem viam, quia melius est bonum antecedenter
ad suam actualem electionem ; transeat ant. Necessariô
assurait priorem viam, quia melius est bonum antecedenter
ad suas libéras deterrainationes antécédentes ; neg. ant.
Reverà, si supponatur hune avarum ponere suam felicitatem
in divitiis, concludi potest illum necessariô electurum esse
priorem viam j sed haec nécessitas oritur ex libéra ejus de-
terminatione antecedenti ponendi suam felicitatem in divi-
tiis. Ciim verô sit liber ponendi suam felicitatem in alio
objecto et non in divitiis, sequitur eum libéré assumere pri-
orem viam.
Obj. 2o. Omnes mentis operationes ad perceptiones,
judicia, propensiones et actiones revocari possunt ; atqui in
nullis istis homo est liber. Objecta enim percipit prout
offeruntur ; prout ea percipit, judicat ; prout judicat, pro-
pendit et vult : voluntatis autera propensionem necessariô
sequitur actio. Ergo. . . . &c.
220. Resp. lo. Neg. maj. Inter enim operationes men-
tis enumerari débet liberum arbitrium, sine quo prsedictae
operationes forent potiùs passiones quàm actiones, ideôque
semper essent necessariae, quod répugnât in praesenti rerum
statu, siquidem mens est activa (200). Ergo sese libéré
determinare potest in suis operationibus, et consequenter,
actiones suas, ad libitum, dirigere potest.
Resp. 2o. Neg. min. ; ad prob. neg. ant. quoad singulas
partes. Falsum est mentem humanam objecta tantiim per-
cipere quse sese ofFerunt ; ipsi enira in nobis efFormamus
varias cogitationes, casque ad nutum nostrum reîinemus
aut repellimus. Falsum est nos judicare ex prima specie
objectorum ; ssepissimè enim deliberamus de rerum naturâ,
causis, effectibus et consectariis, et, deliberatione pendente,
diversa judicia ferimus. Falsum est nos semper velle prout
judicamus ; quotidiè enim videmus meliora probamusque,
détériora sequimur. Falsum est tandem actionem semper
'conjungi cum voluntatis propensione, contra enim propriam
METAPHYSICA. 225
inclinationem saepiùs ab actione abstinemus. Reverà se-
quimur semper judicium ultimum practicura; sed illudnihil
aliud est quàm ipsa libéra arbitrii determinatio. Ergo
. . . .&c.
Obj. 3o. Ad libertatera requiritur indiflferentia sequi-
librii : atqui impossibilis est hœc iiidifferentia. Ergo..&c.
221. Resp. lo. Neg. maj. Nam indifferentia activa se-
quilibrii in hoc consisteret ut quiSjdùm agit aut acturus est,
non magis in unam quàm in alteram partem propenderet ;
atqui ad libertatis exercitium non requiritur ut quicunque
agit aut acturus est, non magis in unam quàm in alteram
partem propendeat, sufficit si polentiam habeat agendi vel
non agendi ad nutum suum : atqui licèt aliquis magis in
unam quàm in alteram partem propendeat, veram tamen
habet potentiam agendi vel non agendi ad nutum suum,
resistendi majori propensioni eamque vincendi ; ssepè Sce-
piùs enim ratio passiones et etiam violentissimas perimit,ut
experientiâ constat.
Resp. 2o. Neg. min. Sunt enim quaedam actiones in
quibus agens ità indifFerens est, ut non magis in unam
quàm in alteram partem propendeat, ut conscientia unicui-
que testatur.
CAPUT TERTIUM.
DE MENTIS SPIRITUALITATE.
222. Principium in nobis cogitans estne simplex et im-
materiale ? Materia potestne cogitare ? En status quœs-
tionis. Spiritualitatem mentis rejecerunt, lo. Epicurei,
qui mentem esse subtilissimum corpus motu quàm levis-
simo agitatum ; v. g., aërem, vel ignem, vel puriorem san-
guinis partem, vel aliud corpus mixtum et sublimiori modo
compositum asserebant. 2o. Spinosa, qui non affirmabat
quidem mentem humanam esse corpus, sed qui eam esse
corporis modificationem contendebat. 3o. quidam recentio-
res Pseudo-Philosophi,qui mentem nostram corpoream esse
dicunt, eamque modo affirmant esse congeriem nervorum
et fibrarum, modo spiritus animales, modo medullam cerebri,
modo subtilissimas atomos, modo nescio quam rem aliam.
Taies sunt D. D. Diderot, de Voltaire, Fre'ret, de la Mettrie,-
Helvétius, le Baron d'IIolbac, Robinet, le Marquis d'Ar-
gens, Boulanger, Naigeon, aliique ejusdem scholœ philo-
V
226 METAPHYSICA.
sophi et plures hodierni physiologistae qui contendunt men-
tein à corpore non esse distinctam.
Propositio.
223. Mens humana est simplex et immaterialis.
Prob. lo. Ex facultate cogitandi. Mens humana cogitât :
atqui cogitatio recipi non potest in subjecto composito seu
materiali. Tune enim vel tota cogitatio in singulis parti-
bus hujus subjecti simul esset, vel una pars cogitationis
in unâ parte subjecti cogitantis et altéra pars cogitationis
in altéra parter ejusdem subjecti resideret, vel denique tota
coçitatio in unâ parte tantùm esset : atqui niliil horum di-
ci potest.
îo. quidem tota cogitatio non potest esse simul in singu-
lis partibus subjecti cogitantis. Nobis enim conscii sumus
nos habere unicam cogitationem de re quâcunque eodem
instanti : atqui tôt haberemus de re eâdem et eodem in-
stanti cogitationes, quot forent partes in subjecto cogitante,
si tota cogitatio simul existeret in singulis ejus partibus.
Idem dici posset de dubitatione, quse multiplex foret, si
subjectum in quo recipitur, non esset simplex.
2o. Una pars cogitationis non posset esse in unâ parte
subjecti cogitantis et altéra pars cogitationis in altéra parte
ejusdem subjecti ; tiim quia cogitatio nullas habet partes,
nec ideô dividi potest, non datur enim média, vel tertia,
vel quarta pars cogitationis ; tùm quia nulla pars subjecti
cogitantis esset conscia totius cogitationis, nullaque ob-
jectum integrum reprcesentaret. Ergo. . .2o. &c. " Jamais
" le matérialiste au plus fort de son délire, inquit D. Ber-
" gier, n'a osé dire la moitié ou le quart de ma pensée, le
" premier ou le second instant de mon jugement, un pouce
** ou un pied cube de raisonnement, un morceau ou une
" fraction de volonté." Traité de la Religion, tom. 1.
pag. 156.
3o. Tota cogitatio non potest esse tantùm in unâ parte
subjecti cogitantis, exclusis aliis. Cur enim hsec pars po-
tiùs cogitaret quàm alia ? Undè ei venit hoc singulare pri-
vilegium. Pr3etereà,vel pars illa esset simplex, vel composi-
ta : si prius,ergo subjectum cogitans necessariô est simplex,
quod contendimus ;si posterius, esedem redeunt difficultates.
Ergo &c. Aliundè &c. Ergo cogitatio recipi non
METAPMYSICA. 227
potest in subjecto composite. Ergo mens humana non
est composita. Ergo est simplex seu immaterialis.
224. Prob 2o. Ex facultate judicandi. Ad judicandum
enim requiritur lo. ut mens habeat duas cogitationes ; 2o.
ut, comparatione factâ, percipiat earum convenientiam aut
disconvenientiam. Atqui ad hanc duplicem operationem
requiritur ut mens sit perfectè simplex. Si enim esset com-
posita, una cogitatio esset in unâ ejus parte, et alla cogi-
tatio in altéra parte. Atqui tune nulla posset esse com-
paratio. Nulla enim potest esse comparatio quin sub-
jectura cogitans utriusque conscium sit cogitationis.
Atqui in isto casu utriusque cogitationis conscium esse
non potest. Singulae enim partes subjecti cogitantis
sese haberent ut duae animas à se invicem distinctae, qua-
rum una unara haberet cogitationem, et alia alteram : atqui
neutra tune foret conscia utriusque cogitationis. Ergo in
hoc casu mens non posset duas cogitationes comparare, et
consequenter earum convenientiam aut disconvenientiam
detegere. Ergo si mens esset composita, non posset judi-
care. Ergo. . . .&c.
225. Prob. 3o. Ex facultate sentiendi et sensationes inter
se comparandi. Quilibet homo varias experitur sensatio-
nes, easque alias cum aliis comparât : atqui si mens mate-
rialis esset, non posset comparare sensationes suas alias
cum aliis. Si enim materialis esset, suas sensationes reci-
peret, vel in eâdem suî parte quee esset essentialiter sim-
plex et una ; vel in diversis partibus ; vel in eâdem parte,
quœ ex aliis portiunculis componeretur. Si in eâdem parte,
qu3e est essentialiter simplex et una ; ergo substantia quae
comparât sensationes, nuUas habet partes. Ergo in hoc
casu est immaterialis. Si sensationes recipiuntur in diver-
sis partibus mentis ; ergo eadem substantia cas comparare
non potest. Si recipiuntur in eâdem parte quse ex aliis
portiunculis componeretur ; rursùs, vel recipiuntur in eâ-
dem portiuncalâ, quae est essentialiter simplex et una, vel
in diversis portiunculis. Si prius ; ergo anima est essenti-
aliter simplex et una, seu immaterialis : si posterius ; ergo
nulla potest esse comparatio duarum sentationum. Ergo
vel mens immaterialis est, vel non potest comparare suas
sensationes. Ergo. . . . &c.
226. Prob. 4o. Ex quibusdam mentis facultatibus. Mens
jiostra omnia sœcula et terapora recordando, potest in prœ-
p2
228 metaphysica.
teritas setates excurrere, facta antiquiora sicut et praesentia
intueri ; pariter generalia scientiarum principia et veritates
à sensibus retnotissimas cognoscere potest, et considerare
quasdani rerum proprietates, aliis omissis, abstractionis
ope : atqui h?ec omnia nullo modo efficere potest materia ;
quocumque enim motu donetur, in ea sola agere potest
quae prsesentia sunt et sensibilia. Ergo. . . .&c. Hâcde re
consuli possunt D Frayssinous, Conférence sur la spiritua-
lité de Vame, tom. 1. pag. 252. &c. D. Barruel, les Hel-
viennes, tom. 2. pag. 237, &c.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. lo. Qaod omnes afFectiones corporis experitur, cor-
pus est, non spiritus : atqui mens. . . . &c. Ergo. . . . &c.
227. Resp. lo. Neg. suppositum majoris. Supponit
enim major veras adesse in corporibus aftectiones ; atqui
istud admitti nequit ; non adsunt enim in corporibus nisi
varise partium dispositiones, contexturce, divisiones, et agi-
tationes, quse sanè afFectiones seu sensationes non sunt.
Resp. 2o. Neg. consqam. Rêvera, occasione corporum,
mens varias experitur sensationes; at non ideo corporea est;
è contra, ideô immaterialis est. Si enim subjectum corpo-
reum posset experiri sensationes, illse sensationes recipe-
rentur vel in eâdem parte, quae esset essentialiter simplex
et una, vel in diversis partibus. Si prius ; ergo sub-
jectum sentiens est essentialiter simpîex et unum, ideo-
que immateriale. Si posterius ; cùm una pars non sit
quid unum et idem cum altéra, una pars non sentit
quod sentit altéra. Ergo tôt erunt, etiam in corpore
tenuissimo, subjecta sentientia quot sunt partes realiter dis-
tinctae. Atqui, etiam in tenuissimo corpore, indefinitse sunt
partes realiter distinctae : juxta enim physicos, materia in
indefinitum divisibilis est. Ergo, etiam in corpore tenuis-
simo, essent entia numéro indefinito sentientia. Ergo pe-
rimeretur Egoismus, quo omnes dicunt, ego caleo, ego fri-
geOy &c. ; porrô quid absurdius ? Ergo ex eo quod mens
experiatur sensationes occasione corporum, concludi non
potest illam esse corpoream.
Inst. lo. Mens omnes vices corporis sequitur ; cum eo
crescit, senescit, roboratur, infirmatur : ergo corpus et ani-
ma sunt quid unum et idem.
METAPHYSICA. 229
228. Resp. lo. Neg. ant. Mens enim non ità pendet
ab organiSj ut seraper malè valeat, si malè se habet corpus.
Multi enim reperiuntur, qui pleniorem suarum facultatum
intellectualium usum servant, etiam ciim corpore quamplu-
rimùni infirmantur.
Resp. 2o. Neg.consqam. Hoc enim solum sequitur, men-
tem arctissimo vinculo conjungi cum corpore. Undè ex
hâc unione hypostaticâ, mens vices corporis sequi débet ;
ideoque mens faciliùs, difiiciliùsve functiones suas exercet,
prout corpus benè vel malè se habet. Hinc ratio videtur in
pueris puerascere, in adolescentibus adolescere, in senibus
senescere ; at non ideo mens et corpus sunt quid unura
et idem.
Inst. 2o. Sensationes sunt corporene. Motus enim nervo-
rum est corporeus ; atqui sensationes nihil aliud sunt quàni
nervorum agitationes. Ergo. . . . &c.
229. Resp. Neg. ant. ; ad probationem, neg. min. Com-
motio nervorum potest quidem esse causa vel physica^ vel
occasionalis sensationum quas mens experitur : at non ideô
est ipsamet sensatio (225, 227). Neve dicatur hanc unio-
nem mentis cum corpore impossibilem esse, quia explicari
non poîest. " Vainement le faux sage, inquit D. Barruel,
" exigera de moi que je lui développe cette union mystéri-
•' euse; il fut donné à l'homme de sentir et de démontrer
*' son existence, et non d'en concevoir tous les rapports,
" ou d'en développer tous les liens. Le nœud existe ; il
** m'est sensible ; je ne j)orterai point la folie jusqu'à nier
*• son existence, parce que je ne puis le résoudre. La vérité
** que je n'explique point ne me fera pas rejeter celle que
** je sens, que je vois, que je démontre. Je ne suppléerai
" pas au mystère par les contradictions les plusmuUipHées
*' cf les plus évidentes ; une seule eût sutS pour m'éloigner
" du matérialiste ; combien n'en faut- il pas dévorer à son
". école ?" Hekiennes, tom 2. pag 267. "
Obj. 2o. Ratio cur materia cogitare non posset est quia
cogitatio et extensio in eodem subjecto coexistere nequeunt;
atqui hœc ratio nuUa est. Nam quies et motus existunt
in materiâ successive, quamvis sint contrarite modificatio-
nes : ergo à pari cogitatio et extensio, licèt sint quaUtates
contrariae, possunt in materiâ simul existere.
230. Resp. Neg. min. ; ad prob. neg. consqam. et pari-
tatem. Extensio est aggregatio partium extra se positarum.
230 METAPHYSICA.
Ergo necessariô requirit subjectum compositum. Cogitatio
autem est perfectè simplex. Ergo requirit subjectum imma-
teriale seu perfectè simplex (223). Ergo extensio et cogi-
tatio sese rautuô excludunt, nec possunt existera in eodem
subjecto, sive simul, sive successive.
Quies est materise iisdem locis spatii correspondentia :
motus est materise translatio è loco in locum. Utrumque
igitur requirit subjectum compositum ; utrumque ergo re-
cipi potest in materiâ quamvis successive. Ergo nulla est
paritas. '* Le matière, inquit D. Frayssinous, est étendue,
" composée de parties placées les unes hors des autres. Or
" qui ne sent pas que la pensée est simple, sans par-
*• ties distinctes ?. . . . La matière est figurée ; elle a une
** forme et des couleurs. Or quelle figure donnez-vous à
" la pensée ? Est-elle ronde ou carrée, cubique ou trian-
" gulaire ?. . . . La matière est divisible ; elle peut être par-
" tagée en parties distinctes les unes des autres. Lapen-
" sée, au contraire, est indivisible, elle est tout entière,
* ' ou bien elle n'est pas : il est inoui qu'on prenne la moitié,
*' le tiers, le quart d'une pensée. Voilà donc comme les
** propriétés les plus constantes, les plus universellement
" reconnues de la matière, sont en opposition manifeste
** avec celles de la pensée." Conférence sur la spiritualité
de Vame, tom. L pag. 262.
Obj. 3o. Non novimus omnes proprietates materise.
Temerè igitur affirmamus illam non posse cogitare. Inter
enim ejus proprietates ignotas, forsan reperitur facultas
cogitandi. Insuper quis audeat asserere Deum, qui est om-
nipotens, non posse concedere materise facultatem cogitan-
di ? Ità D. de Voltaire post Locke.
231. Resp. lo. Non aflîrment ergo adversarii materiam
cogitare posse donec bas proprietates occultas detexerint.
2o. Omnes quas novimus materise proprietates cogitation!
répugnant : atqui materise proprietates incognitse cognitis
repugnare non possunt, alioquin materia constaret attribu-
tis repugnantibus, quod est absurdum. Ergo nulla ex pro-
prietatibus materise incognitis convenire potest cogitationi.
Hoc posito, confidenter aiiirmare possumus Deum non
posse concedere materise facultatem cogitandi, Deus enim
efficere non potest quod contradictionem involvit.
METAPHY8ICA. 231
Obj, 4o. Dantur cogitationes compositœ ; dantur affec-
tiones modo majores, modo minores. Ergo ex simplicitate
cogitationum et afFectionum concludi non potest simplicitas
mentis humanae.
232. Resp. lo. Dist. primam partem ant. Dantur cogita-
tiones compositse, si considerantur quoad objectum quod
repraesentant, cane. Si considerantur in se ; neg. (Log.
44.). Reverà, dantur cogitationes rerum compositarum,
nempè corporum sive existentium, sive possibilium, quac
nobis reprœsentamus ; at illse cogitationes non ideô sunt
corporese, nec ullo modo compositse in se, seu physicè : tune
enim dici posset eas esse rotundas, quadratas, cubicas, lon-
gas aut brèves, albas aut nigras, sicut objecta externa ab
ipsis reprsesentata, quod est absurdum. Ergo cogitationes,
quaecunque sint objecta reprsesentata, sunt simplices i« se.,
€t consequenter requirunt subjectum simplex in quo reci-
piantur.
Resp. 2o. Dist. secundam partem ant. Dantur affec-
tiones modo majores, modo minores, id est, quse plus mi-
nùsve mentem afficiunt ; conc. Modo majores, modo mi-
nores extensione partium extra se positarura ; neg. Solutio
patet ex dictis.
Obj. ,5o. Quod existit incorpore est materiale : atqui
principium in horaine cogitans existit in corpore. Ergo est
materiale.
233. Resp. Dist. Maj. Quod existit per contactum in
corpore est materiale; conc. maj. Quod existit spiritua-
liter in corpore est materiale; neg. maj. ; et contra distinctâ
minore, neg. consqam. Certum est adesse in homine prin-
cipium cogitans et sentiens : pariter certum est materiam
non posse cogitare aut sentire (223, 225), Ergo adest in
homine principium immateriale, seu mens raerè spiritualis.
Sed quinara est existendi modus mentis humnnœ in homine,
seu, in quo consistit unio hyposlatica mentis cum corpore?
Hsec qusestio, sicut innumerse aliœ, pluriraas habet difficul-
tates, quee nostram ignorantiam solummodo demonstrant :
sed nullam contradictionem aut repugnantiam involvunt ;
ideoque infirniare non possunt rationes quibus evidenter
demonstratur mentem humanam esse simplicem et immate-.
rialem (223 &c 229).
232 METAPHYSICA.
Obj. 60. Variae nervorum commotiones ab objectis exci-
tatae ad cerebrum transmittunturet sensationes imprimunt.
Sensationes ibi elaboratse, sicut alimenta in stomacho, cogi-
tationes, volitiones aliasque mentis functiones producunt :
ergo mentis operationes non probant illam esse spiritualem.
Hâc de re audiatur D. Cabanis. *' Le cerveau, inquit, est
" l'organe particulier destiné a produire la pensée, comme
" l'estomac et les intestins à faire la digestion. Les alimens
** tombent dans l'estomac avec leurs qualités propres et en
'* sortent avec des qualités nouvelles. L'estomac digère.
" Ainsi les impressions arrivent au cerveau par l'entremise
*' des nerfs : ce viscère entre en action, il agit sur elles, et
** bientôt les renvoie métamorphosées en idées : d'où nous
" pouvons conclure avec la même certitude que le cerveau
*' digère en quelque sorte les impressions, et fait organique-
*' ment la sécrétion de la pensée." Rapport du physique et
du moral de Vhomme^ tom. 1. pag. 152.
234. Resp. Neg. ant. Experientiâ constat quidem sub-
stantiam quae in nobis cogitât et sentit, indigere ministerio
organorum ut facultates suas et operationes exerceat, et
consequenter nervorum commotiones cerebrique dispositio-
nem non minimâ vi agere in sensationes et afFectiones nos-
tras : at indè concludi non potest nervos et cerebrum ipsam
esse substantiam quse in nobis sentit et cogitât, ut eviden-
ter patet ex dictis : sensationes enim, cogitationes et aliae
mentis operationes dividi non possunt ; ergo în subjecto
divisibili recipi nequeunt (230). Id unum igitur physiolo-
giste concludere debent, nempè strictissimam, licèt inex-
plicabilem, existere connexionem inter corpus nostrum et
substantiam quœ in nobis cogitât. Audiatur D. Frayssi-
nous refellens figmentum philosophi suprà laudati. " Il y
" a, inquit, dans ce langage autant d'équivoques et d'er-
" reurs que de mots : et c'est bien ici qu'on voit toute la
" faiblesse du mensonge, qui, poussé à bout de tous côtés,
•' se réfugie dans les amphibologies et les plus vagues
" obscurités.
" Si l'on nous disait que, d'après l'union de l'ame et du
" corps, l'ame a besoin de l'organe du cerveau pour faire
" ses opérations, je pourrais entendre ce langage. • . .Mais
*' faire du cerveau une machine à pensées, quoi de plus
*' étrange ! En eftet, vous me dites que le cerveau digère
METAPIIYSICA. 233
les impressions qui lui sont transmises ; mais des impres-
sions faites sur les organes ne peuvent être que des com-
pressions, des dilatations, des vibrations, des déplace-
mens de parties matérielles, en un mot, des mouve-
mens. Ainsi, dire que le cerveau digère des impres-
sions, c'est dire qu'il digère des mouvemens : et fut-il
jamais une manière plus barbare de penser et de dire ?
Vous ajoutez qu'il en est du cerveau, par rapjx)rt aux
impressions, comme de l'estomac, par rapport aux sub-
stances nutritives : mais soyez conséquent, et poussez la
comparaison jusqu'au bout. Que fait l'action de l'esto-
mac ? Elle transforme les alimens qu'il reçoit; mais les
qualités qu'il leur donne ne sont pas incompatibles avec
un être matériel, et n'empêchent pas qu'ils ne restent
dans la nature des substances matérielles. Donc il fau-
drait dire que l'action du cerveau, en changeant,en modi-
fiant les mouvemens qui lui parviennent, les laisse tou-
jours dans leur état de mouvement ; donc il n'en résul-
terait jamais que du mouvement, et déjà il est bien dé-
montré que le mouvement n'est pas la pensée. Vous
poursuivez, en disant que le cerveau renvoie les impres-
sions métamorphosées en idées. Mais je demande où
ces idées sont reçues ; il faut qu'elles soient quelque
part. De même que le mouvement n'existe que dans
le mobile, la pensée n'existe que dans un sujet qui pense,
et la même question revient toujours. De quelle nature
est cette substance qui a toutes ces idées ? Si vous la
faites matérielle, je vous oppose mes preuves, qui res-
tent intactes, de l'incompatibilité de la pensée et de la
matière. Voilà donc comme, en analysant votre méca-
nique explication de la pensée, on n'y trouve que des
mots insignifians ou des absurdités palpables." Confé-
rence sur la spiritualité de rame, tom. 1. pag. 269.
CAPUT QUARTUM.
DE MENTIS IMMORTALIÏATE.
235. Immortale generatim illud dicitur quod mori non
potest. Aliquid autem immortale esse potest vel ahsoluiè,
vel hypotheticè. Illud est immortale ahsolutè, quod nuUâ
ratione destrui aut perire potest ; talis est solus Deus^^ Illud
234 METAPHYSICA.
est immortale hypotheticè, quod ex naturâ suâ quidem perire
nequit, sed à principio externo annihilari potest.
236. Iterùm immortalitas duplex est, intrinseca et extrîn^
seca ; iutrinseca, si substantia quse dicitur immortalis, nul-
lum contineat in se principium destructionis ; extrinseca,
si à nullâ causa externâ destrui possit.
237. Certum est mentem humanam absolutè et ab ex-
trinseco non esse immortalem, potest enim à Deo destrui.
Status igitur qusestionis est lo. utrùm mens sit immortalis
ab intrinseco ; 2o. utrùm post hanc vitam altéra sit vita,
in quâ sua sit virtuti merces, suuraque vitio supplicium ; 3o.
utrùm tùm virtutis praemia, tùm vitiorum supplicia sint
aeterna.
Proposîtio prima,
238. Mens humana immortalis est ab intrinseco.
Prob. Mens enim immaterialis est (223). Ergo dissolu-
tione partium perire non potest. Ergo. . . . &c,
239. Ergo lo. nihil obstat quominus mens humana possit
remanere corpori superstes.
Prob. Mens enim humana distinguitur à corpore : ergo
ejus operationes non pendent à corpore, nisi tanquàm ab
occasione. Ergo suas operationes, etiam dissoluto corpore,
exercere potest. Ergo. &c. '* Dans l'ordre actuel des
" choses, inquit D. Prayssinous, l'ame dépend, pour l'ex-
" ercice de ses facultés, du service et du jeu des organes ;
" c'est par eux qu'elle reçoit mille sensations diverses, qui
" deviennent pour elle les riches matériaux d'une foule de
" connaissances ; mais enfin ce n'est pas l'œil qui a le sen-
** timent de la lumière, ni l'oreille celui du son. Ces or-
*' ganes sont le véhicule, et non le siège de nos sensations,
" les instrumens, et non le principe de nos connaissances.
** Et qui nous a dit que l'ame ne pourrait pas un jour se
" passer de leur ministère, que Dieu n'était pas assez puis-
" sant pour opérer sans eux ce qu'il lui plaît d'opérer par
*' eux dans le monde présent ?.... L'ame et le corps se
^' repoussent naturellement par leurs qualités opposées; si
" quelque chose doit étonner, c'est que deux êtres si dis-
'* semblables se trouvent dans un concert d'opérations et
^* une dépendence mutuelle : il ne fallait rien moins que la
*' puissance divine pour les réunir. Après la mort,le corps est
'* assujetti à des mouvemens étrangers à l'action de l'ame,
MBTAPHYSIGA. 235
** qui ne le gouverne plus, et l'ame, à son tour, vit de
'' pensées et de connaissances étrangères à l'impression des
** organes.'' Conférence sur V immortalité de Vame, tom. 1.
pag. 382, &c.
240. Ergo 2o. post hanc vitam possibilis est altéra vita,
in quâ sua sit virtuti merces, suumque vitio supplicium.
Propositio secunda.
241. Sua post hanc vitam manent vitiosis supplicia, et
suse probis mercedes.
Prob.lo. Ex Dei justitiâ. Sub Deo summè justo par non
débet esse justi et injusti conditio ; imô, deterior non po-
test esse justorum conditio quàm improborum ; atqui si sua
post hanc vitam non manerent. . . . &c., tune deterior fo-
ret conditio proborum quàm improborum. Justi enim in
hâc vitâ ssepiiis opprimuntur, et ut virtutem colant, sibi
vim perpetuam inferre debent ; uno verbo, si in hâc solâ
vitâ sperandum habent, miserabiliores sunt omnibus homi-
nibus ; è contra, mali divitiis, voluptatibus et honoribus
ssepè ssepiùs affluunt. Ergo Dei justitiâ exigit ut altéra
sit vita in quâ omnia compensentur et restituatur legitimus
ordo.
Prob.2o. Ex sapientiâ divinâ. Sapiens enim legislator non
potest leges suas ità deserere, ut earum observatores nul-
lum habeant eas servandi motivum sufficiens, dùm è contra
earum contemptores potentissimo incitentur motivo ad
eas infringendas ; atqui si Deus post hanc vitam nullaa
legum suarum infractoribus pœnas, nullas observatoribus
mercedes sanxisset, tune ità deseruisset leges suas. . . .
&c., cùm in hâc vitâ earum observatoribus plerum-
què nihil sit sperandum, dùm spes multa est in illis
infringendis. Ergo Deus non esset sapiens legislator, si
post hanc vitam nullas sanxisset. . . . &c. Ergo. . . . &c.
Prob. 3o. Ex summâ Dei bonitate. Non potest ens sum-
mè bonum eum instituere ordinem in quo viris probis me-
lius esset non existere quàm existere ; atqui nisi futura sit
altéra vita, in quâ mercedem virtus et pœnara vitium reci-
piant, melius esset viris probis non existere quàm existere;
tune enim in nihilum reducendi sunt post mortem viri pro-
bi, qui propter servandas Dei leges innumeris conficiuntur
serumnis ; atqui hujusmodi viris longé melius esset non
existere quàm existere. Ergo. . . . &c.
236 METAPHYSICA.
Prob. 4o. Ex Dei sanctitate. Deus sanctus nec vitiura
approbare, nec vitutem improbare potest : atqui utriusque
accusaretur Deus, si post hanc vitam altéra non esset. . ^ .
&c. In hâc enim vitâ opes, dignitates, voluptates super im-
pios, ssepè verô luctum, œrumnas, opprobrium super jus-
tes effundit Deus. Ergo impios approbare videtur, justos
verô improbare. Ergo ut absolvatur Dei sanctitas, necesse
est ut altéra sit vita in quâ pateat terrenas opes à Deo im-
piis distributas fuisse ad remunerandas quasdam virtutes ;
jjiis vero calamitates datas fuisse ad fidei probationem.
" S'il existe un Dieu, inquit civis Genevensis, il est par-
*' fait : s'il est parfait, il est sage, puissant, saint et juste.
" S'il est saint, juste et puissant, mon ame est immortelle
" .... Toutes les subtilités de la métaphysique ne me fe-
" ront pas douter un moment de l'immortalité de l'ame."
Prob. 00. Ex unanimi populorum consensu. Nulla
quippè unquàm fuit religio quœ post prœsentem vitam alte-
ram non admiserit^ ut confitentur ipsimet adversarii : atqui
universalis illa fides alterius vitse non potuit oriri à prœju-
diciis, nec à cupiditatibus, cùm iis potentissimum frenum
injiciat. Ergo oritur à solâ veritate.
Prob. Go. Ex hominum ingenitâ naturâ. Ità homines
sunt à Deo comparati ut sumraam felicitatem etiam inviti
appelant indesinenter. Ergo explendus est ille appetitus,
nisi dicatur Deum summè veracem in decipiendis suis crea-
turis delectari. Atqui desiderium istud expleri non potest
in hâc vitâ, in quâ, fatentibus omnibus, nulla est vera et
perfecta félicitas quœ mentis omnes expleat facultates.
Ergo manet altéra vita in quâ ille appetitus perfectè satiabi-
tur, si Dei mandata observaverimus. Ergo. . . . &c^ Vide
D. Frayssinous, Conférence sur Vimmortalité de Vame, tom.
1. pag, 377, &c. ; D. Barruel, les Helviennes, tom. 3.
pag. 7Q, &c.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. lo. Illa substantia perire débet cum corpore, quse
ab ipso corpore pendet ut existât : atqui mens humaiia pen-
det. . . . &c. ; lo. quia est substantia incompleta, quee solo
corpore completur ; 2o. quia propter corpus creata est, ut
illud vivificaret. Ergo. . . . &c.
242. Resp. Neg. min. ]Nam lo. mens est simplex et imma-
terialis (223) ; ergo essenti aliter distinguitur à corpore :
METxVPIIYSICA. 237
ergo non pendet à corpore ut existât. Ideo igitur substan-
tia iiicompleta dicitur, quia sola hominem in hâc mortali
vitâ non constituil, et quia destinatur ad regendum corpus,
non autem quia sine corpore existere non potest. Hinc
homo rectè definitur inielligentia cui ministrant organa ; gal-
licè, l'homme est une intelligence servie jmr des organes. 2o.
Mens non est creata propter corpus, sed propter Deum, ad
cujus imaginem formata est.
Obj. 2o. Anima initium babuit cum corpore : ergo
perire débet cum corpore ; et bœc est ratio cur tantoperè
mortem timeat homo. Ergo. . . . &c.
243. Resp. Neg. consqam, et probationis ant. Deusqui
nientem creavit cum corpore, potuit velle et reipsâ voluit ut
sit superstes corpori in prsesenti rerum ordine. Ergo ex eo
quôd initium habuerit cum corpore, non ideô cum corpore
perire débet (239). Mortem vero reformidamus, quia certi
sumus nos post mortem futuros esie miseros aut felices,
nescimus autem utra sors nos maneat. Insuper in illo mor-
tis horrore summoperè elucet divina sapientia quse sic hu-
mani generis conservationi multô securiùs invigilat.
Obj, 3o. Immortalitatis desiderium non probat nos im-
mortalitati natos esse. Nemo est enim qui non desideret
immunitatem ab omnibus doloribus et miseriis : atqui ta-
men hanc immunitatem nulli concessam esse testatur expe-
rientia. Ergo. . . . &c. " Voici, inquit le Baron d'Holbac,
" comment raisonnent les partisans du dogme de l'immor-
*' talité de l'ame -.tous les hommes désirent de vivre toujours ;
" donc ils vivront toujours : ne pourrait-on pas leur rétorquer
** l'argument en disant ?-Tous les hommes désirerd naturelle-
" ment d'être riches : donc tous les hommes seront riches un
" jour." Système de la nature.
244. Resp. Neg. ant. Desiderium illud immunitatis à
miseriis et doloribus probat nos felicitati esse natos, et ideo
destinâtes esse alteri vitse, cùm in hâc prœsenti vitâ nulla
sit vera félicitas. *' Cette manière de rétorquer, inquit D.
" Gérard, est captieuse comme tous les argumens de cet
" auteur, et n'est pas juste. S'il entend par le désir d'être
" riches, celui d'avoir de grandes sommes d'argent, ce n'est
'* point là du tout un désir nécessaire et invincible pour
'* nous, tel qu'est le désir d'exister toujours ; et une toule
*' de gens sont assez sages pour se contenter d'un honnête
238 METAPHYSICA.
*' nécessaire, ainsi que d'une heureuse et simple médio-
" crité. Mais si le désir d'être riches n'exprime au fond
" que celui d'être à son aise, il rentre alors dans le désir
" invincible du bonheur, qui est aussi naturel à touts les
" hommes que celui d'être immortels, parce que en effet
*' tous les hommes sont appelés par la nature à être heu-
" reux, et à l'être éternellement." Théorie du Bonheur.
Obj. 4o. Virtus est ipsa sibi merces, vitiumque sibi
pœna est sufficiens ; pax enim et securitas sunt virtutis
comités ; stimuli verô conscientise sat malos cruciant. Ergo
non requiritur altéra vita in quâ. . . . &c.
245. Resp. lo. Virtus non est ipsa sibi merces sufficiens;
tùm quia ad colendam virtutem multae superandae sunt diffi-
cultates ; tùm quia sensus pacis suavissimus non semper est
virtutis comes ; continué enim timent justi ne Deum,quem
diligunt, ofFendant, et prœsertim ne justitiam sint aliquan-
dô amissuri. PrEetereà, pax illa interior nititur spe merce-
dis in altéra vitâ percipiendse, quee sola justos varias inter
serumnas roborat et solatur.
Resp. 2o. Pariter vitium non est pœna sibi sufficiens,
suas enim habet illecebras quibus malo placet. Praetereà,
improbi ità aliquandô mali consuetudine obdurescunt, ut
nullum experiantur conscientise stimulum. Ideô denique
improbos cruciant conscientise stimuli, quia in animo impres-
sam homines gerunt ideam Dei in altéra vitâ criminum vin-
dicis. Confirmant ergo conscientise stimuli fidem alterius
vitse, nedùm eam destruant.
Obj. 5o. A-nnihilatio post banc vitam est pœna vitio
sufficiens, ciim homines mortem tantoperè abhorreant.
Ergo non est necessaria altéra vita, in quâ sua sit vitio
pœna.
246. Resp. lo. Neg. ant. Impii aliquandô non solùm
hanc annihilationem parùm timent, sed et etiam illam desi-
derant. 2o. Postulant Dei sapientia et justitia ut impii plus
minùsve puniantur, pro majoribus vel minoribus, pluribus
vel paucioribus criminibus quae commiserint. 3o. Eadem
Dei attributa exigunt ut prœpotens frenum injiciatur
flagitiosis hominibus, qui nullo tune motivo retine-
rentur, cùm scirent eamdem omnibus annihilationem
sancitam esse.
METAPHYSICA. 239
Obj. 60. Deus non tenetur mercedem rependere justis,
cùm omnia hominum opéra ipsi debeantur titulo justitiae,
ut supremo rerum omnium Domino. Pariter absque ullo
tùm justitiîE, tùm bonitatis dispendio impiis ignoscere po-
test. Ergo....&c.
247. Resp. Neg. ant. Deus enim, in praesenti rerum
ordine, hominibus, ut potè creaturis intelligentibus et libe-
ris, mandata et leges prsescripsit (Ethic. 86, 87, 88) ; tene-
tur ergo, titulo justi legislatoris, mercedem observatoribus
pœnamque refractariis sancire ; aliter, nedùm sapientissi-
mus, è contra insipientissimus foret.
Propositio tertia.
248. Recta ratio suadet justorum beatitudinem futuram
esse seternam.
Prob. lo. Vera beatitudo omnem anxietatera excludit :
atqui si justorum beatitudo futura non esset aeterna, omnem
anxietatem non exciuderet : imô quô magis cognoscerent
beati suai conditionis pretium, eo acerbiori illius amittendae
metu cruciarentur : hinc heec Tullii verba ; "si amitti vita
" beata potest, beata esse non potest." De finihus boni et
mali, Lib. 2. No. 86.
Prob. 2o. Non solùm felicitatem appetimus, sed felicita-
tem constantem, immutabilem et perfectam. Hsec pro-
pensio universalis est ac invincibilis ; ab ipso igitur Deo
nobis insita fuit, nec suo effeetu, sine hominis culpâ, frau-
dari potest : atqui tamen eo fraudaretur, si justorum félici-
tas non esset seterna.
Et verô, qusenam causa posset Deum impellere ut mentes
à beatitudine in nihilum detruderet post aliquod temporis
spatium ? Justorum animas diligit Deus et ab ipsis diligi-
tur. Quâ de causa abrumperetur illud caritatis commerci-
um ? Nonne probabilius est hune creatoris et creaturae
amorem esse beatitudinis nunquàm desiturae pignus certis-
simum ?
Propositio quarta.
249. Demonstrari non potest repugnare pœnarum aeter-
nitatem.
Prob. lo. Ad demonstrandum repugnare pœnarum aeter-
nitatem, demonstrandum foret nullam esse proportionem
inter pœnam aeternam et peccatum mortale : atqui istud
240 METAPHYSICA.
demonstrari nequit. Ad id enim oporteret ut concipi pos-
set quae sit malitia peccati et ejus enormitas ; ut cognosce-
rentur omnia auxilia, média, gratiee, &c., quibus Deus quo-
tidiè homines à peccato deterret et ad se attrahit : atqui
istud est impossibile. Ergo demonstrari non potest nullam
esse proportionem inter peccatum mortale et pœnam œter-
nam. Ergo. . . . &c. Et verô, eo major est offensa, quô
nobilior est persona lassa, et vilior est persona laedens : at-
qui Deus est infinitus, et homo est finitus. Ergo offensa est
infinita saltem relative ad personam Isesam, seu, relative ad
Deum. Ergo meretur pœnam infinitam : sed pœna nulla
potest esse infinita ratione intensitatis. Ergo pœna, quam
Deus à peccatore repetit, débet esse infinita ratione dura-
tionis, seu, débet esse œterna.
250. Prob. 2o. Qui in peccato moriuntur, ità sunt ani-
me comparati, ut in seternum peccare vellent, si in ceter-
num in terra vivere possent : atqui nunquàm demonstra-
bitur repugnare ut in aeternum puniatur desiderium in
seternum peccandi, Ergo....&c. " La volonté qui pro-
duit le péché, inquit D. de Feller, et qui jusqu'à la mort
persiste dans le péché, est une volonté éternelle dans son
essor, dans sa disposition, dans ses désirs. Le pécheur
décidé contre Dieu en faveur du péché, voudrait pécher
toujours, toujours jouir de son péché, perpétuer son pré-
tendu bonheur dans le péché. La mort arrive ; il quitte
le monde, il quitte les instrumens du péché, mais il ne
quitte pas l'attachement au péché ... * Si le pécheur im-
pénitent ne mourait pas, il ne cesserait de pécher ; s'il
souhaite de vivre encore, c'est qu'il souhaite de pécher
encore. Or celui qui veut ne jamais vivre sans pécher,
pourquoi ne mériterait-il pas de ne vivre jamais sans
souffrances?" Catéchisme phiL No. 477.
Prob. 3o. Ut homines in officio coerceantur, magnoperè
utilis est, imo quasi necessaria pœnarum œternitas : at-
qui nunquàm demonstrabitur Deum summum legislatorem
non posse legibus suis eam dare sanctionem quai magno-
perè utilis est et quasi necessaria earum observationi. Ergo
&c.
2.51. Caeterùm, quod ratio sibi derelicta demonstrare non
potest, clarissimè docet revelatio ; fide enim certum est
œternas fore justorum mercedes et peccatorum pœnas, uti
METAPHYSICA. 241
invictis argumentis demonstratur in Theologiâ, prsesertim
his verbis supremi Judicis vivorum et mortuorum : " dis-
" cedite à me, maledicti, in ignem teternum, . . . îbunt hi in
" supplicium œtèrnum, justi autem in vitam œternam.'*
Matth. cap. 25. ver. 41, 46.
Soîvuntur objectiones.
Obj. lo. Pœnarum seternitas lœdit justitiam : ergo ré-
pugnât.
252. Resp. Neg. ant. Justitia enim in eo non laeditur,
quôd puniatur peccatura quandiù peccandi desiderium per-
sévérât : atquiindamnatis desiderium peccandi in œterniim
persévérât (250), Ergo. . . . &c.
Inst. Inter peccatum momentaneum et pœnam seternam
nulla est proportio. Ergo ccternitas pœnarum justitiam
lœdit.
253. Resp. Dist. Ant. Nulla est proportio durationis ;
conc. ant. Nulla est proportio eequalitatis ; neg. ant.
Porrô pœna non est metienda ex culpse duratione. Si enim
hase proportio non requiratur in justitia humanâ, à fortiori
non requiritur in divinâ justitia. Pœna, ut omnes confi-
tentur, judicanda est ex gravitate offensae. Atqui offensa,
relative ad Deum, est infinita : ergo pœna potest et dé-
bet esse infinita quoad durationem (249).
Obj. 2o. Pœna seterna est inutilis ; damnatorum enim
emendationi nihil prodesse potest. Ergo répugnât sapien-
tise divinaî.
254. Resp. lo. Retorq. arg. Pœna mortis apud bomines
est inutilis, capite enim damnatorum emendationi nihil
prodesse potest. Ergo répugnât sapientiss humanse.
Resp. 2o. Neg. ant.; ad prob. dist. Actu damnatorum
emendationi nihil prodesse potest ; conc. Antequàm pœnis
aeternis addicantur ; neg. Metus enim seternorum sup-
pliciorum potentissimus est ad eos in hâc vitâ à crimine
coercendos et ad meliorem frugem reducendos.
Obj. 3o. Deus est infinité bonus. Ergo non potest à crea-
turis suis seternas repetere pœnas.
Resp. Dist. Ant. Deus est infinité bonus, id est, in se
infinitam possidet bonitatem ; conc. ant. Deus est infinité
bonus, id est, tenetur manifestare exteriùs suam bonitatem
quantum potest, et non potest repetere pœnas œternas à
242 METAPHYSICA.
peccatore ; neg. ant. Solutio patet ex dictis (181, 182,
249, 250).
Obj. 4o. Répugnât mentes huraanas igné torqueri posse ;
post mortem enim corpore spoliabuntur. Ergo ignis, qui est
mera materia, non potest eas torquere.
255. Resp. Neg. ant.; ad prob. neg. consqam. Corpora
enim, inprœsenti rerum ordine, mentem humanam afficiunt
ingratis sensationibus et prsesertim sensatione caloris, ut ex-
perientiâ constat. Hoc posito ; vel ignis ipse mentem, me-
diantibus organis, afficit ; vel ipse Deus excitât in mente
sensationem caloris occasione vel ad prœsentiam ignis : at-
qui in neutro casu demonstrabitur repugnare mentem cor-
pore spoliatam igné torqueri posse. Non in priori casu; quis
enim affirmare audeat ignem non posse, sic ordinante Deo infi-
nito, mentem humanam eodem modo afîicere, non existen-
tibus organis, que eam, in praesenti rerum ordine, afficit
mediantibus organis ? Non in posteriori ; Deus enim omnipo-
tens easdem sensationes, occasione vel ad prsesentiam ignis,
in mente humanâ excitare potest sine organis, quas iisdem
organis mediantibus, excitât inprœsenti rerum ordine. Sed
hœc ad Theologos.
CAPUT QUINTUM.
DE BELLUIS.
256. Variée sunt Philosophorum opiniones circa naturam
et essentiam belluarum. Cartesius et cum ipso quidam alii
(a) contendunt eas mera esse automata, à Deo perfectissimè
constructa, in quibus nuilum est internum activitatis, ima-
ginationis et sensationis principium : sic, juxta eos, singu-
laB belluarum operationes totidem sunt mechanici efiectus ;
objecta externa, inquiunt, vel tenues particulae è corporibus
émanantes organa belluarum tangunt, fibras ac nervos com-
movent, musculos excitant, sicque varies eorum motus
producunt, juxta constantes et perfectas leges ab ipso crea-
tore constitutas (&).
(a) " Des philosophes et des naturalistes de beaucoup d'esprit, dit Mr.Vliey, ontlongue-
" ment disserté sur l'ame des botes, c'est-îi-ilire, sur la nature de leurs facultés inielleclu-
" elles. Toutefois, l'analogie de celle-ci avec l'ame humaine ayant paru non seulement
" humiliante pour noire espt'ce, mais môme incommode et difficile ;i expliquer sans quel-
" que peu de matérialisme, un savant Espagnol, Louis Vivùs (né à Valence en Espagne,
" en 1492, mort ii Bruges, en 1540), imagina de trancher nettement la difficulté en refusant
" toute espèce d'ame aux animaux, et en les réduisant îv l'état de pure machine ou d'auto-
" mate. Descartes soutint cette hypothèse avec tous les eftorts de sa physique corpus-
" culaire, mais sans pouvoir persuader même sa nièce, qui s'obstinait îi retrouver du
" sentiment dans sa fauvette.'' Nottv. Diction, d'histoire naturelle, article awe des brutes .
(b) Institutiones philo sophicoe, h, D. Bouvier, tom. 2. pag. 278.
METAPHYSICA. 243
Hinc si Cartesio et ejus asseclis fides adhibeatur, pati
quidera, gaudere, spontanées elicere motus, &c., belluœ
videntur ; at reverà non magis afficiuntur sensationibus
quàm manuale horologium, neque magis innumerae earum
actiones in eis sunt libéras quàm rotarum motus in quolibet
mecbanicse artificio, vel quàm succus, qui per omnes arbo-
rum et plantaruni partes movetur.
257. Quidam récentes Pseudo-Philosophi affirmare non
erubescunt belluas homini œquales vel etiam superiores
esse, et ab eis solummodo organis diôerre ; sic prseserthn
D. D. de la Mettrie, Helve'tius, d'Holbac, le Marquis d'Ar-
gens, Robinet, Cabanis, &c.
258. Alii vero celeberrimi philosophi, tiim veteres, tùm
recentiores, communissimè docent quoddani inesse belluis
principium à corpore essentialiter distinctum et tamen à
meute humanâ verè diversum (a). Cura bis sit
Propositio prima.
259. In belluis adest substantia à corpore verè distincta,
seu anima essentialiter simplex et immaterialis.
Prob. lo. Ex facultate sentiendi seu sensationes experi-
endi. NuUura enim subjectum, nisi sit essentialiter simplex
et immateriale, sentire, seu variis sensationibus afiSci po-
test (227) : atqui apud omnes populos, tùm veteres, tùm
recentiores, liominibus semper persuasum fuit belluas reip-
sâ sentire, et eas gratis et ingratis affici sensationibus.
Hinc ab omnibus meritô rideretur qui graviter assereret,
v.g.jCaneni baculo percussum non magis dolere quàm trun-
cus arboris qui feriretur, et non magis laetari, si ampla Gar-
nis portio ipsi esurienti projiciatur, quàm plantée quag,
sestivo calore irrigantur. Quis unquàm sibi persuadere po-
terit porcum cultro jugulatum, vel bovem vivum excoria-
tum non magis cruciari quàm arbor quae eradicaretur, et
discerperetur, vel quae cortice denudaretur ? Hinc apud
omnes populos crudelitatis reus arguitur homo qui animalia
gratis torquere delectatur, dùm nemo est qui eum immani-
tatis accuset, si suas arbusculas, merâ recreationis causa,
(a) " Après avoir admis une ame dans les brutes, dit Mr. Virey, après avoir vu qu'elles
" étaient sensibles, qu'elles éprouvaient de la douleur et subissaient surtout nus crur.iucs et
" nos injustices, des philosophes, et surtout Leibnitz dans saThéodicée, n'ont pas cru in-
" digne de la suprt^nie bonté d'accorder à ces animaux une part de rémunération dans una
" autre vie.... Un savant socinien allemand a même publié, au 18me. siècle, un volume in-
" 4o. sur les péchés que peuvent commettre plusieurs animaux entr'eux, soir par la gour-
" mandise, concupiscence, &c," Voyez De Peccatis brulorum, aect. 2. Ibid, Il esc aisé
de voir que cette opinion a'est pas pluâ admissible que celle de Descartes.
Q2
244 METAPHYSICA.
destruat aut comburat. Ergo. . . . &c. Et verô, belluse
variis ejulationibus, clamoribus, gestibus, aliisque exteri-
oribus signis, quas experiuntur sensationes et impressioiies
sive jucuâdas, sive ingratas, sensibiliter et veraciter expri-
munt : atqui evidens est eas istud efficere non posse, si
principio simplici et immateriali non donarentur. Ergo
.... &c.
260. Prob. 2o. Ex diversis belluarum operationibus. Vel
enim adest in belluis anima verè simplex et immaterialis,
vel belluse sunt mera automata quorum omnes operationes
nihil aliud sunt quàm efFectus pure mechanici ; atqui pos-
terius répugnât. In mechanicis enim, inquit D. Bou-
vier, ibid. pacj. 280, accurata débet esse proportio inter
causam et effectum, et esedem causse in lisdem circumstan-
tiis similes semper producunt eiFectus ; atqui in bypothesi
quod belluas forent mera automata, utraque haec régula
violaretur. lo. Quidem accurata non existeret proportio
inter causam et effectum ; tune enim variée belluarum ope-
rationes solo corporum aut corpusculorum tactu determi-
narentur ; atqui multse sunt belluarum operationes quse sic
determinari nequeunt ; v. g., apis ex alveo suo egreditur,
assurgit, vadit, redit, circuit, ad flores sibi convenientes
apte se dirigit, mellis et cerœ materiam colligit, variaque
itinera percurrens non errât, et ad propriam suam mansi-
unculam, inalveario positam, redit. En equus immobilis :
sibilum vel flagelli strepitum audit, vel ieviter tangitur,
statim erumpit, mira velocitate currit, cautèoffendiculade-
vitat, ad labrum obvii prsecipitii immédiate sistit, vel illud
audacter transilit ; ecce canis meus ad pedes meos profun-
dè dormiens : sibilo, illum proprio nomine voco ; statim
evigilat, latràt, subsilit, oculos ad me dirigit, mandatum
expectat, quo accepto, prsedam incredibili velocitate pro-
sequitur, eam videns stat, et ubi sit accuratissimè indicat ;
occisam eam arripit et ad me fideliter reportât, &c. ; quis
autem crediderit tôt motus apis determinari solis particulis
è floribus emissis, tôt saltus totque audaces cursus equi
produci à solâ aeris commotione, tantam denique canis sa-
gacitatem efformari solis corpusculis è praedâ exhalatis.
Ergo &c.
" Le chien, inquit D. Virey, a de la mémoire et se sou-
^' vient des bienfaits reçus comme des châtimens qu'il a
METAPHYSICA. 245
" subis. Les impressions gardées dans sa mémoire peu-
** vent se renouveler d'elles-mêmes jusque dans ses songes,
" comme chez l'homme. Le chien peut comparer diver-
" ses idées et des sensations absentes qu'il a conservées
" dans sa mémoire; ainsi le souvenir d'un châtiment éprou-
" vé étant mis en parallèle avec le plaisir de dévorer un
*' morceau de chair, l'animal se détermine à s'abstenir de
" celui-ci. Or, cette préférence, contraire à l'instinct na-
*' turel de la voracité, dépend du choix et d'un jugement
" dicté par la prudence, ou par une vague prévoyance de
*' l'avenir. Le chien sait encore apaiser son maître par ses
" caresses, ou désarmer sa rigueur par une posture sup-
*' pliante. Il devient aussi comme lui, le plus souvent, ar-
" rogant et impérieux dans la haute fortune, humble et
" soumis dans la misère, en se conformant aux manières de
" la maison qu'il habite.
" Le chien aime ou hait, craint ou espère, désire ou
" évite, s'afflige ou s'irrite à peu-près comme l'enfant ou
" l'homme corporel ; il a même des passions relatives à
*' certains rapports sociaux ; il est jaloux, envieux des
" avantages ou des caresses prodiguées à un autre. Il a
" de la reconnaissance pour les bienfaits de son maître,
" malgré les châtimens qu'il en reçoit. Il s'identifie avec
" lui par le sentiment, et se montre ardent à soutenir ses
" intérêts^ aux dépens même de sa propre vie. C'est le
" seul ami qui n'abandonne jamais dans l'infortune. Il sait
" guider l'aveugle, l'écarter du danger et du précipice. II
" hurle de douleur et de compassion aux cris de son maître,
" comme il participe avec transport à sa joie, à son bon-
" heur. Il est, en un mot, l'être le plus fidèle, le domes-
" tique le plus tendre, le moins égoïste, le plus docile
" qu'on puisse trouver sur la terre. Nouv. Dict. d'hist.
nat. article, animal.
2o. Eœdem causa3 iisdem in circumstantiis similes non
producerent effectus ; sic, v. g., canis videt dominum arma
venationis arripientem, lœtabundus exultât, saltibus fré-
quenter repetitis aliisque signis evidenter manifestât se ul-
tra rnodum oblectari : si idem faciat extraneus, canis nul-
lum currendi desiderium manifestât. Si dominus petasum,
vel linteolum,vel quoddam aliud objectum alicubi de indus-
triâ reliquerit, et etiam cum aUis vestibus, et haec tantiim
246 METAPHYSICA.
verba ad canem dirigat : quœre, perdidî, aliquo exteriori
signo indicans objectum, statim canis currit, quserit et ob-
jectum inventum ad dominum portât : alienus eadem verba
proférât, eodem signo indigitet, canis audiet, loquentem et
gesticulantera conspiciet, sed non parebit ; eadem est ta-
men causa physica, esedem sunt circumstantiœ ; at idem
non est efFectus.
" Il faut avouer, inquit D. Gérard, que les chiens éton-
" nent souvent un philosophe. Montaigne admire avec
*' raison ceux qui conduisent les aveugles ; ils savent s'ar-
*' rêter aux portes oii leurs maîtres doivent demander l'au-
" mône. Ils savent leur faire éviter les embarras des rues,
" et quoiqu'un espace soit assez large pour eux, ils n'y
'* passent pas, s'il n'est pas assez large pour leur maître."
Essai sur les vrais principes, tom. 2. pag. 59. Ergo 2o. . . .
&c. AUundè. . . . &c. Ergo. . . . &c.
261. Prob. 3o. Deus non potest nos positive impellere
in errorem invincibilem; atqui si in belluis non adesset anima
verè simplex et immaterialis, Deus nos positive impelleret
in errorem invincibilem. Universali enim et invincibili pro-
pensione ferimur ad judicandum belluas sentire, casque va-
riis sensationibus afhci, quod repugnaret, si anima verè
simplici et immateriali non donarentur (225). Ergo. . . . &c.
Et vero, ideo inviti ferimur ad judicandum alios homines
varias experiri sensationes, quia eas quibusdam signis ex-
ternis evidenter manifestant ; atqui seepiiis bellutie, servatâ
tamen proportione, iisdem utuntur signis externis quibus
utuntur et ipsi homines ; niirum non est ergo si inviti fera-
mur ad judicandum belluas varias experiri sensationes.
Porrô beiluse sensationes experiri non possent, si anima es-
sentialiter simplici et immateriali non donarentur, ut jàni
vidimus. Ergo judicare non possumus belluas esse mera
automata quin propensioni naturali et consequenter quin
ipsi naturse voci adversemur. — Hinc Moyses, Gen. cap. 1.
animalia, cujuscunque sint generisj vocat animas viventes.
Solvuntur ohjectiones.
Obj. lo. Celeberrimus Vaucanson, plurimique alii in me-
chanicis versatissimi mirabilia effecerunt automata, quse
quamdam animalium speciem exhibebant. Ergo à fortiori
Deus, cujus infinita est sapientia, ità belluas constituera
potuisset, ut licèt sint mera automata, cunctas tamen func-
tiones suas appriraè exercere viderentur.
METAPHYSICA. 247
262. Resp. lo. Neg. consqam. et paritatem. Antoma-
torum de quibus hic mentio est, structura, quœcunque sit,
nedùm adversetur, è contra conformis est legibus physicis ;
at non ilà foret, si belluae vera essent automata ; contra
enim leges physicas nobis evidenter cognitas agerent (260).
Ergo nulla est paritas.
ilesp. 2o. Neg. consqam. Licèt enim Deus absolutè, in
alio rerum ordine, potuisset ità belluas constituere, ut,
quamvis mera forent automata, possent tamen cunctas suas
iunctiones exercere, concludi non débet illum idem posse
in prtesenti rerum statu. Tune enim nos positive in erro-
rem invincibilem impelleret, quod répugnât.
Obj. 2o. Quœdam plantse, v, g., sensitivœ, {les sensi-
iives) veros sensibilitatis characteres exhibent, licèt omnino
sint materiales; ergo bellueepossunt esse omnino materiales,
licèt nobis exhibeant vera sensibilitatis signa.
263. Resp. Neg. ant. Istius modi plantée non ideo vo-
cantur sensitivœ quia sensus seii sensationes experiuntur, '
sed quia quidam in eis inspiciuntur efFectus physici qui
exhibent quamdam analogiam cum motibus animalium (a) ;
at nemo credidit unquàmeas rêvera sentire,et esse ejusdem
naturae ac animalia. Ergo nulla est paritas,
Observandum est onmia animalia eodem sensibilitatis
gradu non donari : plus minùsve sentiunt, jaxta propriam
constitutionem suam et irritabilitatem fibrarum, nervorum,
&;c. Sic, v. g., canis raultô raagis sentit quàm mutilus
{moule, espèce de coquillage), ostrea {huître), &c. Haîc sen-
sibiUtatis diversitas evidenter pendet à summâ Dei volun-
tate, qui singulas bellaarum species ad diverses fines des-
tinavit.
(a) En voyant les plantes tourner assez généralement leurs feuilles et leurs fleurs vers le
" soleil ; en voyant les feuilles de la sensiiive se replier r.i>mme subï'ement quand on ks
'• touche avec la ni^iin, et reprendre leur premier état quflques motneiis après qu'on a cessé
" de les toucher ; en voyant cette mêine phnie, lorsque le soleil se couche, s'abattre au
■' point de paraître comme morie, et le lendemain, au lever de cet astre, revenir îi s«>n état
'' naturel, on est foti.'é à reconnaître dans certains organes des végétaux, une irritabilité ae-
" sez sem'ilable à et- Ile qui se manifeste dans les organes des a:i.maux; mais non à conclure
" qu'il y ait. dans lr:s premiers, une sensibiliié proprement dite ,• puisque ces phénomènes
" peuvent n'être, et ne sont effectivement que des mouvemens purement mécaniques, dé.
" pendans de ceriiines contractions, dont la physique nous fournit des exemples, L'al-
" trappe-mouche nu dionéf\(\iii dôme si bien l'idée d'un animal Carnivore, n'en est, au vrai,
" qu'une pure repréjentation. Il saisit de la moine manière tous les petits corps qui vien-
" nent J» le toucher, et les retient avec la mê;T>e opiniâtreté. Il est facile d'en conclare, que
" iesmouvemens en apparence spontanés de cette pUnte, «ont uniquement une dépendance
" des lois de l'irriiibiliié. Loin de nous donc celte idée, qu'il y ail des plantes où se trouve
'■ comme un premier degré de sensation, et qui fussent, en quelque sorte, le passage du
" règne végétal au règne animal. Si. dans le fait, il e.^istait des plantes dt>uée3 d'une s«n-
" sibilité proprement dite, elles seraient de véritables animaux ; de même que des odî-
" maux privés de sensibilité ne seraient que des plaates.'' Leçont de la nature, par
Mr. Louis Cousiii-Despréaux, comidéralion 74.
248 METAPHYSICA.
Obj. 3o. Experientiâ constat polypum secari posse in
plurimas partes, quee deindè integri polypi évadant. Ergo
in polypis nulla est substantia perfectè simplex et imma-
terialis.
264. Resp. Neg. consqam. Ex hâc experientiâ id unum
concludi potest, scilicet, generationis semina non esse in
unicâ polyporum parte mclusa, sed dissita per omnes eorum
partes. Undè mirum non est, si unusquisque truncus éva-
dât integer polypus {a), simul ac semen generationis quod
continet, ad animationem pervenit juxta leges à Deo sta-
bilitas.
" Il est à présumer, inquit D. Cousin-Despréaux, que,
** dans les êtres de ces espèces (les polypes et les vers de
" terre), les germes, au lieu d'être renfermés dans certaines
" parties, comme chez les autres animaux, sont répandus
*' dans tout le corps, et se développent d'eux-mêmes, dès
(a) Il s'agit particulièrement dans cette objection des polypes d'eaii douce, que l'on con-
naît aujourd'hui sous le nom d'hydres. " Ce3 animaux sont formés par un sac membra-
*' neux plus ou moins long, plus ou moins large, terminé par une ouverture au tour de ia-
" quelle sont implantés de six à douze tentacules ou bras plus ou moins longs, qui leur ser-
" vent pour arrêter leur proie. Tous ces tentacules paraissent comme des fils qui s'allon-
" gent, se contractent et se meuvent en tous sens, h volonté et indépendammenl les uns des
" auires. C'est dans l'eau que vivent toutes les hydres. Elles se fixent par la partie pos-
" térieure de leur corps, sur une base solide, telle que les plantes aquatiques, les racines
" des arbres, les branches tombées dans l'eau, et ce toujours du côte le plus exposé à la
" lumière. Lorsqu'elles veulent cluinger de place, elles le font par un mouvement alterna
" tifde dilatation et de contraction, ou bien eu faisant la roue avec leurs tentacules; mais
" leur marche est fort lente. Un demi-pied de chemin exige chez elles l'emploi d'une
" journée d'efforts contiimels.
" Aussi les hydres ne courent-elles pas après leur proie, elles l'attendent. Elles se tiour-
*' rissent habituellement de larves, d insectes et de vers aquatiques de petites dimensions.
" Lorsqu'un de ces animaux passe h la portée d'un des tentacules d'une hydre, il en est
" entouré, conduit au centre à l'aide des autres tentacules et englouti ;i l'instant... C'est
" par la bouche que sortent toutes les matières ou portions de matières indigeslibles.
" Les hydres s'avalent souvent les unes les autres, et l'avalée, après ôtre restée qiielque-
" fois plusieurs jours dans le ventre de l'avaleuse, en sort toujours intacte et vivante ; elles
" sont indigestibles les unes pour les autres .... La génération des hydres est ce qui a paru
" le plus surprenant aux observateurs qui les premiers les ont connues... .Elles multi-
" plient comme les plantes par rejetons et par boutures.
" Pendant l'été, on voit souvent paraître sur le côté d'une hydre une petite excroissance
" qui bientôt prend la forme d'un bouton, ensuite pousse des bras, et devient enfin un po-
" lype complet. Ces nouveau-nés n'ont pas encore pris tout leur accroissement, qu'ils
" deviennent déjîi père et mère d'autres polypes qui sortent de la même manière de leur
" corps. On a compté jusqu'h dix-huit hydres ainsi réunies. Lorsqu'un membre de la fa-
" mille saisit quelque proie et qu'il l'avale, la nourriture se distribue h tous les au-
" très, ainsi qu'on s'en est assuré par le moyen d'alimens colorés . ." Lorsqu'on
" coupe un polype en deux, la partie où est la bouche marche et mange le même
" jour, pourvu qu'il fasse chaud ; elle semble n'avoir éprouvé aucun changement.
" A l'égard de l'autie partie, il lui pousse des tentacules au bout de vingt-quatre heures, et
" en deux jours elle devient un animal parfait, marchant, saisissant sa proie, &c. Lors-
" qu'on coupe le polype en trois, en quatre, en vingt parties, &c., toutes deviennent en peu
" de jours chacune un aniinal complet "Cette étonnante manière de se multiplier n'est
" pas toujours produite par des causes étrangères. Souvent les hydres se déchirent et se
" séparent en deux, trois ou quatre parties,^ qui deviennent autant d'animaux parfaits, sans
" <,u'on puisse deviner comment se fait cette séparation " Mr. Tiemblay a retourné un
" polype cotnme on retourne un gant Au bout de deux ou trois jours il n'y paraissait
" pas. Ce genre de polypes est extrêmement voisin de celui des Actitiies et de celui des
" Sertulaires." Nouveau Dictioiaiaire d'histoire naturelle, article Hydres, par Mr. Bosc.
METAPHYSICA. 249
•' qu'ils reçoivent une nourriture convenable. En coupant
** l'animal, on détermine vers le germe des sucs qui eussent
*' été conduits ailleurs, si l'on n'avait pas ainsi déterminé
" leur cours. L'abondance de ces sucs développe des par-
** ties qui, sans eux, seraient restées unies et attachées les
" unes aux autres. Chaque morceau du polype ou du ver
" peut donc être considéré comme contenant en soi, ainsi
** que le bouton d'un arbre, tous les viscères, tout ce qui
** est nécessaire à sa reproduction. Toutes les parties
*' essentielles à la vie sont distribuées par tout le corps, et
" la circulation a lieu jusque dans les moindres particules."
Leçons de la nature, considération 78.
Propositio secunda.
265. Homo essentialiter difFert à belluis.
Prob. Homo enim, naturâ suâ, plurimas habet facultates
qu9e nunquàm visse sunt in belluis ; sic, v. g., habet facul-
tatem percipiendi et ideandi, ideas et imagines comparandi,
de convenientiâ aut disconvenientiâ earum pronuntiandi, à '
particularibus ideis et imaginibus ad generaliora principia
assurgendi, remotissimas indè conclusiones deducendi,
omnes suas cogitationes signis arbitrariis et prsesertim voce
manifestandi,opereflexionis, scripturae et colloquiicum aliis
hominibus in variis artibus et scientiis multùm proficiendi,
prœterita, praesentia et futura simul complectendi, in ab-
stractionibus versandi, non soliim de existentiâ, sed de ipsâ
possibilitate rerum et de earum proprietatibus disserendi,
propositiones de bono in génère et de veritate instituendi,
essentiale discrimen inter bonum et malum morale cog-
noscendi : prœtereà Deum creatorem suum contemplatur,
infinitas ejus perfectiones investigat, alias ab aliis deducit,
firmissimis argumentis eas défendit ; illum adorât, venera-
tur, laudibus extoUit, deprecatur, gratias illi agit, &c. ; le-
gem naturalem cognoscit, malum morale execratur, bonum
illi placet, &c : atqui nullis signis manifestant belluse taies
se habere facultates ; scientiis prorsùs extranese sunt, de
speculativis non ratiocinia nostra ullo modo percipiunt,
nuUum progressum in artibus ab origine mundi fecerunt ;
eodem modo semper agunt, sive junioris, sive provectioris
sint setatis ; eodem modo castores œdificant, aves nidifi-
cant, formica-leo ahis insectis insidiatur, canes venantur,
&c.; eumdem raorem singulae species jugiter servant j om-
250 METAPHYSICA.
nés de propriâ conservatione, et de speciei propagalione
tantùm sollicitée sunt («). Reverà quidem belluse cogitant,
judicant, ratiocinantur, memoriam habent, délibérant, com-
parant, eligunt, &c., sed solummodo per imagines in ordine
valdè limitato et circa objecta sensibilia, et essentialiter ca-
rent eximiis facultatibus suprà memoratis, quibus ex natu-
râ suâ eminenter homo donatnr. Ergo. . , .&c.
266. " J'irai plus loin encore, inquit D. Barruel ; je vous
*^ étonnerai peut-être dans ce que j'oserai vous permettre
" de voir dans l'animal. Je vous dirai qu'il est libre dans
" ses directions ; qu'il choisit et raisonne son choix ; qu'il
" peut être infidèle à votre voix, lorsqu'il vous obéit ; qu'il
" agit et se meut conséquemment à ce qu'il voit de pire et
" de meilleur. Mais quels sont les objets sur lesquels sa
*' raison et sa liberté s'exerceront ? Il fuira la prison que
'' vous lui destinez ; il brisera ses chaînes, et rompra sa
** cloison pour respirer un air qui le ranime, pour exercer
" ses membres engourdis, pour éviter la gène, la con-
*' trainte ; il flattera la main qui l'en délivre. La liberté
*' des champs, ou celle de courir après sa proie, voilà «e
** qu'il désire. Et ses raisonnemens, jusqu'où s'étendront-
" ils ? Il sent qu'il est plus faible, il ne s'en prendra pas
" au plus fort, il dévorera le plus faible ; il empîoira et la
" ruse et l'adresse pour l'atteindre ; à l'instinct de la na-
" ture il ajoutera même la lumière de vos leçons ; ce qu'il
" prévoit devoir être suivi de la verge, il l'omettra, ou
*' évitera vos regards pour le faire ; ce qu'il pourra prévoir
" vous engager à satisfaire son appétit et ses besoins, vous
" l'obtiendrez de lui. Il fuira son ennemi, il déclinera le
'*■ danger, il choisira, parmi cent moyens d'arriver à sa fin,
•' le plus aisé, le plus court, et quelquefois même le mieux
" combiné. N'est-ce pas dans ce choix des moj^ns que
*' vous mettez et la liberté et la raison de l'animal?. . . .
" Venez voir le sage dans les fers ; c'est là que je pourrai
" vous faire voir la liberté de l'homme commençant où cel-
" le de l'animal finit ; et tout l'empire de la raison s'éten-
" dre, et toutes les facultés de l'homme se développer où
" l'animal n'a plus d'idées.
*' Que les tyrans menacent, que leurs bourreaux étalent
*' leurs instrumens de mort ; ils ont enchaîné le sage sur
(aj Bouvier, MetQphysicœ, png. 287.
METAPHYSICA. 251
*' un lit de fer ; qu'ils ordonnent le crime ou l'erreur, l'ani-
* mal est dompté ; mais l'homme va se montrer en roi,
' l'esprit seul conservant son empire au milieu des siippli-
" ces comme dans les pièges des syrènes ; le tyran voudra
■' le crime et la faiblesse, le sage montrera la vertu et la
" constance. Le tyran déchirera des membres ; il mena-
•' cera d'arracher une langue obstinée à publier la vérité, il
" n'arrachera pas le mensonge. Voilà ce que j'appelle la
" liberté de l'homme, c'est-à-dire, de penser en homme, de
'' parler en homme, de sacrifier l'erreur à la vérité, le vice
" à la vertu, et tous les sens à l'ame : de connaître, de
" voir, de choisir non ce qui est flatteur pour mes organes,
** utile à ma santé, à la conservation de ce corps de pous-
" sière, mais ce qui est honnête et utile à l'esprit. So-
*• phistes flétrissans, comparez à cette liberté celle de l'ani-
" mal ! Cette raison même, cette intelligence que vous
" exaltez dans la bête, faudra-t-il la rapprocher encore des
'' notions de la raison et de l'intelligence de Thomme ?
" Suivez-nous à l'école du sage, et venez établir vos pa-
"■ rallèles ; venez prêter l'oreille à l'homme discutant sur
" la justice, sur l'immortalité, la spiritualité, l'art de régir
" les peuples et de les rendre heureux ; sur l'ame, la raa-
" tière, la divinité et ses attributs. Ce que vous appelez
" les bêtes raisonnables, faites-les donc passer à cette école ;
" c'est là qu'elles auront des yeux pour ne plus voir, des
'* oreilles pour ne plus entendre, une intelligence pour ne
" plus raisonner. C'est laque la stupeur de l'animal sera
'' la stupeur de la brute et de la pierre même. Le néant
*' n'est pas plus nul pour lui que ce monde nouveau ; et,
" s'il faut achever de vous confondre, que le disciple du
'' Christ ouvre la bouche, qu'il prononce les mots de sain-
" teté,de royaurae des justes ; qu'il parle de l'amour du cré-
'' ateur, du détachement des riehesses, de l'humilité de
*' l'esprit, de la mortification des sens; alors peut-être en-
'* fin vous nous direz : l'homme seul peut entendre ces
" paroles ; entre l'ame qui les peut concevoir et celle de la
** bête, il y a l'infini. Vous n'aurez point encore dit assez,
" et vous ne l'aurez pas distinctement conçu. Il faut pour
" bien connaître toute la différence de l'ame de la bête à
'' l'ame de l'homme, se plaire à parcourir toutes ces régions
** où l'animal est nul par le fait, et où l'homme domine."
Helviennes, tom. 3. pag. 147, &c.
252 METAPHYSICA.
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Si beliuse eadem ac nos haberent organa, forte
exercèrent facultates nostris similes ; ergo non constat eas
ab homine essentialiter differre.
267. Resp. Neg. ant. Mutatio enim organorum naturara
animas non mutaret ; atqui ex naturâ suâ bratorum anima
preeclaris mentis humanœ facultatibus non donatur (265,
266). Ergo etiamsi belluœ eadera ac nos biberent organa,
non minus tamen ab homine essentialiter difFerrent.
Insuper, organa non desunt belluis ut intell'^ctuales exer-
cèrent facultates, si illas possiderent : tam per.'bctè et saepè
perfectiiis vident, audiunt, odorantur, gustant ?c sentiunt
quàm homines ; linguam et pulmones habert ; quid ergo
eis deest ut loquantur, discurrant, &c? Intelligentia pro-
priè dicta, aliœque mentis humanas facultates. Uno verbo,
tam universaliter et invincibiliter judicant homines belluas
ideandi facultate, seu intelligentia propriè dicta destitui,
quàm fiducialiter pronuntiant eas sentire. Ergo. . . . &c.
Inst. Belluœ educantur et discunt, intra eamdem speciem
alise multo faciliùs quàm ali£B instituuntur. Ergo veros
intelligentise cbaracteres exhibent.
268. Resp. Dist. Consequens. Veros cbaracteres intel-
ligentice impropriè dictse, valdè limitatœ et circa objecta
sensibilia tantùm exhibent ; conc. consqam. Seci^is ; neg.
consqam, ob rationes allatas (265). Reverà belluœ per
imagines res sibi reprsesentare, judicare, ratiocinare, com-
parare, deliberare et eligere possunt circa objecta sensibilia.
Hoc posito, facile coraperitur intra eamdem speciem dari
individua quse diversos hujus intelligentiae gradus posside-
ant, et consequenter quœ majori vel minori aptitudine dis-
cendi polieant ; id enim ex organorum dispositionibus con-
tingere potest. Sed nego belluas veros intelligentiœ propriè
dictse cbaracteres circa objecta pure intellectualia unquàm
exhibuisse : nullœ visce sunt quee ope ratiocinii, sicut ho-
mines, erudiri potuerint ; solummodô ictibus repetitis, vel
eorum signis, pabulo prœstito vel oblato instituuntur. Inter
varias earum multitudines, aliae ab aliis ingenti discrimine
separantur, et tamen quse intelligentiores videntur, non
magis in ordine suo profecerunt quàm crassiores. Ergo
. . . . &c.
METAPHYSICA. 253
269. " L'homme, inquit D. de Bonald, naît dans î'igno-
" rance de tout ce qu'il doit savoir, mais avec la capa-
" cité d'apprendre de ses semblables tout ce qu'il ignore,
*' de tout connaître et de se connaître lui-même. La brute,
" au contraire, naît instruite de tout ce qu'elle doit faire,
" mais incapable d'aller plus loin. La raison de l'homme
•' est incertaine, et les passions l'égarent sur la route ; par-
" ce qu'elle n'arrive que par degrés, et en e'cartant ses
** passions, à la connaissance de la vérité. L'instinct de
** la brute est sûr, même infaillible, et ses passions ne font
'* qu'ajouter à sa sagacité ; parce que n'ayant rien à ap-
" prendre, elle doit avoir tout reçu pour la fin qui lui est
" propre. . . .
" Je le répète ; l'animal naît parfait ; l'homme naît per-
**■ fectible. ... La brute n'a rien à apprendre de son espèce,
" collection d'êtres animés rapprochés par les mêmes be-
" soins, qui ne connaissent rien, pas même la perfection de
" leur instinct ; l'homme a tout à recevoir de son espèce,
" société d'êtres intelligens réunis dans des idées générales,
*' qui connaissent tout, et même l'imperfection de leur in-
*' telligence. . . . L'espèce brute recommence toujours, et
^' tourne sans cesse dans un cercle qu'elle ne peut franchir :
" l'espèce humaine ne s'arrête jamais, parce qu'elle suit une
" ligne droite dont elle ne peut atteindre le terme." Recher.
philos, tom, 2. pag. 28L
Obj. 2o. De essentiâ spiritûs est donari intelligentiâ
verâ et propriè dicta. Ergo homo essentialiter non differt
à belluis.
270. Resp. Neg. ant. Dantur substantice solummodô
ideandi et imaginandi capaces, nempè Deus et Angeli ;
dantur pariter substantiae quse ideandi, imaginandi et sen-
tiendi facultatibus donantnr, scilicet mentes humanse : cur
ergo repugnaret alias existere substantias quse, in ordine
inferiori, solis facultatibus imaginandi et sentiendi, vel
etiam quse solâ sentiendi facultate donarentur ? Nunquàm
demonstrabitur hujusmodi substantias esse impossibiles,
dùm è contra evidenter constat belluas anima verè imma-
teriali donari (259), et eas non esse ideandi capaces (265,
266). Ergo. ...&c.
27 L Ex eo quod omnes omninô belluse anima verè sim-
plici et immateriali donentur, concludi non potest omnes
254 METAPHYSICA.
earum varias species iisdem gaudere facultatibus ; quemad-
modùiTi enim belluee organis physicis multùm à se invicem
discrepant; sic industriâ, aptitudine, imaginatione, mansu-
etudine aut feritate, &c., inter se difFerunt. Mirabilis est
Deus in cunctis operibus suis, licèt finis ab eo intentus
sœpè nos lateat. Si quœratur à nobis cur tôt creaverit bes-
tias qutE hominibus inservire non possunt, cur eas sic aut
sic fecerit, respondebimus nos ignorare ; at in cunctis, cu-
juscunque generis sint, manitesti relucent infinitaî sapientiœ
thesauri.
Obj. 3o. Contra primam propositionem. Si anima bellu-
arum est perfectè simpiex et inimaterialis, débet esse im-
mortalis. Falsum consequens ; ergo et antecedens,
272. Resp. Neg. maj. Rêvera ex eo quod belluarum ani-
ma sit perfectè simpiex et immaterialis, rectè concluditur
illam esse immortalem ab intrinseco (23G, 238) ; at inferri
non potest illam idcircô futuram esse reipsâ immortalem.
Ipsa enim mens humana non ideô immortalis est quia est
perfectè simpiex et immaterialis, sed quia intelligentiâ pro-
priè dicta et ratione donatur, ut inferri potest ex dictis (237
et seq.). Atqui belluarum anima neque intelligentiâ pro-
priè dicta, neque ratione donatur (265, 206). Ergo ex eo
quôd belluarum anima sit perfectè immaterialis, concludi
non potest illam reipsâ esse immortalem.
Inst. lo. NuUa pars materiœ annihilatur, sed tantùm no-
vas induit formas ; ergo à pari anima belluina^ quse mate-
riâ nobilior est, annihilari non débet.
273. Resp. cum D. Bouvier, Metaphy. pag. 293, neg.
consqam. et paritatem. Ratio disparitatis est quod, disso-
luto corpore, materia ad aliquem tinem destinata esse non
desinat ; tune enim ejusdem fit naturee ac cœtera elementa
ex qui bus conflatur mundus, ac proindè eamdem habet des-
tinationem ; contra vero anima concessa est belluis ut ea-
rum conservation! invigilet ; casque in obeundis functioni-
bus suis dirigat : nullis indiciis manifestât se ad sublimio-
rem finem destinari : porrô, cessante fine propter quem fuit
creata, statim in nihilum proprio pondère labi débet. Ergo
&c.
'' Quelles difficultés ne vois-je pas d'ailleurs s'applanir,
" inquit D. Barruel,dès qu'avec la raison je prescris à l'ani-
" mal de véritables bornes ? Un être immatériel vit dans
METAPHYSICA. 2r.5
'* lui ; mais la destinée de cet être est bornée à diriger la
** machine. L'un et l'autre dès-lors n'existeront que pour
" peupler la terre, ou pour servir à mes besoins. Ce
" qui termine la carrière de l'une, conscm.me le destin de
" l'autre. L'animal n'a connu que le physique ; le moral
*' est pour lui un monde inaccessible. L'amour du vrai,
" du juste ne lui a point acquis le droit de se survivre ; il
' * a développé toutes ses perfections ; sa destinée est com-
" plète ; la même sagesse qui l'avait dictée, exigera qu'il
" cesse d'exister après l'avoir remplie ; le privilège de l'im-
" mortalité est assuré à l'homme seul." Helviennes, tora.
3. pag. 166.
lust. 2o. Multîe belluse plures experiuntur ingratas sen-
sationes quàm jucundas in hâc vitâ : atqui justitia Dei id
permittere non potest, nisi futura sit altéra vita in quâ hœc
inordinatio reparetur : ergo , . . &c.
274. Resp. cum D. Bouvier, ibid. pag. 294., lo. neg.
maj.; lo. enim belluse non recordantur praeterita, nisi ad-
modi'mi imperfectè, non prœvident futura, dolorum cordis
et animi expertes, mœroribus non afficiuntur ; atqui hsec
omnia multo vividiùs nos cruciant quàm dolores physici, ut
ità loquamur.
2o. Belluae de seipsis tantiim sollicitae sunt, consimilium
miseriis non compatiuntur, in servitutem rediguntur, cate-
nis obruuntur, ad opéra vilia adhibentur, post multos labo-
res aliis dominis traduntur, publiée in foro exponuntur et
venduntur, sed ha;c omnia non aestimant nec sentiunt ;
occiduntur, sed de factis non pœnitentes, defuturis nullam
et etiam momentaneam anxietatem experiuntur ; flagellan-
tur et pro lideli ministerio non semel maîa recipiunt, sed
ingrati criraen. liominum animi non percipiunt, et ideô hœc
agendi ratio eas mœrore non conficit. Si acerbis sensationi-
bus afficiuntur, mox gratis recreantur, et sic qusedam com-
pensatio ferè semper instituitur.
3o. Minori sensu communiter percelluntur bestiae quàm
homines, ut ex pluribus experientiis constare videtur. Sic
araneis. muscis, scarabœis, &c., pes, ala, crus integrum
frangitur vel eruitur, et nihilominùs bestiola movetur et
abit ferè sicut nihil sibi accidisset : si quoddam det signum
doloris, levé est ordinariè et fluxum : ergo. . . . &c.
256 METAPHYSICA.
Resp. 2o. Neg. min. Cùm belluse conservationi suîç
perpetuo invigilare debeant, necesse est ut de his quœ sibi
conveniunt per sensationes ingratas moneantur; dolores
igituFj quos experiuntur, ex ipsarum constitutione naturali
oriuntur. Si qucedam ultra modum ab hominibus excruci-
antur, id per accideiis evenit, et Deo tribui non débet, sed
hominibus qui sœpè ordinationem sapienter à Deo institu-
tam suâ feritate et immanitate deturbant. Ergo. . . . &c.
275. ** Cet être immatériel dans la bête aura souffert
" sans doute, inquit D. Barruel, parce qu'il a fallu que la
" douleur l'avertît des soins qu'il devait à la machme ; mais
*' chez lui la douleur n'est que celle des sens et du mo-
*' ment ; mais la réflexion, les souvenirs amers, la prévoy-
" ance, souvent plus douloureuse encore, rien de ce qui
" déchire mon ame sans passer par mes sens, n'a troublé
'* ses plaisirs ou ajouté à ses douleurs : mais il a recuilli
" sans semer, joui sans mériter ; mais la mort elle-même a
" perdu pour lui ce qui la rend aux hommes si terrible, le
" triste souvenir du passé, l'eiTrayante incertitude de l'ave-
** nir. Il ne l'a point prévue, il meurt sans la connaître.
*' L'animal aura souffert sans doute, mais un Dieu cesse-t-
" il d'être juste, parce qu'il ne l'a point rendu impassible,
" parce qu'il lui donna l'existence au prix de quelques dou-
" leurs rares et passagères, mille fois moins cuisantes que
" les miennes ? Cesse-t-il d'être sage, en faisant de ces
" douleurs le principe des soins que l'animal même doit
" donner à sa conservation ? Cesse-t-il d'être bon, en
" compensant quelques douleurs bien moins cuisantes que
"• les miennes, par des plaisirs plus vifs et sans remords,
" par un bien-être habituel, moins sujet que le mien à s'al-
" térer ? Non le sort de la bête n'autorisera point nos
'' blasphèmes. Si des hommes avides ou barbares ont pu
' * troubler la Providence en aggravant le joug de l'animal, ils
" seront seuls coupables, et la dureté de leur cœur ne sera
" point le crime de la Providence." Ihid. pag. 166.
Finis Metaphysicœ.
INDEX METAPHYSIC^.
257
IVhlH.
Metaphysica, 1
De Pneumatoîogiâ seu de Metaphysicâ particulari, 2
Pars priaia Pneumatologiœ.
De Theodiceâ, S
Caput primum, an sit Deus, 4
I. De prtecipuis argumentis quibus existentia Dei
demonstratur, 8
1. Argumenta moralia existenticie Dei, 10
Propositio I. Conscientias stimuli Deum esse probant, 12
Propositio IL Unanimis populorum consensus Deum
esse demonstrat, 13
Solvuntur objectiones, 15
2. Argumenta pbysica existentiae Dei, 2V
Propositio I. Ex creatione materiae demonstratur
Deum existere, 39
Solvuntur objectiones, 40
Propositio II. Ex necessitate primi materise motoris,
demonstratur Deum existere, 44
Solvuntur objectiones, 45
Propositio III. Mirabilis totius orbis dispositio Deum
esse demonstrat, 47
Solvuntur objectiones, 49
3. Argumenta metaphysicâ existentiœ Dei, 58
Propositio. Existentia entis necessarii Deum esse
demonstrat, 59
Solvuntur objectiones, 61
II. De Atheismi incommodis.
Propositio I. Atheisraus noxius est hominibus pri-
vatis, 64
Solvuntur objectiones, 65
Propositio IL Atheismus noxius est societati naturali, 66
Solvuntur objectiones, 67
Propositio III. Atheismus noxius est societati poli-
ticae, 69
Solvuntur objectiones.
m. De prœcipuis Atheorum systematibus.
1. De Systemate Academicorum, 74
Propositio I. Mundus non est œternus, 75
258 INDEX METAPHYSIC^.
Solvuntur objectiones,
Propositio II. Veram mundi antiquitatem, veramque
diluvii universalis epocham assignavit Moyses,
Solvuntur objectiones,
2. De Systemate Epicuri;,
Propositio. Absurdum est Epicuri systema,
Solvuntur objectiones,
3. De Systemate Spinosee,
Propositio. Rejiciendum est Spinosae systema,
Solvuntur objectiones,
4. De Systemate Immaterialistarum,
Propositio. Rejiciendum est systema Immaterialis-
tarum, 113
Caput secundum. De Attributis divinis, 1 14
I. De Attributis Dei absolutis.
1. De Asseitate, 115
Propositio. Deus à se, essentialiter et necessariô
existit, 116
2. De Infinitate seu omni-perfectione Dei.
Propositio. Deus est in omni perfectionum génère
infinitus, 117
3. De Independentiâ Dei.
Propositio. Deus est summè independens, 118
4. De ^ternitate Dei, 119
Propositio. Deus est seternus, 120
5. De Unitate Dei, 121
Propositio I. Deus est unicus, 422
Solvuntur objectiones.
Propositio II. Duo Manichseorum principia répug-
nant, 124
6. De Simplicitate Dei, 126
Propositio. Deus est substantia omninô simplex, 128
7. De Immensitate Dei, 130
Propositio. Deus ratione substantise suîe est immen-
sus, seu ubique prsesens, 131
Solvuntur objectiones.
8. De Libertate et Immutabilitate Dei, 132
Propositio I. Deus est liber in operibus externis,
V. g., in creatione mundi, 136
Propositio II. Deus ab seterno sese libéré determi-
navit, 137
INDEX METAPHYSICiE. 259
Solvuntur objectiones.
Propositio III. Deus in suis determinationibus im-
mutabilis est, 140
Solvuntur objectiones, 141
IL De Attributis Dei relativis, 149
1. De Scientia Dei, 150
Propositio I. Deus novit omnia absolutè futura libéra
et contingenlia, 158
Propositio IL Deus infallibiliter cognoscit futura
conditionata, etiam ea quorum conditio nunquàm
est ponenda, 1 59
Solvuntur objectiones, 160
2. De Omnipotentiâ Dei.
Propositio. Deus est omnipotens, 169
3. De Providentiel Dei, 170
Propositio I. Deus singulis et omnibus rébus etiam
minutissimis summoperè providet, 174
Solvuntur objectiones, 175
Propositio IL Sub Deo summè provido potest et
débet esse malura naturse, 179
Propositio III. Sub Deo summè provido potest esse
malum pœnse, 180
Propositio IV. Deus summè providus permittere
potest malum culpse seu peccatum, 181
Solvuntur objectiones, 182
Pars secunda Pneumatologise.
De Psychologiâ, 197
Caput primum. De Mentis activitate, 198
Propositio. Mens humana est activa, seu suas ipsa
producit volitiones, 200
Solvuntur objectiones, 201
Caput secundum. De Mentis libertate, 209
Propositio. Est in homine vera et propriè dicta
libertas, 215
Solvuntur objectiones, 216
Caput tertium. De Mentis spiritualitate, 222
Propositio. Mens humana est simplex et imraate-
rialis, 223
Solvuntur objectiones, 227
Caput quartum. De Mentis immortalitate, 235
r2
260 INDEX METAPHYSIC^.
Nuni'
Propositio I. Mens humana immortalis est ab in-
trinseco, 238
Propositio II. Sua post hanc vitam manent vitiosis
supplicia, et suée probis mercedes, 241
Solvuntur objectiones, 242
Propositio III. Recta ratio suadet justorum beatitu-
dinem futuram esse eeternam, 248
Propositio IV. Demonstrari non potest repugnare
pœnarum aeternitatem, 249
Solvuntur objectiones, 252
Caput quintum. De Belluis, 256
Propositio I. In belluis adest substantia à corpore
verè distincta, seu anima essentialiter simplex et
immaterialis, 259
Solvuntur objectiones^ 262
Propositio II. Homo essentialiter differt à belluis, 265
Solvuntur objectiones, 267
Finis Indicis Metaphysica.
261
JNSTITUTIONUM PHILOSOPHICARUM
PARS TERTIA.
ÊTHICA SEU MORALIS.
jrpTHICA seu Moralis ea est pars Philosophise quae de
1. J2j regulis morum tractât, undè Disciplina Moralis
saspè vocatur. Definiri solet, " scientia practica actus
** humanos ad probitatem et honestatera dirigens." Du-
plex est Ethica, generalis et particularis. Generalis consi-
dérât actus humanos in génère, et tradit prsecepta quae
omnibus hominibus sunt communia. Particularis consi-
dérât actus humanos in particulari, et descendit ad varias
hominum conditiones.
2. Actus humanus, prout hic accipitur, est ille qui fit ab
homine modo huraano agente, id est, cum advertentiâ
intellectûs et deliberatione voluntatis. Tahs actus moralis
vocatur, quia subjicitur morum regulis.
3. Actus humanus distinguitur ab actu seu actione
hominis. Actus hominis est ille qui fit citra cognitionem
intellectûs et voluntatis arbitrium, et quasi mechanicè; taies
sunt, V. g., dormientium actiones, motus primo primi qn
à vigilantibus peraguntur ex quodam affectûs rationem
prœvenientis impetu. Taies actus sunt physici potiùs quàm
morales, et non tam ab homine quàm in homine fiunt ;
circa eos non versatur Ethica, quia bonitatis aut mahtiae
morahs non sunt capaces.
PARS PRIMA.
DE ETHICA GENERALI.
In Bthicâ generali agemus lo. de principiis actuum
huraanorum ; 2o. de eorum proprietatibus ; 3o. de eorum
regulis.
CAPUT PRIMUM.
DE PRINCIPIIS ACTUUM HUMANORUM.
4. Principia actuum humanorum duplicis sunt generis ;
alia sunt interna, quae in homine, et alia externa quae extra
hominem reperiuntur (41).
262 ETHICA.
I. De princîpiis internis actuum humanorum.
Hsec principia sunt intellectus, voluntas et libertas.
De Intellectu morali.
5. Intellectus moralis, seu prout sumitur practicè et in
ordine ad mores, ea est facultas quâ cognoscimus et discer-
nimus quid sit in actibus humanis justurn aut injustum,
bonum aut malum, honestum aut inhonestum. Quœ
intellectu sic accepte probantur, recta dicuntur et puîchra,
virtutesque vocantur. Quee verô damnantur, fœda dicuntur
et turpia ; vitiaque nuncupantur. Alia quse de intellectu
morali prsenotanda essent, dicemus ubi de conscientiâ et
de lege.
De Voîuntario morali.
6. Voluntas moralis est facultas quse bonum ab intellectu
propositum prosequitur aut malum aversatur.
7. Actus moraliter voluntarius est ille qui producitur à
voluntate cum cognitione eorum in quibus est actio, juxta
axioma ; " Ignoti nulla cupido." Hinc invoîuntarium
aliquid dicitur quod fit sine cognitione intellectus, ut
infantium et dorraientium actiones ; aut contra voluntatis
propensionem, ut alicujus incarceratio.
8. Voluntarium dividitur lo. in perfectum quod fit ex
plenâ voluntatis inclinatione et sine ullâ repugnantiâ; et
imperfectwn, quod quidem fit ex voluntatis consensu, sed
cum adraixtâ aliquâ repugnantiâ ; talis est actio mercatoris
qui metu naufragii merces suas projicit in mare.
9. Dividitur 2o. in direct um et indirectum. Volunta-
rium directum, quod etiam explicitum vocatur, est illud
quod in se et positive intenditur, ut si quis sciens et volens
occiderit inimicum.
10. Voluntarium indirectum, quod etiam implicitum
dicitur, est illud quod non in se, sed in alio, v. g., in
causa, volitum est ; sic occisio voluntaria est in eo qui se
inebriat, praevidens se in ebrietate esse homicidii capacem.
11. Ut effectus censeatur indirecte in causa moraliter
voluntarius, et possit ad meritum aut demeritum imputari,
très requiruntur conditiones. Prima, ut agens praeviderit,
aut praevidere potuerit et debuerit hune effectum ex causa
consecuturum. Hinc Noë non fuit immodestise reus, quia
praevidere non potuit ex vino immodestiam consecuturam :
ETHICA. 263
sed reus est qui alteri obscenam tabellam aut pravos libros
vendit aut commodat. Secunda, ut agens auferre vel non
ponere causam potuerit ; nemo enim ad impossibile
tenetur. Tertia, ut agens teneatur causam auferre vel non
ponere ; hinc non peccat mulier naodesta, etsi aliis sit
occasio peccandi.
12. Voluntarium dividitur 3o. in expressum, quod dis-
tincte verbis aut aliis signis declaratur ; et tacitum, quod
expresse non declaratur, sed quod ex quodam facto vel
facti omissione sequitur. Hinc pater, superior, qui subdi-
tos, quos vident delinquentes, non corripiunt, cùm possent,
eorum delicta approbare censentur et damna ab ipsis illata
resarcire debent. Aliter tamen esset, si ex prudentiâ
taceant, ne ex suâ correptione graviora exurgant mala, vel
scandala.
13. Voluntarium dividitur 4o. in necessarium, à quo
voluntas non potest abstinere, ut amor quo Sancti Deum
in cœlis diligunt ; et liberum, quod procedit ex delibera-
tione mentis et ex libero voluntatis consensu, quodque
supponit liberam ejusdem voluntatis electionem. Omne
igitur iiberum est voluntarium, cùm semper procédât ex
libero voluntatis consensu ; sed omne voluntarium non
est liberum ; sic amor Dei in sanctis est voluntarius, sed
non est liber.
De Libertate moraîi,
14. Hic relegantur quse dicta sunt à n. 209 ad n. 221
Metaphysicae. Ibi demonstravimus homines esse libe-
ros. Pariter ibi vidimus libertatem esse fundamentum
omnis moralitatis, adeo ut, actio quse non foret libéra, non
posset imputari sive ad bonura, sive ad malum. Nunc
examinandum est lo. qusenam libertas in prsesenti rerura
statu necessaria sit ad merendum vel demerendum ? 2o.
an ad esseutiam libertatis requiratur indifFerentia, seu
potestas agendi vel non agendi ?
Propositio prima,
15. Ad merendum vel demerendum non sufficit iramu-
nitas à coactione, sed requiritur immunitas à necessitate
siraplici et propriè dicta, seu potestas agendi vel non
as-endi.
264 ETHICA.
Prob. Ut quis mereatur aut demereatur, débet habere
dominium suae actionis, et de eâ disponere prout vult.
Atqui agens ex necessitate,etiam simplici, non habet domi-
nium actionis suse, nec de eâ disponere potest prout vult,
tanquàm dominus (Metaphy. 210, 211). Ergo agens ex
necessitate, etiam simplici, non potest merereri aut
demereri.
Propositio secunda»
16. Essentia libertatis in génère non consistit in solo
voluntario, sed ad eam requiritur potestas agendi vel non
agendi.
Prob. Ad veram libertatem requiritur ut agens actus
suos in suâ potestate habeat, et sit eorum dominus. Atqui
si essentia libertatis consisteret in solo voluntario, non
requireretur ad libertatem ut agens suos actus in suâ
potestate haberet, cùm actus possit esse necessarius et
tamen voluntarius, ut amor quo sancti Deum in cœlis
diligunt (13). Ergo. . . . &c.
IL De Causis quœ voluntarium aut liberum minuunt vel
tollunt.
Quatuor sunt istse causse, nimirùm vis seu coactio,
metuSy concupiscentia seu passio et ignorantia.
De Violentiâ seu de coactione.
17. Vioîentia, seu coactio est vis illata homini à
principio extrinseco contra propriam voluntatis inclinatio-
nem. Si sit contra omnem voluntatis inclinationem, ità ut
volantas tantùm résistât quantum resistere potest, tune
violentiâ est absoluta et simplex ; si vero violentiâ non sit
contra omnem voluntatis inclinationem, ut si voluntas
minus resistit quàm resistere posset, tune violentiâ est
secundùm quid,
18. Daplicis sunt generis actus hominis : alii scilicet,
qui ab ipsâ et in ipsâ voluntate perficiuntur, ut amor,
odium ; idcircô dicuntur eliciti : alii mediantibus aliis
facultatibus à voluntate distinctis exercentur, ut dearnbu-
latio, manducatio, &c., et vocantur imperati, quia voluntas
eos ordinariè imperat.
Propositio prima.
19. Violentiâ simplex et absoluta tollit voluntarium
et liberum.
ETIIICA. 265
Prob. Actus enim qui fit voluntate omninù renitente,
nuUo modo potest esse voluntarius, nec proindè liber ;
atqui actus qui violentiâ simplici et absoluta extorquetur,
fit voluntate omnino renitente. Ergo. . . . &c.
Propositio secunda.
20. Violentiâ secundàm qiiid minuit voluntarium et
liberum.
Prob. Nam ibi remanet aliquid voluntarii et liberi, ubi
voluntas quantum potest non resistit : atqui quando actus
fit per violentiam se.cundùm quid, voluntas non resistit
quantiim resistere potest. Ergo voluntarium non omnino
toUitur, sed minuitur tantiim.
Propositio tertia.
21. Voluntas cogi non potest quoad actus elicitos, benè
vero quoad actus imperatos.
Prob. la. pars. Nam actus eliciti ab ipsâ voluntate
eliciuntur. Ergo fiunt juxta voluntatis inclinationem.
Ergo quoad eos voluntas cogi non potest, aliter idem vellet
simul et nollet.
Prob. 2a. pars. Actus enim imperati non ab ipsâ solâ
voluntate peraguntur, sed ab aliis facultatibus etiam exer-
centur. Ergo fieri possunt invita voluntate, ut patet
exemple hominis qui invitus et nolens cogitur brachium
movere et genua flectere coram idolis. Ergo. . . . &c.
De Metu.
22. Metus est animi trepidatio causa periculi imminentis
vel futuri. Duplex est metus, alius levisy quo levé malum
limetur, vel si grave, levé est periculum iilius subeundi :
alius gravis, quo grave malum cum probabili iilius incur-
rendi periculo reformidatur, qualia sunt mors, membrorum
mutilatio, bonorum amissio, infamia, &c. Quando agitur
de metu, pensandcE sunt circumstantiae, personarum status,
aetas, indoles : sunt enim mala, quse respectu viri fortis
levia sunt, nec eum afficiunt, quse tamen respectu infirmo-
rum, fœminarum, puerorum, &c., gravia sunt, et eorum
animos graviter movent.
Propositio prima.
23. Metus levis non perimit voluntarium aut liberum.
266 ETHICA.
Prob. Nec enim intellectûs cognitionem, nec liberam
voluntatis determinationem impedit : sic talis metus non
excusât à peccato.
Propositio secunda,
24. Metus ità gravis ut rationis usum prorsiis adimat,
voluntariuni et liberum omnino tollit.
Prob. NuUum enim potest esse voluntarium, nullumque
liberum sine rationis usu (7). Talis igitur metus excusât
à peccato.
Propositio tertia.
25. Metus gravis, qui rationis usum non tollit, volunta-
rium et liberum non perimit, sed ordinariè minuit.
Prob. Talis enim metus nec impedit intellectûs cognitio-
nem, nec voluntatis liberam determinationem, ut patet ex-
emplo mercatoris qui naufragii metu merces suas projicit
in mare. Sed tamen hic metus minuit voluntatis inclina-
tionem, multamque repugnantiam adjunctam habet. Hinc
ordinariè voluntarium et liberum minuit, ideôque et ipsum
peccatum.
De Conciipiscentiâ.
26. Concupiscentia seu passio, de quâ hic agitur, est mo-
tus animse sensitivœ bonum sensibile prosequens, vel ma-
lum sensibile fugiens, ut odium, amor,&c. Concupiscentia
seu passio sic sumpta, vel est antecedens, vel consequens,
Prior ea est quœ antecedit voluntatis consensum, eumque
aUicit, ut cùm, viso patris homicidâ, voluntas ad vindictam
movetur. Posterior ea est quse oritur ex deliberato et libère
voluntatis consensu, vel quse à voluntate excitatur, aut im-
peratur, ut cùm ex desiderio excitatur odium in animo.
Propositio prima.
27. Concupiscentia antecedens auget voluntarium et mi-
nuit liberum.
Prob. lo. Auget voluntarium ; inflammat enim volunta-
tem et efficit ut cum majori inclinatione et propensione fe-
ratur ad objectum concupitum. 2o. Minuit liberum; minuit
enim cognitionem eorum in quibus actio posita est, impe-
dit ne mens advertat turpitudinem actûs et alia motiva quse
eam ab eo removere debent, sicque minuit voluntatis indif-
ferentiam.
ETHICA. • 267
28. Hinc lo. motus primo primi concupiscentiec, seu
ipsamet antecedens concupiscentia, nullo modo sunt liberi,
ideôque non sunt peccata.
29. Hinc 2o. prout majorem aut rainorem locum relin-
quit advertentiae mentis antecedens concupiscentia, plus
minùsve peccatur agendo ad quod movet concupiscentia.
Propositio secunda.
30. Concupiscentia consequens nec voluntarium, nec li-
berum, nec proindè peccatum tollit aut minuit, sed potiùs
auget.
Prob. Nam concupiscentia consequens (26) oritur ex de-
liberato et libero voluntatis consensu, et de industrie exci-
tatur, imperatur enim à voluntate. Ergo majori cum in-
clinatione et majori nisu perrumpit in actum pravum.
Ergo .... &c.
31. Hinc qui ex pravâ consuetudine, quam corrigere
non curati delinquit, graviùs peccat ; quia actus ex habitu
spontè prodeuntes sunt in se et in causa liberi, eôque pejo-
res quô propensiùs feruntur in malum.
De Ignorantiâ.
32. Ignorantiâ, prout hic sumitur, est privatio cognitionis
rei quam quis scire tenetur : undè difFert à simplici nesci-
entid, quee est ignoratio rei quam scire non tenemur, qualis
est ignoratio jurisprudentise in rustico.
33. Ignorantiâ dividitur lo. ratione subjecti in fTirtwciôi-
lem, quse adhibitâ morali diligentiâ, vinci non potest ; et
in vincibilem quae eâdem diligentiâ superari potest.
34. Ignorantiâ autem vincibilis alia est afectata, quando
quis, ut liberiùs peccet, id vult nescire, quod scire et facere
tenetur, ut si quis consilium de re dubiâ non petat, ne ab
eo avertatur quod facere decrevit : alia est crassa, ut si
quis directe quidem non afFectet ignorare, sed debitam dili-
gentiam non adhibeat, ut ignorantiam depellat et scientiam
congruam acquirat.
35. Ignorantiâ dividitur 2o. ratione objecti, in ignoran-
tiam jum et /ac/i. Prior ea est quà quis ignorât quid lex
sive divina, sive humana praecipiat aut quid prohibeat. Pos-
terior ea est,quâ quis sciens legem, ignorât taie vel taie hu-
icce iegi cognitse esse contrarium ; ut si quis sciens sabbali
diebus vetitum esse carnes comedere, nescit hune cibuui,
quem comedit, esse vetitum.
268 ETHICA.
Propositio prima.
36. Ignorantia vincibilis, sive affectata, sive crassa, sive
juris, sive facti, non toUit voluntarium nec liberum, ideù-
que nec peccatum.
Frob. Hœc enim ignorantia vinci potest : ergo volunta-
ria est et libéra, A^el in se, vel in causa suâ, vel directe, vel
indirecte. Ergo quae extali ignorantia fiunt^ sunt volunta-
ria et libéra, ideoque culpanda, si eorum objectum raa-
lum sit.
37. Cseterùm, si haec ignorantia sit aifectata, voluntari-
um et peccatum auget, siquidem ideo eam sic aifectat agens
ut liberiùs peccet ; quod ardentiorem in peccatum propen-
sionem supponit. Si verô sit crassa, non toUit quidera, sed
minuit voluntarium et peccatum ; cura ille qui extali igno-
rantia agit, sic aftectus supponatur, ut, seclusâ ignorantia,
non ageret.
38. Hinc judex ignorans ea quae necessaria sunt ad judi-
cis munus reclè obeundum, peccat graviter, non solùm cùni
judicis munus suscipit, sed etiam quoties ex ignorantia le-
gum, quas scire tenetur, fert sententiam injustam, quam-
vis eam justam putaverit ; suas enim sententise injustitiam
potuit et debuit cognoscere. Damnum igitur indè secu-
tum resarcire tenetur. Idem dicendum est de Advocato,
Notario, Medico. . . . &c.
Propositio secunda.
39. Quselibet ignorantia invincibilis, sivefacti, sive jurig,
aut positivi, aut etiam naturalis, tollit voluntarium et libe-
rum, proindèque eximit à peccato.
Prob. Quod enim fit ex ignorantia invincibili, fit sine
co2:nitione. Er2;o voluntarium non est, cùm voluntarium
id sit quod fit à principio cognoscente singula m quibus est
actio (7). Atqui quod non est voluntarium non est liberum
(13). Ergo non potest in peccatum imputari (15).
40. Alia est ignorantia quse concomitans vocatur. Haec
ignorantia ea est quœ, licèt non sit voluntaria, sic tamen
actionem comitatur, ut actio fieret, etiamsi abesset ignoran-
tia. Talis est ignorantia illius qui, inter venandum, per
ignorantiam inculpabilem,loco ferae occidit inimicum quem,
si cognovisset, nihilominùs occidisset. Haec ignorantia im-
pedit ne actio exterior sit voluntaria ; voluntas enim non
ETIIICA. 269
influit in actum externum, nec consequenter auget nec mi-
nuit peccatum externum. Hinc homicidium in eo sensu
non reputatur voluntarium, nec darani reparandi obligatio-
nem inducit, nec subjacet pœnis contra homicidas latis,
licèt propter affectum inordinatum graviter peccet homo
iste.
III. De principiis externis actuum humanorum, seu de
eorumjine.
41. Finis est id propter quod res aliqua fit. Finis multi-
plex distinguitur ; alius est intrinsecus seu operis ; alius ex^
trinsecus seu operantis ; alius intermedius ; alius ultimus.
Finis intrinsecus seu operis is est in quem tendit opusneces-
sario et ex naturâ suâ, independenter à voluntate agentis,
ut in eleemosynâ sublevatio pauperis. Hic finis non dis-
tinguitur ab objecte.
42. Finis extrinsecns seu operantis is est quem sibi pro-
ponit operans, ut amor Dei in eleemosynâ. Dicitur extrinse-
cns quia,eo fine sublato, potest actio intégra subsistere.
43. Finis intermedius est ille ad quem actio ità refertur,
ut ipse ad alium finem referatur ; sic sanitas est finis inter-
medius medicinae respectu viri pii, quia ipsam sanitatem
vir plus refert ad gloriam Dei.
44. Finis ultimus is est qui ità intenditur ut. in eo sista-
tur, nec ad alium finem referatur.
45. Cùm homines ità sint à naturâ comparati, ut in suis
actibus beatitudinem tanquàm finem queerant, dicendum est
lo. de beatitudine hominis : 2o. cùm Deus esse debeat finis
creaturarum omnium ultimus, disseremus de obligatione
referendi nostras actiones ad Deum tanquàm ad finem ulti-
mum.
1 . De Beatitudine hominis.
46. Beatitudinis nomine is status intelligitur, qui mentis
desiderium omnino expleat et satiet. Duplex distinguitur
beatitudo, objectiva etformalis. Prior est ipsum objectum
cujuspossessione satiatur hominis desiderium. Posteriorest
modus specialis quo possessum beatitudinis objectum felices
nos reddit. Hic quœstio est in quo posita sit vera hominis
beatitudo, et quodnam sit ejus objectum ?
Propositio.
47. Solus Deus est beatitudo hominis objectiva.
270 ETHICA.
Prob. lo. Objectum beatitudinis nostrœ est summum
bonum plenè et perfectè satians hominis appetitum. Atqui
solus Deus plenè et perfectè satiare potest hominis appeti-
tum. Nam facultates hominis revocantur ad intelîectum,
qui veri cognitionem, et ad voluntatem quse boni possessio-
nem prosequitur. Atqui solus Deus utramque facultatem
hanc explere potest. Qusecunque enim alia bona, cùm sint
finita, aliquid intellectui cognoscendum aut voluntati optan-
dum relinquunt. Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Vel hominis béatitude in ipso Deo posita est,
vel in ipso homine, vel in bonis fortuna3, vel in bonis cor-
poris, vel in bonis animse, aut in congerie bonorum istorum ;
atqui quinque posteriora répugnant.
lo. Non consistit in ipso homine. Homo enim repletur
multis miseriis ; insuper ut asserit Tullius ; " editus est in
** vitam corpore nudo, fragili ac infirme, animo anxio ad
" molestiaSj humili ad timorés, prono ad libidines." Ergo
&c.
2o. Non in bonis fortunœ, v. g., divitiis, honoribus, po-
testate, &c. Quod enim instabile est etcaducum, probis et
improbis commune, non potest hominem verè felicem red-
dere. Atqui talia sunt bona fortunée, nimirùm, divitiae,
honores, potestas, &c. Hinc multi homines bonis, honori-
bus, deliciis abundant, qui tamen sunt miserrimi, continue
perterriti metu, insatiabilique nova bona acquirendi desi-
derio cruciati.
3o. Non in bonis corporis, v. g., robore, pulchritudine,
voluptatibus, &c. Ea enim comitantur anxietas, dolor,
tristitia, conscientiae stimuH, et sunt fluxa. Jnsuper hœc
non perficiunt animam, sed corpus ; atqui tamen vera ho-
minis béatitude, eidem secundùm partem nobiliorem con-
venire débet : aliàs similis esset brutorum felicitati.
4o. Nec etiam consistit in bonis animœ, nempè, scientiâ
et virtutibus, quia nec scientiâ nec virtutes eximunt homi-
nes à morbis, doloribus, egestate, timoré, aliisque miseriis,
quEs tamen cum verâ fehcitate sociari non possunt. Erge
.... &c.
ôo. Nec in bonorum prœfatorum et aliorum congerie.
Hœc enim omnia simul nec mentem explere, nec hominem
ab omnibus miseriis immunem reddere possunt. Hinc Sale-
mon, qui omnia dona tùm animi, tùm corporis, tùm fortu-
ETHIGA. 27 1
nse expertus erat, sic exclamât : Vanîtas vanitatiim, et om-
nia vanitas , • * . Ecce unîversa vanitas, et affiictio spii'iiils.
Ecclesiastœ, cap. 1. ver. 2 et 14.
48. Ergo non datur in hâc vitâ béatitude perfecta, sed
tantùra inchoata et imperfecta : Deum enim non cognos-
cit homo in hâc vitâ nisi imperfectè, per creaturas veluti
per spéculum ; pariter nec eum possidet, nec ei conjungitur
nisi per amoremj juxta illud Joannis : '* Deus charitas est ;
** et qui manet in charitate, in Deo manet, et Deus in eo."
I. Epist. cap. 4. ver. 16.
2. De obligatione nostras actiones ad Deum referendi.
49. Notandum est lo. nullum hominem posse libéré
agere sine fine ultimo, vero, aut falso, aut apparente.
Nam homo in omnibus actibus suis liberis ac determinatis
aliquod bonum verum aut apparens sibi proponit, in quo
voluntas conquiescat, et ultra quod non excurrat : atqui in
eo posita est ratio finis ultimi (44). Ergo. . . . &c.
50. Notandum est 2o. Deum solum esse rerum omnium
finem verum et ultimum ; solus enim Deus est supremum
bonum et suprema creaturarum beatutido. Bona creata
non sunt itaque verus finis ultimus, sed apparens tantùm
aut falsus.
51. Notandum est 3o. hominem posse suos actus ad
Deum referre vel relatione negativd, cavendo ne quidquam
agat legi divinse contrarium, vel relatione aut intentione
positiva, suum actum dirigendo ad Deum modo quocunque.
52. Notandum est 4o. triplicem distingui intentionem,
actualem, virtualem, et hahitualem. Actualis fît per ac-
tualem de Deo cogitationem ; virtualis fit duplici modo, vel
quando actus refertur ad Deum virtute intentionis priùs
conceptse, et in mente moraliter perseverantis, licèt actu
de fine ultimo non cogitetur ; vel quando opus in se
bonum fit ex intentione in se bonâ de se referibili ad Deum,
nec uUâ corrumpitur perversâ agentis intentione. Intentio
habituaîis seu interpretativa ea est quâ quis ità affectus est,
ut, si de Deo cogitaret, propter ipsum operaretur.
53. Notandum est 6o. nos teneri singulos et cmnes actus
nostros referre ad Deum négative ; quia tenemur omnes
cavere ne Deum offendamus, aut quidquam ejus voluntati
contrarium agamus. Hinc tenemur eligere actus in se
bonos, rectos, ac legi divinai consentaneos, linemque iu
272 ETHICA.
omnibus actibus nostris nobis proponere rectum et lau-
dabilem, alioquin contra rationem et legem naturalem
ageremus Deumque ofFenderemus.
54. Notandum est 60. nos quidem teneri aliquandô
actus nostros ex motivo caritatis ad Deum referre, id enim
exigit amor Dei erga nos. Sed non tenemur omnes actus
nostros ad Deum referre intentione actuali, istud enim est
impossibile.
55. Notandum est 7o. non sufficere actus nostros ad Deum
referre intentione interpretativâ, quia hœc relatio nullatenùs
influit in actum ; sicut enim neminem punit Deus ob
crimina quîe perpetravisset, si de illis cogitavisset, ità nec
rémunérât opéra bona quœ facta fuissent ab homine, si in
aliâ circumstantiâ constitutus esset.
Propositio prima.
56. Tenemur omnes actus nostros aliquo modo ad Deum
referre tanquàm ad finem ultimum.
Prob. Deus enim est rerum omnium finis ultimus. Ergo
tenentur homines omnia opéra sua ad Deum referre.
Prsetereà omnia ad Deum pertinent, omnia operatus est,
omnia sua bona à Deo homines acceperunt. JEquum est
igitur, postulatque animi gratitudo ut homines omnia ad
Deum tanqaàm ad finem ultimum référant.
Propositio secunda.
57. Ut actus sit moraliter bonus, non requiritur ut ex
motivo supernaturali ad Deum referatur, sufficit ut sit
honestus tùm in se, tùm in circumstantiis, et eliciatur ex
motivo rectse rationi consentaneo.
Prob. Bonitas enim actûs repetenda est ex honestate
objecti, circumstantiarum et finis (61). Atqui Ucèt actus
non eliciatur ex motivo supernaturali seu fide cognito, fieri
potest ut sit honestus ratione objecti, circumstantiarum et
finis. Sic qui actum in se et ratione circumstantiarum
justum agit, prsecisè quia honestus est, rationi consenta-
neus et à conscientiâ praescriptus, profectô agit opus in se
et ratione circumstantiarum et finis honestum. Idem
dicendum est de eo qui pauperi opitulatur, prœcisè quia
istud dictitat recta ratio. Ergo. . . . &c.
ETIIICA. 273
CAPUT SECUNDUM.
DE PROPRIETATIBUS ACTUUM HUMANORUM.
58. Actuum humanorum proprietates sunt eorura boniias
aut malitia. Actuum humanorum bonitas moralis est
eorum cum rectâ ratione consensio ; malitia autem moralis
est eorum à rectâ ratione dissensio.
59. Itaque actio bona est actio huraana, libéra, rationi
consentanea : actio vero mala est actio humana, libéra,
rationi dissentanea.
60. Actus humanus considerari potest vel in specie, vel
in individuo. Actus in specie est actus spectatus tantùm
ratione objecti, semotis fine et circumstantiis. Actus in
individuo est ille qui spectatur, non tantùm ratione objecti,
sed etiam ratione finis et circumstantiarum.
Propositio.
61. Moralis actuum humanorum bonitas aut malitia
repetenda est ex objecto, fine et circumstantiis.
Prob. la. pars. Ex objecto. Nam ab eo repeti debent
actuum humanorum bonitas aut malitia, undè habent actus
humani ut boni sint vel mali, meliores vel pejores. Atqui
actus humani ex objecto habent ut. . . . &c. Sic bonus est
amor Dei, quia Deus ut amatus, est objectum bonum ;
malum vero odium Dei, quia odium Dei malum est objec-
tum. Sic furtum mille nummorum crimen est gravius,
quàm unius tantùm nummi furtum, quod in iisdem cir-
cumstantiis et propter euradem finem committeretur. Sic
pariter magis meretur qui centum nummos pauperibus
erogat, quàm qui triginta tantùm largitur, si pares sint
aliundè circumstanti?e et finis. Ergo. . . .&c.
Prob. 2a. pars. Finis enim actum efficit ex indifférente
bonum aut malum, ex malo pejorem, ex bono malum, vel
meliorem. Sic deambulatio de se indifferens, fit bona, si
quis ambulat ut posteà officia sua liberiùs impleat ; mala
verù, si quis ambulat luxûs manifestandi causa. Sic fur-
tum de se malum, pejus evadit, si fiât causa suis cupiditati-
bus indulgendi ; eleemosyna de se bona, fit mala, si propter
vanain gloriam erogctur : mclior vero, si ex puro Dei
amorc procédât.
274 ' ETHICA.
Prob. 3a. pars. Solœ enim circumstantire fréquenter effi-
ciunt ut actiones humana3 meliores vel pejores sint, &c.
Sic opem ferre amico indigent!, optima est actio ; sed ea-
dem misericordise opéra prsestare homini ingrate, ignoto,
derelicto, à quo nulla speranda est animi gratitudo, mnUù
excellentior est actus. Sic pariter furtum nummiapud divi-
tem est malum ; sed multo pejus foret, si nummus iste
apud miserrimam viduam surriperetur. Ergo. . . . &c.
62. Ergo nuUus datur actus indifFerens in individuo (GO).
Actus enim indifFerens esset ille cui nec bonitas nec mali-
tia moralis competeret. Atqui nullus actus in individuo sic
esse potest. Vel enim objectum, finis et circumstantiae
alicujus actûs concordant cum recta ratione, vel non. Si
prius, actus est bonus: si posterius, malus est (61). Ergo
.. . j&c. Possunt tamen esse actus in specie, seu ex objecto,
plané indifférentes, id est, qui versantur circa objecta nec
bona, nec mala, ut arnbulatio, locutio, &c.
63. Nota. Ut actus sit bonus, requiritur ut et objectum,
et finis, et circumstantiae bona sint ; ut auîem malus sit,
sufiicit ut unum ex tribus istis malum sit. Hinc adagium :
" bonum ex intégra causa ; malum ex minimo defectu."
CAPUT TERTIUM.
DE REGULIS ACTUUM HUMANORUM.
64. Duplex est actuum humanorum régula : una interna,
nempè conscientia ; altéra externa, nempè lex.
I. DE CONSCIENTIA.
65. Conscientia, seu cordis scientia, definitur animi judi-
cium pronuntians quid in particulari sit licitum aut illici-
tum, quid sit faciendum vel omittendum, aut quid fieri vel
omitti debuisset.
66. Conscientia dividitur lo. in î;eram et erroweam. Con-
scientia vera seu recta, ea est quee dictât aliquid in particu-
lari esse licitum vel illicitum, faciendum vel omittendum,
quod reverà taie est. Conscientia erronea seu falsa, ea est
quae dictât hoc in particulari esse bonum vel malum, agen-
dum vel non agendum, quod reverà taie non est.
67. Dividitur 2o. in certam, dubiam et perplexam. Con-
scientia certa ea est quae ex certis validisque fundamentis,
absque uUo errandi periculo, pronuntiat de rectitudine aut
malitiâ operis bic et nunc agendi.
ETHICA. 275
68. Conscientia dubia, qufe non est conscientia propriè
dicta, est suspensio judicii circa rectitudinem aut malitiani
operis hic et nunc agendi. Hsec suspensio oritur, vel quia
œquales videntur hinc et indè rationes oppositse, tuncque
conscientia est dubia positive, vel quia nulla apparet ratio
assentiendi vel dissentiendi, et tune conscientia est dubia
négative ; rectiùs tamen vocaretur nescientia.
69. Conscientia perp/e^ra est judicium dictans esse pec-
catum, sive actus hic et nunc fiât, sive omittatur, ut si quis
credat se peccare, sive mentiatur ad impediendum homici-
dium, sive non mentiatur.
70. Conscientia dividitur 3o. in lafam et scrupulosam.
Prior ea est quâ mens ex levissimis rnomentis judicat
id esse iicitum quod illicitum esse facile deprehendi
potest, aut quee pro levi peccato habet, quod grave
vulgô existimatur. Posterior ea est quâ mens levissimis
nixa rationibus, cum anxietate judicat peccatum adesse,
ubi non est peccatum.
71. Conscientia dividitur 4o. in probabilem et improbabi-
lem. Prior ea est quœ tota fundatur opinione probabili ; pos-
terior opinione improbabili nititur.
72. 0^\u\o probabilis ea est quse nititur motivo gravi seu
sufficienti ad obtinendum viri prudentis assensum, licèt ab-
solutè fallibile sit motivum istud. Opinio improbabilis ea
est quee nititur motivo levi et insufRcienti ad obtinendum
viri prudentis assensum.
73. Opinio in confiictu alterius dicitur j?ro6a&i/zor, vel
minus pj'obabilis, prout ratione vel auctoritate oppositam
vincit, vel ab eâ vincitur. Dua3 opiniones aequalibus mo-
mentis nixœ, dicuntur œquè probabil es.
74. Opinio tuta ea est quœ removet à peccati periculo ;
tuiior quœ magis removet ; minus tuta quse minus removet
à tali periculo. Undè opinio tutior favet legi, id est, asse-
rit exstare prœceptum jubens vel prohibens aliquid ; et opi-
nio minus tuta favet libertati, quia asserit non esse prœcep-
tum circa aliquid, et affirmât hominem posse licite utrum-
vis eiigere.
Propositio prima.
75. Nunquàm agere licet contra conscientiam etiam er-
roneam.
s2
276 ETHICA.
Prob. Peccat enira qui habet voluntatem peccandi ; at-
qui qui agit contra conscientiam etiam erroneam, habet
voluntatem peccandi ; tune enim illud agit quod crédit esse
peccatum ; atqui profecto ille habet voluntatem peccandi,
qui facit illud quod esse peccatum judicat, etsi judicando
erret. Ergo. . . . &c. Hinc peccat qui perficit actionem
quam illicitam esse judicat, licèt actio ista Hcita sit in se et
imperata.
Propositio secunda.
76. Non semper licet agere ex conscientiâ.
Prob. Nam aliquando conscientiâ laborat errore vincibiii :
atqui non jicet sequi conscientiam vincibiliter erroneam. Si
enim tune non peccaretur, sanè quia error ille excusaret à
peccato : atqui error vincibilis non excusât à peccato (36).
Ergo. . . . &c. Hinc tenemur deponere conscientiam vinci-
biliter erroneam, quod fieri potest, cùm ex hypothesi error
sit vincibilis.
Propositio tertia.
77. Qui dubilat de honestate alicujus actûs, ab eo absti-
nere débet, si nulla urgeat agendi nécessitas ; si verô ad-
fuerit agendi nécessitas, pars tutior est eligenda.
Prob. la. pars. Non licet enim sese exponere peccandi
periculo ; atqui qui agit id de quo dubitat an peccatum sit,
quandô potest abstinere, sese exponit periculo peccandi.
Ergo. . . . &c.
Prob. 2a. pars. Non minus prudentise opus est in nego-
tio salutis quàm in rébus temporalibus ; atqui ubi de tem-
poralibus agitur imprudens esset qui, in dubio, partem tuti-
orem negligeret, ut minus tutam amplecteretur ; qui, v. g.,
cibum comederet quem veneno infectum esse dubitaret, re-
licto cibo quem veneni expertem certô cognosceret. Ergo
&c.
Propositio quarta.
78. In conflictu duarum opinionum sequè probabilium>
securior est eligenda.
Prob. In dubio pars tutior est eligenda {77) : atqui in
conflictu duarum opinionum aequè probabilium, mens est in
dubio. Ergo. . . .&c.
Propositio quinia.
79. Licet sequi opinionem multo probabiliorem libertati fa-
ventem,in conflictu alterius minus probabilis et legi faventis.
ETHICA. 277
Prob. ïlle enim prudenter agit, qui eam ponit actionem,
qiiana morali certitudine judicat esse licitam. Atqui qui
opinionem multo probabiliorem sequitur. . . . &c., ponit ac-
tionem quam morali certitudine judicat es«e licitam. Ergo
.... &c.
80. Tenemur tamen partem tutiorem sequi, lo. ubi agi-
tur de iis quee sunt de necessitate medii ad salutem, vel
quee requiruntiir ad validitatem sacramentorum ; 2o. ubi
agitur de vitando damno proximi, quod ex justitiâ tenemur
cavere ; 3o. ad tutiorem partem etiam minus probabilem
tenetur, qui, vel ex conventione, vel voto, vel superioris
praecepto ad tutiora adhibenda obligatur. Sed haec ad
Theologos.
II. DE LEGE.
81. Lex hic sumitur pro externâ morum régula (64).
Definiri solet : " Prœceptum, commune, justum, stabile,
" ad bonum publicum, ab eo qui curam gerit communitatis
" impositum, et sufScienterpromulgatum." Lex generatina
dividitur in divinam et humanam.
l. De Lege divind.
82. Lex divina ea est quas Deum habet auctorem. Divi-
ditur in JEternam, Naturalem, seu non scriptam, et Positi-
vam seu scriptam.
De Lege œternâ.
83. Lex <^^e?'?za definitur ; '* Suprema ratio quâ Deus
*' ab fôterno statuit quid creaturœ rationales, eo tempore
** quo exstiturœ sint, agere vel fugere debeant." Legi œter-
nse sic acceptée subjacent lo. creaturœ rationales in terris
viventes ; 2o. ipsimet Beati et Angeli in cœlis, qui sentiunt
id omne quod agunt, divinse rationi congruere. Deus vero
propriè dici non potest legi œternae subjectus ; superiorem
enim, à quo lex dimanet, nullo modo habere potest. Deus
tamen ab illâ lege recedere non potest, cùm sit ipsamet
a3terna ratio, justitiâ et sapientia, quibus necessario in suis
omnibus actibus dirigitur. " On peut dire, inquit D. Bos-
" suet, que Dieu lui-même a besoin d'avoir raison, puis-
" qu'il ne peut rien faire contre la raison."
De Lege naturali,
84. Lex naturaîis, seu lex divina non scripta, ea est legis
aeternse eraanatio seu manifestatio quÀ homines, in societate
278 ETHICA.
viventes, naturaliter bonum à malo secernunt, et has vel
illas actiones sibi licitas aut illicitas esse percipiunt. Prima-
ria ejus principia reverà sunt in cordibus ab ipso Creatore
scripta ; at non ideô, si quibusdam recentioribus fides ad-
hibeatur, homo sôlis suis viribus eorum cognitionem acqui-
rere potest ; juxta eos enim hœc cognitio à solâ et in solâ
societate, orali traditione, transmitti potest (Log. 19, 20,
21. Metapby. 20, 21).
85. Hinc lo. lex naturalis non difFert à lege aeternâ,
nisi quod huic addat proraulgationem factam in tempore
per ejus expressionem, id est, per vocem.
86. Hinc 2o., cùm prrecepta legis naturalis verè sint in
essentiâ rerum, et cùm sint mentibus nostris congenita, so-
cietas ea non excogitavit seu finxit, ut quidam impii falsô
supponunt, sed eorum cognitionem accepit à Creatore tan-
quàm depositum, sicut accepit vocem et idearum expressio-
nem, ut illam posteris communicet, sicuti eis vitam com-
municat.
Status igitur queestionis est utrùm existât lex naturalis,
seuutrùm,ante pacta civilia,detur essentiale discrimen inter
bonum et malum morale.
Proposîtîo.
87. Existit lex naturalis, seu, ante pacta civilia, datur
essentiale discrimen inter bonum et malum morale.
Prob. lo. Deus est infinité perfectus (Metaph. 117);
ergo necessariô et essentialiter amat omnes perfectiones ;
atqui ordo est perfectio, siquidem ipse Deus est œternus et
increatus ordo : ergo Deus necessariô et essentialiter ordi-
nem amat. Ergo Deus non potuit creare, quin creaturis
suis, sive intelligentibus, sive intelligentibus et liberis simul,
sive intelligentiâ destitutis, ordinem prœscriberet, alioquin
ipse ordinem contemneret. Ergo Deus hominibus, qui sunt
intelligentiae liberse, necessariô et essentialiter prœscribere
debuit quemdam ordinem, sive quasdam régulas juxta quas
homines componere debeant suas actiones : atqui istœ régu-
lée juxta quas homines suas actiones componere debent,
nihil aliud sunt quàm lex naturalis. Ergo. . . . &c.
Prob. 2o. Ex consensu omninum populorum. Omnes
enim omnium temporum et locorum gentes alias actiones
ut bonas, alias ut malas agnoverunt et etiam nunc agnos-
cunt ; atqui unanimis ille consensus oriri non potuit ab
ETHICA. 279
educatione, quae varia est pro variis locis et temporibus, ne-
que à legibus ob eamdem rationem, neque à cupiditatibus,
quibus potentissimuni frenum injicit sensus ille justi et in-
justi, virtutis et criminis, &c. Ergo oritur à solà rei veri-
tate ; seu, quod idem est^, necessario et essentialiter est in
naturâ reruni. Ergo. . . . &c.
Et vero, ex ipsis adversariis tenemur obedire legibus civi-
libus ; atqui ad id non tenemur, nisi quia existit lex natura-
lis quœ hanc obsdientiam nobis prrescribat. Ergo. . . . &c.
88. " Jetez les yeux, inquit civis Genevensis, sur toutes
" les nations du monde : parcourez toutes les histoires.
" Parmi tant de cultes inhumains et bizarres ; parmi cette
" prodigieuse diversité de mœurs et de caractères^ vous
" trouverez partout les mêmes idées de justice et d'hon-
" nêteté ; partout les mêmes notions du bien et du mal.
' ' L'ancien paganisme enfanta des dieux abominables que
" l'on eût punis ici comme des scélérats, et qui n'offraient
** pour tableau du bonheur suprême que des forfaits à corn--
" mettre et des passions à contenter. Mais le vice armé
" d'une autorité sacrée descendait en vain du séjour éter-
*' nel, l'instinct moral le repoussait du cœur des humains.
" En célébrant les débauches de Jupiter, on admirait la
** continence de Xénocrate. La chaste Lucrèce adorait
" l'impudique Vénus. L'intrépide romain sacrifiait à la
" peur, il invoquait le Dieu qui mutila son père, et mou-
" rait sans murmurer de la main du sien. Les plus mépri-
" sables divinités furent servies par les plus grands hommes.
" La sainte voix de la nature plus forte que celle des dieux
" se faisait respecter sur la terre, et semblait reléguer dans
" le ciel le crime avec les coupables. . . .11 est donc au fond
** des âmes un principe inné de justice et de vertu, sur le-
" quel, malgré nos propres maximes, nous jugeons nos
** actions et celles d'autrui comme bonnes ou mauvaises."
" Cet accord évident et universel de toutes les nations,
" ils (les prétendus sages) l'osent rejeter; et, contre
'* l'éclatante uniformité du jugement des hommes, ils vont
" chercher dans les ténèbres quelque exemple obscur et
" connu d'eux seuls, comme si tous les penchans de la
" nature étaient anéantis par la dépravation d'un peuple,
** et que, sitôt qu'il est des monstres, l'espèce ne fût plus
[' rien. Mais que servent au sceptique Montaigne les
280 ETHICA.
'* tourraens qu'il se donne pour déterrer en un coin du
** monde une coutume opposée aux notions de la justice ?
*' Que lui sert de donner aux plus suspects voyageurs
" l'autorité qu'il refuse aux écrivains les plus célèbres ?
'* Quelques usages incertains et bizarres, fondés sur des
" causes locales qui nous sont inconnues, détruiront-ils
*' l'induction générale tirée du concours de tous les peuples,
" opposés en tout le reste, et d'accord sur ce seul point?
" O Montaigne ! toi qui te piques de franchise et de
" vérité, sois sincère et vrai, si un philosophe peut l'être,
" et dis-moi s'il est quelque pays sur la terre où ce soit un
" crime de garder «a foi, d'être clément, bienfaisant, géné-
'* reux ; où l'homme de bien soit méprisable et le perfide
*' honoré ?" Emile, tom. 2. pag. G;3.
Solvuniur ohjectiones.
Obj. lo. Si daretur essentiale discrimen inter bonum et
malum morale, utriusque limites facile secernerentur ;
atqui boni et mali limites non facile secernuntur, ut patet
ex variis opinionibus doctorum circa ejusdem actûs boni-
tatem aut malitiam moralem, et ex variis legibus funditùs
oppositis qucC de re eûdem sancitte fuerunt. Ergo. . . . &c.
89. Resp. Dist. Maj. Limites boni et mali facile secer-
nerentur pluribus in casibus, conc. maj.; m omnibus
casibus, neg. maj. Pluribus in casibus facile secernuntur
limites boni et mali ; quis, v. g., mendacium, furtum, homi-
cidium, &c., non condemnat ? Sed plures sunt casus
difficillimi in quibus non ità facile secernuntur isti limites.
At non ideô concludi potest nullum adesse discrimen
essentiale inter bonum et malum morale ; quemadmodùm
ex eo quod in remotissimis consecutionibus facile non
possit secerni verum à falso, concludi non potest verum et
faisum essentialiter non discrepare.
Obj. 2o. Eadem non sunt apud omnes populos morum
principia : sic, v. g., Lacedaemonii furtum, Scythas occisio-
nem hospitum, Massagetœ c?edem parentum suorum esse
licita arbitrabantur. Ergo. . . . &c.
90. Resp. Dist. Ant. Non sunt apud omnes populos
eadem morum principia, quoad remotas conclusiones, et
applicationem primorum principiorum ad quosdam casus
particulares, conc. ant.; quoad existentiam primariorum
prinaipiorum, neg. ant. Sic historiâ compertum est omnes
ETHICA. 281
semper credidisse, "sua cuique esse reddenda ; parentibus
" debitam esse pietatem ; omnes homines esse diligendos:"
at erraverunt in applicatione istoram principiorum. Sic
lo. Lacedœmonii non omnibus indiscriminafim, sed junio-
ribus ediilium furtum permittebant, modo solerter fieret ;
hoc modo rati adolescentes futures esse vigilantiores et
bello aptiores. 2o. Omnibus caritatem debitam esse crede-
bant Scythne ; sed pariter credebant licitum esse occidere pa-
trice hostes et proditores ; et in hoc errabant quod advenas
omnes indiscriminatim crederent hostes et proditores patrite.
3o. JVIassagetae parentes colendos esse non dubitabant :
cùm igitur eos senio confectos occiderent, praeceptum hono-
randi parentes sibi proponebant ; sciUcet, ut eos hberarent
ab hujus vitee miseriis. Haec et simiUa exempla non pro-
bant legis naturaUs principia non esse in rerum naturâ, sed
tantùm diversos errores exstitisse circa eorum appUcationem.
Resp. 2o, Neg. consqam. Etsi paucissimi homines
prima quœdam morum principia non admisissent, non indè
sequeretur populos in iis admittendis non fuisse moraliter
unanimes. In morahbus enim paucissimi pro nullis repu-
tantur : cseterùm mirum non est si tanta adsit in hâc
materiâ diversitas ; cùm rarô contingat ut quidam prœ-
judiciis et cupiditatibus abrepti et obcœcati, naturae
vocem praefocent, nec eam audiant.
Obj. 3o. Discrimen inter bonum et malum morale oritur
à praejudiciis. Ergo non fundatur rerum naturâ.
91. Resp. Neg. ant. Praejudicia enim nec sunt uiiiver-
salia, nec ubique vigent, nec apud omnes populos, nec
omnibus temporibus, ut experienfiâ constat. Atqui dis-
tinctio boni et mali in omnibus locis, omnibus temporibus
et apud omnes populos semper viguit. Ergo non oritur à
preejudiciis. Eodem ratiocinio probari posset hanc distinc-
tionem ortam non fuisse ab educatione.
Obj. 4o. Surdi-muti à nativitate, ni scripturâ aut signis
doceantur, et omnes alii homines qui à primulà infantiâ
nuUarn quocunque modo communicationem habuerunt cum
aliis hominibus, nullam cognoscunt distinctionem inter
bonum et malum morale. Ergo haec distinctio oritur ab
educatione.
Resp. Neg. consequentiam, ob rationes allatas (84, 86
Log. 19, 20, 21. Metaph. 20, 21).
282 ETHICA.
Obj. 5o. Si existeret lex naturalis, inutiles forent leges
civiles. Falsum consequens ; ergo et antecedens.
92. Resp. Neg. ant. Nam lo. leges civiles pœnas
temporales infractoribus irrogant, sicque plures in officie
retinent. 2o. Leges civiles in memoriam hominum officiis
et negotiis distractorum revocant legis naturalis principia.
3o. Plura sunt quae lege naturali neque imperata neque
prohibita sunt, et quas tamen imperare vel prohibere
societati utilissimum est.
Obj. 60. Deus non dédit hominibus facultates aut poten-
tias inutiles. Ergo quidquid possunt homines, id légitimé
possunt. Ità Hobbes, pluresque celeberrimi philosophi.
93. Resp. Neg. consqam. Nam potestas benè vel malè
agendi est una et eadem polestas, nempè libertas. Quamvis
igitur homo licite non possit illâ uti ad malè agendum, non
ideo est inutilis, cijm sit fons et radix omnium virtutum.
Inst. Quidquid Deus valet, ipsi licitum est. Ergo à
pari quidquid homo potest, ipsi licitum est.
94. Resp. Neg. consqam. et paritatem. In eo disparitas
est quod Deus sit summè sanctus, nec consequenter possit
malum agere. E contra, cùm homo non sit essentialiter
justus, abuti potest sua libertate ; potest ergo ehgere
malum, nec jus ipsius, sicut in Deo, potestatem adaequat.
95. Ex his videre est absurdissima esse simul et pernicio-
sissima systemata quœ nullum admittunt essentiale discri-
men inter bonum et malum morale, qualia quas proposue-
runt lo. Spinosa, qui nullum aliud jus admittit praeter-
quàm quod viribus et cupiditate determinatur.
2o, Hobbes, qui discrimen inter bonum et malum repetit
ex solis legibus civilibus ; idem sentit civis Genevensis,
libro cui titulus VEmile.
3o. Mandeville, libro cui titulus La Fable des Abeilles,
qui sentit boni et mali distinctionem ortum ducere à poli-
ticâ principum, qui populis suaserunt alios actus esse bonos,
alios vero malos, ut faciliùs gentes sibi devincirent.
4o. Helvetius, qui, libro cui titulus de l'Esprit, hoc
solum vetitum ac malum esse contendit, quod societati
nocet ; illud autem bonum esse quod societati prodest.
De Legis naturalis immutabilitate.
96. I. Legis naturalis principia; ut pote rerum essentiis
fundata, nunquam mutantur. Hinc idem actus non potest
ETHICA. 283
esse aliquando licitus, et aliquando illicitus, sicut propositio
non potest esse modo vera, et modo falsa. Mutatis tamen
essentialibus rei circumstantiis, actus priùs licitus potest
fieri illicitus, et vice versa : tune enim fit alter actus à
priori distinctus. Sic homicidium privatâ auctoritate com-
missum est illicitum ; sed in bello aut publicâ auctoritate
factum, fit licitum. At non ideô lex naturalis mutatur
aut exceptionem patitur, ut evidens est.
97. IL Deus non potest in lege naturali dispensare.
Nam in lege naturali dispensare est concedere alicui ut agat
aliquid intrinsecè et ex narurâ sua malum ; vel ut omittat
id quod ex naturâ suâ bonum est : atqui istud divinam
sanctitatem et sapientiam dedecet et manifesté répugnât.
Sic Deus permittere non potest odium sui. Ergo. . . . &c.
Obj. Deus dispensavit cum Abrahaino, ut ipsi liceret fi-
lium occidere ; cum Israëlitis, ut ^Egyptiorum vasa aurea
furarentur. Ergo Deus dispensare potest in lege naturali.
Resp. Neg. ant. Deus nec permisit nec prsecepit actio-
nés in objectione memoratas, manentibus circumstantiis,
sub quibus lege naturali vetitse sunt, sed illas prsecepit aut
permisit in iis tantùm circumstantiis in quibus lege natu-
rali minime prohibitoe erant, nec ad illius legis materiam
pertinebant.
Ad lum. Homicidium quidem privatâ auctoritate factum
legi naturali adversatur. Sed occisio innocentis facta auc-
toritate et jussu Dei, qualis Abrahamo prsecipiebatur, non
est injusta nec vetita lege naturali, cùm Deus sit supreraus
vitse et necis omnium arbiter.
Ad 2um. Deus tanquàm supremus rerura Dominus vasa
yEgyptiorum aurea Israëlitis donavit, sive in laborum mer-
cedem, quâ Israëlitas fraudaverant -^gyptii, sive ut puni-
retur iEgyptiorum in Israëlitas crudelitas. Israëlitae igitur
rem alienam non retinuerunt, nec proindè furti rei fuerunt.
De Lege divind positiva seu scriptâ.
98. Lex divina positiva, seu lex divina scripta, ea est
quam Deus hominibus libéré dédit, et aliter promulgavit
quàm per ejus cognitionem quam tradidit primis parentibus
ut eam posteris communicarent ; scilicet, quam promulga-
vit aliquo signo externo vel scripto.
99. Alia est merè positiva, quee statuit aliquid anteà
jure naturali minime prteceptum ; v. g., circumcisionera.
284 ETHICA.
Alia.quae statuit aliquid jàm anteà lege naturalipraeceptum
vel prohibitum, qualia sunt praecepta decalogi, excepta de-
terminatione sabbati.
100. Dividitur in legem veterem seu Mosaycam, et legem
novam seu Evangelicam. Prior ea est quse à Deo data est,
sive ante, sive post Moysen, populo Judaico, usque ad
Christum. Posterior est illa quam ipse Christus cunctis
gentibus dédit, et quae usque ad finem mundi duratura est.
2. De Lege humanâ.
101. Lex humana est prseceptum commune, justum et
stabile, ab eis qui societatis politicse vel ecclesiasticae cu-
ram gerunt, promulgatum.
Hinc lo. praeceptum quod à Deo accepit Abraham occi-
dendi filii, lex non erat, siquidem illum solum respiciebat.
102. Hinc 2o. prœceptum injustum non est lex, sed
injustitia. Legis autem justitia repetenda est lo. ab ob-
jecti honestate et conformitate cum lege divinâ ; 2o. ex
parte legislatoris qui auctoritatis limites excurrere non dé-
bet ; 3o. ex parte subditorum, quibus ità distribuenda
sunt reipublicae onera, ut cujusque facultatum ratio ha-
benda sit.
103. Nullus tamen subditus facile prsesumere débet le-
gem esse injustam. Imô quoties eam injustam esse evi-
denter non patet, legi submissè obedire débet.
104. Hinc 3o. lex non obligat quoties promulgata non
est. Lex enim régula est juxta quam actiones suas infor-
mare tenentur subditi. Atqui talis régula declarari débet
his qui suas actiones juxta eam informare debent. Ergo
.... &c.
105. Al, ut lex obliget, necesse non est ut omnibus et
singulis hominibus innotescat, alioquin omnes ferè leges fo-
rent irritcE. Ea sufRcit promulgatio, quâ solemniter et
juxta patrire morem lex ità publicetur, ut cuilibet facile in-
notescere possit.
106. Lex humana dividitur in scrîptam et non scriptam,
quae dicitur consuetudo. Lex scripta alia est ecclesiastica,
quse oritur à potestate ecclesiastica ; alia civilis, quae ortum
ducit à potestate civili.
107. Alia est quae communis est omnibus ferè gentibus,
et Qua3 ideo vocatur jus gentium. Jus gentium illud est
quod usu exigente et humanis societatibus, omnes ferè gen-
ETIIICA. 285
tes communi consensu sibi constituerunt («)• Ad illud per-
tinent imperiorum divisio et distinctio, belli et pacis leges,
legatorum privilégia, cum alienigenis commercium, &c.
Propositio prima.
108. Auctoritas civilis jus habet condendi leges quae in
conscientiâ obligent.
Prob. Deus enim creaturis suis concedere débet omnia
média necessaria ut perveniant ad finem ad quem eas des-
tinavit. Atqui homines destinavit ad societatem (198).
Ergo horainibus concedere débet média necessaria, ut stare
possit societas. Atqui societas stare non potest, si aucto-
ritas publica seu civilis non habeat facultatem condendi
leges quse subditorura conscientiam obligent. Coercendi
sunt enim abusus sensim irrepentes, improbi in officio reti-
nendi sunt suppliciorum formidine, quce omnia stare non
possunt sine legibus. Ergo. . . . &c.
109. Ergo subditi legibus civilibus et politicis jure divino
obedire tenentur.
Prob. Homines enim jure divino obeliire tenentur legibus
quee in conscientiâ obligant : atqui leges civiles et politicae
in conscientiâ subditos obligant (108). Ergo. . . . &c.
110. Hanc propositionem demonstrat scriptura sacra.
" Per me reges régnant, et legum conditores justa decer-
" nunt. Per me principes imperant, et potentes decernunt
" justitiam." Prov. cap. 8. ver. 15, 16. — Sic loquitur
Christus, Luc. cap, 20. ver. 25. " Reddite quae sunt Cae-
" saris, Csesari, et quae sunt Dei, Deo." — Idem docet
Apostolus, Rom. cap. 13. ver. 1,2,5. " Omnis anima
" potestatibus sublimioribus subdita sit ; non est enim po-
" testas nisi à Deo. . . . Itaque qui resistit potestati, Dei
" ordinationi resistit. Qui autem resistunt, ipsi sibi dam-
** nationem acquirunt. . . . Ideo necessitate subditi estote,^
" non soliim propter iram, sed etiam propter conscien-
" tiam." — I Petr. cap. 2. ver. 13. '• Subjecti igitur estote
" omni creaturœ propter Deum ; sive Régi, q\iasi praecel-
(a) '■ Il existe,(}it Mr. de la Mennais. entre les diverses sociétés des rapports nécessaires
" dont l'ensemble forme ce qu'on appelle \c droit des gens, et les sociétés sont plus ou
" moins tranquilles, selon q'je ce droit est plus ou moins conforme à l'ordre immuable ou à
" la nature des êtres dont se composent les sociétés . , ,." Les lois du droit des gens uiiis-
" eeot la société naissante h toutes les autres aociéié-'i, ou ù la grande société du geiue hu-
" main et l'ordonnent par rapport au (oui duni elle fait partie.'' Essai sur l' indifférence en
tnalihre de religion, lora. !■ pag. 332.
286 ETHICA.
" lenti ; sive dacibus, tanquàm ab eo missis ad vindictam
" maledictorum, laudem verô bonorum."
111, Si tamen lex humana quidpiara juberet contra
legem naturalem aut divinara, omaia patienter essent
potiùs toleranda, quàm legislatori imperanti obtemperan-
dum ; tune enim " obedire oportet Deo magis quàm
" horainibus." Actu. cap. 5. ver. 29.
Propositio secunda.
112. Ecclesia jus habet condendi leges quee in con-
scientiâ obligent.
Prob. Christus enim Ecclesise concedere debuit quidquid
est necessarium ad bonum regimen reipublicae christianse,
et ad salutem animarum : atqui jus condendi leges quae in
conscientiâ obligent, est necessarium. . . . &c. Ergo. . . .
&c. Hinc sic Christus loquitur suos apostolos, Matth.
cap. 18. ver. 17, 18. "Die EcclesiEe ; si autem Eecle-
*' siam non audierit, sit tibi sicut etlinicus et publicanus.
" Queeeunque alligaveritis super terram, erunt ligata et in
" cœlo, et qusecunque solveritis super terram, erunt soluta
" et in cœlo." Insuper, Actu. cap. 20. ver. 28. de omnibus
apostolis eorumque successoribus dicitur ; " attendite vobis
" et universo gregi, in quo vos Spiritus sanctus posuit
" Episcopos, regere Eeclesiam Dei." Ergo. . . . &c.
PARS SECUNDA.
DE ETHICA SPECIAL!.
113. Ethica specialis tractât de officiis hominum erga
Deum, erga seipsum et erga proximum.
CAPUT PRIMUM.
DE OFFICIIS HOMINUM ERGA DEUM.
114. Hominis erga Deum officia reducuntur ad cultum
Dei religiosum. Cultus ille duplex est, alius internus, alius
externus.
1. De Cultu Dei interno.
115. Cultus generatim est lionor alicui exhibitus. Cùm
Deus sit spiritualis, infinitus et cunctis cogitationibus
nostris, etiam secretioribus, intimé prsesens (Metaph. 156),
actibus merè internis honorari potest. Qusestio est igitur
an hujusmodi cultum illi stricte debeant homines.
ETHICA. 287
Propositio.
116. Tencntur homines ad cultum Dei internum.
Prob. lo. Nam cultus internus consistit in amore, ado-
ratione, obsequio, timoré, oratione et gratiarum actione :
atqui tenentur homines Deum amare, cùm sit infinité
amabilis, et cùm perfectiones omnes complectatur: tenentur
illum adorare, cùm suprema sit ejus majestas, supremum-
que sit ipsius in creaturas dominium : ei obsequium prees-
tare, cùm sit omnipotens, et jus habeat imperandi :
tenentur illum timere, novit enim omnia peccata, ea aver-
satur et plectere potest, pro iis denique à peccatoribus,
ratione justitise et œquitatis, pœnas repetere valet et débet:
eum orare, in dies enim nova bénéficia nobis conferre
potest : gratias illi agere, innumeris enim beneficiis nos
quotidiè cumulât. Ergo....&c.
Prob. 2o. Attributa divina, potentia, bonitas, sapientia,
intelligentia, in orbe universo splendescunt. Cur autem
Deus sic seipsum suaque attributa in operibus manifestavit?
Cur aliundè intellectum hominibus concessit, quo ista attri-
buta cognosci possunt, nisi quia vult in suis operibus ab
istis hominibus coUaudari ?
Prob. 3o. Ex unanimi populorum consensu. Omnes
morahter homines cunctorum locorum et temporum semper
persuasum habuerunt aliquem cultum Deo exhibendura
esse, et consequenter homines teneri ad cultum Dei inter-
num : at(iui hœc universalis et constans hominum consensio
firmissimum est veritatis argumentum, in solâ enim naturâ
homines ità sibi consentiunt : ergo ipsa natura, proindèque
ipse Deus auctor naturœ, docet cultum internum Deo
exhibendum esse. Ergo. . . . &c.
Solvuniur objectiones.
Obj. Deus nullum exigit cultum ex parte nostrâ. Ergo. .&c.
117. Resp. Neg ant. Deus enim exigit quidquid rectus
ordo postulat ; atqui rectus ordo postulat ut omnis creatura
intelligens creatorem suum agnoscat, agnitum colat, adoret,
timeat, et ex toto corde diligat. Ergo. . . .&c.
Inst. lo. Deus nullatenùs cultu nostro indiget ; ergo
illum non exigit.
118. Resp. Dist. Ant. Deus non indiget cultu nostro ut
perfectior fiât ; conc. ant. Deus nullam ob aliam rationem
288 ETHICA.
indiget cultu nostro ; neg. ant. et consqam. Ex eo quod
Deus non indigeat cultu nostro, sequitur tantùm ipsum non
exigere à nobis cultum, ut ipsi possimus addere aliquani
perfectionem ; minime vero sequitur Deum hune cultum à
nobis non exigere ut nobis fructuosum, ut fini nostro con-
gruum et ordini recto conformera ; atqui cultus ille nobis
fructuosus est, fini nostro congruus, et recto ordini con-
formis. Ergo, . . . &c.
** Dieu trouvant en lui-même son bonheur, inquit D.
" Frayssinous, n*a pas besoin sans doute de ses créatures;
*' il n'est ni plus heureux par nos hommages, ni plus mal-
*' heureux par nos révoltes ; il n'est pas comme les princes
" de la terre, qui éprouvent des sentimens intérieurs et va-
•* riables de plaisir ou de peine, par la fidélité ou la déso-
** béissance de leurs sujets, et dont la destinée dépend
" toujours plus ou moins des passions et des caprices des
" peuples. . . .11 n'en est pas ainsi de Dieu, qui est éternel.
•' Notre indifférence ne saurait altérer sa félicité; les blas-
'* phèmes et les révoltes des nations liguées ne sauraient
" obscurcir sa gloire, ni ébranler le trône de sa grandeur,
" Non, ce n'est pas pour en être plus heureux qu'il veut
" être honoré de ses créatures ; mais enfin Dieu est la sa-
" gesse et l'équité même, il est essentiellement le Dieu de
'* l'ordre, il veut, il approuve, il commande tout ce qui est
*• conforme à la souveraine raison ; il condamne tout ce qui
*' s'en écarte. Or il est dans la nature des choses que la
" créature dépende du créateur, que Dieu soit la fin de tout,
" comme il en est le principe : et s'il ne peut se dépouiller
*' lui-même de sa qualité de maître suprême, il ne peut
" nous dépouiller de notre qualité de sujets ; nous sommes
*' l'ouvrage de ses mains, son domaine sur nous est inalié-
** nable ; il se doit à lui-même de ne pas se dessaisir de son
" empire, parce qu'il ne peut cesser d'être Dieu." Confc-
rence sur le culte en général, tom. 2. pag. 9.
Inst. 2o. Cultus noster Deo indignus est. Ergo nec titulo
nostrse utilitatis Deus eum exigere potest.
119. Resp. Neg. ant. Quidquid enim rectœ rationi con-
forme est, Deo indignum esse non potest : atqui rectae ra-
tioni conforme est creaturas creatori pro coîlatis donis gra-
lias et amorem exhibere. Ergo. . . . &c.
ETHICA. 289
Inst. 3o. Quô majus est intervallum inter eum qui colit
et eam qui colitur, eô magis decrescit cultûs valor. Ergo
cultus à creaturâ Deo redditus non potest esse nisi infinité
parvi pretii. Atqui cultus infinité parvi pretii Deo indignus
est. Ergo. . . .&c.
120. Resp. lo. Quô majus est intervallum inter eum qui
colit et eum qui colitur, eô major est dependentia colentis
ab eo qui colitur ; eô igitur magis necessarius est cultus.
Resp. 2o, Neg. min. Deo enim indignum esse non potest,
quod ordini conforme est, et quod recta ratio non solùm
approbat, sed et etiam strictissiraè prœscribit : atqui talis
est cultus quem homines Deo reddere tenentur. Er^ro
....&c.
Inst. 4o. NuUa est proportio inter cultum à creaturâ
valdè imperfectâ prsestitura, et Deum summè perfectum.
Ergo ille cultus Deo est indignus.
121. Resp. Dist. Ant. Nulla est proportio aequalitatis ;
conc. ant. Nulla est proportio habitudinis (de rapport) et
relationis ; neg. ant. Fateor equidem nuUam dari propor-
tionem eequalitatis inter cultum à quâlibet creaturâ exhi-
bitum, et Deum cui exhibetur : id evidens est. Sed nego
nullam dari proportionem habitudinis et relationis : ad hoc
enim sufficit ut mens plurimis gaudeat facultatibus quibus
Deum attingere valeat : atqui mens plurimis hujusmodi
facultatibus gaudet, nempè facultate eum cognoscendi,
amandi, deprecandi, &c. Ergo. . . . &c.
IL De Cultu Dei externo.
122. Cultus externus est ille qui aliquibus corporis mo-
tibus aut signis, v. g., sacrificiis, canticis, precibus vocali-
bus, &c., exercetur.
Propositio prima.
123. Tenentur homines ad cultum Dei externum.
Prob. lo. Tenentur enim homines ad cultum Dei inter-
num (116). Ergo tenentur ad id omne quod necessarium est
ad promovendum et fovendum cultum Dei internum ; atqui
cultus externus necessarius est ad. . . .&c. Cùm enim diii
objecta spiritualiaprosequi nonpossimus, nisi rébus sensibi-
îibus excitemur, cultus internus sine cultu externo brevi
languesceret et exstingueretur. Ergo. . . . &:c.
T
290 ETHICA.
Prob. 2o. Idcirc6 Deo debetur cultus internus, quia Deus
mentis nostree est creator : atqui pariter corporis nostrr est
Creator. Ergo, cùm Deus corpus et animam mirabili uni-
one conjunxerit, corpus débet, pro suo modulo, quoddam
tributum Deo persolvere, sicque in celebrandis sui creatoris
laudibus menti consociari. Ergo, . . . &c. " L'homme, inquit
" D. de la Mennais, compose' de deux substances, doit à Dieu
" l'hommage entier de son être, ou, pour parler le langage
'* profondément philosophique du catéchisme, il doit con-
** naître Dieu, l'aimer et le servir ; le connaître par sa pen-
" sée, l'aimer par son cœur, le servir par ses sens. La
'* nécessité d'un culte extérieur dérive donc de la nature
" de l'homme, être intelligent et physique. Un culte
" purement spirituel est le culte des purs esprits ; c'est le
*' culte des anges ; mais ce n'est point celui de l'homme,
" qui par un efliet de l'intime union de l'ame et du corps ne
" peut entrer en société, soit avec Dieu, soit avec sessem-
" blables, qu'à l'aide des organes." Essai sur V indifférence
en matière de religion, tom. 1. pag. 505.
Prob. 3o. Semper et ubique cultus externus fuit in usu.
Sic Caïn et Abel Deo offerebant de fructibus terrae et de
gregibus munera. Sic Noë, vix egressus arcâ, œdificavit al-
tare Domino ; sic apud omnes gentes mos semper exstitit
divinitatem ritibus externis adorandi, supplicandi. . . . &c.
Ergo, . . .&c.
" Que nous dit la raison, inquit D. Frayssinous ? c'est
** que l'homme doit faire à Dieu l'hommage de son être
** tout entier, de son corps comme de son esprit. Nous ne
♦' sommes pas de pures intelligences, indépendantes des
♦' choses sensibles, ne vivant que de sentimens et de pen-
'* sées ; nous avons un corps et des organes dont nous
" nous servons pour l'exercice même de nos facultés intel-
" lectuelles. N'est-ce donc que lorsqu'il s'agit de laDivi-
" nité et des hommages qui lui sont dus, que notre cor|)3
'* serait comme étranger ? ou plutôt n'est-il pas juste de le
" faire servir au culte de son créateur par ces actes cxtéri-
** eurs et sensibles, les seuls dont il soit capable ? Il ne
'* faut pas s'y tromper ; il ne s'agit pas, pour relever la
^* dignité de l'homme, de lui supposer une perfection chi-
" mérique, de le croire tellement dégagé des sens et de
*' l'imagination, qu'il puisse aisément se passer de leur in-
ETHICA. 291
" fluence. - Si vous bornez le culte de la Divinité à des
*' hommages purement intérieurs, qu'arrivera-t-il ? C'est
" que bientôt les sentimens de la piété s'affaibliront jus-
" qu'à ce qu'ils finissent par s'éteindre entièrement. Oui,
" s'ils ne sont éveillés, nourris, fortifiés par des pratiques
" extérieures, ils n'auront plus qu'un je ne sais quoi de
" froid, de vague et de superficiel. En vain le fausse déli-
" catesse, le bel esprit dédaigneux, affectent de voir des
*' pratiques puériles et ridicules dans les rites sacrés, la
" pompe des cérémonies, les postures suppliantes, léchant
*' religieux et les décorations des autels, l'expérience ap-
" prendra toujours que, si tout cela n'est pas la religion
'^ même, tout cela du moins en est l'aliment et le soutien ;
" que, sans les dehors de la religion et ses pratiques
" saintes, bientôt les peuples en perdraient le goût et l'es-
" prit; que la piété sincère habite, il est vrai, dans le cœur
" comme dans un sanctuaire impénétrable et connu de
** Dieu seul, mais qu'elle finirait néanmoins par n'être
** qu'un vain fantôme, si elle n'était fixée, rappelée, incul-
" quée et comme réalisée dans le culte extérieur. Tout
" ce prétendu culte de la pensée se réduirait à quelques
" idées métaphysiques sur la Divinité qui ne régleraient ni
'* les affections ni la conduite. . . .11 faut prendre l'homme
*' tel qu'il est : son esprit est si faible, son imagination si
" volage, son cœur si facile à s'égarer, qu'on ne doit négli-
" ger aucun des moyens qui peuvent fixer son inconstance,
" éveiller son attention, et nourrir dans son ame de pieux
"■ sentimens." Ihid. pag. 20, &c.
Propositio secunda.
124. Deo debetur cultus solemnis ac publicus, seu tenen-
tur homines ad Deum publico ritu colendum.
Prob. lo. Ad id enim tenentur homines sine quo cultus
interior et exterior brevi deficerent, prœsertira apud rudes.
Atqui sine conventibus publicis ubi res religionis agantur,
sine caeremoniis, id est, sine cultu publico, cultus interior
et exterior brevi deficerent. Ergo. . . . &c.
Prob. 2o, Ubique terrarum semper exstiterunt templa,
festa, solemnitates, sacerdotes, altaria, ritus sacri et publici,
ut innumera testantur historiarum monumenta : atqui hsec
omnia invincibiliter probant universis gentibus persuasum
t2
292 ETHIGA.
semper fuisse cuUum publicum et solemnem Deo exhiben-
dum esse. Talis autem persuasio adeô constans et univer-
salis, à prsejudiciis vel ab aliis errorum nostrorum fontibus
oriri non potuit. Ergo orta est à solâ rei veritate. Ergo
&c.
Prob. 3o. iEquum est gratum animum colligere eos qui
in divinis beneticiis miré collecti sunt ; tequum est eos qui,
prout sunt societatis merabra et ipsa societas, tôt beneficiis
cumulati sunt, simul in societatem ad laudes Deo persol-
vendas adunari.
Prob. 4o. Homines in conventus publicos congregantur
ut res civiles peragant. Ergo à fortiori congregari debent
ad res religionis agendas. Ergo. . . .&c.
Soîvmitur objecliones.
Obj. lo. Cor solum intuetur Deus. Ergo sufficit illum
cultu interno honorare.
125. Resp. Neg consqam. Ex eo quod enim Deus cor
intueatur, rectè concluditurcultum merè externumnon esse
sufficientem, ipsumque Deo placere non posse, nisi cum
cultu interno verè jungatur. Hinc Deus eos solos, qui se-
ipsum in spiritu et veritate adorant, spectat, et improbat
cultum eorum qui labiis ipsum honorant, dùni cor eorum
longé est ab ipso. At inferri non potest nullum cultum
externum Deo exhibendum esse. Illius quippè nécessitas
ex cultu interno et ex naturali hominis constitutione evi-
denter sequitur (123). Ergo, . . . &c.
Inst. Corpus meriti aut demeriti incapax est. Ergo Deus
non exigit cultum externum.
126. Resp. Dist. Ant. Meriti aut demeriti incapax
est corpus in se spectatum et tanquàm causa efticiens ;
conc. ant. Cum anima junctum et in quantimi est instru-
mentum ; neg. ant. Fateor equidem corpus in se specta-
tum nullius meriti aut demeriti esse capax ; est enim ma-
teria intelligentiae et libertatis omnino expers ; sed nego
illud meriti aut demeriti capax fieri non posse, quatenùs
est instrumentum quo mens utitur ; homo enim est perso-
na ex corpore et anima coalescens ; ipsa persona sic com-
posita mereri aut demereri potest : porro recta ratio evi-
denter prsescribit obsequium totius personse nostrae Deo
prœstandura esse. Ergo. . . . &c.
ETHICA. 293
Obj. 2o. Inutilis est oratio ; nihil est enim quod à Deo
postulare possiraus. Ergo .... &c.
127. Resp. Neg. ant. Deus enim sortis liumanœ est su-
premus arbiter, hondnuraque pater optimus. Ergo in eo
spem et fiduciam coUocare debemus ; atqui naturale est
opem eiHagitare ab eo, in quo spem et fiduciam collocavi-
mus. Ergo. . . . &c.
Et verô Deus inutilia non jubet : atqui Deus jubet ut ore-
mus. Jubet enim quod natura et recta ratio nos docent. Atqui
natura et recta ratio nos docent ut oremus. lo. Natura; ità
enim suraus à natura comparati, ut in angustiis et serumnis
opem à Deo efRagitemus, et subito exclamemus, mi Deus !
bone Deus! &c.2o. Recta ratio; nihil enim recta3 rationi magis
consentaneura est, quàm in necessitatibus ad Deum summè
potentem, summè beueficum et bonorum omnium fonteni
recurrere. Atqui talis est Deus. Ergo. . . . &c.
Adprob. neg. ant. Nam postulare possumus lo. ut mala
tiim prœsentia, tùm futura, tiim eminentia avertat ; 2o. ul
nos à cupiditatibus prsemuniat ; 3o. ut noxia quceque à no-
bis arceat.
Inst. Vel rerum ordo, sapienter à Deo institutus, exigit
ut mala quse nos premunt, evanescant, aut ut bona, quce
petimus, concedantur, vel non. Si prius, inutiles sunt pre-
ces ; si posterius, Deo injuriosae sunt ; tune enim postula-
mus ut muietur ad nutum nostrum ordo sapienter à Deo
institutus.
128. Resp. In neutrâ hj^pothesi inutiles sunt preces.
Non in priori, cùm preces ingrediantur ordinem à Deo sa-
pienter institutum, et cùm ipse Deus decreverit mala quas-
dam avertere, bonum vero concedere, si seipsum enixè ora-
verint homines. Non in posteriori; possunt enim homines
absque ullâ in Deum injuria postulare ut mutet circumstan-
tias quaî nobis adversantur ; sicque eum exorant ut suam
potentiam, bonitatem, misericordiam, liberlatem, &c., ma-
nifestet ; quod sanè in Deum injuriosum esse non potest.
m. De Religionum indifferentid.
129. Quidam pseudo-pbilosoj)hi volunt Deum quâlibet
religione coli posse, et consequenter quemlibet cultum ipsi
placere, ideoque cuilibet horaini licere quamlibet de Deo
opinionem habere, quemlibet cultum sequi, dummodô
Deum amet et in eo spem reponat. liinc quisque potest
294 ETHICA.
modo aliam, modo alteram pro variis locis, temporibus, et
circumstantiis profiter! religionem, ità ut possit esse deista
cum deistisjudaeus cum judseis, raahumetanus cum mahu-
metanis, lutheranus cum lutheranis, catholicus cum catho-
licis, &c. Hcec indifFerentia vocatur etiam tolerantia
theologica. Omninô differt à tolerantia civili seu poUticd,
quae nihil aliud est quàm potestas à principe civili subditis
concessa quamlibet publiée profitendi et prasdicandi religio-
nem. " La tolérance civile, inquit D. Frayssinous, consiste
" à permettre le libre exercice de toutes les religions, non
" parce qu'on les regarde toutes comme égales aux yeux de
" la Divinité, mais parce qu'on ne croit pas devoir gêner
" les partisans des divers cultes dans la manifestation
" publique de leur croyance particulière. Jusqu'où doit
" s'étendre cette tolérance? Quelles sont les mesures de
** sagesse à prendre pour tout contenir dans les justes
*' bornes, et pour empêcher que la liberté des cultes ne
" dégénère en excès funestes ? Ce sont là des questions
" qui sont du ressort de la politique, des problèmes faits
" pour embarrasser les meilleurs esprits, et dont il serait
" difficile, je pense, de donner une solution complète pour
" tous les hommes et pour tous les lieux. Les habitudes,
" le génie des peuples, les conjonctures, peuvent amener
" dans la conduite des gouvernemens des mesures difFé-
** rentes, mais toutes également sages." Conférence sur la
tolérance, tom. 4, pag. 60.
Propositio,
130. Rehgionum indifFerentia admitti nequit.
Prob. lo. Existit Deus ; ergo existit aliqua religio ; sed
unicus est verus Deus. Ergo unica est vera religio.
Ergo. . . . &c.
Proie. 2o. Duœ religiones oppositee non possunt esse duae
verse.' religiones. Ergo ambae simul admitti nequeunt.
Ergo. . . . &c.
Prob. 3o. Deus semper et ubique idem est, semperque
est summa veritas. Ergo semper et ubique eodem modo
colendus est. Veritatem semper diligit semperque menda-
cium odio habet : ergo falsa religio ei placere non potest.
Prob. 4o. lUud admitti nequit ex quo sequeretur Deum
approbare errorem, contradictionem et impietatem. Atqui
si admitteretur religionum indifFerentia, sequeretur Deum
ETHICA. 295
approbare. . . . &c. Omnes enim religiones, si veram exci-
pias, errore vel contradictione vel iinpietate nituntur, ut
clarè constat ex earum cornparatione. Nam lo. vel unicus
est Deus, vel plures sunt. Si prius, impii sunt pagani; si
posterius, christiani impii sunt. 2o. Vel Christus Dei
filius est, vel est impostor ; si verè filius Dei est, rei sunt
judœi ; si est impostor, stulti et impii sunt christiani. 3o.
Vel reljgio mahumetana est divina, vel non ; si divina est,
in errore versantnr christiani ; si non est divina, ipsi
omnes mahumetani errant. Ergo. . . . &c.
" On nous dit qu'il suffit d'être honnête homme, inquit
" D. Frayssinous, mais le premier devoir de l'homme
" n'est-ce pas d'obéir à celui qui a fait l'homme? La
*' créature a-t-elle le droit de rejeter le joug de son créa-
" teur ? Peut-elle se dispenser de payer un tribut d'ado-
" ration et d'amour à celui de qui elle a tout reçu? et si
"■ par un effet de sa bonté incompréhensible, puisqu'elle
" est infinie, il avait daigné nous manifester ses volontés
" saintes, nous donner une religion positive, nous révéler
" ce qu'il faut croire et pratiquer, pourrions-nous impuné-
" ment mépriser ce bienfait, lui dicter la loi au lieu de la
" recevoir ? Dieu n'est-il pas le roi des esprits comme de
" la matière? n'a-t-il pas le droit de commander ànotrein-
" telligence d'adhérer aux vérités qu'il nous révèle, comme
" de commander à notre volonté la soumission aux précep-
*' tes qu'il lui donne? Non, nous ne sommes pas plus les
'' maîtres de nous soustraire à son empire qu'à ses regards.
" Sans doute, si cette révélation m'était inconnue, si elle
•' n'avait pas fait briller sa lumière à mes yeux, je ne
" serais pas coupable de l'ignorer: l'ignorance de la vérité,
" quand elle est entièrement involontaire, n'est pas crimi-
" nelle. Le souverain Juge ne demandera compte que des
" lumières qu'il aura communiquées, et celui qui aura été
" dans l'impossibiUté de connaître l'Evangile ne sera pas
" jugé par l'Evangile ; mais la vérité n'en conserve pas
" moins le droit de soumettre les esprits, et d'exiger
*' leurs hommages, du moment qu'elle vient les éclairer.
*' L'homme doit toujours être dans la disposition sincère
" d'embrasser la rehgion véritable, quand elle vient se
" nianifester à lui. Ce n'est pas une chose arbitraire, c'est
" un devoir : j'aurais bien pu l'ignorer sans être coupable,
296 ETHICA.
*' mais je ne pourrais, sans l'être, ni la rejeter quand elle
*' se présente avec des titres suffisans pour subjuguer mon
•' esprit, ni l'abandonner après Tavoir connue.
" On dit encore qu'il est libre à chacun de suivre tran-
" quillement, et sans examen, la religion de son pays :
" mais d'abord il faut bien que les partisans les plus fou-
" gueux du tolérantisme y m.ettent quelques bornes; car
" enfin on a vu des cultes qui outrageaient l'humanité et la
" vertu, qui convertissaient les temples en lieux de pros-
*' titution ou en théâtres de carnage ; les divinités qu'on y
*^ adorait demandaient des meurtres et des infamies :
" apôtres complaisans de TindifFérence, vous ne voudrez
" pas, je pense, l'étendre jusqu'à ces abominables excès.
*' Vous voilà forcés de restreindre votre système, si vous
" ne voulez pas absoudre tout ce que la superstition a
'' inventé de plus cruel ou de plus impur. Il vous plaît
'' d'avancer que, dans l'ordre de la religion, on peut suivre
* les divers cultes, comme dans l'ordre civil on peut se
' conformer aux diverses lois de police : vous vouiez que
' l'on puisse changer de religion comme de climat : que
' l'on soit catholique à Rome, anglican à Londres, calvi-
' niste à Genève, musulman à Constantinople, idolâtre à
' Pékin ; c'est-à-dire, que dans votre penséi', il faudra que
' tour à tour, suivant les lieux et les usages, j'adore ce
' que mon cœur déteste, ou que je blasphème ce que mon
' cœur adore. Ainsi je crois que Jésus-Christ est vérita-
' blement le sauveur du monde par sa mort, comme il en
• a été la lumière par sa doctrine, n'importe ; si j'étais au
■ Japon, je pourrais, suivant vous, blasphémer contre lui
■ en foulant aux pieds ses images sacrées. Ainsi je crois
qu'il n'est qu'un seul Dieu, créateur de la terre et des
cieux, n'importe ; si je me trouvais au milieu des
idolâtres, je pourrais, suivant vous, invoquer avec eux
les divinités les plus fabuleuses. Ainsi, au sein de
cette capitale (Paris), je puis traiter hautement Mahomet
d'imposteur, et, si jetais à la Mecque, je pourrais,
suivant vous, m'écrier avec le musulman : Dieu est Dieu,
et Mahomet est son prophète. Quel système que celui
qui ne se compose que de contradictions, qui met sans
cesse la conduite en opposition avec la conscience; qui
m'apprend soit à trahir par mes discours et mes actions
ETHICA. 297
** les ventés que je crois, soit à me régler d'après des dog-
" mes impies que j'abhorre ! Quel système que celui qui
'' fait de la religion un jeu et un caprice, qui m'autorise à
'^ faire semblant de croire ce que je ne crois pas, qui met la
*' piété dans la dissimulation, et qu'on ne réduit en pratique
" que par un vice détestable, l'hypocrisie !" Ibid. pag. 81.
Legatur caput IV. operis suprà laudati cui titulus: Essai
sur V indifférence en matière de religion, à D. de la Mennais.
Solvuntîir ohjectiones.
Obj. lo. Cuique sufficit, ut toto corde suo Deum dili-
gat ; atqui in quâlibet religione quisque potest Deum toto
corde diligere. Ergo. . . . &c.
132. Resp. lo. Neg. supp. maj. Supponit enim major
sincerum Dei amorem subsistere posso absque ardenti
studio inquirendi quisnam sit verus Dei cultus ; atqui
sincerus Dei amor subsistere non potest. . . . &c. Qui enim
Deum sincère amat, diligenter inquirit quo cultu ipsi
placere possit. Ergo. . . . &c.
Resp. 2o. Neg. min. Nam verus Dei amor non potest
consistere cum errore^ contradictione et impietate : atqui,
ut in quâlibet religione quisque posset toto corde Deum
diligere, oporteret ut verus Dei amor consistere posset cum
errore, contradictione et impietate (130, 131). Ergo...,&c.
Obj. 2o. Indifferentia religionum admitti débet, si nulla
adsint média detegendi quee sit vera religio : atqui nulla
adsunt média. . . . &c., prœsertim apud indoctos. Ergo
.... &c.
133. Resp. Neg. min. Vera enim religio specialibus
quibusdam characteribus ità splendescit, ut plana et obvia
sit lis quibus sufficienter explicatur et proponitur, dummo-
do eam sincère perquirant ; aliter Deus sibi contradiceret,
cùm ipse prsecipiat ut homines veram profiteantur reîigio-
nem, utque firmiter illi adhaereant, et tamen ipse nulla
suppeditaret média detegendi quEe sit hœc vera religio.
Et vero, licèt concederetur indoctos non posse per
seipsos secernere quse sit vera religio, nihil indè sequeretur
contra nostram assertionem ; possunt enim et debent
imperiti consulere doctos et peritos ut, queenam sit vera
rehgio, agnoscant.
Cseteriim, fieri potest ut quis bonâ fide et ignorantiâ
minime culpabili falsse religion! adhœreat ; in eo casu non
298 ETIIICA.
damnabitur quia veram religionem ignoraverit: Deus enim
impossibilia non jubet et solas culpas voluntariè admissas
pœnis proportionatis afficit, "La Sorbonne, inquit D.
Frayssinous, dans la censure de l'Emile, après avoir
parlé des enfans baptisés dans les communions sépa-
rées, et de ces hommes simples dont Dieu seul connaît le
nombre, ajoute (censure de la proposition 32e.): tous ces
enfans et ces simples ne participent ni au schisme ni à
Vliérésie ; ils en sont excuses par leur ignorance invincible
de l'état des choses, et Von ne doit j^cts les regarder comme
n'appartenant pas à l'Eglise hors de laquelle il n'y a point
de salut.'* Maximes de l'Eglise catholique sur le salut des
hommes, tom. 4. pag. 29.
Obj. 3o. Intolerantia semen est bellorum. Ergo admit-
tenda est indifFerentia religionum.
134. Resp. Dist. Ant. Per accidens, conc. ant. ; per su-
am naturam, neg. ant. Reverà homines, ut suis cupidita-
tibus indulgeant, ut ambitioni, vanse gloriœ, vindictis, divi-
tiarum appetitioni, &c., faveant, sub religionis larvâ sœpè
ad arma convolant ; sed haec omnia religioni imputari
non debent : è contra, vera religio seditiones, dissensiones,
vindictas, odia, &c., improbat et damnât, sincerumque
amorem in proximum ab omnibus exigit. Viri itaque verè
religiosi odio habent errores, errantes vero sicut semet-
ipsos diligunt. Hâc de re audiamus D. Frayssinous." Con-
férence sur la tolérance, tom. 4. pag. 64.
" Intolérante contre les erreurs, mais tolérante envers
" les personnes, telle est la religion que nous avons le bon-
" heur de professer ; tout ce qui a pu dans le cours des
" siècles s'écarter de ce double caractère de force d'un côté
" et de douceur de l'autre n'est pas venu de la religion,
" mais des passions humaines. Elle nous apprend à sup-
** porter dans des sentimens de paix et d'indulgence ceux
" mêmes que nous croyons dans l'erreur, à les plaindre
'' plus encore qu'à les condamner : le vrai chrétien sait
'* distinguer l'erreur toujours odieuse, de celui qui s'égare ;
" le paradoxe qui révolte, de celui qui le soutient. Sans
" doute la mensonge ne mérite pas plus de ménagement
*' que le vice, et l'athée n'est pas plus respectable que le
" débauché; mais le zèle le plus légitime a ses bornes, il
" doit toujours être tempéré par une sage condescendance ;
ETHICA. 299
** et, lors même que les doctrines peuvent diviser les es-
" prits, la charité doit confondre les cœurs." Voyez à ce
sujet la conférence sur la religion vengée du reproche de fana-
tisme ^ toni. 3. pag. 332.
CAPUT SECUNDUM.
DE OFFICIIS. HOMINIS ERGA SEIPSUM.
135. Duplicis sunt generis officia hominis erga seipsum ;
alia scilicet ad animam, et alla ad corpus spectant.
I. De oficiis hominis ad ipsius animam spectantibus.
Duœ sunt preecipuse mentis humanae facultates, nempè
intellectus et voluntas ; ad utriusque curam igitur revocari
possunt hominis erga mentem suam officia.
De officiis quœ ad intellectum spectant.
136. Cùm intellectus ad hune finem destineturut verum
agnoscat, mens veris circa res ad officium suum pertinentes
sententiis imbuenda est, et cognitionibus homine dignissi-
mis exornanda.
137. Hinc lo. eas imprimis inquirere debemus cognitio-
nes quse ad omnes homines pertinent, qualia sunt religionis
et raorum principia.
138. Hinc 2o. eas cognitiones, disciplinas aut artes ad-
discere debemus quae ad peculiarem vitse institutum, ad
munusque rectè obeundum necessarise sunt.
139. Hinc 3o. acquisitis cognitionibus necessariis, statûs-
que nostri repletis officiis^ animum adjungere licet ad scien-
tias utiles aut jucundas, quales sunt mathesis, physica,
chimia, historia naturalis, linguarura cognitio, historia, &c.;
aut ad artes libérales et ingenuas, quales sunt graphis (le
dessin), pictura, architectura, musica, &c, Cseterùm, in
hujuscemodi cognitionibus inquirendis parùm proficiemus,
si Deum ducera non adhibeamus; ut enim ait Apostolus, I.
Corinth. cap. 3. ver. 7 ; " neque qui plantât est aliquid,
'* neque qui rigat, sed qui incrementum dat, Deus." Ip-
sius igitur opem cum prophetâ sic implorare debemus :
" bonitatem, etdisciplinam, et scientiam doce me." Psalm.
118. ver. 66,
300 ETHICA.
De officlis quœ ad voluntatem spectant.
140. Cùm voluntatis proprium sit bonum appetere et
maîum aversari, curandum nobis maxime est ut appetitus
noster nec aliud quàm bonum solidum prosequatur, nec
aliud quàm verum malum efFugiat. INihil ergo nobis magis
optandum esse débet quàm ut à mendacibus bonorum appa-
rentium illecebris deludamur.
141. Hinc lo. omni conamine bona solida et œterno re-
rum ordini consentanea, singula pro suâ dignitate et excel-
lentiâ, appetere tenemur. Undè colligere est lo. Deum
ante et super omnia esse diligendum, cùm sit summum bo-
num, quo nihil perfectius et excellentius excogitari potest ;
2o. animam corpori anteponendam esse, quia corpore me-
lior est et prœstantior : 3o. omnes omninô homines propter
Deum esse diligendos.
142. Hinc 2o. eos voluntatis afFectusreprimere tenemur, .
qui ex naturâ suâ pravi sunt et inordinati, ut ira, ambitio,
avaritia, &c.; eos vero intra légitimes fines continere, ralio-
nis imperio subjicere et ad propriam destinationem flectere
debemus qui ex naturâ suâ boni suut^ ut felicitatis deside-
rium, &c.
143. Hinc 3o. abstinendum est lo. à libris amatoriis vulgô
dictis Romans. Ex eorum lectione quantum immineat pericu-
lum patet, quôd toti sint in describendis profanis amoribus,
in referendis colloquiis et litterulis ad libidinem compositis,
in commemorandis factis ad eum finem excogitatis ut vo-
luptatis sensum provocent. Quàm verô ex hujusmodi libellis
infausta nascantur consectaria, neminem latet («) ; 2o. à
choreis et saltationibus, quales fieri soient ; in illis enim
vehemens occurrit libidinis incitamentum. " Jen'aija-
" mais douté, inquit D. Bussi-Rabutin, que le bals ne fus-
" sent très-dangereux. Ce n'a pas été seulement ma rai-
'' son qui me l'a fait croire, c'a encore été mon expéri-
" ence ; quoique le témoignage des Pères de l'Eglise soit
" bien fort, je tiens que^ sur ce chapitre^ celui d'un cour-
*• tisan sincère doit être d'un p!us grand poids. . . . JI est
*' certain qu'on court grand hasard d'offenser Dieu dans
" les bals. . . . Les jeunes gens ne pourraient s'y trouver,
(a) " On se plaint que les romans tournent les tûtes : je le crois bien; en montrant sans
" cesse à ceux qui les lisent, les prétendus charmes d'un éiai qui n'est pas le leur, ils les
" séduisent ; ils leur font prendre leur état en dédain, et en faire un échange imaginaire
" contre celui qu'on leur fait aimer. Voulant être ce qu'on n'est pas, on parvient K se
'• croire autre chose que ce qu'on est ; et voilà comme on devient fou ." J. J. Rousteau.
ETHICA. 301
" sans s'exposer à de grands périls. Ainsi, je tiens qu'il
" ne faut point aller au bal, quand on est chrétien ; et je
'* crois que les directeurs feraient leur devoir, s'ils exigeaient
*' de ceux dont ils gouvernent les consciences, qu'ils n'y
" allassent jamais." Lettre à M. de la Roquette ^ Evêque
d'Autun.
144. Abstinendam est 3o. à scenicis ludis (les specta-
cles) ; in his enim libidines excitantur, amor inordinatus,
odium infensum, ambitio inexplebilis, ira implacabilis, vin-
dicta crudelis, aliaque vitia celebrata in theatris. Quis-
quis igitur voluerit pravos voluntatis affectus cohibere, is
magnoperè ludos scenicos efFugere débet. Hâc de re vide
D. Ge'rard, le Comte de Valmonè,tom. 2. pag. 84, 109, &c.
II. De officlis hominis ad ipsius corpus spectantibus,
145. Cùm Deus animam corpori eâ lege conjunxerit, ut
ipsius bono et saluti consuleret, débet homo, quantum ho-
nestè fieri potest, curare ut sua corpori vita, sua integritas, ,
suaque valetudo constet; débet igitur ipsius vires cibo, potu
et somno reficere ; quâ tamen in re, non quid voluptas sug-
gérât, sed quid nécessitas requirat, attendendum est,necaro
concupiscat adversùs spiritum.
146. Hinc lo. plus sequocibis et potibus non est indul-
gendum ; sœpè sa;piùs enira corpus raoliiiis enutritam ad-
versùs spiritum extoUitur, ipsiusque imperium detrectat.
147. Hinc 2o. nec molli cura corpus enervandum est,
nec nimio labore frangendum, sed moderatâ exercitatione
roborandum ; niraia enim segnities est infensissima pestis,
omnium vitiorum parens et origo.
148. Hinc 3o. corporis sensibus ponen^la est custodia ;
qu^e enim per aures et oculos mentem subeunt, Stcpè vivi-
diùs atficiunt, et certissimam libidinum pestem invehunt.
Nunc examinandum est utrùm licita sint suicidium et
singulare ceilâmen quod duellum y ocsctur.
Propositio prima.
149. Illicitum est suicidium.
Prob. lilud enim est illicitum, quod impium erga Deum,
reum erga societatem et crudelem erga seipsum hominem
reddit : atqui suicidium. . . . &c.
I. quidem suicida impius est erga Deum : nara lo. divi-
nae voluntati resistit, quse seipsam insito nobis naturali
302 ETHICA.
mortis horrore interpretatur ; 2o. juraDei sibiarrogat, cùm
Deus sit solus supremus vitse nostrce arbiter, cùmque vi-
tara nobis non dederit Deus nisi tanquàm depositum, quod
ipse solus à nobis répétera potest ; 3o. providentiae consilia
subvertit, quse finem nobis implendum destinavit ; 4o. jus-
titiam Dei provocat,deserto statu militise in quo est colluca-
tus j 5o. deniquè Deo denegat otîicia, metam laborum ab eo
prsescriptam non attingendo. Ergo I. . . . &c.
II. Suicida reus est erga societatem : lo. enim unum ex
ejus membris violenter avellit et abscidit ; 2o. curas sibi
commissas incautè relinquit ; nullus est enim homo qui non
habeat saltem aliqua officia erga alios homines explenda ;
V. g., exemplapietatis, humilitatis, patientics illis prsebendo;
3o, perversum aliis dat exemplum ; si enim propter serum-
nas et tsedium vitae mortem sibi inferre unicuique liceat,
quicunque erit miser et afflictus pœnis suis, voluntariâ
morte tutô sese subtrahere poterit ; ciim autem maxima
pars generis humani ingratis curis vexetur, borrenda volun-
tarise mortis spectacula quotidiè oculis prœberentur ; 4o. si
possit quisque vitam abjicere, ut ab importunis doloribus
seseliberet, cur non poterit pater familias, ut tranquillitati
suae consulat, uxorem et liberos deserere et in solitudinem
recedere ? Ergo II. . . . &c.
III. Erga seipsum est crudelis. Sub fugiendienim mali
prsesentis prsetextu, in apertum summae infelicitatis discri-
men sese conjicit. Prœsentia quidem mala déclinât ; at
certus est, si providentiam agnoscat, injussum se ad supre*
mi judicis tribunal intrudere, ac proindè gravissimis sup-
pliciis afficiendum esse.
Solvnntur objectiones.
Obj. lo. Seipsum occidere fortis est animi ; ergo suici-
dium est licitum.
150. Resp. Neg. ant. Qui enim seipsum occidit, ità se
gerit quia vel taedium vitœ, vel infortunia, morbos, aerum-
nas, egestatem, autaliahujus vitae mala tolerare non potest;
atqui in hâc agendi ratione ignavia est potiùs quàm forti-
tudo ; fortius est enim et difficilius miserrimam libenter du-
cere vitam, quàm illam deserere. " Tu t'ennuies de vivre,
" inquit civis Genevensis, et tu dis, la vie est un mal.
" Tôt ou tard tu seras consolé et tu diras ; la vie est un
ETHICA. 303
" bien. Tu diras plus vrai sans mieux raisonner ; car rien
" n'aura changé que toi. Ciiange donc dès aujourd'hui, et
" puisque c'est dans la mauvaise disposition de ton ame
" qu'est tout le mal, corrige tes affections déréglées, et ne
" brûle pas ta maison pour n'avoir pas la peine de la ranger
" .... Que tes exemples sont mal choisis, et que tu juges
** bassement des Romains^ si tu penses qu'ils se crussent
" en droit de s'ôter la vie aussitôt qu'elle leur était à
" charge ! Regarde les beaux tems de la République, et
" cherche si tu y verras un seul citoyen vertueux se déli-
'* vrer ainsi du poids de ses devoirs, même après les plus
** cruelles infortunes. . . . Par quelle raison tant de géné-
" raux se laissaient-ils volontairement livrer aux ennemis,
**■ eux à qui l'ignominie était si cruelle et à qui il en coû-
" tait si peu de mourir ? C'est qu'ils devaient à la patrie
'* leur sang, leur vie et leur dernier soupir, et que la honte
** ni les revers ne les pouvait détourner de ce devoir sacré."
Nouvelle Héloïse, tom, 1. pag. 572.
Obj. 2o. Vita est beneficium. Ergo eam abjicere licet,
quando molesta est.
151. Resp. Dist. Ant, Vita est beneficium simul et de-
positum ; conc. ant. Est beneficium merè gratuitum ; neg.
ant. Reverà vita est beneficium à Deo concessum ; at non
est merum beneficium, sed merum et reale depositum quod
Deus ipse solus à nobis repetere potest. Illud igitur servare
debemus donec ab eo repetatur.
Obj. 3o, Mors aliquandô unicum superest malis nostris
remedium ; ergo tune ad eam licet confugere ; fas enim est
malis nostris finem iinponere quibuscunque mediis. Ergo
&c.
152. Resp. lo. Neg. ant. Tùm quia in prsesenti vita
nihil est omnino desperatum ; perpetuœ enim sunt in rébus
humanis vicissitudines ; tùm quia altéra est vita, in quâ
sua est virtuti merces, suumque vitio supplicium ; cura
autem graviter peccet qui contra Dei jussum suam statio-
nera deserit, sequitur mortem voluntariam, nedùm sit ma-
lorum finis, initium esse pœnœ longe gravioris in altéra
vitâ subeundse.
Resp. 2o. Neg. consqam. Quamvis enim mors foret
unicum remedium malorurn quse patimur, ad illud tamen
confugere non liceret ; sed expectandum esset donec provi-
304 ETHICA.
videntia, quse hœc mala permittit, aliquod prsesenti nostrse
condition! levamen et solatium, eo quo sibi placuerit gradu,
afferat.
Inst. Membrum amputare licet, ut corporis totius saluti
consulat ur. Ergo multô magis potest aliquis vitam abji-
cere, ut felicitaè in tuto ponatur.
153. Resp. Neg. consqam. et parit. Ideô enim licitum
est membrum graviter vitiatum amputare, quia totum
corpus aliter servari non potest : at nunquàm probabitur
vitam servari non posse absque evidenti felicitatis nostrse
detrimento. Quœcunque enim sit nostra conditio in hâc
mortali vitâ, semper adest felicitatis nostrse obtinendee via,
nempè sincerum erga voluntatem divinam obsequium, quod
sanè récusât, qui voluntariè vitam abjicit.
Obj. 4o. Licet pro patriâ, pro religione vitam aliquandô
aperto discrimina exponere. Ergo. . . . &c.
154. Resp. Neg. consqam. In quibusdam enim circum-
stantiis datur prseceptum legis naturalis et divinœ ut vitam
pro patriâ et religione abjiciamus ; ergo qui tune sic
eraoritur, non ultrô vitam exponit, sed Dei jussui ob-
tempérât.
Propositio secunda»
155. lUiciia sunt singularia certamina seu duella.
Probatur, quia hœc certamina fiunt lo. contra legem
divinam, quœ homicidium prohibet ; 2o. contra volunta-
tem Dei, qui solus vitee hominis ipsiusque membrorum
dominium habet, et ad quem pertinet vindicta : " mihi
** vindicta, ego retribuam, dicit Dominus ;" (Rom. cap.
12. ver. 19.) divina igitur usurpant jura qui privato certa»
mine congrediuntur ; 3o. contra omnem pietatis et religio-
nis sensum ; qui enim ad singulare certamen provocat, aut
provocatus ad ill;xl sese accingit propter inanem quamdam
honoris umbram, is et suam et alterius salutem in apertum
discrimen adducit ; alteruter quippè, et fortassis uterque
supremum judicem injussus aditurus est ; 4o. contra
rectam rationem, quse dictitat non deserendam esse vitam,
nec alteri eripiendam, ne umbratilis offensa remaneat
inulta ; 5o. deniquè contra commune patrie bonum, cui
per hujusraodi certamina rapiuntur fortissimi viri, quorum
operâ et in bello et in pace uteretur. Ergo &c.
ETHICA. 305
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Licet injustum aggressorem occidere in defen-
sionem vitee ; ergo à pari in defensionem famse et honoris.
156. Resp. Neg. consqam. et paritatem. Fieri enim
potest ut vita efficaciter defendi nequeat nisi per injusti
aggressoris occisionem: tune igitur vim vi repellere licitum
est. Contra vero nunqiiàm mors aggressoris necessaria est
ad conservandum honorem ; honor enim prœcipuè consistit
in virtutis exercitatione et in optimâ famâ apud viros
probos ; atqui singularia certamina nunquàm necessaria
sunt ad obtinendam aut conservandam optimam famam
apud viros probos. Preetereà, vita est bonum ordinis
su])erioris honore.
157. "Gardez-vous, inquit civis Genevensis, de con-
fondre le nom sacré de l'honneur avec ce préjugé féroce,
qui met toutes les vertus à la pointe d'une épée^ et n'est
propre qu'à faire de braves scélérats. . . . Vit-on un seul
appel sur la terre, quand elle était couverte de héros ?
Les plus vaillans hommes de l'antiquité songèrent-ils
jamais à venger leurs injures personnelles par des
combats particuliers ? César envoya-t-il un cartel à
Caton, ou Pompée à César, pour tant d'affronts récipro-
ques ?. . . . Rentrez en vous-même, et considérez s'il
vous est permis d'attaquer de propos délibéré la vie d'un
homme et d'exposer la vôtre, pour satisfaire une barbare
et dangereuse fantaisie qui n'a nul fondement raisonna-
ble, et si le triste souvenir du sang versé dans une
pareille occasion, peut cesser de crier vengeance au
fond du cœur de celui qui l'a fait couler. Connaissez-
vous aucun crime égal à l'homicide volontaire? Et si
la base de toutes les vertus est l'humanité, que penserons-
nous de l'homme sanguinaire et dépravé, qui l'ose atta-
quer dans la vie de son semblable ? Souvenez-vous que
le citoyen doit sa vie à sa patrie, et n'a pas le droit d'en
disposer sans le congé des lois ; à plus forte raison
contre sa défense." Nouvelle Heloïse, 1ère, partie,
lettre 57.
Obj. 2o. Nemo tenetur famée jacturam pati ; porro qui
provocatus ad duellura, illud recusaret, juxta hominuni
existimationem, famae jacturam pateretur. Ergo. . . . &c.
U
â06 fîTHICA.
158. Resp. Neg. maj. E duobus eniin malis minimum
eligendum est: atqui longé satius est in opprobrium incur-
rere, et hominibus esse despectui, quàniîamam eâ ratione
defender e, quas à divinis humanisque legibus prohibeatar.
In eo quippè casa standum est huic Scripturœ oraculo :
'* nescitis quia amicitia hujus mundi inimica est Dei ?
'' Quicunque ergo voluerit amicus esse s^eculi hujus,
" inimicus Dei constituitur." Jac. cap. 4. ver. 4.
Obj. 3o. Duellum est actus fortitudinis : ergo licitum est.
159. Resp. Neg. ant. Quis enim unquàm fortitudinem
vocaverit quod recta ratio reprobat ? Quis unquàm herosm
illuni esse dixerit qui, sub injurise sibi illat^e iarv*, propriœ
vel aliénée mortis periculo sese committit, et qui sese suo
vel proximi sanguine contaminare non abhorret ? Duellum
i"-itur non est actus virtutis et fortitudinis, sed scelus
immane, ferox et horrendum. " Tu veux te battre au
" premier sang ! inquit philosophus suprà laudatus ; grand
" Dieu ! et qu'en veux tu faire de ce sang, bête féroce ?
" Le veux-tu boire ?. . . . Le vrai courage a plus de con-
*' stance et moins d'empressememt ; il est toujours ce qu'il
" doit être. L'homme de bien le porte partout avec lui ;
*' au combat contre l'ennemi, dans un cercle en faveur des
*' absens et de la vérité, dans son lit contre les attaques
" de la douleur et de la mort. . . . L'homme de courage
" dédaigne le duel, et l'homme de bien l'abhorre. Je
*' regarde les duels comme le dernier degré de brutahté où
** les hommes puissent parvenir." Ihid.
CAPUT TERTIUM.
DE OFFICIIS HOMINUM ERGA CiETEROS HOMINES.
160. Hominum erga cseteros homines officia alla gene-
rali humanitatis titulo nituntur ; alia vero ad societatem,
sive generatim consideratam, sive domesticam, sive politi-
cam spectant. De his totidem articulis agemus.
I. DE HOMINUM OFFICIIS QU^ NITUNTUR COMMUNI
HUMANITATIS TITULO.
Principium générale.
161. Alios homines quisque sicut seipsum diligere tene-
tur ; omnes enim homines sunt sequales (a) , ciim omnibus
(a) Hic non agitur de aequalitato civili et polittcâ.
ETHICA 307
eadem sit natura, eaedem sint facultates, idem sit creator,
idemque finis.
162. Hinc lo. diligendi sunt inimici, sunt enim ejus-
dem naturee.
Hinc 2o. nulli inferendum est damnum ; alios enim
homines sicut nosmetipsos diligere debemus ; atqui ità se
suaque amat unusquisque, ut sibi damnum afferri nolit :
erga cœteros igitur homines eodem modo comparatus esse
débet.
Hinc So. abstinendum est ab homicidiis, latrociniis,
rapinis, calumniis, contumeliis, &c.
163. Hinc 4o. si plurimi actionis damniferae fuerint
participes, tenetur eorum unusquisque restituere pro ratione
damni quod intulit ; imô totum damnum ab eo resarcien-
dum est, si suam alii partem non restituant.
164. Hinc !')0. proximo indigenti pro suâ unusquis-
que facultate subvenire débet. Subsidia autem proximo
débita alia sunt spiritualia, alia corporea. Spiritualia sunt,
ignorantes erudire, errantes corrigere, dubitanîibus consi-
lium dare, mœstos consolari, Deum pro salute pix)ximi
orare : corporea sunt, esurientes pascere, sitientibus potura
dare, nudos vestire, captivos redimere, peregrinos hospitio
recipere, œgrotos invisere, mortuos sepelire,
165. Si autem cunctis indigentibus subvenire non possi-
mus, quidam instituendus est ordo in beneficiis conferendis ;
10. extraneis anteferendi sunt qui sanguine, amicitiâ,
religione, nobis sunt conjunctiores, et hoc cùm œquaHs est
hinc et indè indigentia : 2o. graviori necessitati priùs
subveniendum est ; in hoc enim est caritas, ut qui priùs
indigent, priùs accipiant.
11. DE OFFICIIS HOMINUM QUiE AD SOCIETATEM GENERATIM
CONSIDERATAM SPECTANT.
166. Societas est plurimorum hominum conjunctio,
propagationis, conservationis et perfectionis causa.
Hobbes fatetur homines ahos ahis indigere, maxime
pueros, senes et aegrotos ; contendit tamen eos à naturâ
suâ ad societatem non esse destinatos, sed essentialiteresse
malos et perpetuam habere voluntatem lœdendi, aliosque vi
aut fraude supplantandi ; ità ut eorum conditio sit status
belli omnium contra omnes.
u2
308 ETHICA.
167. Civis Genevensis (Discours sur V origine et les fon^
démens de Vinégalité parmi les hommes J , libenter agnoscit
statum natura? nunquàm exstitisse, quia homines de facto
semper fuerunt in societate, Deo ità volente et disponente ;
at ex hypothesi quod ille status exstitisset, inquirit quid
tune fuissent homines et undè conditionum inœqualitas
oriri potuisset ; deindè hypothesis suée oblitus, eodem modo
ratiocinatur ac si status naturœ purse reverà olim exstitis-
set, et asserit hominem naturâ sua esse raitem, ?iraplicem,
benignum, omniumque virtutum seminibus donatum ;
ipsum autem à societate depravari et in vitia pronum fieri
contendit. Undè concludit hominem, nedùm ad societa-
tem, quâ corrumpitur, à naturâ constitutus fuerit, è contra
destinatum esse ut, belluarum instar, in sylvis, in agris et
in cavernis vitam agat segregem, si ab omni criminum labe
sese purum servare velit. Talis est, juxta hune philoso-
phum, status purce naturœ. Contra hoc utrumque systema sit
Propositio.
168. Homo natus est ad societatem cum aliis hominibus
ineundam.
Prob. lo. Ex hominis conditione. Varias enim hominis
a?tates perlustranti patet eum nunquàm sibi sufficere, sed
aliorum ope semper indigere. lo. In pueritiâ. Quâ enim
ratione tenellus infans vitam servare posset, nisi sedulâ
parentum cura foveretur, tegeretur, aleretur ? Nudus
enim, inermis, humi jacens, aëris inclementiee expositus,
vel inediâ consumeretur, vel belluarum precda factus, vix
in lucem editus miserabiliter periret. 2o. Adolescentiam
assecutus, nisi parentum aliorumve hominum consiliis
eruditus et auxiliis adjutus esset, quid aliud erit quàm
animal quoddam indomitum et ferox, diversas corporis et
omnes mentis facultates ignorans ? 3o. Virilem attingenti
œtatem occurrunt prolis suae educatio et liberorum cura,
quee patrem inter et matrem vitee consortium ac proindè
societatem exigunt. 4o. Demùm senescenti eadem occurrit
corporis imbecellitas qu?e in infantiâ et eadem infirmitas.
Tune igitur, subiatâ societate, humi procumbens, raorbis et
miseriis confectus, nullis sublevatus remediis, nullo cibo
recreatus durissimâ famé exstingueretur. Ergo. . . . &c.
" L'homme n'est pas fait pour vivre seul, inquit D. Virey ;
«« c'est un animal social par sa nature. La multiplicité
ETMICA. 309
^' de ses besoins naturels, puisqu'il nait le plus impuissant
" et le plus misérable des animaux, la sensibilité de ses
" organes, l'étendue de ses désirs, la longue faiblesse de
•* son enfance, son genre de vie essentiellement omnivore,
** et sa nudité, nécessitent un état de société pour le
*' maintien de son espèce." Nouveau dictionnaire dliis-
toire naturelle, art. homme.
Prob. 2o. Ex hominis facultatibus. Inest homini
facultas varios animi motus voce, vultu, gestibus, aliisque
signis externis exprimendi, documenta, quibus perficiatur,
recipiendi ; inest ingenium artium et scientiarum capax ;
inest omnium facultatum perfectibilitas quas nullatenùs
existit in belluis ; quibus omnibus nibil inutilius excogitari
potest, si homo ad societatera non destinetur. Imô heec
omnia homini sunt nociva, eumque belluis inferiorem
reddunt, si tollatur societas ; bellua enim, cujuscunque
generis sit, omnia naturaliter et instinctive (instinctive-
ment, par instinct) novit et agit quœ sunt necessaria ad'
suam conservationem et defensionem ; dùm è contra homô
hsec omnia ediscere tenetur, quia intelligentiû propriè dicta
seu facultate ideandi donatur. Ergo. . . . &c. " L'homm.e,
" intelligence servie par des organes, inquit D. de Bonaîd,
" entre en société ou en communication avec ses sembla-
*' blés, avec son intelligence et ses organes; par consé-
" quent avec l'expression organique de son intelligence,
*' je veux dire la parole, premier moyen de toute conser-
*' vation, de toute perfection, de toute sociabilité ; parole
*' qu'il transmet à son enfant, comme il l'a lui-même reçue
*' de ses parens, et ceux-ci, en remontant de génération en
'* génération, de la première famille, qui n'a pu elle-même
*' la recevoir que d'un être hors de l'homme et supérieur à
" l'homme {Vide Log. 17, &c. Metaph 20, &c.).
" L'enfant reçoit donc de ses parens l'instruction de la
" parole, et avec la parole là connaissance de tout ce
" qu'il lui est nécessaire de savoir ou la iaculté d'acquéiir
" cette connaissance ; car, si on ne lui parlait pas, il ne
'' parlerait pas lui-même, et les sourds-muets ne sont
" muets que parce qu'ils sont sourds, et n'ont pas entendu
" la parole.
" L'homme ne naît pas, comme la brute, vêtu et armé;
" il n'a pas reçu de la nature cet instinct de conservatija
310 ETHICA.
" personnelle, qui, sans éducation de leçon, ni même
'' d'exemple, fait discerner à l'animal ce qui lui est utile ou
" ce qui lui est nuisible, et lui fait chercher sa proie ou
•' éviter son ennemi ; l'animal, je le répète, naît parfait,
" et ce que nous lui apprenons est pour nos besoins ou
" nos plaisirs, et non pour les siens : l'homme naît perfec-
*' tible ; il faut qu'il apprenne à vivre, qu'il juge par son
" intelligence tout ce qui est nécessaire à sa conservation,
" qu'il combatte par l'action de ses organes tout ce qui
" s'oppose à l'accomplissement de ses besoins ou au déve-
" loppement de ses facultés. Il faut donc qu'il apprenne
" tout de ceux qui l'ont précédé dans la carrière de la vie,
'* qu'il apprenne à parler pour apprendre à exprimer ses
" pensées, et pour les autres et pour lui-même." Démons-
tration philosophique du principe constitutif de la société, pag.
96. Hâc de re vide D. Cousin-Despréaux, Leçons de la
nature, considération 188.
Prob. 3o. Ex hominis propensionibus ingenitis. Nemo
est enim, communiter loquendo, qui consortium cum aliis
hominibus non amet ; nemo qui dolores suos et gaudia aliis
narrare non cupiat, qui amicitiae dulcedinibus non recrée-
tur ; nemo ferè qui in solitudine vitam agere velit prorsiis
segregem. Omnibus inest famae, laudis et glorise cupiditas ;
adsunt in omnibus benevolentise, misericordise et commi-
serationis sensus : atqui omnes istœ propensiones testan-
tur hominem à naturâ destinatum esse ad societatem cum
aliis ineundam. Ergo. . . . &c. " L'état de la société, in-
" quit D. Virey, est si naturel à l'homme, qu'il y est par
" toute la terre, quoiqu'en divers degrés de civilisation.
" Il ne faut pas croire que les Sauvages soient dans un pur
** état d'isolement ; ils forment des familles et de petites
" nations, dont les divers particuliers gardent entre eux la
" plus étroite union. La plupart émanent originaiiement
" d'une seule famille, ce qui les rend tous alliés, parcns et
" frères entre eux. C'est ainsi que les douze tribus Israé-
" lites sortaient des douze fils de Jacob, comme toutes les
" branches d'un arbre sortent primitivement d'un seul
" tronc." Ibid.
Solvuntur objectiones.
Obj. lo. Societas juri naturali adversatur. Ergo homo
non est destinatus ad societatem.
BTHICA. 311
169. Resp. Neg. ant. Ad euin quippè finem instituta est
societas ut faiiliùs et tutiùs observetur jus naturale, scilicet,
ut cupiditates lioininura certis legibus quodamque veluti
l'reno coerceantur. Ergo. . . . &c.
Inst. lo. E societate nascitur conditionum inœqualitas ;
atqui conditionum inœqualitas opponitur juri naturali. Ergo
societas juri naturali adversatur.
170. Resp. lo. Neg. maj. Societas enim, ut omnes con-
fitentur, orta est ex insequalitate conditionum naturali ; so-
cietas igitur non prsecessit inaequalitatem hominum, sed
ipsa hominum insequalitas societatem prsecessit.
Resp. 2o. Neg. min. Quod enim ab ipsâ naturâ oritur,
juri naturali non adversatur ; atqui conditionum inaequali-
tas ab ipsâ naturâ oritur : nam alii naturâ ipsâ sunt junio-
res et alii setate provectiores, alii fortes et alii débiles, alii
sani et alii infirmi, alii ingenio conspicui et alii hebetes,
alii parentes et alii filii, &c. Ergo conditionum insequalitas
juri naturali non adversatur.
Inst. 2o. Homines jure naturali sunt œquales. Ergo so-
cietas juri naturali adversatur.
171. Uesp. Dist. Ant. Eo sensu quôd habeant eamdem
naturam, eamdem originem et eamdem destinationem ;
conc. ant. Eosensu quôd sit contra hominum naturam ut
alter ab altero pendeat ; neg. ant. et consqam. Nam lo.
ipsa nascendi conditio parentibus liberos subjicit, idque
omni tempore omnes docuit naturâ : 2o. jurium suorum
exercitium debitum servare nequeunt homines, quin cédant
partem suai libertatis et quin aliquara admittant regiminis
îbrmam ; secijs, nullo freno coerceri possent efïrenatse cu-
piditates et libidines : atqui nulla potest esse regiminis for-
ma sine magistratibus, quibus alii obedire teneantur. Ergo,
ipsâ docente naturâ, homines non sunt œquales eo sensu
quôd nullus ab alio pendere possit.
Inst. 3o. In societate alii sunt tyranni et alii servi, alii
sunt valdè divites et alii omnium egeni : ergo injusta est
societas, ac proindè juri naturali adversatur.
172. Resp. Dist. Ant. Sed illud contingit ex ipso socie-
tatis abusu ; conc. ant. Ex ipsâ societatis naturâ; neg. ant.
et consqam. Itaque eequum non est in aliquam institutio-
nem ea incommoda refundcre quae ex solâ hominum pravi-
tate contingunt. Si enim valeret hujusmodi criminatio,
312 ETHICA.
optimum quodque culpandum esset. NuUum quippè est bo-
num quod homines vel in suam, vel in aliorum perniciem
vertere non valeant.
Fateor equidem aliquoties contingere in societate ut qui-
dam, suâ abutentes auctoritate, alios servitutis jugo subji-
ciant ; sed injusta haec consectaria ab ipsâ societatis natu-
râ nonoriuntur: suprema enim potestas,quaecunquesit, re-
gibus et principibus eâ solùm conditione concessa fuit ut
populos, non suo nutu et arbitrio, sed œquis legibus guber-
narent, ut evidens est.
Pariter, si aliquoties contingit ut quidam divitiis affluant,
diim alii dura paupertate premuntur, abusus est qui socie-
tatem déformât, non autem vitium ipsius naturae illigatum.
PrcEtereà, ciim plurimi suâ culpà, nempè inertiâ, segnitie
aut incuriâ, ad inopiam redigantur, injustum prorsùs esset
illud incommodum societati imputare. Ergo si qui abusus
in societatem irrepserint, non ipsa accusanda est, sed cul-
pandi sunt homines, qui rébus optimis abutuntur.
Obj. 2o. Societas felicitati adversatur. Ergo. .. . &c.
173. Resp. Neg. ant. In societate enim rectè ordinatâ
omnes legibus sapienter institutis ad bonum commune diri-
guntur, omnesque impelluntur ad implenda sua in Deum,
in proximum et in seipsum officia ; in statu vero purse na-
turae, si existere posset, quisque, non commune bonum, sed
proprium suum commodum quœreret et etiam gravissimo
aliorum detrimento. Ergo societas, nedùm felicitati adver-
setur, è contra tota est ut omnes ad felicitatem perveniant ;
quod adeô verum est, ut quemadmodùm nuUum hominem
reperias qui felicitatem non appetat, ità nullum invenies
populum qui aliquam non habeat regiminis forraam.
Inst. Societas cupiditatibus originem prsebet : ergo feli-
citati adversatur.
174. Resp. Neg. ant. Nam cupiditates suam in ipsis
hominum pectoribus sedem habent et originem, nobiscum
nascuntur et adolescunt ; sunt enim sequela libertatis à
Deo hominibus concessœ. Ergo iste status homini naturalis
est, non in quo nullse sunt cupiditates, sed in quo poten-
tiori freno reprimuntur : atqui in societate cupiditates po-
tentiori freno reprimuntur quàm in statu purse naturae, ut
evidens est. Ergo. . . . &c.
ETHICA. 313
Corollaria.
175. Ergo lo. civis quisque patrise legibus obtemperare
débet ; sunt enim vinculum societatis cujus auctor est Deus
qui nos ad eam destinavit. Graviter igitur peccat qui bas
leges infringit.
176. Ergo 2o. vitam pro patriâ, si opus est, exponere
debemus. Quisque enisTi est societatis membrum ; ergo
vita cujusque civis est patriœ bonum : atqui patria bonum
suum, qaando opus est, repetere potest ; alioquin sub-
sistere non posset. Hinc adagium : salus populi suprema
lex esto.
177. Ergo 3o. quisque bonis suis patriam adjuvare dé-
bet ; lege enim jus habent privati ut suas fortunas et vitam
defendat patria ; atqui istud efficere non potest patria nisi a
civibus adjuvetur. Ergo. . . . &c.
178. Ergo 4o. suas animi et corporis dotes in patriœ
utilitatem impendere debent privati : ad hoc enim à Deo
concessee fuerunt. Graviter igitur peccat, qui, neglectis-
animi dotibus, in turpi otio vitam agit.
III. DE HOMINUM OFFICIIS QU.E PERTINENT AD SOCIETA-
TEM DOMESTICAM.
Triplex est potissimùm societas domestica, conjugaîis,
paterna et herilis.
1. De sociefate conjugali.
179. Societas conjugaîis est intima viri et mulieris
conjunctio inita ad prolem suscipiendam, nutriendam
et educandam, et ad mutua auxilia sibi invicem prœs-
tanda. Hune prœcipuè in susceptione liberorum sibi
tineni proponere debent conjugeSj ut verœ fidei et religio-
nis cultores educent, tidelesque patrise cives efforment.
ISO. Debent conjuges mutuam sibi opéra prœst^re, ut
faciliùs matrimonii onera sustineant. Ad hrec assequenda,
sese invicem diligere, mutuoque honore concordiam colère
tenentur ; sic tamen ut mulieres subditœ sint viris suis, vi-
rique uxores habeant tanquàm socias et non veluti famulas.
Mutuus autem inter conjuges amor fovebitur, si vir ut dé-
bet, uxori, quantiim religio et ratio sinunt, sese praestet
benignum et obsequiosum, siejus inlirmitates patienter sus-
tineat, eamque, quantum prudentia suggesserit, rerum do-
mesticarum participem rcddat^ itù ut tamen scrnper in l'ami-
314 ETHICA.
liam retineat potiorem auctoritatem ; ipsius est enim fami-
lias prseesse.
2. De societate paternâ.
Societas paterna ea est quae parentes et filios respicit.
Parentum igitur et filiorum consideranda sunt officia.
De officiis parentum erga filios.
181. lo. Parentes filios sicut semetipsos diligere, et
eos summâ cura enutrire, induere, dirigere et sub omni
respectUj juxta conditionem suara, informare tenentur.
182. 2o. Summoperè curare debent ut liberi vera
religionis ac morum principia, etiam in teneris annis,
edoceantur, et ab omni contagio vitiorum sedulô reraovean-
tur, in hoc Tobiam imitantes, qui filium ab infantid timere
Deum docuit, et abstinere ah omni peccato. {Tob. cap. 1.
ver. 10). Ad Dei igitur cognitionem, cultum et amorem
verbo et exemplo informandi sunt liberi, ipsisque pietatis
et aliarum virtutum suppeditanda suntexempîa.
3o. Cavendumest ne l'acta dictis dissentiant, parentesque
pravis moribus liberos in vitia pertrahant. Curandum est
igitur ut nihil nisi rectum^ bonum et sanctum audiant, vide-
ant aut legant.
4o. Si qusedam in liberis suis vitia detexerint, statim
omni conamine extirpare nitantur.
5o. Cùm adultam eetatem assecuti fuerint liberi, ipsis
proponatur vitse institutum, non quod caro et sanguis, sed
quod Dei voluntas œternaque liberorum félicitas suadere
videantur.
De officiis liberorum erga parentes.
183. Ad quatuor revocari possunt hsec officia, nempè
ad honorem et reverentiam, ad amorem, obedientiara et
auxiiium.
lo. Quidem honorem et reverentiam parentibus deberi
ità docet natura, ut in eâ re consentiant omnes omninô po-
puli. Honor vero ille et reverentia postulant lo. ut eos li-
beri consulant in rébus alicujus momenti, in quibus ab
eorum auctoritate pendent, et ipsorum consiliis acqui-
esçant, nisi lex divina obstiterit. 2o. Ut parentum
infirmitates patienter sustineant ; œquum est enim ut,
quijuvenilem imbecillitatem nostram sustinuerint, eorum
senilem infirmitatem toleremus. Fili, inquit Ecclesias-
ETHICA. 315
ticus, suscîpc senectam pairis tiii, et non contristes eum in
vitd illius ; et si defecerit sensu, veniam da, et ne spernas eum
in virtute tua. (cap. 3. ver. 14, 15.)
2o. Parentes suos amore tenerrimo complecti debent li-
beri ; eorum eniiii ministerio vitam et innumera bénéficia
à Deo acceperunt. Hinc graviter peccant lo. qui parentes
oderunt, qui de eorum adversitate gaudent vel de prosperi-
tate dolent, qui illis mala exoptant, v. g., mortem, ut citiùs
hsereditate tVuantur. 2o. qui, etsi forte diligant interiùs
parentes, eis signa odii demonstrant ; qui, v. g., eos sine
causa contristant, vel verbis asperis alloquuntur, &c.
184 3o. Parentib'js obedire tenentur liberi ; cujus obse-
quii illustre exemplum preebuil Christus Dominus, de quo
sic narrât S. Lucas, cap. 2. ver. 51., et erat suhditus illis
(parentibus). Haec autem parentibus obtemperandi lex,
non tantùm quandiii vivant, sed etiam post ipsorum mor-
tem obligat ; tune enim eorum ultimas voluntates exequi
tenentur liberi.
185. 4o. Liberi parentibus subministrare tenentur quid-
quid ad eorum vitam sustentandam necessarium est, habita
ratione status et conditionis. Pariter eorum spiritualibus
necessitatibus subvenire debent.
3. De societate herili.
Societas herilis, qualis in hâc regione existit, ea est quae
héros, seu dominos, et famulos respicit. Dominorum
igitur et famulorum consideranda sunt officia.
De officiis dominorum erga famulos.
186. lo. Domini erga famulos duriiis agere non debent ;
famuli enim ejusdera sunt naturae, eumdem habent Deum
patrem, eamdemque destinationem. Insuper, ciim jàm per
se laboriosa sit et humilis eorum conditio, postulant caritas,
pielas, et humanitas ut hujus ministerii difficultates et objec-
tionem, quantum in nobis est, temperemus. Molliùs tamen
erga eos agendum non est ; nimiâ enim bonitate sœpiùs
abuterentur : omnia igitur ità sunt moderanda, ut dominos
ament et revereantur, simulque officiis suis fideliter fun-
gantur.
2o. Tenentur domini pactam eum famulis mercedem
tempore statuto persolvere, juxta hoc Tobise monitum :
" quicunque tibi aliquid operatus fuerit, statim ei merce-
316 ETHICA.
•• dem restitue; et merces mercenaiii tui apud te omnino
*' non remaneat." Tob. cap. 4. ver. 15.
3o. Si quem in morbum, ex nostro servitio, inciderint
famuli, diligentem eorum curam gerere debemus ; hoc non
solùm humanitatis est et caritatis, sed quasi justitise.
4o. Tenentur domini faraulorum saluti invigilare, eos à
vitiis et libidinibus arcere, et ad bonum, quantum in eis est,
incitare. Pariter curare debent, ut famuli omnibus religio-
nis christianse mysteriis erudiantur.
De officiis famulorum erga dominos,
187. Famuli dominis suis praestare debent honorem,
reverentiam, obedientiam, et justitiam : eorum bon a sicut
propria augere, servare, gerere, aut curare tenentur, et re-
sarcire quidquid culpâ sua deperierit vel furto ablatum fuerit :
item si otiantes tempus inutiliter terant, aut convenienti
modo labori non incumbant, &c.
Idem dicendum est, servatâ proportione, de operariis ad
brève tempus, v. g., ad mensem, hebdomadam, vel diem con-
ductis : item de iis qui opéra sua locant usque ad mortem.
IV. DE SOCIETATE POLITICA SEU CIVILI.
188. Societas politica seu civilis definiri potest, '' homi-
•' num multitudo qui sub eodem regimine publico consoci-
" antur, securitatis et felicitatis comparandae causa."
Hinc in omni societate politica unus vel plures supremam
auctoritatem habent ; cseteri verô nullam, vocanturque sub-
diti seu cives pro diversâ regiminis forma. " Une simple
aggrégation d'hommes, inquit D. de la Mennais, devient
une société en se constituant, c'est-à-dire, par l'établisse-
ment du pouvoir, fondement nécessaire de tout ordre; et,
dans l'univers physique même, il n'y a d'ordre que parce
qu'il est gouverné par un pouvoir intelligent." Essai
sur Vindifférence en matière de religion, tom. 1, pag. 333.
1. De prœcipuis regiminis politiciformis.
Variae sunt politici regiminis formœ, quae tamen ad très
generaiiter revocari possunt : undè triplex potissimùm di-
stinguitur politica societas, nempè monarchica, aristocratica
et democratica (a).
(a) " Toutes les formes de gouvernement, inquit D. Duvoisin, (Z>çpHse f^e Toj-t^re io-
" «a/, piig. 17), j'entends les formes simples, du mélange desquelles se composent les
" formes mixtes, se réduisent donc h hx Démocratie, ou l'empire du peuple; a. V Aristocratie,
" ou l'empire des \mi,\cs { oplimal.s ) ; \i\a. Monarchie, ou l'empire d'un seul. Cunclas
" naiioncs et H/ici,, dit Tacite, populus, aut primores, aut singuli regunt."
ETHICA. 317
189. Monarchia est societas in quâ unus totam habet
auctoritatem, et vocatur rex, imperator, princeps, dux,
cornes, è^c.
Duplex est monarchia, videlicet, absoluta et temperata.
Absoluta ea est in quâ monarcha plenam possidet auctorita-
tem per seipsum leges condendi, tributa exigendi, justitiam
administrandi, &c., juxta civiles fundamentalesque regni
vel imperii leges, ut olim in Galliâ, in Hispaniâ, &c. " De
" ce que les sujets n'ont aucune action contre le souverain,
" inquit D. Duvoisin, s'ensuit-il que le souverain affranchi
" de toute loi, puisse gouverner selon son caprice, et que
" les sujets doivent une obéissance aveugle à toutes ses
*• volontés ?"
'' Dans un état constitué, le souverain n'est pas un
" despote, les sujets ne sont pas des esclaves. La puis-
*' sance souveraine, toujours et nécessairement absolue,
" trouve des bornes dans les loix de la nature et de la
" religion, dans les lois civiles et dans les lois fondamen-
** taies de l'état, dans son propre intérêt, qu'elle ne peut
" séparer de l'intérêt des peuples, sans courir à sa perte."
Défense de V ordre social, pag. 186.
190. Monarchia temperata ea est cujus monarchce aucto-
ritas intra quosdam limites déterminâtes coercetur, ut in
Angliâ, et nunc in Galliâ, &c. In hujusmodi monarchiis,
rex plenam non possidet auctoritatem condendi leges, tri-
buta exigendi, &c.; sed insuper requiritur consensus, per
majoritatem sufFragiorum expressus, utriusque conventûs,
scilicet, conventûs Parium et conventûs Delegatorum
populi, vulgô, de la Chambre des Pairs, et de la Chambre
des Députes, en France ; de la Chambre Haute ou des Lords,
et de la Chambre Basse ou des Communes, en Angleterre.
Hsec gubernia gallicè voçantur, gouvernemens représentatifs,
royautés constitutionelles , -Szc.
191. Monarchia absoluta, quando nulles sunt leges fun-
damentales, et prœsertim quando sola principis voluntas
vim legis habet, vocatur despotisme : dicitur verô tyrannis
(tyrannie) quando princeps, sive legitimus, sive illegitimus,
subditos injuste opprimit.
192. Monarchia est electivavel successiva seu hœreditaria.
Est electiva quando princeps à populo vel à magnatibus
regni eligitur, ut olim in Germaniâ et in Poloniâ. Est
318 ETHICA.
autem successiva seu hœreditaria, cùm principis descenden-
tes natu majores ei succedunt. Aliquando filii et fiiiae
indiscriminatim auctoritatem vi successionis obtinent, ut
in Angliâ ; aliquando veio soli niasculi ad eam possiden-
dara idonei sunt, ut olirn in Galliâ, vi legis antiquissirnae
quœ dicitur salica.
Qui supremam auctoritatem sine ïegitimo titulo obtinet
vel arripit, summœ injustitiee reus est, et appellatur
iisurpator,
193. Aristocratîa est societas in quû primates supremam
auctoritatem habent, sive nobilitate, sïve opibus, sive
capacitate ceeteris praecellant ; taie fuit olim gubernium
Venetiarum. Si in hoc regimine quidam irrepant abusus,
V. g., si primates populum opprimant, si digniores à
consilio avertant, ut indignos vel incapaces admittant, tune
gubernium istud vocatur oUgarchia (oligarchie), gouverne-
ment où V autorité est entre les mains d'un petit nombre.
194. Democratia, quee etiam vulgo appellatur respublica,
ea est societas in quâ supreraa auctoritas pênes generalia
populi comitia residet. Hâc gubernii forma usi suntLace-
daemonii, Carthaginienses, Romani, &c. Hoc gubernium,
si infima plebs auctoritate praevaleat, vocatur Ochlocratia
(ochlocratie), gouvernement du bas peuple fa).
195. Alia sunt gubernia quœ coalescunt ex pluribas
à se divisis, aliquo tamen vinculo unitatis inter se conjunc-
tis, et sub hoc respecta unicam societaîem politicam con-
stituentibus ; heec gubernia vocantur fœderata ; talia sunt
fœdera inter respublicas Helvetiorum (les Cantons Suisses),
inter principes Germaniee (la Confédération germanique),
inter provincias unitas Americae septentrionalis (les Etats-
Unis), &c.
2. Quodnam triplici ex illo regimine sit anteponendum?
196. Resp. lo. Suaunicuique regiminis formée sunt com-
moda, suaque, propter hominum cupiditates, sunt incom-
moda : sic, v. g., respublicBe Grœcorum, Carthaginiensium,
Romanorum, non œqualiter floruerunt ; sic perdiù celebris
fuit respublica Venetiarum (de Venise), dùm monarchia
electiva Poloniae paucaintra saecula cum ipsâ gente corruit.
(a) " L'ochlocrntie ou l'anarchie populaire, dit Mr. Malle-Brun, existe lorsqu'une mul-
" lituile, une tourbe quelconque s'empare d'un pouvoir suprême illégitime." Traili élé-
mtntairi dt géographit, tom. 1. pag. 417.
ETIUCA. 319
Attamen dici potest regimen aibitrarium quod despotique
vocatur, et regimen raeiè democraticum es&e omnium im-
perlectiora : " Dans les institutions humaines, inquit D.
Duvoisin, la perfection absolue est une chimère. Les
gouvernemens ne sont susceptibles que d'une perfection
relative. Il ne faut pas demander quel est le gouverne-
ment le plus parfait, mais quel est celui qui convient le
mieux au climat, au caractère, aux mœurs, aux habi-
tudes, aux préjugés d'une nation. J'ai donné aux Athé-
niens, disait Solon, non les meilleures lois possibles, mais
les meilleures qu'ils pussent recevoir. . . .
" Cependant il faut convenir que les gouvernemens
extrêmes, le despotisme et la démocratie pure, sans mé-
lange d'aristocratie, sont essentiellement vicieux. Le
despotisme, parce qu'il opprime et anéantit toute liberté ;
la démocratie pure, parce qu'elle mène infailliblement à
l'anarchie, et détruit la liberté par l'excès de la liberté.
Dans l'un, c'est la tyrannie d'un seul ; dans l'autre,
c'est la tyrannie de la multitude, mille fois plus cruelle
que celle d'un despote.
" Le despotisme est une monarchie sans lois, où les su-
jets n'ont point de droits à l'égard du souverain, où la
volonté du maître est le seul titre de propriété. La dé-
mocratie pure ne diffère presque pas de l'état de nature,
l'une et l'autre ayant pour principes la liberté et l'éga-
lité : elle annonce l'enfance ou la dissolution de la
société. . . .
" La sûreté personnelle, la liberté, le droit de propriété
n'existent, et ne peuvent se maintenir que sous les gou-
vernemens modérés. Mais que faut-il entendre par un
gouvernement modéré ?
" Les gouvernemens modérés, quelleque soit leur forme
et leur dénomination, sont ceux où les sujets n'ont à souf-
frir ni des excès d'une entière liberté, ni de la gêne d'une
entière servitude ; nec totam servitutem, nec totam liberta-
tem, dit Tacite. Ce sont les gouvernemens où l'on re-
connaît une constitution, c'est-à-dire, des lois fondamen-
tales qui fixent, restreignent et dirigent l'exercice du pou-
voir souverain. Dans tout gouvernement, où nul citoyen
ne peut être privé de ses biens, de sa liberté, de sa vie,
que par un jugement public rendu conformément à des
320 ETHICA.
** lois, et selon des formes reçues ; dans tout gouverne-
" ment, où il esr permis d'appeler de la volonté arbitraire
" du souverain à sa volonté légale, il existe une constitu-
" tion plus ou moins parfaite, selon que la propriété, la
*' liberté, la sûreté des citoj^ens, et la tranquillité publique
" sont plus ou moins assurées.
** Il n'en existe point dans le despotisme et la démocra-
" tie pure, parce que le despote et le peuple ne voient rien
" au-dessus d'euXj et ne peuvent se croire liés aujourd'hui
" par la volonté qu'ils ont eue hier. . . . Comment le despote
" et le peuple souverain seraient-ils soumis à une constitua
" tion qui est leur ouvrage, et qu'ils sont en droit de chan-
" ger toutes les fois qu'il leur en prend envie ?" Défense
de V ordre social, pag. 19, &c.
" A prendre le terme dans la rigueur de l'acception, in-
" quit civis Genevensis, il n'a jamais existé de véritable
" démocratie, et il n'en existera jamais. Il est contre l'or-
" dre naturel que le grand nombre gouverne et que le
" petit soit gouverné." Contrat social, liv. 3. cap. 4.
197. Resp. 2o. Juxta plurimos in rébus politicis versa-
tissimos, monarchia mixta seu temperata, et lisereditaria,
qualis nunc vigeret in Angliâ, si quidam reformarentur
abusuSj perfectior est regiminum forma ; in hoc enim gu-
bernio, et populus per suos delegatos, et optimates seu no-
biles, id est, magna corpora politica (les deux Chambres)
omni conamine nascentes aut exortos abusus praefocant aut
comprimunt ; jura tùm régis, tiim subditorum tuentur et
défendant ; institutionibus publicis, legum observationi, to-
tius societatis felicitati perpétué invigilant ; &c. (a).
Obj. In hâc regiminis forma contingere potest ut prin^-
ceps infans aut infirmus, stupidus aut furibundus ad fasti-
gium supremse auctoritatis perveniat. Ergo hcec regiminis
forma valdè vitiosa est.
Resp. Neg. consqam. In hujusmodi enim guberniis,
omnes isti casus chartâ constitutive praevidentur {so7it pré-
vus imr la charte constitutionnelle) , quandôque incidunt,
(a) Outre cette monarchie, que les pubTicisies appellent arislo- démocratique, il y a en-
core la monarcliie arislocratique et la moiiarcliie démocratique. Il est aisé de voir que ces
différentes formes de gouvernemens peuvent varier pour ainsi dire îi riiifini, et qu'elles doi-
vent offrir (le grands avantages ou de graves inconvûiiiens, selon que le pouvoir suprême
est partagé entre le monarque et le corps aristocratique ou le corps démocratique, d'une ma-
nit;re plus ou moins conforme au génie, au caractère, aux mœurs, aux habitudes, aux pré-
jugés, &.C., des peuples.
ETHICA. 321
instituitur temporaria administratio (régence), ut non semel
evenit in Angliâ, régnante Georgio tertio.
3. Undènam oriatur suprema civilîs regiminis potestas ?
198. Hccc qurestio gravissimi est mo.aienti, et nemo
nesclt quot et quantos pullulaverint calamitates ex erroneo
sensa quo fuit inîeliecta hodiernis hisce temporibus.
Civis Genevensis supponens homines naturâ sua esse
omnino libères et prorsùs independentes, contendit eos,
solû spe utiiitatis semper ductos, societatem civilem eâ solâ
mente iniisse ut sese defenderent, et mutua auxilia et
coîiimoda sibi invicem prœstarent. Undè concludit eos
per unanimitatem suffragiorum fundamentali pacte conve-
Disse id ab omnibus jugiter habitum iri ut sancitura,
quod majori numéro sufïragantium statueretur. Hinc,
juxta eum, suprema civilis potestas necessariô residet in
populo, qui eam ad nutum suum delegare, nunquàm verd
alienare potest : principes igitur nullam propriè loquendo
habent anctoritatem ; sunt tantùm delegati et ministri
populi, ad cujas beneplacitum corrigi et etiam deponi
possunt. Sic ipse loquitur, Contrat social, liv. 3. ch. 18.
** De ces éclaircissemens il résulte que les dépositaires de
" la puissance executive ne sont point les maîtres du
" peuple, mais ses officiers ; qu'il peut les établir et les
" destituer quand il lui plaît ; qu'il n'est point question
** pour eux de contracter, mais d'obéir, et qu'en se char-
" géant des fonctions que l'état leur impose, il ne font que
" remplir leur devoir de citoyens, sans avoir en aucune
*• sorte le droit de disputer sur les conditions,
" Quand donc il arrive que le peuple institue un gou-
" vernement héréditaire, soit monarchique dans une famille,
" soit aristocratique dans un ordre de citoyens, ce n'est
** point un engagement q\i'il prend ; c'est une forme pro-
'* visionnelle qu'il donne à l'administration jusqu'à ce qu'il
*' lui plaise d'en ordonner autrement." His observatis, ut
solvatur prsesens qusestio, sit
Propositio.
199. Suprema civilis potestas non à populo, sed à solo
Deo tanquàm à primario fonte repetenda est (^aj.
(a)"La force fnibliqur.dit M. Diivoisin, réside toute entière dans le souverain. .On voit asse:^
"ce quej'entendâ par \& sonveraÎTi. Dans les monarchies absolues, c'est le monarque gou-
" Tcrnant selon les formes et les luis fondamentales. Uqiis les raonarcliies limitôes, c'est le mo-
322 ETHICA.
Prob. lo. Ex omnium consensu suprema civilis potestas
leges condere potest sub pœnâ mortis contra earum infrac-
tores ; atqui hsec suprema potestas à solo Deo, qui solus
supremus est vitae et necis arbiter, confertur, non autem à
singulis subditis. Cum enim singuli nec in suam, nec in
aliorum vitam jus habeant, illud alteri dare nequeunt.
Ergo. . . . &c. " Une maxime dictée par la saine raison et
** consacrée par la religion, inquit D. Frayssinous, c'est
*' que Dieu est l'auteur du monde moral comme du monde
" matériel, qu'il a donné des loix à la nature intelligente
*' comme à la nature corporelle, qu'il préside aux destinées
** des peuples comme aux mouvemens des astres ; il n'est
" qu'un seul créateur, qu'un seul législateur, qu'un seul
" souverain de l'univers, source unique de la vie, intelli-
*' gence incréée, puissance sans bornes. C'est de lui
** qu'émane toute vie, toute intelligence, toute puissance
" dans les créatures; c'est lui qui communique l'autorité aux
" pères sur leurs familles, aux maîtres sur leurs serviteurs,
*' aux magistrats sur la cité, aux gouvernemens sur le
" peuple confié à leurs soins. En destinant l'homme à la
** société, il l'a fait naître avec des facultés, des besoins et
'* des penchans qui se rapportent à la vie sociale. Non,
** la Providence n'a pas abandonné aux recherches, à
** l'invention des hommes, les premiers liens de la sociabi-
" lité ; elle les a fait dériver de la nature même des choses
" qu'elle a établies ; l'ordre seul dans lequel elle veut que
*' l'espèce humaine se perpétue, se développe, se perfec-
*' tionne, s'instruise, a mis les uns dans un état de supé-
'* riorité et les autres dans un état de dépendance inévita-
** ble. Les rapports mutuels des pères et des cnfans ne
^' sont point arbitraires : si le père a des devoirs à remplir,
" il a aussi des droits à exercer. . . .
*' Les Etats naissans, trouvant leur modèle dans la
*' famille, furent plutôt de petits royaumes que des répu-
*' bliques, ainsi que l'attestent les plus antiques traditions.
" Nous ne dirons pas néanmoins que la royauté est une
** institution divine ; non aucune forme de gouvernement
" n'a été expressément révélée. L'Evangile n'en consacre
'' narque réuni aux autoiilés qui partagent avec lui les droits et l'exercice île la souveraineté.
" Dans les républiques, c'est le conseil ou l'assemblée, à qui la constilulion délère l'admi-
" r)islration et le pouvoir suprême. Ainsi, je ne dis pas que tous les peuples doivent être
" gouvernés par un roi, ni que tous les rois doivent être absolus ; mais je dis que, dans
" quelque gouvernement que ce soit, le souverain ne peut être justiciable de ses sujcIh, et
" que, dans toute ttociélé, la puissance publique est inviolable de droit. Jbid. png. 1C3.
ETHICA. 323
** aucune comme nécessaire ; il fait dériver de Dieu la
*' puissance et non la manière extérieure dont elle s'exerce.
** Celle-ci a pu varier suivant les besoins, les circonstances,
** le génie des peuples, présenter des monarchies ou bien
" des républiques plus ou moins tempérées, placer le
*' pouvoir suprême dans les mains d'un seul ou de plusieurs,
** d'un roi, d'un sénat, ou des deux réunis ensemble ;
*' mais partout la source et la nature du pouvoir ont été
** les mêmes. Sans examiner comment il s'est établi,
" jusqu'à quel point y a concouru tacitement la multitude,
" toujours est-il vrai que l'ordre social entrait dans les
" vues de la Providence ; qu'elle a voulu, pour la conser-
*' vation de la société, (ju'il y eût dans son sein des dépo-
" sitaires du pouvoir; que ce pouvoir suprême eût ses
*' attributs comme le pouvoir paternel a les siens. . . . Oui,
" dans la famille. Dieu a voulu l'ordre, et il a revêtu les
*' pères d'une autorité sacrée ; dans la société, Dieu a
" voulu l'ordre, et il a revêtu le magistrat de Tautorité
,*' qui lui donne des droits à l'obéissance : et, si l'on peut
^' dire que les formes de l'autorité publique viennent des
'* hommes, on est forcé de reconnaître que le fond
" de l'autorité vient de Dieu : doctrine qui ne s'applique
" pas seulement au pouvoir royal dans les monarchies,
*' mais à tout pouvoir suprême sous toutes les formes
" légitimes du gouvernement," Conférence sur l'union et
l'appui réciproque de la religion et de la société, tbm. 4. pag.
304, &c. 307, &c.
200. Prob. 2o. Suprema civilis potestas supponit in
subditis strictam obediendi obligationem, alioquin vana et
illusoria foret : atqui, in conventione sociali quam fingunt
civis Genevensis et ejus asseclae, subditi stricte obedire non
tenentur : ab ipsorum enim voluntate et suprema civilis
potestas et obediendi obligatio pendent. Ergo si volunta-
tem mutarent subditi, eo ipso tolleretur suprema potestas, et
consequenter cessaret obediendi obligatio. Ergo tamdiù
solummodo obedire tenerentur subditi, quandiù vellent, ut
evidens est. Atqui nemo non videt quanta dissidia, cala-
mitates, dissensiones, et perturbationes pullularent ex hoc
exitiali principio. Ergo. . . . &c.
201. "La philosophie, inquit D. de la Mennais, nous
" parle avec une étonnante confiance d'un pacte primitif,
x2
324 ETIIICA.
" par lequel, pour l'intérêt de chacun, tons déposent à cer-
*' taines conditions leur souveraineté, ou l'eiercice de leur
*' souveraineté, entre les mains d'un seul ou de plusieurs ;
*' et ce pacte, si on veut l'en croire, est la véritable base
*• de l'ordre social. Or, s'il fut jamais une doctrine
" absurde, funeste, dégradante, c'est celle-là (a). . . .
*' En effet, tout pacte implique essentiellement l'idée
*' d'une sanction qui le rende obligatoire. Où trou-
*' vera-t-on cette sanction, fondement nécessaire de
" Tobligation morale, et sans laquelle il n'existe pas de
" vrai contrat ? Le concours des volontés, qu'on fait tant
*' valoir, n'est ici d'aucun secours. La volonté de l'homme
** n'est pas obligatoire pour lui-même, comment serait-elle
" obligatoire pour autrui ? Celui qui cède sa souveraineté,
" ou l'exercice de sa souveraineté, au fond ne cède donc
" rien, puisqu'il peut, et Rousseau l'avoue, reprendre,
" dès qu'il voudra, ce qu'il a cédé. Celui qui reçoit la
** souveraineté ne reçoit rien qu'une faculté temporaire,
" une puissance physique de régir, qu'on peut lui ôter à
" à chaque instant, et il n'est tenu d'aucune condition,
" puisqu'il ne saurait être obligé, ni par la volonté d'autrui,
" ni par la sienne même. Je ne vois donc résulter du
" prétendu contrat social, aucun devoir, ni aucun droit, ni
** par conséquent aucune autorité véritable. Je ne vois
" qu'un déplacement de la force, qui reste, en dernier
" ressort, seul arbitre de la société. Si le peuple a plus de
(a) " Si l'autorité vient de Dieu, dit Rlr. Frayssindiis, dès lors elle a aux yeux dt-a
" peuples un caractère nugusie et sacré qui lui donne plus d'usc-eiiduiit sur les es|)rils, «s-
" sure mieux le respeci et l'obéissance, prévient davantage les dissensions et les révoiiea
." qui, trop souvent, préparent les voies à la servitude par l'anarcliie. 6i l'autorité vient de
" Dieu, voyez comme l'obéissance s'ennoblii : en s'arrêtant à lliomme qui commande, et
" qui peut-être est souvent indigne par lui-même de mes hommages, mon obéissance serait
" aussi vile que pénible ; ce serait celle de l'esclave ubruli qui iiemble devant scn maître,
" et voilîi jiourtani celle de ces novateurs qui ne voient dans le pouvoir qu'une cbose hu-
" maine Lu religion porte plus haut mes regards ; au-dessus de 1 iiomme elle me montre
" le Roi des rois, celui qui préside aux destinées des princes comme à celles des peuples;
" c'est a lui que se rappoire ma soumission ; c'est devant sa rnii|cMéque je mabaisse, en
" pliant devant l'iiistrunient visible de sa justice ou de sa miséiicorde. Par lui, mon obéis ■
*' sance, en même tems qu'elle est plus douce, a quelque chose de plus élevé: elle iem-
" l)le purlici()er à la grandeur de celui que révère ma pensée. CJue les sopiiisies modernes
" ne voient que l'homme dans celui qui commande, que leur politique se borne à la terre,
" que dès-lors leur obéissance soit rampante comme leur doctrine ; pour in.i.j il.r-rcliuiii
" dans Dieu, législateur suprême, la raison première des droits et des devoiis ; et c est alors
" que notre raison, loin de se sentir humiliée, pourra se glorifier de sou obéissance....
" La multitude des familles qui composent une sociéié sous une autorité commune est bien
" indépendante, mais elle n'est pas souveraine ; et à qui celle multitude a-t elle le droit de
" coininander ? à personne. Qui est tenu de lui obéir ? personne. ,. .Cette multiiude tôt
" maîtresse sans doi ,e d'adopter une forme de gouvernement pluiû; qu'une autre, de réfu-
" ser ou de donner son assentiment à celle qui est proposée , mais elle n'a ni le droit de la
" dicter ;i celui qui n'en voudrait pas, ni le droit d'imposer ;i qui que ce soit 1 obligation de
O la gouverner: elle est libre, si l'on veut, mais par là même qu'elle n'a aucune autorité
" à exercer, je cherche en vain en quoi elle est eouveraine." lOid. pag. 311.
ETHICA. 325
force, il renversera le souverain dès qu'il en aura la
volonté, et les partisans de la souveraineté du peuple lui
accordent tous ce droit, qu'ils ne sauraient lai refuser
dans leurs principes. Si la force, au contraire, est du
côté du souverain, il aggravera les liens du peuple au
gré de ses caprices ou de ses craintes, comme on serre
la chaîne d'un animai féroce, de peur d'en être dévoré."
Ibid. png. 337, 338, 339.
" Ainsi le principe désastreux que tout pouvoir vient du
peuple, conduit infailliblement les peuples, ou à la
privation de gouvernement, ou à un gouvernement
oppressif. La même doctrine qui détrône Dieu, détrône
les rois, détrône l'homme même, en le ravalant au-
dessous des brutes ; et dès que la raison se charge de
gouverner seule le monde, l'intérêt particulier, source
éternelle de haine, devient le seul lien social. De même
que l'autorité n'est plus que la force, l'obéissance n'est
plus que la faiblesse, car l'intérêt de l'orgueil n'est
jamais d'obéir. Le désir inné de la domination, com-
primé par la violence, réagit et pousse incessamment les
sujets à la révolte. Le pouvoir errant dans la société,
les troubles succèdent aux troubles et les révolutions
aux révolutions." Pas:. 345.
o
" La notion de la loi se lie intimement à la notion de
l'autorité ; et toute doctrine qui détruit la notion de
l'autorité, détruit la notion de la loi. Aussi les philoso-
phes qui, excluant Dieu de la société, font dériver le
pouvoir d'un pacte dépendant des volontés libres de
l'homme, ou qui, en d'autres termes, attribuent à l'homme
la faculté de créer le pouvoir, lui attribuent également la
faculté de créer la loi (a); et la loi n'est plus que la
volonté de l'homme ou selon la définition de Rousseau,
V expression de la volonté générale, c'est-à-dire, de toutes
les volontés particulières des membres du corps social.
Et la volonté générale étant toujours droite, les lois sont
(a) " Des philosophes qui, en théorie, ne nient pas la divinité, dit M. de Bonald, Légis-
lation primitive, tom. 2. pa?.21, ne croient pas nécessaire son intervention dans la société
et attribuent la sduverainelé à Thomme, pris collectivement, on au peuple. Mais ont-ils
réûéchi aux conséquences de ces principes ? Si !e peuple est souverain légitime, toutes
les lois faites nar le neuole ou au nom du neunle. sont bonnes et lu lui Wa rinfant'i»;.!..
326 ETHICA.
" toujours justes ; le peuple crée la justice comme il crée la
'' loi, il n'est pas même nécessaire que ses volontés soient
*' raisonnables ; l'essence de la loi consistant, non dans la
" raison, mais dans la volonté ; le peuple n'a pas besoin de
" raison pour valider ses actes ; il peut légitimement tout
*' ce qu'il veut, mGme se déchirer, même s'anéantir ; car,
*' dit Rousseau, s'il plaît au peuple de se faire mal à lui-
^' même, qui est-ce qui a droit de l'en empêcher ?
" En lisant ces maximes, fécondes en calamités et en
" forfaits, on croit lire le code même du désordre et la
" théorie de la mort. Si le chaos et l'enfer ont une légis-
" lation, elle doit être fondée sur cette base, sans aucun
" doute." Pag. 360, 361.
^' Toute véritable législation émane de Dieu, principe
" éternel de l'ordre, et pouvoir général de la société des
" êtres intelligens. Sortez de là, je ne vois que des
*' volontés arbitraires, et l'empire dégradant de la force : je
" ne vois que des hommes qui maîtrisent insolemment
" d'autres hommes ; je ne vois que des esclaves et des
*' tyrans. Le code variable des intérêts remplace le code
" de la justice, immuable comme la nature des êtres qu'elle
" doit régir, et qu'elle conserve, en les maintenant dans
" leurs vrais rapports. . . .
*' Les législations purement humaines ont encore cet
" inconvénient terrible, que les lois protectrices de l'ordre
" sont celles que la multitude supporte le plus impatiem-
*' ment, parce qu'elles tendent à maintenir ce qu'il est de
" son intérêt de renverser. Elle pourra souffrir les lois
' ' immorales, à cause du désordre qu'elles consacrent, et
" dont elle profite plus ou moins. Mais ses passions ne
*' tirant aucun avantage des bonnes lois, dont l'objet est
" de les réprimer, elle n'y verra nécessairement qu'un
*' obstacle à ses désirs, et un attentat à ses droits. Et
*• comme aucune loi émanée de l'homme seul n'est obliga-
" toire pour l'homme, il faudra mettre l'équité sous la
" protection de la force, et arracher à la peur ce qu'en vain
*' l'on demanderait à la conscience. Plus l'effroi sera
" profond, plus la soumission sera grande, la sécurité
" publique n'aura d'autre garant que le bourreau, et l'on
" proclamera la justice au nom de la mort, pour n'avoir pas
*' voulu la proclamer au nom de Dieu." Pag, 366, 367, 368.
ÈTMICA. 327
202. Hinc io. iii hypothesi quod populus sub aliquâ
regiminis legitimi forraà pacto conventionali sese constitue-
nt, per delegatos suos determinare quidem potuit modum
quo regeretur ; at solus Deus, cujuslibet ordinis auctor et
conservator, potest et conferre gubernantibus sic constitutis
jus imperandi, et praescribere subditis strictam parendi
obligationem.
203. Hinc 2o. licèt innumeree et varice quasi ad indefi-
tiitura possint esse populorum et guberniorum constitutio-
nes, ut jàm pluries observatum fuit, nihilominùs tamen
certum est supreraam auctoritatem à solo Deo tanquàm à
primario fonte repetendam esse. Sic ipsa suprema aucto-
ritas est divina, quamvis ejus existendi modus reverà sit
humanus.
204. His principiis accedit scriptura sacra. Per me
reges régnant, et legum conditores justa decernunt ; per me
principes imperant, et patentes decernunt justitiam. Prover.
cap. 8. ver. 15, 16. . . . Quoniani data est à Domino potestas
vobis (regibus et his qui multitudini prsesunt), et virtus ah
Altissimo, qui interrogabit opéra vestra, et cogitationes scru-
tabitur, quoniam cùm essetis ministri regni illius, non rectè
judicastis. i . * Judicium durissimum his qui prasunt, fiet.
Sapien. cap. 6. vers. 4, 5, 6. . . . Sic loquitur Christus, Luc.
cap. 20. ver. 25. Reddite quœ sunt Cœsaris, Cœsari; et
quœ sunt Dei, Deo. . . . Idem docet Apostolus, Rom. cap. 13.
ver. 1, 2, 5, 6, 7. Omnis anima potestatibus sublimioribus
subdita sit ; non est enim potestas nisi à Deo. . . . Itaque qui
resistit potestati, Dei ordinationi resistit. Qui autem resis-
tunt, ipsi sibi damnationem acquirunt. . . . Ideo necessitate
subditi estote, non solàm propter iram, sed etiam propter
conscientiam. , . . Ministri enim Dei sunt (qui supremam auc-
toritatem exercent), in hoc ipsum servientes. Reddite ergo
omnibus débita ; cui tributum, iributum ; cui vectigal, vectigal;
cui timorem, timorem ; cui honorem, honorem. . . . Eadem est
beati Pétri doctrina, Epist. I. cap. 2. ver. 13. Subjecti
igitur estote omni humanœ creaturœ propter Deum ; sive régi,
quasi prœcellenti ; sive ducibus, tanquàm ab eo missis ad
vindictam malefactorum, laudem veru bonorum,
Corollaria.
205. Ergo lo. omnibus, qui politicac auctoritatis légitimé
sunt participes, et prcecipuè principibus et his qui societati
328 ETHICA.
civili praîsunt, debentur honor et obsequium ; sunt eniai-
Dei ministri in eâ auctoritatis parte quam exercent. Fari-
ter eis obediendum est non solùm propter rram, scd etiam
propter conscientiam, ut ait Apostolus, id est, non solometu
pœnse legum violatoribus impositas, sed etiam propter
obsequium Deo debitum.
206. Ergo 2o. nunquàm licitum esse potest in principem,
seu in auctoritatem politicam insurgere seu rebellare.
Prob. lo. liomo enim divinitùs natus est ad societatern
(168): ergo vitare débet quidquid noxium est societati ;
atqui rebellio in principem noxia est societati. Ex rebel-
lione enim popuii in principem necessario plurima nasce-
rentur graviora mala, seditiones, bella civilia, teterrimaque
anarcbia, quee omnia societatern subversionis periculo expo-
nerent, ut pluribus in regionibus nuper accidit. Ergo....&:c.
207. ''' Dira-t-on, inquit D. Frayssinous. qu'après avoir
" adopté, du moins tacitement, un régime politique, la mul-
'* titude est souveraine, en ce sens qu'elle puisse leclianger
*' à son gré? mais ce droit, qui l'exercera.? est-ce le
" peuple tout entier? cela est impossible. Exclurez-vous
*' ici le sexe, l'adolescence, la jeunesse? Voilà donc plus
** de la moitié de la population dépouillée de toute parti-
" cipation à la souveraineté ; voilà donc la majorité soumise
" à la minorité, ce qui, au lieu du peuple souverain, cons-
*' titue une aristocratie véritable. . . .
" Qu'il existe des voies légales et régulières pour opérer
*' les réformes politiques, je le conçois ; mais qu'on cherche
*• dans l'insurrection le remède aux maux de l'état, quel
" délire ! qui pourra la commencer légitimement ? est-ce
** une province ? pourquoi pas une cité ? pourquoi pas un
'* village ? pourquoi pas une famille, un individu ? et ne
" voyez-vous pas que c'est mettre dans le corps social un
" principe de destruction ? Certes c'est bien moins pour
" l'intérêt de ceux qui gouvernent que pour l'intérêt de
*' ceux qui sont gouvernés qu'il faut combattre ces desas-
" treuses maximes. Il importe que la société, qui n'est
" faite que pour servir de barrière aux passions, ne soit pas
'* livrée à la merci de ces mêmes passions ; que la société.
** qui n'existe que pour être le remède de l'anarchie, ne
" soit pas exposée à retomber dans l'anarchie. Appeler la
** révolte pour corriger les abus, c'est appeler l'incendie
ETHICA. 329
" pour réparer la maison endommagée. Je ne connais pas
" de doctrine plus ennemie des peuples que celle de la sou-
" verainetc du peuple" (a). îbid. pag. 312, &c.
208. " Tel est le respect que tout citoyen doit à ia tran-
*' quillité publique, inquit D. Duvoisin, que cet intérêt
" l'emporte quelquefois sur les droits d'une justice rigou-
" reuse. C'est en faveur de la tranquillité publique, que le
" droit des gens admet une prescription à l'égard de la
" souveraineté, comme les lois civiles l'ont instituée à
" l'égard des propriétés particulières. Quand un pouvoir
*' est solidement établi, l'origine en fut-elle injuste, il faut
" le conserver, parce que le salut du peuple y est attaché.
" Lors même que la prescription n'a pas légitimé le
" pouvoir, il n est pas toujours permis aux particuliers de
" l'attaquer à force ouverte. Car s'il est vrai que je ne
'* dois rien à l'usurpateur, je dois à la société de ne pas
" troubler son repos par des tentatives qui n'aboutiraient
" qu'à plonger l'état dans les horreurs de l'anarchie."
Défense de Vordre social, pag. 245.
Prob. 2o. Suprema civilis potestas à solo Deo tanquàm
à primario fonte repetenda est (199). Ergo qui insurgit in
principem, insurgit in potestatem à Deo stabilitam ; atqui
nunquàm îicitum est insurgere in potestatem à Deo stabi-
litam ; non potest enim esse rebellio in potestatem à Deo
stabilitam, quin necessario adsit rebellio in Deum ipsum.
Ergo. . . . &c.
209. Ergo 3o. suprema civilis potestas à solo Deo
pendet ; nulla est igicur potestas in terris quee subditos à
tidelitatis sacramento eximere possit.
210. Ergo4o. in monarchiis et in guberniis mixtis honor,
reverentia, et protectio debentur delegatis, diira functiones
suas in utroque senatu seu conventu exercent ; hi enim
omnes supremoe potestatis rêvera sunt participes : eos igitur
inquietare non licet ratione sufFragiorum quse tulerint.
211. Ergo 5o. honorem et reverentiam debitam cives
praestare tenentur raagistratibus à principe constitutis ;
ipsius enim vices gerunt.
(a) Il est aisé de voir que Torateiir parle ici de la snuveraineié absolue du peuple, telle
qu'elle est devenue la doctrine du J. j. Kou?seau, (l'JO), el de ceux de ses partisans, qui
regardent l'insurrection comme le plus saint des devoirs, «luelijue soit lu fortne du gouverne-
[n«nt établi.
330 ETHÏCA.
Solvuntw objectiones.
Oh}, to. Contingit frequentiùs ut à regibus inîqiia potes-
tas exerceatur; atqui nec ratio, nec Deus jubent ut iniqucË
potestati pareamus. Ergo. , . . &c. («).
212. Uesp. lo. Nego majoreni ut captiosam. Omnis po-
testas à Deo est (199); ergo nulla est potestas iniqua ;
solummodo dari potest usus iniquus potestatis, et tune,
si potestas sit stabilita, in eam febellare non licet ; hsec
doctrina tota est ut non turbetur félicitas publica (208),
juxta adagium, scllus populi suprema lex esto.
Resp. 2o. Dist. Min. Deus et ratio non jubent ut iniquae
potestati pareamus propter ipsius abusum iniquum, conc.
min.; propter reverentiam ipsi debitam et majora incom-
moda ex rebellione în potestatem nascentia, neg. min.
Itaque quando iniquus potestatis usus exercetur, non ipsa
quidem potestatis iniquitas meretur ut ipsi pareamus ; sed
ipsa ratio potestatis in se sumptee, quee semper veneranda
est, in iis etiam qui eâ abufuntur.
Inst. lo. Si nunquàm liceret in principem rebellare,
populus fidem despondens principi, semetipsum ejus im-
perio sine ullâ re&trictione subjiceret : atqui nec potest
nec débet popUlus sic principi sese subjicere. Ergo....&c.
213. Resp. Neg. min. Illud enim potest et débet popu-
lus quod necessarium est ad tranquillitatem et rectum
societatis ordinem : atqui ad tranquillitatem et rectum
societatis ordinem necessarium est ut populus imperio
principis (quicunque sit in variis regiminibus) sese sine
restrictione subjiciat ; aliter populus judex esset et arbi-
ter legum et factorum principis ; atqui istud admitti
nequit. Vix enim intelligi posset quot et quanta ex hoc
principio puUularent mala, bella civilia, seditiones, &c.,
quae brevi totam civilem societatem in omnes anarchiae
horrores dejicerent, eamque eversionis evidenti periculo
exponerent ! Ergo populus non potest esse judex et arbiter
(a) Il ne sera pas inutile d'observer que le despotisme lyrannique et l'ochlocratie ou la dé-
mocratie pure ne sont point de vrais gouvernemens conatitués ; ils ne sont et ne peuvent
Ctre que l'excès ou l'abus du pouvoir dans la société. Ces régimes odieux étant absolu-
ment contraires à l'ordre social seraient de véritables anomalies dans les états cbrétiens ; on
ne peut donc pas supposer qu'ils puissent y exister d'une manière lise et permanente.
D'après cela, il est facile de voir qu'il n'est point question de ces sortes de régimes dans
les réponses a cette objection et aux suivantes. Il ne s'y agit particulièrement que de ces
gouvernemens constitués dans lesquels, comme dans l'ancienne tnotiarcliie française, "il ex-
" islp, dit Mr. Duvoisin, des lois fondamentales, dont le prince ne peut jamais s'écarter, et
" contre lesquelles toute sa puissance viendrait .se briser. Tout ce qu'il attenterait, au mé-
" pris de ces lois sacrées, serait nul de plein droit, parce qu'il y aurait, non pas siinple-
" ment abus, mais défaut de pouvoir." Ibid. pag. lOi.
ETHICA. 531
legum et factorum principis ; ergo potuit et debuit. . . . &c.
(a). In hâc responsione non agitur de regiminibus mixtis
quae vulgô vocantur gouvernemens constitutionnels, in quibus
jus et auctoritas tùm principis, timi utriusque conventûs
(si duo sint) determinantur et limitantur chartâ constitu-
tivâ, quam recognoscerent et populus et princeps.
Inst. 2o. Inter principem et populum adesse censetur
contractus socialis qui mutuas et principi et populo imponit
obligationes; atqui, in omni contractu, si una pars non ad-
impleat suas obligationes, altéra à suis obligationibus libe-
ratur. Ergo si princeps inique gubernat, populus nihil ei
débet.
214. Resp. lo. Dist. Maj. Inter principem et populum
adesse censetur contractus insequalitatis, in quo una pars
contractans alteri se inferiorem submittit ; conc. maj. Con-
tractus eequalitatis in quo utracjue pars contractans suani
servat independentiam ; neg. maj. Inter principem et po-
pulum reverà adest contractus socialis, verè synallagmati^
eus, sive formalis, sive tacitus, ideôque mutuse sunt obliga-
tiones : at licèt istse obligationes mutuse sint et œquales,
jus tamen coercendi ut adimpleantur non est idem ex utrâ-
que parte. Populus enim se inferiorem principi submittit
et consequenter suam independentiam amittit : princeps
verô est superior et arbiter, ideoque nullum nisi solum
Deum agnoscit et habet superiorem, Ergo ad nullum tri-
bunal adduci potest in terra. Ergo jus coercendi ut adim-
pleantur mutuee inter principem et populum obligationes
non est idem populo quod et principi.
215. Resp. 2o. Neg. min. De essentiâ enim contrac-
tus non est ut dissolvatur eo quôd una pars contractans
non adimpleat conditiones ; bonum enim publicum ali-
quando prsevalere potest et débet juri partis Isesœ ; sic, v. g.,
matriraonium adeo indissolubile est, ut infidelitas unius
partis aiteram à jugo non liberet ; et id exigunt, tùm bona
privatorum, tùm ordo publicus, tùm mores, qui aliter
statim depravarentur. Rationes multo gravioris momenti
exigunt ut contractus socialis, inter principem et populum
(a) Dans les républiques démocratiques où tous les fonctionnaires de l'éial sont éleciifs, Ip
penp? a bien le droit d'examiner les actes et l'administration du gouvenietnent, innis il n"a
pas c(îlui de se révolter : tout ce qu'il peut légiiimenient luire, lorsqu'il a sujet d èire mé-
content, c'est d'engager les élecif ;as ii nommer aux difTérens emplois des pcrauniies capa-
bles de mi. ux conduire l'état, et de corriger les abus qui se sont introduits peuduiii ladmi-
niatration précédente.
332 ETIIICA.
initus, sit perpetims et indissolubilis, nisi clausulas irritan-
tes textualiter recognoscat charta constitutiva (l IG).
Iiist. 3o. Piinceps qui non adimpiet obiigationes suas,
eoij)SO resilit contractum socialem, vel saltem illum resi-
lire imperiumqua abdicare censetur. Ergo populus tune li-
beratur à suis obligationibus.
216. Resp. Dist. Ant. Si adsint clausulas irritantes
quas pactum- sociale seu constitutio formaliter et textualiter
recognoscat et admittat ; conc. ant. Si non adsint hujiis-
modi clausulee ; neg. ant. et consqam. Itaque principuni
auctoritas iisdeni terrainis non limitatur variis in regimini-
bus. In quibusdam monarchiis ha^reditariis persona prin-
cipis est sacra et inviolabilis, et tune princeps nullo modo
légitimé puniri aut destitui potest, quia ipsi ministri (les
ministres d'état) de factis principis sua fortunâ et etiam
capite spondent. In his guberniis, si princeps sit adhue in-
fans, araens, furibundus, aut etiam t5'rannus, prœcipui civi-
um ordines, seu magna corpora poiitica administrationem
temporariam ( une régence ) instiluunt, quœ ipsius vices
2;erat (197).
In quibusdam aliis guberniis pactum sociale seu charta
constitutiva formaliter et textualiter quasdam clausulas ir-
ritantes exprimit et déterminât, et accuratc prœscribit qui
sint civium ordines qui principis evidenter praivaricantis
resiliationem seu abdicationem leii^alem légitimé pronunciare
valeant. Cùm hœc oinnia needivinara, nec humanam la3-
dant justitiam, licite tieri possunt, ut omnes confitentur,
217. Si vcro in constitutione nullœ adsint clausulœ irri-
tantes, si princeps in sua auctoritate formaliter et textuali-
ter non limitetur ab aliquu legali auctoritate, resiliatio seu
abdicatio ex ipsius parte supponi non potest, quia nullus est
civium ordo qui eam légitimé pronunciare valeat, ciim in
hoc casu nullus sit judex ad cujus tribunal princeps adduci
possit (213).
Pnetereà, si hscc resiliatio seu abdicatio supponeretur ex
parte principis, non dissolveret solummodo vincula quœ ex-
istere debent inter populum et principem, sed etiam ea quœ
existunt inter varias corporis politici partes, teterrimumque
conflaret civile bellum. In hoc igitur interrègne, nulla ex-
isteret poiitica societas, sed tantiim hominum multitudo
qucE brevi dejiceretur lethalem in anarchiam, à cujus horro-
ETHICA. 333
ribus et calamitatibas non liberaretur, nisi postquilni ex-
perta fuisset innumera mala, qua3 multo graviora forent
quàm illa quœ vitare contendebat suâ in principem rebel-
lione.
Obj. 2o. Populus légitimé mutare potest constitutioneni
quâ regilur ; atqui hcsc mutaiio fieri non potest, quin aucto-
ritas principis intra quosdam limites coerceatur, et sœpc
quin ipse deponatur. Ergo. . . . &c.
218. Resp. Dist. Maj. Populus légitimé mutare potest,
id est, constituti civium ordines mutare possunt constitu-
tioneni ex consensu principis^ conc. maj ; sine consensu
principis, neg. maj. et consqam. Reverà quidem, in con-
stitutionibus queedara nmtationes légitimé interdùm fieri
possunt. quando scilicet patrantur ex consensu partiuni quîs
ad hoc jus habent, et consequenter ex consensu principis ;
aliter populus judex esset et arbiter auctoritatis et actuum
principis, quod manifeste répugnât (213, 217). Hinc gra-
vissimè deiinquunt qui, sub prsetextu reformandi abusus in
gubernio existentes, viros armatos contra principem exci-
tant, iliumque cogunt ad novam constitutioneni cum jura-
mento acceptandam, ut pluribus in regionibus etiani nunc
videre est.
Si rebeilare non licet in siipremam pote5tatem,quid igitur
agendum erit si princeps populos, qui sub ejus ditione erant
ut rectè gubernarentur, extraneo imperio submittat, vel si
fundam.entales imperii leges funditiis subvertere conetur,
vel deniquè si de civium proprietatibus, bonis, honore et
vitâ arbitrario et injuste statuât ?
219. Resp. cum D. Bossuct ( Politique tirée de VEcriture
Sainte, Yiv.s'o. art. 3.) ; "si des sujets ne doivent plus rien
*' à un roi qui abdique la royauté, ou qui abandonne tout-
*' à-fait le gouvernement, que penserons-nous d'un roi qui
*' entreprendrait de verser le sang de tous ses sujets, et qui,
" las de massacrer, en vendrait le reste aux étrangers '/
** Peut-on renoncer plus ouvertement à les avoir pour sujets,
** ni se déclarer plus hautement, non plus le roi et le père,
** mais l'ennemi de tout son peuple ? C'est ce que fit An-
*' tiochus à l'égard de tous les Juifs."
Idem docet D. Duvoisin, ibid. pag. 202. " Guillaume
'* Bardai, inquit, dans sa défense des Rois (a),' demande
(a) De regno et regali potesiaCe.
334 ETHICA.
" s'il ne peut exister aucun cas, où il soit permis au peu-
"• pie de se soulever contre un prince qui abuse de son au-
'• torité. Il répond que le peuple ne peut rien contre lui,
" à moins qu'il n'ait commis quelque crime qui lui fasse
*^ perdre le droit et la qualité de roi. Car, alors, il se dé-
" pouille lui-même de sa dignité, et il n'est plus qu'un
" homme privé."
" Mais, continue Bardai, je ne connais que deux cas,
** oii un roi, se dégradant lui-même, perd le titre de son
" autorité. L'un arrive, lorsqu'un prince entreprend de
"■ renverser l'état, comme l'histoire le rapporte de Caligula
'" et de Néron. Un roi qui forme et manifeste un pareil
*' dessein, abdique par là même, et perd l'autorité qu'il
*' avoit sur ses sujets, comme un maître perd son droit sur
" un esclave qu'il abandonne. L'autre cas arrive, quand
*' un roi soumet à une puissance étrangère le royaume in-
" dépendant qu'il avoit reçu du peuple et de ses ancêtres.
" En assujettissant, contre son gré, un peuple dont il était
'' obligé de défendre l'indépendance, il dénature essentiel-
'' lement l'autorité qui lui était confiée, il ne confère aucun
*' droit à celui auquel il se soumet, et le peuple, devenu
*' libre à son égard, peut se gouverner désormais comme il
*' juge à propos.
•' Quoiqu'il en soit de cette seconde décision que tous
" les Publicistes n'adopteraient pas, s'il s'agissait d'un
'* prince qui se verrait contraint par une guerre malheureuse
" de se rendre tributaire ou vassal d'une puissance étran-
" gère, on peut avouer, avec Bardai, qu'un prince perd le
*' droit et la quahté de roi, lorsque, foulant aux pieds les
*' lois civiles, et les lois constitutives de son état, il se dé-
" clare hautement, comme dit Bossuet, non plus le roi et
" le père, mais l'ennemi de son peuple.
" L'Etat est un vaisseau dont le roi est le capitaine et le
'' pilote. Lui seul a droit de commander la manœuvre.
" S'il paraît s'écarter de la route, il faut attendre qu'il y
" rentre de lui-même : les passagers peuvent l'avertir
*' de son erreur, mais non lui arracher le gouvernail.
** Cependant, s'il est évident que toutes les manœuvres
"■ tendent à faire briser le vaisseau contre des rochers, dans
" ce moment d'un péril imminent et général, le salut
" public, qui est la loi suprême, l'emporte sur la loi de
ETHICA. 335
" l'obéissance qui, loin de sauver l'équipage, le ferait périr
" infailliblement. Ce parti extrême et toujours infiniment
" dangereux, ne peut être justifié que par cette nécessité
" extrême qui ne connaît point de loi."
Vide, circa quœstionem de societate politicâ, D. D. Frays-
sinous, de la Mennais, Duvoisin, Bossuet, locis supra
laudatis ; D. Pey, de V autorité des deux imissunces , toni. 1.
et D. Bouvier, înstitutiones philosophicœ, tom. 3.
Finis Etliicœ.
336
INDEX ETHIC^.
Num.
Ethica, l
Pars prima. De Etbicâ generali.
Caput primum. De principiis actaum liumanorum, 4
I. De principiis internis actuum liumanorum.
De Intellectu morali, 5
De Voluntario morali, 6
De libertate morali, 14
Propositio prima, 15
Propositio secunda, 16
II. De causis quee voluntarium aut liberum minuunt
vel tollunt.
De Violentiâ seu de coactione, . 17
Propositio prima, 19
Propositio secunda, 20
Propositio tertia, 21
De Metu, 22
Propositio prima, 23
Propositio secunda, 24
Propositio tertia, 25
De Concupiscentiâ, 2(3
Propositio prima, 27
Propositio secunda, 30
De Ignorantiâ, 32
Propositio prima, 3G
Propositio secunda, 39
III. De principiis externis actuum liumanorum, seu
de eorum fine, 41
1. De Beatitudine homini«, 46
Propositio. Solus Deus est beatitudo hominis objectiva^ 47
2. De obligatione nostras actiones ad Deum refercndi, 49
Propositio prima, 56
Propositio secunda, 57
Caput secundum. De proprietatibus actuum liuma-
norum, 58
Propositio, 61
Caput tertium. De regulis actuum humanorum, 64
I. Dé conscientiâ, 65
Propositio prima, 75
INDEX ÇTHIC4K. 3^7
Num.
Propositio secunda, 76
Ffopositio tertia, 77
Propositio quarta, 78
Propositio quinta, 79
IL De lege, «.1
1. De Jege divinâ, 82
De lege œternâ, 83
De lege naturali, 84
Propositio, 87
Solvuntur objectiones, .89
De legis naturalis immutabilitate, 96
De lege divinâ positiva seu scriptâ, 98
2. De lege humanâ, 101
Propositio prima, 108
Propositio secunda, 112
Pars secunda. De Ethicâ speciali, 113
Caput primum. De officiis hominum erga Deum, 114
I. De cultu Dei interno, ll5
Propositio, 116
Solvuntur objectiones, 117
II. De cultu Dei externe, 122
Propositio prima, 123
Propositio secunda, 124
Solvuntur objectiones, 125
III. De religionum indifFerentiâ, 129
Propositio, 130
Solvuntur objectiones, 132
Caput secundura. De officiis hominis erga seipsum, 135
I. De officiis hominis ad ipsius animam spectantibus.
De officiis quae ad intellectum spectant, 136
De officiis quse ad voluntatem spectant, 140
II. De officiis hominis ad ipsius corpus spectantibus, 145
Propositio prima, 149
Solvuntur objectiones, 150
Propositio secunda, 155
Solvuntur objectiones, 156
Caput tertium. De officiis hominum erga cseteros
homines, 160
I. De hominum officiis quse nituntur communi hu-
manitatis titulo, 161
338 INDEX ETHlCiE.
Ntint.
IL De officiis liominum quse ad societatem genera-
tira spectant, 166
Propositio, 168
Solvuiitur objectiones, 169
Corollaria, 175
III. De hominum ofHciis quoB pertinent ad societa-
tem domesticara.
1. De societate conjugali, 179
2. De societate paternâ.
De officiis parentum erga liberos, 181
De officiis liberorum erga parentes, 183
3. De societate herili.
De officiis dominorum erga famulos, 186
De officiis famulorum erga dominos, 187
IV. De societate politicâ seu civili, 188
1. De prsecipuis regiminis politici formis.
2. Quodnam triplici ex illo regimine sit anteponen-
dum? 196
3. Undènam oriatur suprema regiminis civilis potes-
tas ? 198
Propositio. Suprema civilis potestas non à populo,
sed à solo Deo tanquàm à primario fonte repeten-
daest, 199
Corollaria, 205
Solvuntur objectiones, 212
Finis Indicis Ethicœ.
339
PREUVES
DE LA RELIGION REVELEE CO'J .
^ I. INSUFFISANCE DE LA RELIGION NATURELLE.
La religion fondée sur la loi naturelle est ce que l'on ap-
pelle la religion naturelle. Cette religion est-elle suffisante
à l'homme dans son état actuel ? Elle ne lui est point
suffisante ; lo. parce que la sanction n'en est pas manifestée
avec un caractère assez décisif; 2o. parce qu'elle ne présente
pas, surtout dans les cas un peu difficiles, des règles assez
fixes, assez précises et assez sensibles pour être aperçues et
senties par la généralité du genre humain. Un très-petit
nombre d'hommes instruits et d'un jugement sain seule-
ment viennent à bout de découvrir celles qui sont le plus
palpables : souvent elles sont ignorées, du moins en grande
partie, d'une multitude de gens ignorans qui ne raisonnent
point ou raisonnent mal. Le fait en donne une preuve bien
frappante. Portons nos regards sur les peuples privés du
flambeau de la révélation, et voyons ce qui s'y passe. Sur
ce qui concerne la Divinité et son culte, Thomme, son ame,
son origine, sa fin et ses devoirs, on est étonné de ne trouver
qu'erreurs extravagantes, non-seuieraent parmi le vulgaire
ignorant, mais même parmi ceux qui s'honorent du titre de
sages et de savans.
Le soleil, la lune, les astres : voilà les divinités du Chal-
déen, de l'Assyrien et du Perse. L'eau est le dieu de
l'Indien. L'Egyptien adore un bœuf, des reptiles, des
légumes et les animaux les plus vils et les plus immondes.
Le Grec et le Romain prodiguent leur encens à un Jupiter
adultère, à une Junon jalouse et vindicative^ à un Àlars
féroce et sanguinaire, à un Bacchus intempérant, à une
Vénus impudique, à un Mercure voleur, à une multitude
d'autres divinités toutes tachées de vices non moins infâmes,
puisqu'elles n'étaient pour la plupart que le vice et les
passions personnifiés. Qui oserait raconter les cérémonies
de ces dieux et leurs mystères impurs ? les prostitutions
établies en l'honneur de Vénus et pratiquées dans les orgies
(a) l'our remplir la promesse qu« nous avons faite dans le prospectus de ce Cours do
Philosophie, de terminer Cfi ouvrage par un traité des preuves de la Religion révCUe, nous
donnons le suivant, tel qu'il se trouve dans un Cours élémentaire de Philosonhiti, à l'usage
des Collèges ; 1 vol. 12o. Lvon, 182:J.
Y 2
340 PREUVES
consacrées à Bacchus ? Il eût manqué quelque chose à ce
culte affreux, si la cruauté ne s'y était mêlée. Le Grec,
couronné de fleurs, égorge en chantant des victimes
humaines. On ne peut lire, sans frémir d'horreur, les
sacrifices épouvantables du cruel Carthaginois, et le nombre
des malheureux qu'il immolait avec férocité à ses dieux
barbares (a). Le Gaulois ne connaît point de sacrifice plus
agréable à là Divinité que celui des hommes, surtout des
hommes les plus innocens. Rome range parmi les exercices
sacres de la religion les combats barbares des gladiateurs.
En un mot, comme le dit si bien Bossuet, le culte n'était
qu'une continuelle profanation, ou plutôt une insulte à la
Divinité.
Les erreurs des philosophes dans leurs dogmes ne sont
pas moins révoltantes que celles du vulgaire dans la pratique.
S'ils reconnaissent la nécessité d'un premier principe de
toutes choses, ils ne le découvrent qu'à travers un voile
épais, qui leur en cache les attributs les plus essentiels.
Celui-ci admet une matière éternelle qui s'est arrangée
d'elle-même pour former l'univers ; celui-là, un être in-
dépendant de la matière, mais qui n'en a été que le modé-
rateur et le régulateur sans en avoir été le créateur. Les
uns reconnaissent un premier être, auteur de la nature,
mais dont les actions ne sont déterminées que par un destin
aveugle; les autres imaginent deux principes opposés, l'un,
auteur du bien, et l'autre, auteur du mal. Socrate, qui
avait si bien parlé de la Divinité, meurt en ordonnant à ses
amis de sacrifier un coq à Esculape ; après avoir fait le
discours le plus sublime sur l'immortalité de l'ame, il le
termine en doutant si l'ame est immortelle. Platon, qui
(a) Les Canliaginois ofiVnieiit des victiinea luimoines en sacrifice ;i Saturne, connu dans
l'Ecriture sous le nom tie ftlolor.h. Les parens se faisaient un point d'honneur et de religion
d'assister à ce cruel et barbare spectacle, l'œil sec et sans pousser un seul géinissinent. Ils
auraient cru rendre le sacrifice moins tigiéuble à la divinité, et en perdre le fruit, s'ils
avaient poussé quelque soupir.
Pendant un combat contre Gélon, tyran de .Syracuse, combat qui dura depuis le matin
jusqu'au soir, Atnilcar, (ils d'Hannon leur pénérnl, ne cessa point de sacrifier aux dieux
des hommes vivans et en grand nombre, en les faisant jeter dans un bûclier ardent.
Dans le temps de la peste, ils sacrifiaient îi leurs dieux un grand nombre d'enfans, sans
pitié pour un âge qui excite la compassion des |)lus cruels ennemis. Dans le temps qu'Aga-
ihocte était pr(^s de mettre le siège devant Carthnge.les habitans de celte ville, se voyant ré-
duite à lu dernière exiréinilé, imputèrent leur malheur à lu juste colère de Saturne contre
eux, parce qu'au lieu des en!"ans de la première qualité qu'on avait coutume de sacrifier, on
avait inis frauduleusement h leur place des enfans d'esclaves et d'élrangcrs. ï'our réparer
celte faute, ils immolèrent à Saturne deux cents eiifans des meilleures maisons de Carthage ;
et outre cela, plus de trois cents citoyens qui se sentaient coupables de ce prétendu crime,
s'ofl'rireiit volontairement en sacrifice. Ils avaient, dit Diodore, une statue de Saturne dont
les mains étaient penchées vers la terre, de sorte que l'enfant que l'on posiiit sur ces mains,
tombait aussitôt, par une ouverture, dans une fournaise pleine de feu.
DK LA RHLIGION REVELEE. 341
distingue si nettement l'esprit de la matière, qui reconnaît
un auteur suprême, et que l'on admire par de si beaux en-
droits, se dc'ment honteusement en faisant partager les
honneurs divins aux astres, à la terre, aux démons; il veut que
l'on s'enivre aux fêtes de Bacchus, que la jeunesse célèbre
des jeux d'oii il bannit toute décence. Le grave Solon établit
à A-thènes un temple à Vénus la prostituée, à l'Amour
impudique. Le sage Aristote, après avoir blâmé toutes les
images déshonnêtes, en excepte celles des dieux, qui vou-
laient être honorés par ces infamies. Jamais les sages de
l'antiquité payenne n'ont pu s'accorder sur la nature du
souverain bien : Varrcn, le plus savant d'entre eux, compte,
sur ce seul article, deux cent quatre vingt-dix-huit opinions.
Tant d'extravagances des peuples et des philosophes privés
du flambeau de la révélation ne démontrent que trop l'in-
suffisance de la rehgion naturelle pour l'homme dans son
état actuel, et prouvent évidemment qu'il a besoin d'une
religion révélée, qui soit pour lui un guide plus sûr.
§ II. EXISTENCE d'une RELIGION REVELEE.
Il existe une religion révélée. L'insuffisance de la reli-
gion naturelle suffirait seule pour le démontrer, parce qu'un
Dieu souverainement sage, souverainement bon et souve-
rainement provident, n'a pu créer l'homme intelligent, libre
et raisonnable, sans lui donner un moyen sûr de connaître
son principe, ses devoirs, sa fin et les moyens d'y arriver.
Mais passons à l'examen des faits : il existe une religion
révélée depuis le premier jour du monde jusqu'à celui où
nous vivons, si les livres de l'ancien et du nouveau Testa-
ment sont authentiques, fidèles et intègres ; parce qu'ils
indiquent, avec toute la clarté et la précision possibles, les
différentes époques et les diverses circonstances où Dieu
s'est manifesté à l'homme pour lui communiquer ses volon-
tés, et lui enseigner les vérités qu'il avait à croire et à pra-
tiquer. Or les livres de l'ancien et du nouveau Testament
sont authentiques, fidèles et intègres.
Livres de V ancien Testament,
Authenticité de ces livres.
Vous ne doutez pas, dit M. Le François, qu'il n'y ait eu
un Cyrus, un Alexandre, un Cicéron ; que ce dernier ne
soit auteur des livres qui portent son nom. Rendez- moi
342 PREUVES
compte, je vous prie, des motifs qui vous engagent à croire
ces faits. Je vois, répondez-vous, les hommes réunis dans
cette créance. Ceux qui vivaient avant nous croyaient la
même chose : ainsi, en remontant jusqu'à Cicéron, jusqu'à
Alexandre, jusquà Cyrus, les auteurs qui ont suivi de siè-
cle en siècle attestent ces faits. Qu'opposer à une tradi-
tion si suivie, si liée, si constante ? Or, qu'il y ait eu un
Moïse, législateur des Juifs et auteur du Pentateuque, c'est
un fait appuyé sur la créance générale de tout un peuple
nombreux, qui subsiste encore de nos jours ; sur le témoi-
gnage de tous les écrivains de ce peuple, tant anciens que
modernes ; sur le consentement des historiens du paga-
nisme qui ont eu connaissance de la nation juive. Diodore
de Sicile, Strabon, Trogue-Pompée, Justin, Pline, Tacite,
Juvénal, Galien, Longin, tous lui donnent Moïse pour légis-
lateur. Le fait n'a jamais été contredit. Joseph, dans sa
savante réponse à Appion, cite les premiers auteurs phéni-
ciens, égyptiens, grecs, comme autant de témoins irrépro-
chables de l'antiquité de cette nation et de Moïse. Celse,en-
nerai déclaré du nom chrétien, n'a pas osé attaquer l'exis-
tence de Moïse, ni l'authenticité du Pentateuque. Il y a
plus de dix-huit siècles que les fondateurs et les docteurs
de la société chrétienne tiraient contre les Juifs et les Païens
des preuves du Pentateuque comme d'un ouvrage reconnu
universellement pour être de Moïse.
Le Pentateuque n'a pu être exposé au sort de ces livres
que peu de personnes lisent, et auxquels le lecteur le plus
passionné ne prend qu'un faible intérêt. Ce livre renferme
tout ce qu'un peuple a de plus cher, son origine, sa religion,
sa police, ses mœurs, sa philosophie, tout ce qui sert à ré-
gler la vie, tout ce qui unit et forme la société, les bons et
les mauvais exemples, la récompense des uns et le châtiment
rigoureux des autres. Le Juif y trouvait l'histoire de ses an-
cêtres, ses privilèges au-dessus des autres nations, ses droits
sur la terre de Chanaan, toutes les lois politiques et sacrées
qu'il devait suivre pour éviter l'effet des plus terribles me-
naces. Des ministres publics étaient chargés de ce précieux
dépôt. Dans des temps marqués ils devaient faire la lecture
de la Loi en présence du peuple. Il n'y avait point d'autre
livre où l'on étudiât les préceptes de la bonne foi. Tout y
était réglé ; les fêtes, les sacrifices, les cérémonies, toutes
DE LA RELIGION REVELEE. 343
les autres actions publiques et particulières, les jugemens,
les coutrats, les marriages, les successions, les funérailles,
la forme même des habits, et en général tout ce qui regarde
les mœurs. Chaque particulier était obligé d'être instruit de
cette loi, de la méditer jour et nuit, d'en recueillir des sen-
tences,de les avoir toujours devant les yeux. La principale
règle d'éducation pour les pères était d'apprendre à leurs
enfans, de leur inculquer, de leur faire observer cette sainte
loi, qui seule pouvait les rendre sages dès l'enfance.
Il était de la dernière conséquence d'en être instruit et
d'y être fidèle. Manquer à certaines observances, c'était
mériter la mort. La crainte seule du châtiment ne permet-
tait donc à personne de négliger ces livres. Il n'est donc
point de fait certain, si l'on peut supposer de bonne foi qu'on
ait pu en imposer au peuple juif sur Moïse et sur ses li-
vres. D'après cet exposé, il n'est pas possible de douter
que Moïse n'ait donné aux Juifs leurs lois civiles et sacrées.
Aussi, si les Machabéesse rendent illustres par leur cou-
rage et leurs victoires, c'est pour défendre la loi de Moïse
contre les fureurs d'un roi impie qui veut l'abolir. Esdras
et Néhémie ne s'immortalisent, après le retour de la capti-
vité, qu'en rappelant les Juifs à la loi de Moïse par une lec-
ture assidue ; en rétablissant cette loi dans sa première
splendeur ; en réglant les fêtes, les sacrifices, les cérémo-
nies, la forme de l'autel, les mariages, la police, en un
mot toutes choses, selon qu'il était ccrit dans la loi de Moise
serviteur de Dieu.
Ce grand nombre de prophètes qui se succèdent sous les
rois et pendant la captivité, ne parient que de Moïse, n'ex-
hortent le peuple qu'à l'observation de la loi de Moïse, ne
lui reprochent que d'y être infidèle ; lui rappellent conti-
nuellement le souvenir des prodiges extraordinaires qui écla-
tèrent lorsque cette loi sainte fut publiée, et ne cessent de
lui annoncer les menaces terribles que le Seigneur y fait
contre les prévaricateurs qui oseront la transgresser.
Le livre seul des Psaumes, oii sont recueillis tant d'an-
ciens cantiques du peuple de Dieu, fournit, dans la plus
divine poésie qui fut ja nais, des monumens éternels des
livres de Moïse,, imprimés par le chant et par la mesure dans
la mémoire de tous les Juifs. Dans l'histoire de ce peuple et
dans ses livres il n'y a pas un seul fait considérable qui puisse
344 PREUVES
subsister un moment, si on le détache de Moïse, tel que
nous l'avons. L'histoire des Juifs et leurs livres ne sont
donc qu'un rêve, si le Pentateuque n'est pas de Moïse, et
même dans sa pureté.
L'authenticité des autres livres qui ont été écrits depuis
Moïse se démontrerait de la même manière.
Fidélité des livres de l'ancien Testament.
Les livres de l'ancien Testament sont fidèles, c'est-à-dire,
qu'ils rapportent les faits tels qu'ils sont arrivés. En effet
ils sont fidèles, si les auteurs n'ont été ni trompés, ni trom-
peurs : or ils n'ont été ni l'un, ni l'autre.
D'abord ils n'ont point été trompés : il est impossible
qu'ils aient pu letre. La nature des faits qu'ils voyaient
eux-mêmes, ou qu'ils entendaient raconter par des té-
moins oculaires, qu'ils voyaient d'ailleurs démontrés par
une foule de monumens et une tradition récente et
universelle, ne pouvaient leur permettre de tomber en
erreur. Les faits étaient trop grands^ trop frappans,
trop intéressans : c'est la création du monde, la chute
de l'homme, sa punition, la promesse de sa future
rédemption ; la corruption générale du genre humain, son
anéantissement par les eaux du déluge, la conservation mi-
raculeuse de Noé et de sa famille ; l'alliance du Seigneur
avec Abraham et sa postérité, alliance dont la circoncision
est le signe ; la promesse du Messie tant de fois et en tant
de circonstances renouvelée aux trois patriarches Abraham,
Isaac et Jacob : c'est la famille nombreuse et puissante de
ces hommes illustres dans tout l'Orient, errant dans la terre
de Chanaan, passant en Egypte, s'y trouvant avantageuse-
ment placée par Joseph vendu par ses frères, et devenu,
par une suite de prodiges, premier ministre du Roi ; s*y
multipliant avec une rapidité merveilleuse ; forcée d'en sor-
tir par l'oppression des tyrans du pays, qui ne lui permettent
de partir qu'après avoir été accablés d'une multitude de ter-
ribles fléaux ; conduite par Moïse, dont la vie entière est
toute miraculeuse : c'est une foule de prodiges qui boulever-
sent Tordre de la nature : un peuple entier traversant la
mer Rouge entre ses flots divisés ; une armée ennemie en-
gloutie sous ces mêmes flots ; une colonne de feu marchant
à la tête d'Israël délivré ; un voyage de quarante ans dans
le désert ; la manne tombant chaque jour du ciel ; l'eau sor-
DE LA RELIGION REVELEE. 345
tant du sein des roches arides ; les habits n'éprouvant au-
cun dépérissement ; la Loi donnée au milieu des foudres et
des éclairs ; toute une législation politique et religieuse ; des
cérémonies et des fêtes solonnelles ; l'entrée dans la terre
de promission ; le partage de cette terre prophétiquement
indiqué par Jacob deux cent quarante-quatre ans aupara-
vant ; le renversement de Jéricho au son des trompettes ;
le passage du Jourdain à pied sec, ses flots s'étant rebrous-
sés ; le gouvernement des juges ; l'établissement de la
royauté ; Saùl miraculeusement élu roi et réprouvé pour sa
rébellion contre l'autorité divine dont la sienne émanait ; les
règnes brillans de David et de Salomon ; la construction du
premier temple, ajuste titre mis au nombre des plus belles
merveilles du monde ; sa dédicace solennelle faite par tout
le peuple assemblé par l'ordre du roi ; la séparation et le
schisme des dix tribus sous le règne de Roboam ; la capti-
vité de Babylone, long-tems auparavant annoncée par les
prophètes ; le retour de cette captivité, également prédit ;
l'érection du second temple à la place du premier, détruit
par Nabuchodonosor ; les guerres miraculeuses des ]\Iacha-
bées, et mille autres faits non moins éclatans dont l'énumé-
ration serait trop longue. Des faits et des événemens de
cette nature ne pouvaient laisser le moindre sujet à l'illu-
sion. Il est donc évident que les auteurs des livres de l'an-
cien Testament n'ont pu être trompés.
En second lieu ils n'ont pu être trompeurs. Il ne faudrait
pour le démontrer que leur caractère dépeint dans leurs
écrits qui ne respirent que vertu, candeur, probité, intégrité,
religion, désintéressement, et qui se font surtout admirer
par leur merveilleux accord. Mais quand ils auraient été
de caractère à tromper, l'auraient-ils pu? Auraient-ils pu
faire accroire à toute une nation qu'elle voyait ce qu elle ne
voyait pas, qu'il s'opérait sous ses yeux de grands événemens
qui l'intéressaient, sans qu'il s'en opérât aucun ? Auraient-
ils pu en imposer sur des faits de la publicité et de l'impor-
tance de ceux que nous avons rapportés, à tout un peuple
dont chaque individu avait ses vues, ses opinions, ses pré-
jugés et ses intérêts particuliers ; que l'on chargeait de
cérémonies gênantes, de pratiques opposées aux passions, de
lois rigoureuses, toutes fondées sur les événemens qui se pas-
saient; à qui on reprochait sans cesse des prévarications in-
346 PREUVES
famantes, suivies de cbâtimenshumilians; qui se soumet aux
institutions nouvelles sans la plus légère réclamation ; qui y
est demeuré pendant toutes les générations inviolablement
attaché ; qui non-seulement ne dénonce aucuns vestiges de
faux, mais qui plutôt appuie et confirme tout par ses paroles
et sa conduite ; à tout un peuple qui se divise en deux
nations ennemies, acharnées l'une contre l'autre, différentes
de sentimens sur tout le reste, excepté sur l'authenticité et
la véracité de leurs livres. Les dix tribus rebelles qui
s'étaient soustraites à une partie du culte de leurs pères,
n'auraient elles pas motivé leur séparation sur la fausseté
de ce culte, s'il avait été mal fondé ? Elles ne le font pas
cependant, elles n'y pensent même pas ; bien loin de là, si
elles font éprouver quelques changemens au cérémonial,
elles conservent le même fond de doctrine et les mêmes
livres sans y rien changer, du moins quant à la substance.
Des raisons aussi péremptoires ne prouvent-elles pas incon-
testablement que les auteurs de ces livres n'avaient ni
trompé, ni pu tromper la nation à laquelle ils les adressaient?
Donc les auteurs des livres de l'ancien Testament n'ont pu
être trompeurs ; d'un autre côté ils n'ont pu être trompés ;
donc ils n'ont été ni trompés ni trompeurs ; donc ils ont
rapporté les faits tels qu'ils se sont passés^ et leurs écrits sont
d'une fidélité entière qui ne laisse rien à désirer.
Mais on dira peut-être: Du moins Moïse a bien pu être
trompé et trompeur sur les faits qui se sont passés pendant
les deux mille quatre cent trente-trois ans qui ont précédé
sa naissance. Pas plus que sur ceux qui sont arrivés de
son vivant. En effet, sur le récit de ces faits, il établit une
religion, et pour preuve de la divinité de sa mission et de la
religion qu'il établit, il opère une foule de prodiges qui ne
peuvent être que l'œuvre de Dieu : or Dieu n'approuve pas
et ne confirme pas ainsi le mensonge, l'erreur, l'imposture et
la fausseté. Donc Moïse n'a pu dire que la vérité, et il n'a pu
être trompé ni trompeur sur les faits qui ont précédé sa nais-
sance, non plus que sur ceux qui sont arrivés de son vivant.
Dire qu'il n'avait pas de moyens de les connaître d'une
manière infaillible, c'est parler sans fondement, sans preuve,
et contre toute raison. Il avait d'abord fort bien pu en être
instruit par révélation ; il avait également pu en être très-
bien instruit par une tradition constante et universelle, par
une foule de monumens et peut-être par des écrits.
DE LA RELIGION REVELEE. 347
lo. La longue vie des premiers hommes, qui n'a pas été
inconnue aux plus anciens historiens du paganisme, était,
dit M. Le François, une source de lumières pour Moïse.
Le petit nombre de générations qui s'étaient écoulées avant
lui rapprochait de son temps l'origine du monde. Amram,
père de Moïse, avait vécu long-temps avec Lévi son aieul ;
celui-ci avait vécu plusieurs années avec Isaac, qui avait
vécu long-temps avec Sem, fils de Noé ; et Noé avait vécu
près de six cents ans avec Mathusala, qui avait vécu plus de
deux cents ans avec Adam : la tradition des événeraens qui
avaient précédé le déluge, ne roulant que sur six têtes, était
donc récente.
La cause de notre ignorance dans l'histoire de'nos ancê-
tres, est que nous avons peu vécu avec eux, et qu'ils sont
sont morts souvent avant que nous fussions parvenus à
rage de raison. Mais lorsque les hommes vivaient si long-
temps, les enfans vivaient long-temps avec leurs pères ;
ainsi les pères entretenaient long-temps leurs enfans. Or
de quoi les entretenaient-ils, sinon de l'histoire de leurs
ancêtres ? Toute l'histoire était réduite à celle-là. fis
n'avaient ni les sciences ni les arts qui occupent une grande
partie des discours des hommes. L'ancienne philosophie
n'était que la connaissance des traditions primitives.
Il était encore moins difficile à Moïse de déterrer l'his-
toire de Noé, d'Abraham, d'isaac, de Jacob, de Joseph
Les vieillards de son temps avaient pu converser avec le
saint patriarche Jacob. La mémoire de Joseph et des mer-
veilles que Dieu avait faites par ce grand ministre des rois
d'Egypte, était toute fraîche. Les traditions du genre
humain étaient donc pour Moïse une source de lumières.
11 lui était aisé de les recueillir.
2o. Une seconde source étaient les monumens qu'Abra-
ham, Isaac et Jacob avaient érigés en mémoire des princi-
paux événemens de leur vie. On montrait, chez les peuples
voisins et dans la terre de Chanaan, les lieux oii ils avaient
habité ; les puits qu'ils avaient creusés, les montagnes où
ils avaient sacrifié à Dieu et oii il leur était apparu ; les
pierres qu'ils avaient dressées ou entassées, pour servir de
mémorial à la postérité ; les tombeaux où reposaient leurs
cendres. Le souvenir de ces grands hommes subsistait non-
seulement dans leur pays, mais encore dans tout l'Orient,
348 PREUVES
où plusieurs nations célèbres n'ont jamais oublié qu'elles
venaient de leur race. Les premiers temps étatent curieux
d'ériger et de conserver ces sortes de monumens. La pos-
térité retenait soigneusement les occasions qui les avaient
fait dresser. C'était une des manières d'écrire l'histoire.
Toute la Grèce en était remplie. On a depuis façonné et
poli les pierres. Après les colonnes, les statues ont succédé
aux masses grossières et solides que l'on érigeait dans les
temps primitifs.
3o. Les noms des patriarches étaient encore une espèce
de monumens plus simples et plus familiers. Ils signifiaient
ce que leur naissance avait eu de singulier, ou quelque
faveur reçue de Dieu, ou quelque événement mémorable
arrivé de leur temps. Ainsi c'était comme une histoire
abrégée ; car ils avaient soin d'expliquer à leur enfans la
raison de ces noms. On ne pouvait les prononcer sans en
rafraîchir la mémoire.
4o. Il est plus que vraisemblable que dans la lignée où
s'est conservée la connaissance de Dieu, on conservait aussi
par écrit des mémoires des anciens temps ; car les hommes
n'ont jamais été sans ce soin.
5o. Ce qui est bien assuré, et qui n'était pas un faible
secours pour l'histoire, il se faisait des cantiques que les
pères apprenaient à leurs enfans, cantiques qui, se chantant
dans les fêtes, les assemblées, y perpétuaient la gloire des
actions les plus éclatantes des siècles passés. Le style de
ces cantiques, hardi, extraordinaire, naturel toutefois, en ce
qu'il est propre à représenter la nature dans ses saillies et
dans ses transports, se grave plus aisément et plus profon-
dément dans la mémoire.
De tous les peuples du monde, celui ou de tels cantiques
ont été le plus en usage, c'est le peuple juif. Moïse en
marque un grand nombre, qu'il désigne par les premiers
vers, parce que le peuple savait le reste. Lui-même en
fait deux de cette nature. Le premier met devant les yeux
le passage triomphant de la mer Rouge, et les ennemis de
son peuple, les uns déjà noyés, et les autres à demi-vaincus
par la terreur. Dans le second il célèbre les bontés et les
merveilles de Dieu, et confond l'ingratitude du peuple.
Les siècles suivans l'ont imité. Jacob avait prononcé, dans
ce langage mystique, les oracles qui contenaient la destinée
de ses enfans.
DE LA RELIGION REVELEE. 349
D'après cet exposé, il est évident que Moïse pouvait con-
naître par des moyens sûrs l'histoire du monde jusqu'à la
création, histoire dont il ne rapporte qu'un abrégé des
faits les plus frappans, les plus intéressans pour toute la
nation, les plus faciles à conserver dans la mémoire, et dont
tout le monde devait avoir une connaissance exacte. On
aurait donc bien tort d'avancer que Moïse a manqué de
moyens sûrs pour connaître les faits qui ont précédé sa
naissance (Log. 82, 83, &c. Metaph. 77, &c.).
Intégrité des livres de Vancien Testament.
Les livres de l'ancien Testament sont de la dernière
intégrité, c'est-à-dire, qu'ils n'ont pu être ni altérés ni fal-
sifiés. En effet, comment auraient pu être altérés ou
falsifiés, des livres qui dès leur origine ont été répandus
dans une multitude de mains ; pour lesquels la nation avait
tant de respect, que ni le laps des temps^ ni l'assemblage
de toutes les adversités, n'ont jamais pu le diminuer;
dont on remettait un exemplaire aux princes et aux pon-
tifes après leur inauguration ; dont on faisait tous les
sept ans une lecture publique à la fête des Taberna-
cles ; qui contenaient la législation civile et religieuse,
et la généalogie des familles, objets à la conservation
desquels on est si intéressé et si soigneux ; des livres
qui consignent tant d'infidélités, de prévarications, d'in-
famies et de châtimens humilians pour toute la nation,
ce que l'on n'aurait pas manqué de supprimer sans doute, si
l'on avait tant fait que d'y introduire la moindre altération ;
des livres qui étaient le fondement de la croyance publique
et la règle des mœurs, que les particuliers lisaient tous les
jours, qu'ils possédaient en grande partie par mémoire,
qu'ils portaient partout, qu'ils méditaient sans cesse, et
qu'ils regardaient comme leur trésor le plus précieux ; des
livres surtout conservés constamment semblables par deux
peuples séparés et ennemis. Il est toujours bien évident
qu'ils n'ont pas été altérés depuis leur séparation : il est bien
impossible qu'ils soient entrés en connivence pour une telle
action. S'ils avaient été altérés auparavant, à cause de la
haine mutuelle qu'ils se portaient, l'un ii*eût pas manqué
non plus de les rejeter en voyant l'autre les conserver, et de
donner pour motif de son rejet la falsification qui aurait eu
lieu. La Providence a pourvu à tout : elle n'a peut-être
350 PREUVES
permis la séparation des deux peuples de Juda et d'Israël,
que pour constater à toutes les nations, de la manière la
plus évidente, l'intégrité aussi bien que l'authenticité des
livres de l'ancien Testament, et surtout d€S livres de Moïse,
dont les autres ne sont que la suite ; mais ils sont tous si
bien liés, ils se prêtent un tel appui, qu'ils sont ou tous
faux 01! tous vrais. Il n'y a pas d'absurdité plus grande
que de dire qu'ils soient tous faux : ils sont donc nécessai-
rement tous vrais. Aussi jamais on n'a cité et jamais on
ne citera, avec quelq